Sommaire
Présidence de M. Jean-Pierre Raffarin
Secrétaire :
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
2. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
4. Avenir et justice du système de retraites. – Suite de la discussion en procédure accélérée et rejet d'un projet de loi modifié
M. Dominique Watrin.
Amendement n° 235 rectifié de Mme Isabelle Pasquet. – Mmes Isabelle Pasquet, Christiane Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé ; MM. Jean-Claude Lenoir, Gérard Longuet. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 26
Amendement n° 315 rectifié de M. Claude Domeizel. – M. Claude Domeizel, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; MM. Jean Desessard, Gérard Longuet, Jean-Claude Lenoir, Jean-François Husson, Mme Hélène Lipietz. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 346 rectifié de Mme Kalliopi Ango Ela. – Mmes Hélène Lipietz, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Retrait.
Mme Catherine Deroche, M. Michel Vergoz.
Adoption de l'article.
Amendement n° 412 de la commission. – Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; M. Gérard Longuet. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 27
Amendement n° 236 de Mme Isabelle Pasquet. – M. Christian Favier, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Article 27 bis (nouveau). – Adoption
Amendement n° 238 de M. Dominique Watrin. – M. Michel Le Scouarnec, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 399 rectifié de M. Gilbert Barbier et 413 de la commission. – M. Gilbert Barbier, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Adoption des deux amendements.
Amendement n° 239 de M. Dominique Watrin. – Mmes Isabelle Pasquet, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
MM. Jean-Yves Leconte, Gérard Longuet.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 28
Amendement n° 203 rectifié de M. Dominique Watrin. – Mmes Isabelle Pasquet, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Amendement n° 240 de M. Dominique Watrin. – Mmes Laurence Cohen, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Amendement n° 419 de la commission. – Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 29 bis (nouveau). – Adoption
Amendement n° 294 de M. Gérard Longuet. – MM. Jean-Noël Cardoux, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe. – Rejet.
Amendement n° 241 de M. Dominique Watrin. – M. Christian Favier.
Amendement n° 414 de la commission. – Mme la rapporteur.
Amendement n° 314 de M. Claude Domeizel. – M. Claude Domeizel. – Retrait.
Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet de l’amendement n° 241 ; adoption de l’amendement n° 414.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 30
Amendement n° 242 de M. Dominique Watrin. – M. Michel Le Scouarnec, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Amendement n° 243 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin
Amendement n° 344 rectifié de M. Jean Desessard. – M. Jean Desessard.
Amendement n° 244 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen.
Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; MM. Gérard Longuet, Jean Boyer, René-Paul Savary. – Rejet des amendements nos 243 et 344 rectifié.
MM. Jean Desessard, Jean Boyer, René-Paul Savary. – Rejet de l’amendement n° 244.
Amendement n° 345 rectifié de M. Jean Desessard. – M. Jean Desessard, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Rejet de l’article.
Amendements identiques nos 295 de M. Gérard Longuet, 355 de M. François Zocchetto et 380 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Jean-Noël Cardoux, Gérard Roche, Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; MM. Jean-François Husson, Gérard Longuet, René-Paul Savary, Claude Domeizel, Gilbert Barbier, Marc Laménie, René Beaumont. – Adoption, par scrutin public, des trois amendements supprimant l'article.
Amendement n° 296 de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
Amendement n° 403 de M. Gilbert Barbier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 297 de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
Amendements identiques nos 310 de M. René Beaumont et 402 de M. Gilbert Barbier. – Devenus sans objet.
Amendement n° 415 de la commission. – Devenu sans objet.
Amendement n° 298 de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
Amendement n° 300 de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
Amendement n° 356 de M. François Zocchetto. – Devenu sans objet.
Amendement n° 309 de M. René Beaumont. – Devenu sans objet.
Amendement n° 388 rectifié de M. Gilbert Barbier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 416 de la commission. – Devenu sans objet.
Amendement n° 299 de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
Amendement n° 404 de M. Gilbert Barbier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 301 rectifié de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
Amendement n° 302 de M. Gérard Longuet. – Devenu sans objet.
M. Claude Domeizel.
Adoption de l'article.
PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume
Articles additionnels après l'article 33
Amendement n° 303 de M. Gérard Longuet. – M. Jean-Noël Cardoux, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; M. Jean-François Husson. – Rejet.
Amendement n° 305 de M. Gérard Longuet. – Mmes Isabelle Debré, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; M. Jean-Noël Cardoux. – Rejet.
Amendement n° 304 de M. Gérard Longuet. – M. Jean-Noël Cardoux, Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre. – Rejet.
Amendement n° 306 de M. Gérard Longuet. – Mmes Isabelle Debré, la rapporteur, Marisol Touraine, ministre ; MM. Jean-François Husson, Jean-Noël Cardoux, Marc Laménie, Jean Desessard, Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Articles 33 bis (nouveau) et 34. – Adoption
MM. Jean-Noël Cardoux, Jean Bizet, Dominique Watrin, Mme Françoise Laborde, MM. Gérard Roche, Claude Domeizel, Jean Desessard, Gilbert Barbier, Mme Isabelle Pasquet, M. Jean-Claude Lenoir, Mme Laurence Cohen, MM. Hervé Maurey, Claude Jeannerot, René-Paul Savary.
Rejet, par scrutin public, du projet de loi modifié.
Mmes la rapporteur, Marisol Touraine, ministre.
5. Fin de mission de sénateurs
6. Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Pierre Raffarin
vice-président
Secrétaire :
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission des affaires sociales a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites actuellement en cours d’examen.
Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
3
Renvois pour avis unique
M. le président. J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation et l’exploitation d’une nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin (n° 115, 2013-2014), dont la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire.
J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2014 (n° 117, 2013-2014), dont la commission des affaires sociales est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances.
4
Avenir et justice du système de retraites
Suite de la discussion en procédure accélérée et rejet d'un projet de loi modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (projet n° 71, résultat des travaux de la commission n° 96, rapport n° 95, avis n° 76, rapport d’information n° 90).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux dispositions du titre III.
Titre III
SIMPLIFIER LE SYSTÈME ET RENFORCER SA GOUVERNANCE
Chapitre Ier
Simplifier l’accès des assurés à leurs droits
Article 26
I. – L’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Avant le premier alinéa, il est ajouté un I ainsi rédigé :
« I. – Les assurés bénéficient d’un droit à l’information sur le système de retraite par répartition, qui est assuré selon les modalités suivantes. » ;
2° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « II. – » ;
3° Les troisième et quatrième alinéas sont supprimés ;
3° bis (nouveau) À la fin de la deuxième phrase du cinquième alinéa, la référence : « neuvième alinéa du présent article » est remplacée par la référence : « premier alinéa de l’article L. 161-17-1 » ;
4° Au début du sixième alinéa, est ajoutée la mention : « III. – » ;
5° La deuxième phrase du septième alinéa est ainsi rédigée :
« L’assuré bénéficie d’un service en ligne lui donnant accès à tout moment à son relevé actualisé, l’informant sur les régimes dont il relève et lui permettant de réaliser certaines démarches administratives et d’échanger avec les régimes concernés des documents dématérialisés. » ;
6° Le huitième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « IV. – » ;
b) La dernière phrase est supprimée ;
7° Après le huitième alinéa, il est inséré un V ainsi rédigé :
« V. – Dans le cadre de tout projet d’expatriation, l’assuré bénéficie à sa demande d’une information, par le biais d’un entretien, sur les règles d’acquisition de droits à pension, l’incidence sur ces derniers de l’exercice de son activité à l’étranger et sur les dispositifs lui permettant d’améliorer le montant futur de sa pension de retraite. Une information est également apportée au conjoint du futur expatrié. Les conditions d’application du présent V sont définies par décret. » ;
8° Le neuvième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « VI. – » ;
b) Les deux premières phrases sont supprimées ;
9° (nouveau) À l’avant-dernier alinéa, les références : « huit premiers alinéas » sont remplacées par les références : « I à V » et, après le mot : « groupement », sont insérés les mots : « mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 ».
I bis (nouveau). – Au huitième alinéa de l’article L. 114-2 du même code, les références : « huit premiers alinéas » sont remplacées par les références : « I à V ».
II. – Le 5° et le b du 8° du I entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard, respectivement, au 1er janvier 2017 et au 1er juillet 2014.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article prévoit la création, d’ici au 1er janvier 2017, d’un service en ligne donnant à tout moment aux assurés un accès aux informations relatives aux retraites les concernant, ce qui est positif : nous ne sommes évidemment pas opposés à ce que nos concitoyens puissent, à leur demande, obtenir des informations sur leurs droits.
Toutefois, compte tenu de l’importance des informations susceptibles d’être fournies aux assurés, il nous semble important de préciser dans la loi que, si les informations données sont erronées et que les droits se trouvent finalement réduits par rapport à ce que ces informations laissaient entrevoir aux assurés, ceux-ci peuvent demander que les informations communiquées par ce nouveau service soient opposables.
En outre, nous souhaiterions savoir, madame la ministre, quelle sera la nature juridique de l’établissement chargé d’informer les salariés de leurs droits. S’agira-t-il d’un établissement public ou privé ? Les personnels qui renseigneront les salariés bénéficieront-ils d’une formation sur l’ensemble des régimes existants – on le sait, la matière est complexe – et sur les règles de convergence qui peuvent exister ?
L’expérience montre que l’instauration d’un guichet unique, avec la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC, ne permet pas de répondre convenablement aux questions et attentes de nos concitoyens si elle n’est suivie d’aucune formation appropriée des personnels concernés.
Par ailleurs, madame la ministre, je veux vous faire part de mon étonnement sur un point particulier. Peu après la présentation de votre projet de loi, vous avez rendu publique la mise en place d’un simulateur web permettant de calculer l’âge de l’accès à une retraite à taux plein : voilà tout de même un renseignement susceptible d’intéresser tout un chacun. Or ce simulateur ne semble pas prendre en compte les périodes de décote, qui sont pourtant importantes.
Cette anomalie a-t-elle d’ores et déjà été réparée ? Sinon, allez-vous faire le nécessaire pour qu’elle le soit ?
M. le président. L'amendement n° 235 rectifié, présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après le mot :
bénéficient
insérer le mot :
gratuitement
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 26 prévoit la création, d’ici au 1er janvier 2017, d’un service en ligne donnant à tout moment aux assurés un accès aux informations relatives à la retraite les concernant. L’alinéa 3 prévoit ainsi que « les assurés bénéficient d’un droit à l’information sur le système de retraite par répartition ».
Il s’agit, par cet amendement, que l’on pourrait qualifier de « rédactionnel », de préciser que l’accès à cette information est gratuit. Quitte à se placer sur le terrain du déclaratif, autant que la déclaration soit complète.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet amendement prévoit que l’accès au compte individuel retraite en ligne se fera gratuitement.
Il est évident que ce service a vocation à être gratuit et que le groupement chargé d’en piloter la mise en place d’ici à 2017 devra s’assurer des conditions dans lesquelles les personnes n’ayant pas accès à internet à leur domicile pourront y accéder.
La commission aimerait connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends tout à fait la préoccupation des auteurs de cet amendement. Toutefois, il n’est pas juridiquement utile dans la mesure où il va de soi que ce service est gratuit.
Néanmoins, si le Sénat juge nécessaire d’apporter cette précision dans la loi, je ne m’y opposerai pas. C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. L’amendement qui nous est proposé présente plus de risques que d’avantages.
Bien sûr, il est souhaitable que l’on puisse consulter sans difficulté un site internet pour bénéficier d’un certain nombre d’informations – nous le faisons tous couramment – et, en l’espèce, pour connaître ses droits à la retraite.
Toutefois, préciser que les assurés bénéficient de ce service « gratuitement » pose problème. En effet, cela signifie a contrario que ce service a un coût.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Eh oui ! Le service public a un coût !
M. Jean-Claude Lenoir. Qui supportera ce coût ? La sphère publique ou la sphère privée ? S’il s’agit de la sphère privée, il serait intéressant de savoir quels organismes relevant du droit privé devront effectivement le supporter. Assurément, un jour viendra où il nous sera rétorqué que ce coût doit être supporté par les finances publiques ! Et si c’est la sphère publique qui supporte ce coût, je me demande dans quelle mesure l’article 40 de la Constitution ne pourrait pas être opposé à cet amendement.
Dans l’incertitude, j’estime que vous prenez un grand risque, madame la ministre, à entrer dans ce débat : apporter cette précision présente, je le répète, plus d’inconvénients que d’avantages.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, j’interviendrai très brièvement, car mon collègue Jean-Claude Lenoir vient de dire l’essentiel.
Pour succéder au groupement d’intérêt public Info Retraite, vous allez mettre en place cette Union des institutions et services de retraites – UISR –, dont certains sont paritaires, tandis que d’autres sont publiques. Quoi qu'il en soit, ces institutions et services vont contribuer au fonctionnement de ce service d’information. Or l’activité dont il s’agit n’est pas négligeable puisqu’il faut tout de même reconstituer les droits individuels de tous les futurs retraités, pour ne pas prendre le terme de « pensionnés » utilisé outre-quiévrain, chacun d’entre eux s’interrogeant, à juste titre, sur ce qui l’attend.
Il est positif de mettre en place ce système ; c’est nous qui avions lancé cette idée avec le GIP Info Retraite. Je considère que ce service doit, en effet, être en libre accès et qu’il ne doit pas y avoir d’obstacle financier à sa consultation. Toutefois, le terme « gratuit » est équivoque.
Ce système a un coût, et il est financé par les cotisants, par le biais des associations membres de l’UISR. Le service en question n’a donc rien de « gratuit » !
M. Jean-Claude Lenoir. Voilà !
M. Gérard Longuet. Pour assurer son financement, on fera appel aux crédits soit de l’État, soit des organismes de retraite.
C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur cet amendement.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 26, modifié.
(L'article 26 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 26
M. le président. L'amendement n° 315 rectifié, présenté par M. Domeizel, Mme Demontès, MM. Teulade, Kerdraon, Daudigny et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du septième alinéa, le mot : « périodiquement » est remplacé par les mots : « dans l’année des trentième, quarantième et cinquantième anniversaires de l’assuré » ;
2° À la première phrase du huitième alinéa, les mots : « à partir d’un certain âge et selon une périodicité déterminée par le décret susmentionné » sont remplacés par les mots : « dans l’année du soixantième anniversaire de chaque assuré ».
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Cet amendement vise à préciser la périodicité de l’envoi à chaque futur retraité, par voie postale, d’un relevé de situation individuelle et d’une estimation indicative globale de la pension à laquelle il devrait avoir droit. Actuellement, de fait, chaque actif reçoit ces informations par l’intermédiaire du GIP Info Retraite à ses trente-cinquième, quarantième, quarante-cinquième, cinquantième et cinquante-cinquième anniversaires.
Dès lors qu’est créé un service en ligne, on pourrait assister à un abandon de la communication de ces informations par voie postale, étant donné que tout le monde pourra désormais consulter son relevé individuel de situation à tout moment, quand il le souhaite.
Pour ma part, je pense qu’il faut maintenir cet envoi postal, en prévoyant cependant un véritable agenda. La loi doit être plus précise et plus directive : le relevé de la situation individuelle serait limité aux trentième, quarantième et cinquantième anniversaires de l’assuré et l’estimation indicative globale serait adressée à chaque actif à son soixantième anniversaire.
Si je propose de fixer ainsi le rythme des envois, c’est pour prévenir les doublons dans l’information, d’autant qu’il existe aussi le rendez-vous du quarante-cinquième anniversaire.
Il faut également voir là une mesure d’économie, car le coût des envois à toutes les cohortes concernées représente chaque année entre 18 et 24 millions d’euros.
Pour avoir mis en place le système actuel en tant que président du GIP Info Retraite, je n’ignore rien de la satisfaction des futurs retraités lorsqu’ils reçoivent des informations relatives à leur situation ; mais je pense qu’il faut savoir limiter le nombre des envois postaux.
Par ailleurs, le trentième anniversaire me paraît préférable au trente-cinquième, parce que je conçois aussi la communication de ces informations comme un moyen de sensibiliser de bonne heure nos concitoyens au système de retraites. De fait, bien souvent, les actifs ne pensent à leur retraite que deux ou trois ans avant d’y parvenir !
M. Jean-Claude Lenoir. En effet !
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Les auteurs de cet amendement entendent tirer les conséquences de la création du service en ligne, prévue à l’article 26, en clarifiant les conditions d’envoi à l’assuré du relevé de situation individuelle et de l’estimation indicative globale, qui dont deux documents importants. C’est pourquoi la commission donne un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Domeizel, je comprends parfaitement votre objectif et je ne peux que souscrire à votre volonté de réaliser des économies et d’éviter la redondance des informations. Néanmoins, je vous demanderai de retirer votre amendement.
M. Charles Revet. Il est bon, mais il faut le retirer !
Mme Marisol Touraine, ministre. En effet, votre objectif ne pourra être atteint que lorsque le nouveau service d’information en ligne sera complètement opérationnel. Or je ne voudrais pas qu’il y ait une période d’incertitude pendant laquelle les assurés ne recevraient plus par voie postale les informations qu’ils attendent, alors que le nouveau système en ligne n’aurait pas été entièrement mis en place.
En revanche, je peux vous assurer que, parmi les mesures qui seront prises par décret, le passage de l’information par courrier à l’information individuelle en ligne sera prévu.
Monsieur le sénateur, je ne suis pas opposée à votre démarche, mais je veux être certaine que les assurés continueront, au cours de la période de transition, à être correctement informés, de la façon qui paraît aujourd’hui la plus classique et la plus rassurante, c’est-à-dire par courrier.
C’est pourquoi, dans le cas où vous maintiendriez votre amendement, le Gouvernement y serait plutôt défavorable, au nom de la bonne information des assurés.
M. le président. Monsieur Domeizel, l’amendement n° 315 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Domeizel. Madame la ministre, je comprends votre demande ; j’ai, autant que d’autres, le souci de la bonne information des actifs au sujet de leur retraite.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Claude Domeizel. La mesure que je propose peut être mise en application dès à présent, dans le cadre du système prévu par l’article 10 de la loi du 21 août 2003. Elle présente l’avantage d’éviter les redondances avec d’autres modes d’information, en particulier avec le rendez-vous à quarante-cinq ans. À cet âge, en effet, si cet amendement n’est pas adopté, les futurs retraités recevront un relevé de situation individuelle en même temps qu’ils auront un entretien : cela fait tout de même beaucoup !
J’insiste aussi sur l’importance qui s’attache au fait d’avancer la délivrance de la première information à l’âge de trente ans. Dans mon esprit, il s’agit de sensibiliser les assurés à la retraite, quasiment au début de leur vie active.
Voilà pourquoi, madame la ministre, je maintiens mon amendement. Je le fais en tant que concepteur du système actuel comme président du GIP Info Retraite, dont je suis aujourd’hui vice-président.
Et je répète, mes chers collègues, que cela permettrait d’économiser de 18 à 24 millions d’euros par an !
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur Domeizel, je ne pourrai malheureusement pas voter votre amendement et je suivrai l’avis de Mme la ministre.
M. Gérard Longuet. Une fois de plus ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. Je pense en effet qu’il est nécessaire de maintenir l’envoi des informations sur papier.
M. Gérard Longuet. C’est ce que M. Domeizel propose !
M. Jean Desessard. Certes, j’ai bien noté que, selon la proposition de M. Domeizel, ceux qui n’ont pas accès à internet pourraient demander à recevoir par courrier les informations qui les concernent.
Mme Catherine Deroche. Voilà !
M. Jean-François Husson. Pas très écologique, votre position, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Allons, mon cher collègue, vous n’allez tout de même pas me dire que, selon vous, l’écologie, cela consiste à ne plus vouloir qu’on écrive sur du papier ! C’est une vision vraiment petite de l’écologie ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Je n’avais pas prévu de parler cinq minutes sur cet amendement, mais, si vous m’y poussez (Sourires.),…
M. le président. Rien ne vous y oblige, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean Desessard. … je vais vous exposer ce qu’est la base de l’écologie. (Nouvelles exclamations sur les travées de l’UMP.)
La base de l’écologie, ce n’est pas de planter une fleur sur un parterre à la sortie d’une ville ; c’est de constater que, au rythme actuel de développement, compte tenu de l’augmentation de la population, de ce que nous consommons et de ce que nous produisons, les ressources de la planète ne seront pas suffisantes pour couvrir les besoins essentiels de l’humanité.
C’est cela, monsieur Husson, la base de l’écologie ! Cela n’implique pas que tout le monde doit devenir végétarien ! Cela veut dire que, globalement, nous devons limiter notre consommation et réduire la production,…
M. Jean-Claude Lenoir. Réduire la production ! Intéressant…
M. Jean Desessard. … faute de quoi nous n’aurons pas assez d’une seule planète.
Bien sûr, il peut y avoir entre nous certaines contradictions – d’ailleurs, qui y échappe ? –, mais la base de l’écologie, c’est cela. C’est une vision globale !
M. Jean-François Husson. Même vos amis socialistes sourient !
Mme Laurence Rossignol. Pas du tout : les socialistes sont d’accord avec cette conception !
M. Jean-François Husson. Une socialiste !
Mme Laurence Rossignol. Plusieurs, mon cher collègue !
M. Jean Desessard. Les socialistes sont en parfait accord avec cela ! (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.) Parfois, ils disent aux écologistes : on va attendre cinq ans pour appliquer telle ou telle mesure, parce qu’on n’est pas encore prêt. Mais, sur l’analyse de fond, ils sont d’accord avec nous : il y a des contraintes environnementales dont il faut tenir compte.
Il est vrai que, parfois, ils sont moins pressés d’agir que nous. (Rires sur les mêmes travées.) Nous allons donc tâcher de nous accorder sur un rythme : chers collègues de l’opposition, vous serez surpris, dans un an, de voir notre cohésion, notre convergence sur de vrais objectifs,…
M. Jean-François Husson. Vous reconnaissez donc qu’il n’y a pas de cohésion aujourd’hui ! C’est un aveu ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. … de constater que le Gouvernement fonctionne parfaitement. Ce jour-là, chers amis, vous ferez une triste mine, parce que vous penserez : ils vont encore faire une nouvelle mandature ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Je reviens maintenant à l’amendement de M. Domeizel.
M. le président. Ah, nous pensions que vous aviez terminé ! (Rires.)
M. Jean Desessard. Veuillez m’excuser, monsieur le président, mais nos collègues de l’opposition me provoquent. Il faut bien que je leur explique l’écologie ! (Sourires.)
Nous ne voterons pas cet amendement parce que nous pensons que les systèmes informatiques ne sont pas encore suffisamment au point et que de nombreuses personnes n’y sont pas habituées. Pour certaines, il n’est pas forcément facile de se familiariser avec les nouvelles technologies ! Et puis on sait bien que, si l’administration n’est pas obligée de suivre la même procédure pour tout le monde, cela crée des problèmes. De plus, lorsque c’est à la personne intéressée de faire la demande, tout est généralement beaucoup plus compliqué, d’autant qu’il n’y a pas toujours les logiciels nécessaires.
Dans vingt ans, monsieur Domeizel, je serai prêt à étudier de nouveau la question…
M. Jean-Claude Lenoir. Nous ne serons plus là !
M. Jean Desessard. Pour le moment, nous voterons contre l’amendement n° 315 rectifié !
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. De tous les biens rares, le plus certainement rare est le temps ; aussi ne faut-il pas le gaspiller car, comme il est écrit dans l’Évangile, nous ne connaissons « ni le jour ni l’heure ». Du reste, depuis le début de ce débat, en dépit de notre appétit de dialogue et d’approfondissement des sujets, nous nous sommes efforcés de l’économiser en respectant nos temps de parole et en évitant les digressions sans rapport avec le problème des retraites. (Mmes Catherine Deroche et Françoise Boog rient. – Murmures sur les travées du groupe CRC.)
Monsieur Desessard, dans un travail collectif, il n’est pas inutile de savoir de quoi on parle, et l’expérience n’est pas un défaut ; nous rendons hommage à celle de M. Domeizel, ancien président du GIP Info Retraite, dont nous voterons l’amendement.
Madame le ministre, mon collègue Philippe Bas a plusieurs fois constaté que vous marchiez dans les pas des législateurs de 2003. J’observe que c’est encore le cas lorsque vous transformez le GIP Info Retraite en une UISR : vous rendez ainsi une forme d’hommage à un travail auquel vous aviez pourtant refusé de participer !
C’est la raison pour laquelle, proactivement, nous poursuivrons l’effort engagé en 2003, puisque vous ne le cassez pas aujourd'hui, et c’est dans cet esprit que nous voterons l’amendement de M. Domeizel.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous croyions que le temps était un bien rare…
M. Jean-Claude Lenoir. L’excellente intervention de mon collègue Gérard Longuet me permettra de parler deux fois moins que je ne l’avais prévu.
Les mots que M. Domeizel a choisis m’ont touché. Mon cher collègue, vous avez parlé vrai, en homme de terrain qui a exercé des responsabilités dans une caisse de retraite. Vous avez touché du doigt un aspect essentiel, qui échappe complètement aux sphères du pouvoir, aux cercles parisiens et aux grandes administrations : le vécu de toute personne qui a travaillé relativement au droit fondamental qu’est la retraite.
À l’article 1er du projet de loi, la majorité a rejeté l’un de nos amendements, qui prévoyait simplement transparence et lisibilité. Eh bien, la démarche proposée par M. Domeizel va dans ce sens : elle permettra aux actifs de mieux comprendre et de mieux anticiper.
Comme sans doute nombre de nos collègues, je suis frappé par le désintérêt des jeunes actifs, et même de ceux qui travaillent depuis dix ou quinze ans, pour les problèmes liés à la retraite. Parlez de la retraite à votre fils, à un jeune cousin, à un jeune voisin, sa réaction sera : « Ce n’est pas un sujet qui m’intéresse ! »
Je pense que l’initiative de M. Domeizel participe de l’effort pédagogique consistant à alerter les actifs, y compris les plus jeunes, sur les bienfaits d’un système de prévoyance et de protection en plus du régime général ; il peut en résulter une curiosité, voire un intérêt, pour la souscription à un dispositif.
Mon cher collègue, je vous félicite d’avoir parlé avec tant de sincérité ; en ce qui nous concerne, nous voterons votre amendement !
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. À entendre certains de nos collègues, j’ai le sentiment de ne pas m’être bien exprimé. Je vais donc rappeler de quelles informations disposeront nos concitoyens pendant toute la durée de leur activité.
D’abord, un service en ligne pourra être utilisé librement et, comme nous venons même de le préciser, gratuitement.
Ensuite, le rendez-vous à l’âge de quarante-cinq ans permettra à tout actif de se faire expliquer comment fonctionne le système de retraite.
Par ailleurs, ma proposition ne met nullement fin à la communication d’une information régulière sur papier.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Tout à fait !
M. Claude Domeizel. Permettez-moi de m’expliquer à nouveau.
Selon moi, un document sur papier est indispensable pour mieux comprendre, dès l’âge de trente ans, le calcul de la retraite. Aujourd'hui, un relevé de situation individuelle est adressé automatiquement au moment des trente-cinquième, quarantième, quarante-cinquième et cinquantième anniversaires de chaque assuré. Je propose que ce document soit désormais envoyé lorsque l’assuré atteint l’âge de trente ans, de quarante ans et de cinquante ans, étant entendu qu’il y aura en outre un entretien à quarante-cinq ans. De plus, à soixante ans, l’assuré devra bénéficier d’une estimation indicative globale, laquelle lui permettra de connaître le montant de sa retraite une fois l’âge requis atteint.
Il est donc clair que l’information périodique et systématique sur papier demeurera !
J’ajoute que le GIP Info Retraite a mis en place voilà maintenant trois ans une information à la demande. Ainsi, tout actif qui veut obtenir des renseignements sur sa retraite a la possibilité de s’adresser au GIP Info Retraite pour connaître sa situation. Autrement dit, l’information est totale.
Par ailleurs, quand je parle d’économies, je sais de quoi il retourne ! L’envoi systématique à tous les actifs de trente-cinq, quarante et quarante-cinq ans coûte jusqu’à 24 millions d’euros. Ce coût s’explique par le fait que chaque régime auquel l’actif a cotisé envoie son propre bilan de situation. Cela a évidemment des répercussions, car le fait de recevoir ces informations incite beaucoup d’actifs à demander des renseignements complémentaires, d’où un surcroît de travail pour l’ensemble des régimes de retraite.
En fait, loin de prôner l’abandon de l’information sur support papier, je pense qu’il faudra ne jamais l’abandonner ! Cette information est en effet indispensable à la bonne compréhension de ce qu’est la retraite puisque les intéressés reçoivent une liasse de documents retraçant leur parcours professionnel au sein de l’ensemble des régimes auxquels ils ont cotisé, y compris, bien sûr, le régime de base.
J’espère que ces précisions permettront à certains collègues de mieux comprendre l’objet de mon amendement.
M. Jean-Claude Lenoir. Mais il n’y a pas de malentendu !
M. Jean Desessard. Nous cherchons simplement le dialogue !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Plutôt que de m’engager dans des digressions, comme a pu le faire M. Desessard (Exclamations.), je veux simplement dire que, à l’instar de nos collègues du groupe UMP, je soutiendrai cet amendement, estimant qu’il va dans le sens à la fois de l’intérêt des usagers et de l’intérêt général.
Mon expérience professionnelle m’a en effet convaincu que toutes les occasions étaient bonnes pour informer nos concitoyens le plus tôt possible de leurs droits en général et, plus particulièrement, de leurs droits à la retraite.
On a eu l’occasion de le dire au cours de ces derniers jours, la retraite paraît souvent éloignée et n’est pas prise en compte comme il le faudrait par nos concitoyens, notamment les plus jeunes.
Informer tôt, dès l’âge de trente ans, est évidemment une bonne solution, qu’il s’agisse d’une information dématérialisée, pour celles et ceux, de plus en plus nombreux, qui privilégient un accès en ligne, ou d’une information disponible sur un support papier, qui constitue, à tout moment, le seul moyen d’apporter une preuve. (M. Claude Domeizel fait une moue dubitative.) Une fois qu’un document sur papier est mis en sécurité, il ne peut quasiment jamais être détruit. N’en déplaise à certains, le document papier est donc indispensable.
Par ailleurs, il est important de s’intéresser à ce qui pourrait et devrait figurer sur les documents communiqués à nos concitoyens. Puisqu’on parle beaucoup de répartition, outre les valeurs en euros et, demain, en points, je souhaiterais qu’on puisse inscrire également les règles en vigueur, dans un encadré qui ne dépasserait pas dix lignes.
M. Claude Domeizel. C’est déjà le cas !
M. Jean-François Husson. Il conviendrait de rappeler ces règles, qui, malheureusement ou heureusement, évoluent au cours d’une vie active, nous l’avons souvent dit la semaine dernière : la durée de cotisation augmente, les parcours sont modifiés, le montant des cotisations évolue ; les règles de calcul, y compris pour ce qui concerne les rentes, doivent être portées à la connaissance des intéressés sur un document qui ne représente guère qu’une feuille recto verso. Cette information synthétique est un droit pour chacun et chacune : c’est celui de connaître les modalités à venir de sa retraite.
Nous partageons donc vos préoccupations, monsieur Domeizel ; elles rejoignent les nôtres. Nous voterons donc cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote.
Mme Hélène Lipietz. Je m’étonne, monsieur Husson, que vous ayez eu recours au terme de « digression » à propos d’une discussion parlementaire. Si notre assemblée n’est pas un lieu de discussion, où donc peut-on échanger ? Le Parlement est, par essence, un lieu de parole et nos interventions permettent de faire avancer le débat !
En l’occurrence, les précisions apportées par M. Domeizel nous ont convaincus et nous voterons son amendement. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) Je vous rappelle qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 315 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 26.
L'amendement n° 346 rectifié, présenté par Mme Ango Ela, M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er juillet 2014, le Gouvernement remet au Parlement un rapport analysant les obstacles à l’accès des Français et des Françaises résidant à l’étranger aux versements de la pension de retraite, notamment aux ruptures de versement induites par les réglementations particulières qui leur sont appliquées quant aux justificatifs d’existence ainsi qu’aux délais applicables.
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Mme Hélène Lipietz. Cet amendement a été déposé sur l’initiative de ma collègue Kalliopi Ango Ela, qui représente les Français établis hors de France. Par ailleurs membre de la commission des affaires sociales de l’Assemblée des Français de l’étranger, elle est, à ce titre, particulièrement attentive aux questions relatives à la retraite des expatriés.
Les Français résidant hors de France, et eux seuls, doivent fournir chaque année à la CNAV un certificat d’existence pour obtenir le versement de leur pension de retraite. C’est l’article 83 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 qui a instauré ce rythme annuel, fixant en outre un délai d’un mois pour faire parvenir ledit certificat à l’administration. Je signale au passage que, dans le cadre d’une procédure judiciaire, par exemple, la personne installée à l’étranger dispose de délais supplémentaires. Or, dans le cas qui nous préoccupe, les expatriés doivent produire en un mois l’ensemble des attestations demandées.
Ce délai est manifestement insuffisant pour ceux qui résident dans les nombreux pays soumis à des aléas administratifs et postaux, ce qui entraîne régulièrement une cessation de versement des pensions de retraite des Français résidant dans ces pays, leur causant bien des difficultés. Il est évidemment beaucoup plus facile de fournir les documents nécessaires quand on vit en Belgique ou au Luxembourg que si l’on est installé en Inde ou en Afrique subsaharienne !
Il serait souhaitable d’instaurer un rythme bisannuel pour la présentation de ce certificat et d’étendre le délai de réception à au moins trois mois. C’est dans cet esprit que nous demandons que cette question soit étudiée par le Gouvernement.
Madame la ministre, vous aviez certes intégré au sein du rapport instauré par l’article 29 bis du texte la question du traitement administratif des dossiers de retraite des Français établis hors de France et vous aviez indiqué que le rapport devrait examiner « les difficultés liées à la perception d’une pension de retraite à l’étranger ». Toutefois, la rédaction actuelle de cet article est trop imprécise En effet, ce qui nous importe, c’est surtout la question des délais de remise des certificats.
Nous voulons profiter de la présentation de cet amendement pour vous interpeller sur une question connexe. L’article 83 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ouvre des possibilités de mutualisation entre les régimes obligatoires de retraite concernant la gestion des certificats d’existence, dont les conditions sont renvoyées à un décret. À notre connaissance, ce décret d’application n’a pas encore été pris. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point, madame la ministre ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement prévoit la remise d’un rapport sur les obstacles rencontrés par les Français de l’étranger pour bénéficier du versement de leur pension de retraite.
De notre point de vue, il est satisfait par le rapport faisant l’objet de l’article 29 bis du texte, inséré par l’Assemblée nationale. Ce rapport, vous l’avez dit, madame Lipietz, devra examiner les difficultés liées à la perception d’une pension de retraite à l’étranger. Son objet est effectivement plus large que le rapport que vous demandez par cet amendement, mais je pense que, dans le cadre de l’examen des difficultés liées à l’application des conventions bilatérales en matière de retraite, les problèmes que vous évoquez pourront bien évidemment être pris en compte par le Gouvernement.
Pour cette raison, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est identique à celui de la commission.
Madame la sénatrice, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Tout d’abord, le rapport qui sera remis par le Gouvernement en application de l’article 29 bis du présent texte traitera certainement des sujets que vous évoquez, en particulier les conditions dans lesquelles doivent être remis les certificats d’existence.
Au demeurant, des avancées ont déjà été réalisées concernant ces certificats. Ainsi, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 prévoit d’ores et déjà, vous l’avez dit, que les caisses ne doivent les réclamer qu’une fois par an, au maximum.
Vous avez également fait allusion à un décret en demandant à quel moment il allait être publié. Je peux vous dire que je l’ai signé ; il est actuellement à Bercy pour contreseing et sa publication ne devrait donc plus tarder.
Par ailleurs, les caisses et en particulier le régime général travaillent à la suppression des certificats d’existence pour les retraités qui résident dans certains pays de l’Union européenne, par l’intermédiaire d’échanges des données d’état civil.
Enfin, le GIP créé par l’article 27 sera chargé de coordonner les démarches interrégimes destinées notamment à mettre en œuvre les simplifications relatives aux certificats d’existence.
Je crois donc que des réponses ont d’ores et déjà été apportées à vos préoccupations, madame la sénatrice.
M. le président. Madame Lipietz, l’amendement n° 346 rectifié est-il maintenu ?
Mme Hélène Lipietz. Je vous remercie, madame la ministre, de nous annoncer cette bonne nouvelle que constitue la signature du décret auquel j’ai fait allusion.
Je vous remercie également des précisions que vous venez d’apporter concernant le rapport prévu à l’article 29 bis. Ces questions spécifiques ayant été pointées au cours de notre discussion, j’espère que ce rapport les abordera effectivement. Je le répète, il s’agit non des personnes expatriées en Europe, qui sont sans doute celles qui ont le moins de problèmes, mais des expatriés dans les pays les plus défavorisés, qui ont énormément de mal à remplir les exigences liées au certificat d’existence.
Compte tenu de votre réponse, madame la ministre, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 346 rectifié est retiré.
Article 26 bis (nouveau)
Après le mot : « réglementaires, », la fin du premier alinéa de l’article L. 815-7 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : « après une information spécifique par ces organismes auprès des intéressés et demande expresse de ces derniers. »
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, sur l’article.
Mme Catherine Deroche. L’article 26 bis tend à instaurer l’obligation, pour les caisses de retraite, d’informer les bénéficiaires potentiels de l’allocation de solidarité aux personnes âgées – ASPA – de leur éligibilité au dispositif.
Nous avions abordé cette question lors de l’examen de la proposition de loi déposée par Isabelle Debré visant à autoriser le cumul de l’ASPA et de revenus professionnels ; nous l’avons de nouveau évoquée hier lors de l’examen de son amendement n° 2 rectifié, que le Sénat a adopté.
Quand le gouvernement précédent a décidé d’augmenter le plafond d’éligibilité à l’ASPA, peu de personnes désormais susceptibles de la percevoir en ont été averties. C’est pourquoi il nous semble important que les allocataires potentiels de l’ASPA soient informés de leur éligibilité. Nous voterons donc l’article 26 bis.
M. le président. La parole est à M. Michel Vergoz, sur l’article.
M. Michel Vergoz. Cet article me pose un petit cas de conscience et c’est pourquoi je souhaite m’en expliquer avant de le voter.
Madame la ministre, si les bénéficiaires potentiels de l’ASPA ne demandent pas à en bénéficier, nous dit-on, c’est parce qu’ils n’ont pas été suffisamment informés. L’explication est un peu courte et ignore les réalités du terrain.
L’article 26 bis oblige précisément les caisses de retraite à informer de leurs droits les bénéficiaires potentiels de l’ASPA, retraités pauvres parmi les plus pauvres. D’après les nombreux témoignages que nous avons recueillis ici et là, il apparaît que les gens ont peur de percevoir cette allocation de solidarité dans la mesure où elle est en réalité – appelons un chat un chat ! –une avance sur succession.
C’est pourquoi, madame la ministre, il faudrait rapidement, par décret, relever le seuil ouvrant droit au recours sur succession destiné à obtenir, de manière tout de même assez indécente, il faut bien le dire, le remboursement de ce que l’on considère donc comme une « avance ».
Mes chers collègues, nous nous donnons en quelque sorte bonne conscience en votant cet article 26 bis, mais le dispositif qui y est prévu s’avérera rapidement inefficace et la réalité nous éclatera à la figure.
La question qui se pose aujourd’hui est celle-ci : quand va-t-on enfin relever le seuil de recours sur succession ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 26 bis.
(L'article 26 bis est adopté.)
Article 27
I. – À l’intitulé du paragraphe 1 de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, après le mot : « Information », sont insérés les mots : « et simplification des démarches ».
II. – L’article L. 161-17-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 161-17-1. – L’Union des institutions et services de retraites est un groupement d’intérêt public, créé dans les conditions prévues au chapitre II de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, regroupant l’ensemble des organismes assurant la gestion des régimes de retraite légalement obligatoires, la Caisse des dépôts et consignations ainsi que les services de l’État chargés de la liquidation des pensions en application du code des pensions civiles et militaires de retraite. Elle est dotée d’un conseil d’administration.
« L’union assure le pilotage stratégique de l’ensemble des projets de coordination, de simplification et de mutualisation ayant pour objet d’améliorer les relations des régimes avec leurs usagers dans lesquels tout ou partie de ses membres sont engagés et veille à leur mise en œuvre. Elle assure notamment la mise en œuvre des droits prévus aux I à V de l’article L. 161-17 et le pilotage des projets prévus aux articles L. 161-17-1-1 et L. 161-17-1-2.
« L’autorité compétente de l’État conclut avec l’Union des institutions et services de retraites un contrat qui détermine les objectifs pluriannuels de simplification et de mutualisation de l’assurance vieillesse ; il comprend un schéma directeur des systèmes d’information. Ce contrat est conclu pour une période minimale de quatre ans.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État. »
III. – Les articles L. 161-1-6 et L. 161-1-7 du même code deviennent, respectivement, les articles L. 161-17-1-1 et L. 161-17-1-2.
III bis (nouveau). – À la première phrase de l’article L. 161-17-1-1 du code de la sécurité sociale, tel qu’il résulte du III du présent article, après la référence : « L. 815-1 », est insérée la référence : « , L. 815-7 ».
IV. – L’article L. 161-17-1-2 du même code, tel qu’il résulte du III du présent article, est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après le mot : « base », sont insérés les mots : « et complémentaires » ;
2° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Ce répertoire contient également les points acquis au titre du compte mentionné à l’article L. 4162-1 du code du travail. »
V (nouveau). – Les I et II entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard au 1er juillet 2014.
M. le président. L'amendement n° 412, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’Union est administrée par un conseil d’administration, composé de représentants de l’ensemble des organismes et services mentionnés à l’alinéa précédent, et d’un comité exécutif qui met en œuvre ses orientations stratégiques dans des conditions définies par décret.
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. À titre liminaire, je précise que cet amendement, qui porte sur l’Union des institutions et services de retraites, avait été adopté par la commission avant que celle-ci ne rejette l’ensemble du projet de loi dans le texte de la commission. C’est pourquoi je me vois contrainte de le présenter de nouveau aujourd’hui.
Le succès, réel, en particulier auprès des futurs retraités – c’est bien là le plus important – du GIP Info Retraite repose essentiellement sur la dynamique impulsée par les grands opérateurs que constituent les régimes de retraite numériquement les plus importants – la CNAV, les régimes de retraite complémentaire des travailleurs salariés AGIRC et ARRCO, les régimes de retraite de la fonction publique –, lesquels rassemblent à eux seuls 80 % des droits de vote. La création de l’UISR doit permettre de conserver cet élément stratégique.
À cet égard, nous proposons d’adjoindre au conseil d’administration de l’UISR un comité exécutif composé des grands opérateurs et chargé du pilotage des projets confiés à ce groupement dans des conditions définies par décret.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la rapporteur, vous proposez, au fond, de clarifier et de simplifier la gouvernance de ce futur GIP. Cela permettra à cette institution de bénéficier, à l’instar du GIP Info Retraite, de la dynamique donnée par les principaux organismes de retraite.
Le Gouvernement salue cette très bonne initiative et émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Une fois encore, je ne résiste pas au plaisir de constater que vous prolongez le travail législatif que nous avions engagé en 2003. C’est exactement comme cela que devrait fonctionner une démocratie apaisée : nous proposons, vous améliorez, nous soutenons ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 27, modifié.
(L'article 27 est adopté.)
Article additionnel après l'article 27
M. le président. L'amendement n° 236, présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé
Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les coûts pour les comptes sociaux et les avantages pour les assurés, d’une mesure permettant aux fonctionnaires relevant d’une catégorie active, de pouvoir bénéficier d’un départ à la retraite à taux plein à soixante ans.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Les catégories actives visées dans cet amendement recouvrent les emplois de la fonction publique exposés à un risque particulier ou à des facteurs de fatigue exceptionnels : par exemple, les éboueurs, les infirmiers, les égoutiers, les maçons, les policiers municipaux, les sages-femmes ou les sapeurs-pompiers professionnels.
Il s’agit ainsi de reconnaître une certaine forme de pénibilité pour certaines catégories de fonctionnaires.
Une nouvelle fois, vous l’aurez compris, il s’agit de contourner utilement l’article 40 tout en sollicitant un engagement du Gouvernement.
Le présent projet de loi prétend offrir en contrepartie de l’allongement de durée des cotisations la prise en compte de la pénibilité. Dans ce cas, autant aller jusqu’au bout et viser l’ensemble des personnes concernées. Il convient donc de reconnaître la pénibilité des fonctions exercées par les fonctionnaires relevant d’une catégorie active et, par conséquent, de leur donner la possibilité d’un départ anticipé à la retraite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Nos collègues du groupe CRC demandent que soit remis au Parlement un rapport sur le bénéfice d’une retraite à taux plein dès soixante ans pour les fonctionnaires des catégories actives.
Peu ou prou, ce qu’on appelle « catégories actives » dans la fonction publique correspond à celles qui sont visées par le dispositif relatif à la pénibilité dans le secteur privé. Les mesures d’âge qui s’appliquent aux fonctionnaires relevant des catégories actives tiennent compte de leur exposition particulière à des conditions de pénibilité ou à des facteurs de risque. La situation actuelle n’est pas modifiée par le projet de loi et elle ne justifie donc pas l’élaboration d’un rapport.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 236.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 27 bis (nouveau)
I. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° Après la seconde occurrence du mot : « officiers », la fin du 1° de l’article L. 6 est ainsi rédigée : « après la durée fixée par le décret en Conseil d’État mentionné au 1° de l’article L. 4 ; »
2° À l’article L. 7, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « deux » ;
3° Au 2° du II de l’article L. 24, les mots : « ou par limite de durée de services » sont supprimés ;
4° L’article L. 25 est ainsi modifié :
a) Au 2°, après la référence : « L. 24 », sont insérés les mots : « , sous réserve qu’ils réunissent quinze ans de services effectifs à la date de leur radiation des cadres, » ;
b) Au 3°, les mots : « radiés des cadres sans avoir » sont remplacés par les mots : « , réunissant quinze ans de services effectifs à la date de leur radiation des contrôles et n’ayant pas » ;
c) Au 4°, après la référence : « L. 24, », sont insérés les mots : « sous réserve qu’ils réunissent quinze ans de services effectifs à la date de leur radiation des cadres ou des contrôles, » ;
d) Après le 4°, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Avant l’âge mentionné à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, pour les militaires autres que ceux mentionnés à l’article L. 24 du présent code, lorsqu’ils réunissent à la date de leur radiation des cadres ou des contrôles moins de quinze ans de services effectifs. »
II. – Le présent article est applicable aux militaires dont le premier engagement a été conclu à compter du 1er janvier 2014. – (Adopté.)
Article 28
I. – La sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 173-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 173-1-2. – I. – Lorsqu’un assuré relève ou a relevé successivement, alternativement ou simultanément du régime général de sécurité sociale, du régime des salariés agricoles et des régimes d’assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales et demande à liquider l’un de ses droits à pension de vieillesse auprès d’un des régimes concernés, il est réputé avoir demandé à liquider l’ensemble de ses pensions de droit direct auprès desdits régimes. Le total de ses droits à pension dans ces régimes est déterminé selon les modalités suivantes.
« Pour le calcul du total des droits à pension, sont additionnés, pour chaque année civile ayant donné lieu à affiliation à l’assurance vieillesse auprès d’un des régimes concernés :
« 1° L’ensemble des rémunérations ayant donné lieu à cotisation d’assurance vieillesse, afin de déterminer annuellement le nombre de trimestres d’assurance pour l’ensemble des régimes concernés ;
« 2° L’ensemble des périodes d’assurance retenues pour la détermination du droit à pension dans l’un de ces régimes ;
« 3° Les salaires et revenus annuels de base de chacun des régimes, sans que leur somme ne puisse excéder le montant du plafond annuel défini au premier alinéa de l’article L. 241-3 en vigueur au cours de chaque année considérée.
« Le nombre de trimestres validés qui résulte de la somme des 1° et 2° du présent I ne peut être supérieur à quatre par an.
« II. – La pension est calculée, en fonction des paramètres prévus au I, par un seul des régimes concernés, en fonction de ses modalités et règles de liquidation. Un décret en Conseil d’État détermine la règle de priorité permettant de désigner le régime compétent pour liquider la pension.
« III. – Le régime qui a calculé et qui sert la pension en supporte intégralement la charge. Un décret précise les modalités de compensation financière forfaitaire entre les régimes concernés.
« IV. – Le comité de suivi mentionné à l’article 3 de la loi n° … du … garantissant l’avenir et la justice du système de retraites est accompagné dans ses travaux par un jury citoyen constitué de neuf femmes et neuf hommes tirés au sort et renouvelés par tiers tous les ans à compter de 2016. Cette participation citoyenne ne donne lieu à aucun défraiement.
« V. – Sauf disposition contraire, un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
II. – Le I s’applique aux pensions prenant effet à une date fixée par décret, au plus tard le 1er janvier 2017.
M. le président. L'amendement n° 238, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Supprimer le mot :
forfaitaire
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Le rapport du Conseil d’orientation des retraites – COR –, comme l’étude d’impact qui a été jointe au projet de loi, démontre que le mode de calcul des droits à pension des assurés ayant relevé de différents régimes engendre des différences entre monopensionnés et polypensionnés dans le montant des pensions qui leur sont servies. Cette inégalité est renforcée par la méthode de calcul du salaire annuel moyen.
Afin de remédier, au moins en partie, à ces inégalités, cet article instaure un mécanisme selon lequel un assuré polypensionné du régime général et d’un régime aligné – salariés agricoles, artisans et commerçants –, lorsqu’il demande à liquider l’un de ses droits à pension de vieillesse, soit réputé avoir demandé à liquider l’ensemble de ses pensions de droit direct auprès de ces régimes.
Ainsi, seuls certains des régimes concernés procèdent au calcul de la pension et un seul procède à la liquidation des droits. C’est donc logiquement que le paragraphe III prévoit un mécanisme de compensation entre les régimes de telle sorte que le régime qui verse les pensions pour le titre d’un autre puisse être remboursé par eux dans des conditions fixées par décret.
Nous ne sommes pas opposés à ce mécanisme, mais à la condition que la compensation entre régimes soit intégrale. Or, aux termes de l’alinéa 9 de cet article, celle-ci sera forfaitaire.
Certains régimes, qui sont déjà dans des situations économiques particulièrement inquiétantes – je pense à la mutualité sociale agricole ou au Régime social des indépendants – pourraient, en raison de cette compensation forfaitaire, supporter de lourdes charges administratives et des pertes dues à cette compensation non intégrale.
Cette situation est évidemment injuste, et l’on sait que ses conséquences économiques seront, in fine, supportées par les assurés.
Afin de prévenir ce risque, nous souhaitons que la compensation entre régimes soit intégrale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent que, en cas de liquidation, par l’un des régimes concernés, de la pension d’un polypensionné, la compensation financière soit intégrale entre les régimes, sur une base réelle et non pas sur une base forfaitaire.
Il s’agit là d’une question importante et la commission souhaiterait recueillir l’avis du Gouvernement, en particulier sur la faisabilité technique de la mesure proposée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Monsieur le sénateur, l’inquiétude que vous manifestez n’est pas fondée. On pourrait penser, a priori, qu’une compensation à l’euro près serait préférable. Néanmoins, elle entraînerait des frais de gestion considérables et sa mise en œuvre serait probablement d’une lourdeur excessive pour les caisses concernées. Elle supposerait en effet une traçabilité permanente des flux financiers, retraité par retraité, et la charge qui en résulterait serait susceptible d’être plus importante que les gains financiers qui pourraient en être espérés par les caisses concernées. Certaines caisses, par exemple la MSA, ont fait part de leurs craintes à cet égard.
Or, s’agissant de cette caisse, il n’y a aucune inquiétude à avoir sur le plan financier puisque la compensation se fait par le biais du régime général, auquel elle est intégrée.
Au demeurant, je le répète, sur le plan technique, la mesure que vous proposez, monsieur le sénateur, apparaît comme trop lourde et trop pénalisante financièrement pour les caisses.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 399 rectifié est présenté par MM. Barbier, C. Bourquin et Collombat.
L'amendement n° 413 est présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 399 rectifié.
M. Gilbert Barbier. À l’article 3, le Sénat a maintenu, en dépit d’un amendement de suppression que j’avais présenté, le comité de suivi des retraites, qu’on nous a présenté comme un organe technique.
Aux termes du projet de loi, ce comité sera composé de deux hommes, de deux femmes et d’un président. L’alinéa 10 de l’article 28 prévoit qu’il sera « accompagné dans ses travaux par un jury citoyen constitué de neuf femmes et neuf hommes tirés au sort et renouvelés par tiers tous les ans ».
À la rigueur, la création de ce comité de suivi peut se justifier s’il s’en tient à un rôle technique, mais tel n’est plus le cas si, devenant un lieu de discussion, il prend véritablement à revers le COR, que je considère comme une instance très efficace.
Pour cette raison, je propose de supprimer l’alinéa 10.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter l'amendement n° 413.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Le nouveau mécanisme de pilotage du système de retraites prévu à l’article 3 du présent projet de loi repose sur une distinction claire entre l’instance de concertation et de diagnostic partagé que constitue le COR et l’instance d’expertise, de recommandation et d’alerte qu’est le comité de suivi des retraites.
Les partenaires sociaux sont représentés au sein du COR et seront consultés par le Gouvernement après la publication par le comité de suivi de son avis annuel.
La mission technique dévolue au comité de suivi – M. Barbier y a fait allusion – s’accommode mal de la présence d’un jury citoyen aux côtés des experts qui le composent. En outre, la mise en œuvre du pilotage du système de retraites ne doit pas voir la démocratie participative se substituer à la démocratie sociale et à la démocratie représentative.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends parfaitement, monsieur le sénateur, madame la rapporteur, la préoccupation que vous exprimez. Dans la mesure où l’alinéa que vos deux amendements tendent à supprimer a été introduit par l’Assemblée nationale au cours de la discussion, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 399 rectifié et 413.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 239, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À compter du 1er janvier 2015, les nouveaux assurés mentionnés à l’article L. 731-30 du code rural et de la pêche maritime ne peuvent plus être affiliés qu’auprès des organismes de mutualité sociale agricole mentionnés à l’article L. 723-1 du même code.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Historiquement, c’est un fait, la protection sociale des agriculteurs repose sur le principe de la pluralité d’assureurs. En effet, les assurés peuvent opter soit pour le régime de la MSA, la mutualité sociale agricole, soit pour la gestion de leurs cotisations et de leurs droits par des organismes à but lucratif. La MSA se trouve donc en concurrence avec des assurances privées commerciales, détenues par des actionnaires et des fonds de pension qui gèrent des droits sociaux en lieu et place d’un organisme sans but lucratif.
Si on laissait faire la Commission européenne, ce modèle pourrait s’étendre. En effet, pour celle-ci, l’assurance maladie obligatoire est un marché financier, à l’image de l’assurance maladie complémentaire. Ainsi, je vous rappelle qu’un projet de directive vise à soumettre la protection sociale obligatoire de base à la procédure d’appel d’offres, afin de permettre aux opérateurs privés commerciaux d’emporter le marché.
Le mécanisme actuellement en place à la MSA participe d’une privatisation rampante de la sécurité sociale et sert d’exemple pour l’extension de cette privatisation. Il s’agit en l’occurrence d’un exemple peu vertueux puisque les frais de gestion des opérateurs lucratifs sont bien plus importants que ceux de la MSA, de la même manière que les frais de gestion des organismes complémentaires sont nettement supérieurs à ceux que supporte la sécurité sociale.
Au passage, je regrette que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ait conforté le principe de la pluralité d’assureurs en permettant que les indemnités journalières créées pour les agriculteurs qui n’en percevaient pas puissent être proposées aussi bien par la MSA que par des assureurs privés.
Je crois savoir que l’amendement que nous proposons est satisfait par une disposition votée au cours de la discussion du PLFSS pour 2014 à l’Assemblée nationale ; aussi me demandera-t-on certainement de retirer cet amendement. Il reste que le Sénat n’a pas encore débattu de ce texte ; c’est pourquoi je le maintiendrai, de manière à pouvoir obtenir une garantie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. De notre point de vue, cet amendement est pleinement satisfait par l’article 64 du PLFSS pour 2014, que nous allons examiner la semaine prochaine et qui prévoit une gestion unique par la MSA des risques maladie et des risques accident du travail et maladie professionnelle des exploitants agricoles.
C’est pourquoi nous sollicitons effectivement le retrait de cet amendement. Toutefois, Mme Pasquier ayant indiqué qu’elle excluait un tel retrait, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement émet le même avis, car l’article 64 du PLFSS répond effectivement à la préoccupation des auteurs de l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l'article.
M. Jean-Yves Leconte. Je voterai l’article 28, mais je souhaite dire auparavant qu’il suscite en en moi une satisfaction à 43 % et une frustration à 57 %. (Sourires.)
Le rapport Moreau, les rapports du COR et l’étude d’impact de ce projet de loi indiquent qu’à effort contributif égal, les polypensionnés n’obtiennent pas le même niveau de pensions. Le calcul des vingt-cinq meilleures années suffit à expliquer cette situation. En effet, si vous relevez de trois régimes, par exemple, vous ne pouvez pas totaliser trois fois vingt-cinq meilleures années de cotisation. Par conséquent, pour calculer le montant de la pension, on prend en compte, dans certains cas, toutes les années, ce qui implique de comptabiliser aussi les plus mauvaises. Ainsi, in fine, vous avez cotisé à la même hauteur, mais vous recevez des différents régimes de retraite des pensions plus faibles.
Certains régimes sont alignés : le régime général, le régime des salariés agricoles et les régimes d’assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales. Les personnes qui sont dans ces trois régimes, et exclusivement dans ceux-là, représentent 43 % des polypensionnés. Or les polypensionnés de ces régimes alignés bénéficient depuis 2003 d’un mode de calcul différent pour les meilleures années, lequel s’effectue au prorata du nombre d’années pendant lesquelles ils ont cotisé dans les différents régimes de retraite.
L’article 28 permet de les traiter comme les personnes bénéficiaires du régime général. C’est là un point positif et c’est la raison de ma satisfaction à 43 %.
Quelle est, maintenant, la cause de ma frustration à 57 % ?
Le monde évolue, les carrières sont de plus en plus multiples. Or nos systèmes de retraites ont été conçus à une époque où l’on s’engageait dans une certaine activité et où on la pratiquait pendant toute la vie. Ce n’est plus le cas aujourd'hui : non seulement on ne travaille pas toute sa vie dans une même entreprise, mais on change même d’activité professionnelle. Par conséquent, l’état de polypensionné va tendre à devenir la règle. Dès lors, il faut veiller à éviter les décalages.
Or, pour les 57 % de polypensionnés bénéficiant aussi d’un ou de plusieurs autres régimes qui ne sont pas alignés, l’article 28 ne s’appliquera pas dans les mêmes proportions. Il s’agit des professions libérales, des agriculteurs, ainsi que des personnes qui accomplissent une partie de leur carrière à l’étranger.
L’amendement que nous avions élaboré et qui visait à traiter par décret ce décalage a malheureusement été déclaré irrecevable en application de l’article 40 de la Constitution. Cette irrecevabilité même montre l’existence d’un décalage et d’une injustice envers ces polypensionnés, car déclarer l’irrecevabilité au nom de l’article 40 revient à reconnaître qu’il y avait une dépense. Je souhaite, même si c’est compliqué, que l’injustice liée à ce décalage puisse être corrigée à l’avenir. En effet, si la situation des polypensionnés des trois régimes alignés s’améliore, celle de tous les autres polypensionnés mériterait aussi d’être prise en compte, en particulier quant à la manière dont on calcule les vingt-cinq meilleures années.
Nous ne pouvons pas demeurer dans cette situation. Les polypensionnés seront de plus en plus la règle, et même si le cas de 43 % d’entre eux est traité dans cet article, restent les 57 % qui mériteraient un traitement un peu plus équitable. Ils cotisent de la même manière, mais ne percevront pas les mêmes pensions.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Notre excellent collègue vient d’exposer les raisons pour lesquelles, quant à nous, nous nous abstiendrons sur l’article 28.
Les polypensionnés forment un ensemble qui a vocation à croître et dont la situation sera de plus en plus complexe. Nous devons tenir compte non seulement de salariés polypensionnés relevant de régimes différents, mais aussi de polypensionnés qui relèvent d’une part de différents régimes de salariés, d’autre part de régimes de travailleurs indépendants.
M. Leconte a en outre évoqué, à juste titre, le cas de ceux, de plus en plus nombreux, qui accomplissent au moins une partie de leur carrière à l’étranger. Je pense en particulier aux 70 000 travailleurs frontaliers résidant en Lorraine et travaillant au Luxembourg. Le nombre total des travailleurs frontaliers lorrains s’élève à plus de 100 000. En France, 200 000 à 300 000 salariés transfrontaliers connaissent des régimes complexes.
L’article 28 organise une simplification. En effet, un régime principal doit calculer l’ensemble des droits. Pour autant, cet article n’épuise pas le sujet. Je crains même que, dans certains cas, par les dispositions tendant à limiter le nombre de trimestres que l’on peut valider chaque année, il ne méconnaisse la réalité de salariés qui ont dû s’adapter à des circonstances très particulières.
Évidemment, si nous étions hors de la procédure d’urgence, on pourrait se dire : « Voilà un sujet important, la commission n’a peut-être pas consacré suffisamment de temps à ce thème difficile, nous allons approfondir les échanges et Mme la ministre pourra nous apporter des apaisements en commission. » Malheureusement, le Gouvernement nous a privés de cette possibilité en appliquant la procédure accélérée. Nous sommes donc obligés d’aller vite ! Dans le doute, nous nous abstiendrons parce que nous ne sommes pas certains que cet article 28 puisse résoudre les difficultés qui se présentent pour une majorité de polypensionnés.
M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié.
(L'article 28 est adopté.)
Article additionnel après l'article 28
M. le président. L'amendement n° 203 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement, un rapport relatif à la situation des polypensionnés et à un calcul équitable du montant de leur pension en tenant compte de l’ensemble des régimes auxquels l’assuré a cotisé.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement demande un rapport sur la situation des polypensionnés et « un calcul équitable du montant de leur pension ».
Ce projet de loi, je le rappelle, comporte déjà des avancées significatives en faveur des polypensionnés, notamment en matière de simplification du calcul du montant de leur pension, à travers l’article 28 que nous venons d’examiner. Il ne me semble donc pas nécessaire de prévoir encore un rapport supplémentaire, d’autant que de nombreux travaux sur la situation des polypensionnés ont déjà été réalisés.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable. Je ne saurais trop souligner la remarquable qualité du rapport du COR de 2012.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 203 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 29
I. – Le paragraphe 3 de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 161-22-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-22-2. – Lorsqu’un assuré n’a relevé au cours de sa carrière que d’un régime de retraite de base et ne justifie pas d’une durée d’assurance, au sens du deuxième alinéa de l’article L. 351-1, au moins égale à un nombre de trimestres fixé par décret en Conseil d’État, il perçoit, à sa demande, au plus tôt à l’âge fixé à l’article L. 161-17-2, un versement égal au montant des cotisations versées à son régime de retraite, auxquelles sont appliqués les coefficients de revalorisation en vigueur au 1er janvier de l’année de la demande applicables aux salaires et cotisations servant de base au calcul des pensions. »
II. – La sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre VII du même livre Ier est complétée par un article L. 173-1-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 173-1-3. – Lorsque les droits à pension d’un assuré établis dans un régime d’assurance vieillesse de base légalement obligatoire sont inférieurs à un seuil fixé par décret et que l’assuré relève ou a relevé alternativement, successivement ou simultanément de plusieurs régimes obligatoires de base, le régime auprès duquel l'assuré justifie de la plus longue durée d'assurance peut assurer, pour le compte du premier régime, le versement de la pension due. Un décret précise les modalités de mise en œuvre du présent article, notamment les modalités de remboursement entre les régimes concernés.
« Le premier alinéa peut s’appliquer aux pensions de réversion ; un décret en Conseil d’État établit les adaptations nécessaires, liées notamment aux évolutions dans le temps des pensions de réversion servies. »
III. – L’article L. 351-9 du même code est abrogé.
IV. – Le présent article s’applique aux assurés dont l’ensemble des pensions prennent effet à compter du 1er janvier 2016.
M. le président. L'amendement n° 240, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le présent article prévoit, pour les monopensionnés, le remplacement du versement forfaitaire unique par un dispositif de remboursement de cotisations. Si nous pouvons comprendre les considérants d’une telle mesure, nous estimons cependant que le remboursement des cotisations est contraire au principe des retraites par répartition, contraire au principe universel des retraites.
Le système des retraites n’est pas une assurance, mais bien un système spécifique, mis en place à la Libération. Nous l’avons déjà souligné hier, les cotisations versées par un assuré ne sont pas sa « propriété » et toute cotisation doit ouvrir droit à pension, même si celle-ci est réglée d’une manière forfaitaire. Il faut donc maintenir, pour les mono-pensionnés, le droit à pension sous la forme du versement forfaitaire unique.
C’est pourquoi nous demandons la suppression des alinéas de cet article prévoyant le remboursement des cotisations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. La suppression proposée remettrait en cause la mesure de simplification prévue à l’article 29. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 419, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 2
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
...- À l'article L. 161-5 et au premier alinéa de l'article L. 311-9 du code de la sécurité sociale, la référence : « L. 351-9 » est remplacée par la référence : « L. 161-22-2 ».
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 29 bis (nouveau)
Avant le 31 décembre 2014, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant les conditions d’application des conventions bilatérales existant en matière de retraite et évaluant les conséquences de leur mise en œuvre pour les Français ayants droit de systèmes étrangers dès lors qu’ils ne résident plus dans l’État concerné. Le rapport examine également les difficultés liées à la perception d’une pension de retraite à l’étranger. – (Adopté.)
Chapitre II
Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraite
Article 30
Tous les ans, le Gouvernement organise avec les organisations syndicales de fonctionnaires un débat sur les orientations de la politique des retraites dans la fonction publique.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 294 est présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 400 est présenté par M. Barbier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. L’article 30 prévoit l’organisation par le Gouvernement d’un débat annuel avec les organisations syndicales de fonctionnaires sur les orientations de la politique des retraites dans la fonction publique. Nous estimons que ce débat, comme beaucoup des rapports et des débats qui sont prévus dans ce texte, est superfétatoire.
En outre, si un tel débat devait avoir lieu, il relèverait plutôt de la compétence des assemblées parlementaires et non de celle du Gouvernement et des organisations syndicales.
Au reste, peut-être un tel affichage témoigne-t-il du manque de courage du Gouvernement à effectuer une réforme structurelle qui inclurait la convergence des régimes de retraite.
M. le président. L'amendement n° 400 n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 294 ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. L’article 30 tend à mettre en œuvre une recommandation de la commission Moreau, celle-ci n’ayant pu identifier aucun moment où il pouvait être débattu, au sein de la fonction publique, des orientations de la politique des retraites.
L’article 30 permettra enfin d’organiser chaque année un débat constructif sur une question qui mérite d’être abordée de façon dépassionnée. L’information de nos concitoyens en sera améliorée.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Il est effectivement important d’organiser un débat sur l’évolution des retraites dans la fonction publique. Mais il est un autre débat, d’ampleur nationale celui-là, qui est encore plus important et que nous attendons toujours puisque, bien que la loi de 2010 ait prévu qu’il se tiendrait avant la fin du premier semestre 2013, il n’a pas eu lieu. Le débat ici envisagé est un débat au rabais ! C’est la raison pour laquelle je suis pour la suppression de cet article.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 241, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Au plus tard un an après la promulgation de la présente loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, le Gouvernement organise les élections dans chacune des branches de la sécurité sociale.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Selon l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, l’article 30 a pour objet de remédier à l’absence de cadre de discussion identifié concernant les orientations de la politique de retraite dans la fonction publique entre le Gouvernement et les organisations syndicales de fonctionnaires. C’est pourquoi il tend à prévoir un cadre annuel d’échange.
Ce rendez-vous, commun aux trois fonctions publiques, vise à assurer « un suivi transparent et concerté des grands indicateurs que sont l’évolution des taux de remplacement, l’évolution moyenne des pensions, la situation financière des régimes, la comparaison de l’évolution des pensions entre hommes et femmes ».
Naturellement, nous souscrivons pleinement aux objectifs qui sont fixés à ce rendez-vous, sans pour autant être certains que ce cadre relève de la loi. Il me semble d’ailleurs que, plutôt que de créer un rendez ex nihilo, il serait plus simple d’intégrer ce débat au sein du conseil commun de la fonction publique.
Pour mémoire, ce conseil a déjà, depuis janvier 2012, une existence légale et intervient pour toute question d’ordre général commune aux trois fonctions publiques. Le cadre existant nous paraît donc suffisant.
À l’inverse, il nous semble urgent de remettre en place les élections au sein de la sécurité sociale. C’est un outil de participation imaginé par le Conseil national de la Résistance et qui reposait – et devrait encore reposer – sur un certain nombre de grands principes : l’unicité, l’universalité, la solidarité et la démocratie.
La démocratie est sans doute le principe qui a été, avec l’unicité, le plus lourdement remis en cause. C’était une exception française très innovante que de permettre aux assurés de participer directement à la gestion de leur protection sociale. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que les élections des administrateurs ont été supprimées en 1967, soit la même année que l’édiction des ordonnances qui ont scindé la gestion de la sécurité sociale en trois branches, pour être remplacées par une désignation par les syndicats représentatifs.
Mais c’est un gouvernement de gauche, celui de Pierre Mauroy, qui réintroduisit ces élections en 1982. Un an plus tard eurent lieu les élections au sein de la branche famille. Malheureusement, elles ont été les dernières ! Pourtant, aucun texte de loi n’a supprimé le principe des élections qui reste, selon nous, étroitement associé aux objectifs mêmes de la sécurité sociale.
C’est pourquoi nous proposons que, au plus tard un an après la promulgation de cette loi, le Gouvernement organise des élections dans chacune des trois branches. La gauche s’honorerait d’une telle avancée démocratique.
M. le président. L'amendement n° 414, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après les mots :
de fonctionnaires
insérer les mots :
, au sein du conseil commun de la fonction publique,
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision visant à spécifier que le débat se tiendra au sein du conseil commun de la fonction publique, afin que, comme l’a souhaité M. Favier, ne soit pas créée une nouvelle instance de concertation et que soit assurée une représentation des trois fonctions publiques : d’État, territoriale et hospitalière.
Je précise que la ministre de la fonction publique a annoncé que le débat annuel pourrait d’ailleurs se tenir dans le cadre du conseil commun de la fonction publique, qui regroupe les trois fonctions publiques.
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par M. Domeizel, est ainsi libellé :
I. - Remplacer les mots :
la fonction publique
par les mots :
les trois fonctions publiques
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les employeurs territoriaux et hospitaliers y sont représentés, pour chacun d’eux, par un membre désigné par le conseil d’administration de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Cet amendement vise à rappeler l’existence des trois fonctions publiques. Je le retire au profit de l’amendement n° 414.
M. le président. L’amendement n° 314 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 241 ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement tend à proposer l’organisation d’élections au sein de chacune des branches de la sécurité sociale par le Gouvernement. De notre point de vue, cette mesure n’a pas sa place dans le présent projet de loi. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 241 et 414 ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 241. Nous avons ce débat régulièrement : il ne me paraît pas nécessaire d’organiser de nouveau des élections qui n’ont pas eu lieu depuis plus de trente ans.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 414, qui permettra d’associer les trois fonctions publiques à la démarche engagée.
M. le président. Je mets aux voix l'article 30, modifié.
Mme Laurence Cohen. Le groupe CRC s’abstient !
(L'article 30 est adopté.)
Article additionnel après l'article 30
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le IV de l’article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’établissement public est autorisé à placer tout ou partie des fonds dont il dispose au titre du régime dans les actifs mentionnés à l’article R. 931-10-21 du code de la sécurité sociale, dans des limites fixées annuellement par le conseil d’administration et approuvées par arrêté. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
Article 31
I. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 732-58 est supprimé ;
2° Après le même article L. 732-58, il est inséré un article L. 732-58-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-58-1. – Le conseil d’administration de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole assure le suivi de l’équilibre financier du régime. Il adresse tous les trois ans aux ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget un rapport détaillant la situation financière du régime, ses perspectives d’équilibre de long terme, ainsi que les risques auxquels il est exposé. Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent alinéa.
« Sur la base du rapport mentionné au premier alinéa, le conseil d’administration de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole propose aux ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget les règles d’évolution des paramètres du régime sur les trois années à venir. Ces propositions permettent de garantir l’équilibre de long terme du régime. » ;
3° Le dernier alinéa de l’article L. 732-59 est ainsi rédigé :
« L’arrêté mentionné à l’article L. 732-60-1 ou, à défaut, le décret mentionné au dernier alinéa du même article fixe le ou les taux de cotisation. » ;
4° L’article L. 732-60 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– la première phrase est ainsi rédigée :
« Le nombre annuel de points est déterminé en fonction de l’assiette retenue pour le calcul des cotisations, prévue à l’article L. 732-59, et des valeurs d’achat fixées par l’arrêté mentionné à l’article L. 732-60-1 ou, à défaut, par le décret mentionné au dernier alinéa du même article. » ;
– au début de la seconde phrase, les mots : « Le même » sont remplacés par le mot : « Un » ;
b) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L’arrêté mentionné à l’article L. 732-60-1 ou, à défaut, le décret mentionné au dernier alinéa du même article fixe les valeurs de service et les valeurs d’achat du point de retraite. » ;
5° Après le même article L. 732-60, il est inséré un article L. 732-60-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-60-1. – Dans le cadre du plan triennal défini à l’article L. 732-58-1, le conseil d’administration de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole propose aux ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget une évolution triennale des valeurs de service du point de retraite, des valeurs d’achat du point de retraite ainsi que des taux de cotisation. L’impact de ces évolutions doit être évalué dans le rapport mentionné au second alinéa de l’article L. 732-58-1. Au vu de cette proposition, les ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget arrêtent les évolutions des paramètres précités.
« Si au cours du plan triennal, sur la base d’études actuarielles, le conseil d’administration de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole considère que l’évolution des paramètres n’est plus de nature à assurer la pérennité financière du régime, il propose aux ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget des corrections de ces paramètres sur cette période. Au vu de cette proposition, les ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget arrêtent les évolutions des paramètres précités.
« Les modifications proposées ne peuvent excéder des plafonds de variations annuelles définis par décret en Conseil d’État.
« À défaut de plan triennal permettant de garantir l’équilibre de long terme du régime, les valeurs de service du point de retraite, les valeurs d’achat du point de retraite et les taux de cotisation sont modifiés par décret. »
II (nouveau). – Le rapport mentionné au premier alinéa de l’article L. 732-58-1 du code rural et de la pêche maritime est remis pour la première fois au plus tard le 1er septembre 2015.
M. le président. L'amendement n° 242, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. L’article 31 a pour objet de réformer le pilotage du régime complémentaire obligatoire, ou RCO, des non-salariés agricoles en y associant la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, la CCMSA.
Désormais, le conseil d’administration de la CCMSA aura pour mission l’équilibre financier du régime complémentaire obligatoire. Afin d’y parvenir, il lui appartiendra d’adresser tous les trois ans aux ministres compétents un rapport détaillant « la situation financière du régime, ses perspectives d’équilibre de long terme ainsi que les risques auquel il est exposé ».
Il lui appartiendra également de proposer, s’il estime que la pérennité du régime est en cause, l’évolution des paramètres à retenir afin que le régime reste à l’équilibre.
En vérité, nous craignons que, comme nous l’avons dit à propos de l’article 3, la solution retenue pour favoriser le retour à l’équilibre ne consiste le plus souvent, pour ne pas dire systématiquement, à agir sur la valeur de service du point de retraite ou encore sa valeur d’achat, c’est-à-dire, au final, sur le montant des prestations servies.
Compte tenu de la faiblesse des pensions dont il s’agit ici, cette mesure ne nous semble pas acceptable, car elle revient à faire supporter tous les efforts aux salariés, alors même que se développe une spéculation financière jamais vue sur les produits agricoles, qui fait le bonheur de quelques-uns et le malheur de beaucoup.
L’organisation Oxfam dévoilait d’ailleurs voilà peu l’ampleur du phénomène et démontrait que cette spéculation profite non pas aux agriculteurs mais à des banquiers, tout en étant responsable, dans des proportions grandissantes, de la malnutrition ou de la sous-nutrition dans le monde.
Si l’on cherche des ressources pour assurer l’équilibre des comptes, mieux vaut taxer les revenus financiers issus de cette forme de spéculation que les puiser dans la poche des agriculteurs !
Voilà pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article 31.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. La commission émet évidemment un avis défavorable, étant précisé que cet article n’ouvre pas la voie à une réforme systémique, mais associe simplement la MSA au pilotage du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles, ce qui constitue une avancée importante.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 243, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 5
1° Première phrase
Après le mot :
agricole
insérer les mots :
, après avis de l’ensemble des organisations syndicales agricoles représentatives au plan national,
2° Seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à notre amendement précédent.
L’article 31 tend à mettre en place divers mécanismes de pilotage et d’encadrement des évolutions du régime des exploitants agricoles géré par la CCMSA. Il vise à conforter cette caisse centrale dans sa fonction de pilotage du régime de retraite complémentaire obligatoire des exploitants agricoles, comme cela vient d’être rappelé, et à modifier et préciser la mission de son conseil d’administration.
Cet article s’appuie sur le constat du déficit chronique de cette caisse, essentiellement dû à la chute continue du nombre d’exploitants de notre pays. C’est une réalité, le régime compte aujourd’hui seulement un actif pour au moins trois retraités, ce qui explique que les recettes provenant des cotisations ne représentent que 12,8 % de ses ressources.
Ces dispositions ont donc pour objet d’envisager une évolution des paramètres du régime, qu’ils portent sur le taux de cotisation, la valeur d’achat et la valeur de service ou sur la possibilité de mettre en place une modulation pour le secteur agricole, sans en préciser les termes.
Par conséquent, si j’ai bien compris, ces propositions seront formulées par le conseil d’administration de la MSA. À partir de ces propositions, un arrêté ou un décret sera pris pour fixer le nouveau taux de cotisation.
Pour notre part, nous estimons que, dans une démarche de renforcement de la démocratie sociale, il conviendrait d’affirmer la nécessité d’une concertation avec les syndicats agricoles représentatifs à l’échelon national, afin qu’ils soient associés aux perspectives d’évolution du régime de retraite complémentaire obligatoire telles qu’elles seront discutées au niveau de la caisse centrale de la MSA.
Les acteurs concernés doivent être consultés. C’est la raison pour laquelle nous avons proposé tout à l’heure un amendement en faveur du renouvellement des élections au sein des organismes de sécurité sociale. On ne peut pas toujours parler de citoyenneté, de démocratie, et ne pas prendre les mesures cohérentes au regard de ces objectifs. Cela vaut en matière agricole comme en toute autre matière.
M. le président. L'amendement n° 344 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5
I. – Première phrase
Après le mot :
agricole
insérer les mots :
, après avis de l’ensemble des organisations syndicales agricoles à vocation générale représentatives nationalement,
II. – En conséquence, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement est quasi identique à celui qui vient d’être présenté par M. Watrin.
L’article 31 élargit les missions de la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole : chargée jusqu’à présent d’une simple gestion administrative, la CCMSA assurera désormais un réel pilotage. Ainsi, il est proposé que cette caisse puisse recommander tous les trois ans des évolutions des paramètres du régime aux ministres de tutelle, notamment pour ce qui concerne le taux de cotisations, la valeur d’achat et la valeur de service.
Cette évolution a pour but d’aligner les prérogatives de la MSA sur celles des autres régimes complémentaires professionnels, comme le RSI – régime social des indépendants – ou l’IRCANTEC – Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires des collectivités publiques –, qui disposent d’un véritable pouvoir de pilotage.
Pour notre part, chers collègues du groupe CRC, nous saluons cette évolution. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas voté votre amendement n° 242. Toutefois, nous considérons comme vous qu’il faut s’interroger sur la concertation en elle-même. En effet, le pilotage proposé via cet article ne saurait être envisagé sans une participation accrue des syndicats agricoles.
À l’Assemblée nationale, le député Germinal Peiro a dirigé un groupe de travail consacré aux retraites agricoles, dont les conclusions de ses membres ont fortement influé sur le contenu du présent projet de loi en ce qui concerne les retraites agricoles. Ce groupe de travail est notamment à l’origine des solutions de financement pour ces retraites. Or, en son sein, les organisations et syndicats agricoles ont joué un rôle majeur pour identifier les niches fiscales et sociales et pour développer des pistes de financement. Leur connaissance fine des réalités sociales et financières doit continuer à être mise à contribution pour garantir l’efficacité et la justice du système des retraites agricoles.
C’est pourquoi mon amendement tend à établir la concertation, en amont, entre les syndicats agricoles représentatifs à vocation nationale, d’une part, et la MSA, d’autre part, quant aux évolutions des régimes de retraite complémentaire obligatoire. L’avis de ces organisations devrait être sollicité avant la remise du rapport de la MSA aux ministres de l’agriculture, des affaires sociales et du budget.
M. le président. L'amendement n° 244, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 5, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et le niveau des prestations servies
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. C’est peu dire que les retraités agricoles perçoivent des pensions modestes ! Du reste, cette réalité a déjà été rappelée plusieurs fois dans cet hémicycle. La retraite moyenne des exploitants s’élève à 800 euros par mois et celle de leurs épouses à 500 euros. Qui niera qu’il est difficile de vivre dignement et même de survivre avec une telle pension, presque inférieure de moitié au seuil de pauvreté ?
Nous sommes encore loin de l’objectif fixé par le candidat François Hollande : porter à 75 % du SMIC le montant des retraites des carrières complètes des chefs d’exploitation. Cet objectif ambitieux avait déjà été affiché avec la loi de 2003 ; hélas, rien n’a jamais été mis en œuvre pour qu’il soit atteint !
Au vu de cette réalité, nous avons tenu à rappeler l’objectif en question, d’autant que l’article 31 semble avoir pour seule ambition d’assurer l’équilibre du régime. Cet équilibre est certes utile, mais encore faut-il qu’il profite aux assurés. Il ne s’agit pas simplement de rassurer la Commission européenne ou les marchés financiers ! Or nous avons l’impression que c’est cela qui est visé.
De fait, comme à l’article 3, la recherche de l’équilibre ne semble pas répondre à un quelconque but. À nos yeux, si elle est indispensable, c’est avant tout en vue de garantir le niveau des prestations servies. Disposer de comptes sociaux à l’équilibre tout en constatant un effondrement du montant des pensions et du niveau de vie des retraités n’est absolument pas acceptable d’un point de vue social. J’ose espérer que cette analyse est partagée sur l’ensemble de ces travées !
La réduction des droits et des pensions et l’extension des décotes pour garantir cet équilibre ne sont pas plus acceptables. C’est pourquoi, dans la continuité de ce que nous n’avons cessé de dire, nous souhaitons voir préciser dans le présent texte que le maintien du niveau des prestations servies constitue également un objectif majeur du conseil d’administration de la Caisse centrale de la MSA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. L’article 31, outre qu’il confie au conseil d’administration de la CCMSA une mission de pilotage de la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles, lui attribue un rôle de conseil auprès du Gouvernement en la matière.
La demande des auteurs des amendements nos 243 et 344 rectifié, quasi identiques, me semble satisfaite par la composition même du conseil d’administration de la CCMSA, qui comprend des représentants des exploitants, des représentants des salariés et des représentants des employeurs agricoles.
M. Gérard Longuet. Exact !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Les principales sensibilités exprimées par les organisations syndicales y seront représentées. Celles-ci y feront valoir leurs positions. Aussi la commission émet-elle un avis défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° 244 tend à préciser que les propositions adressées par conseil d’administration de la CCMSA aux ministres compétents visent à garantir le niveau des prestations servies, au même titre que l’équilibre de long terme du régime de retraite complémentaire obligatoire.
À mon sens, il ne faut pas opposer, d’un côté, équilibre de long terme et, de l’autre, niveau de prestations servies à celles et ceux qui ont cotisé durant toute leur carrière. Il n’est pas question d’aboutir, avec cet article, à une baisse du niveau des pensions servies aux non-salariés agricoles retraités. Ce projet de loi s’inscrit bien dans une logique de revalorisation des pensions les plus faibles, qui, à terme, doivent atteindre 75 % du SMIC.
Je ne suis pas convaincue de la nécessité d’inscrire la précision proposée dans l’amendement n° 244 et m’en remettrai donc, sur celui-ci, à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Sur les amendements nos 243 et 344 rectifié, le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les raisons que Mme Demontès vient d’avancer.
Sur l’amendement n° 244, je souscris aux arguments de Mme la rapporteur, et j’émets, quant à moi, un avis défavorable.
L’objectif de cette disposition est clair : garantir le niveau des prestations servies. Tel est d’ailleurs le but assigné à l’ensemble de régimes de retraites. Le Gouvernement a la volonté de l’atteindre, à travers le dispositif de pilotage, en faveur duquel les sénateurs du groupe CRC n’ont d’ailleurs pas voté, mais qui a précisément été mis en place à cette fin.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur l’amendement n° 243.
M. Gérard Longuet. Sous couvert de démocratiser le fonctionnement du conseil d’administration de la caisse centrale de la MSA, les amendements nos 243 et 344 rectifié tendent à imposer la consultation de toutes les organisations syndicales agricoles représentatives à l’échelle nationale. Mme le rapporteur et Mme la ministre ont eu tout à fait raison d’en demander le rejet.
La MSA est un organisme vivant. Elle est composée de représentants du monde agricole désignés par le biais d’élections qui, à ma connaissance, sont régulièrement tenues et qui permettent de faire émerger des personnalités issues du monde agricole et disposant d’une compétence reconnue.
M. Antoine Lefèvre. Eh oui !
M. Gérard Longuet. Sur le terrain de l’action sociale, ces élus sont parfaitement aptes à gérer le système, à se pencher sur son avenir et à entretenir le dialogue avec le Gouvernement.
Aussi, nous ne voyons pas pourquoi nous sanctionnerions la MSA, dont les instances sont déjà représentatives du monde agricole.
Avec l’amendement n° 244, qui tend à compléter la dernière phrase de l’alinéa 5 de l’article 31, nous rouvrons un débat qui illustre tout ce que la rédaction du Gouvernement a d’équivoque.
Madame le ministre, cette disposition renvoie au rapport mentionné au premier alinéa, qui, je le rappelle, est rédigé par le conseil d’administration de la CCMSA. Elle précise que cet organe « propose aux ministres chargés de l’agriculture, de la sécurité sociale et du budget les règles d’évolution des paramètres du régime sur les trois années à venir ». Or cette formulation suscite un vrai questionnement.
Nous savons tous que, pour des raisons évoquées sur l’ensemble de ces travées, la caisse de retraite du monde agricole subit un déséquilibre structurel.
M. Claude Domeizel. Certes !
M. Gérard Longuet. Je ne reviendrai pas sur les explications que nous avons développées hier soir. Nous le savons, la démographie agricole est une pyramide qui repose sur sa pointe, ce qui déstabilise évidemment le système de retraites. Le monde agricole n’en a pas moins créé des richesses. Surtout, par une générosité démographique que les statistiques confirment, et qui remonte aux Trente Glorieuses, il a apporté aux secteurs de l’industrie et des services de très nombreux actifs, donc de très nombreux cotisants.
Ainsi, la solidarité nationale tend non seulement à compenser de réelles difficultés, mais encore à reconnaître l’apport du monde rural à la société tout entière, par les gains de productivité agricole et par l’apport démographique des campagnes. Je le répète, le monde agricole a contribué à asseoir l’équilibre d’autres régimes de retraites, qu’il s’agisse des salariés ou des professions libérales.
Cela étant, qu’entend le Gouvernement par « règles d’évolution des paramètres » ? Le conseil d’administration de la CCMSA sera-t-il contraint par ces critères que sont les taux et durées de cotisation ou les prestations servies ?
Sans approuver l’amendement n° 244, déposé par nos collègues communistes, je comprends sa légitimité. Quel est le paramètre ajustable ? S’il y avait un régime par points, comme le préconisent nos collègues du groupe UDI-UC, on pourrait se fonder sur la valeur du point. Mais vous avez récusé le régime par points : n’en parlons plus !
Sur quels critères le conseil d’administration de la CCMSA peut-il diable jouer, sachant que les perspectives démographiques sont négatives pour le monde agricole ? Je le répète, il ne dispose guère que de l’allongement de la durée des cotisations, de l’augmentation de leur montant et du niveau de prestations fournies.
Madame la ministre, vous pourriez me rétorquer que j’oublie un dernier paramètre : la subvention de l’État. J’ai évoqué hier l’ancien BAPSA, devenu en 2005 le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA. Mais la Caisse peut-elle jouer sur ce critère ? Non ! C’est au Parlement de fixer le niveau d’une subvention publique.
Ainsi, le dialogue institutionnalisé par le présent texte présente une certaine ambiguïté. En apparence, la responsabilité est renvoyée au monde agricole. En réalité, ce dernier est tributaire de l’effort public, et le Gouvernement le sait parfaitement.
Je ne reviendrai pas sur la formule que le projet de loi de financement de la sécurité sociale nous rappellera dans quelques jours. Vous prédisez l’amélioration des retraites agricoles, qui correspondait à une promesse de votre candidat. Soit ! Je remarque cependant que ce processus repose uniquement sur la surfiscalisation des revenus agricoles, pesant notamment sur les GAEC – groupements agricoles d’exploitation en commun – et toutes les formes d’action collective des agriculteurs…
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, pour explication de vote.
M. Jean Boyer. Mes chers collègues, pour ma part, je me conterai de faire un rappel, que je compléterai néanmoins par un vœu.
En 1945, quand la France comptait dix à douze fois plus d’agriculteurs qu’aujourd’hui, tous visaient un seul et même objectif : constituer un tissu mutualiste ! Ainsi, dans toutes les communes de notre pays, qu’elles comptent 30 ou 20 000 habitants, un délégué était chargé de représenter l’ensemble des exploitants. C’est cela, le mutualisme !
Le nombre d’agriculteurs a considérablement baissé du fait des restructurations qu’a connues le monde agricole ; la mécanisation, en particulier, a entraîné des bouleversements considérables. L’évolution que le monde agricole a connue au cours des cinquante dernières années a été au moins aussi profonde que celle qu’il avait subie depuis le début du XIXe siècle.
Madame la ministre, je vous parle simplement, en tant qu’ancien agriculteur d’une zone de montagne. Aujourd’hui, Dieu merci, il n’y a pas de terre sans hommes, mais il y a des hommes qui livrent un combat permanent. Pourquoi ? Parce que, aujourd’hui, le régime forfaitaire de la MSA n’existe plus. Le seuil qui permettait d’en bénéficier ne correspond plus qu’à ceux qui sont dans un insoutenable état de précarité.
Le débat autour de cet amendement m’amène à rappeler qu’un tissu mutualiste existe encore en France, même s’il n’a plus le même aspect qu’il y a seulement dix ans. La mutualité sociale agricole n’a pas échappé à une évolution qui la conduit à ressembler aujourd’hui à une grande administration. Auparavant, chaque département bénéficiait d’un service spécifique, et nous connaissions personnellement le responsable de chaque secteur.
La MSA devient une grande maison, mais il nous revient de tout faire pour qu’elle garde sa vocation mutualiste, c'est-à-dire pour qu’un homme de la France d’en bas – une formule qui vous est chère, monsieur le président – bénéficie de la crédibilité indiscutable d’un organisme national.
Voilà ce que je tenais à dire en cet instant, et j’espère que vous me pardonnerez le caractère improvisé de cette intervention spontanée !
M. Gérard Longuet. Elle venait du cœur !
M. Jean Boyer. La MSA est un exemple et nous devons veiller à la conserver ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. Gérard Longuet applaudit également.)
Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je voudrais vous faire part du mécontentement qui monte du monde agricole. Les agriculteurs sont révoltés et ne comprennent plus la charge que représentent leurs cotisations, surtout quand ils les mettent en regard des prestations qui sont finalement versées aux retraités.
Tous nous disent qu’ils sont ulcérés, et leurs différentes manifestations expriment un profond malaise. La profession ressent particulièrement mal le fait que lui soient sans cesse imposées de nouvelles taxes, ainsi que l’ont montré les événements qui se sont récemment déroulés en Bretagne, et qui couvent dans d’autres territoires.
Il est important, à mon sens, d’adresser un signe aux agriculteurs, notamment à travers les retraites. Or que leur propose-t-on ? Un rapport ! On voit bien que cette réforme ne répond pas aux problèmes importants que rencontrent à la fois cette profession et son régime de retraites.
On n’échappera pas à une véritable réforme structurelle, qui devra prendre en compte l’ensemble des différentes caisses. Il apparaît clairement, à travers cet article 31, mais aussi de l’article 32, qui concerne les professions libérales, que votre réforme, madame la ministre, n’est pas à la hauteur des défis.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 244.
M. Jean Desessard. Cet amendement, proposé par nos camarades du groupe CRC, tend à compléter le texte de l’article en précisant que les propositions faites par le conseil d’administration de la CCMSA sur la base de son rapport devront non seulement porter sur les règles d’évolution des paramètres du régime et être de nature à garantir l’équilibre de celui-ci à long terme, mais garantir aussi le montant des prestations servies, ce qui, à l’évidence, intéresse directement les usagers.
Mme Laurence Cohen. Exactement !
M. Jean Desessard. Cet amendement vise donc à placer le regard au plus près du terrain, de façon que ceux qui émettent les propositions ne se cantonnent pas aux schémas statistiques visant de manière abstraite, conceptuelle, à l’équilibre du régime, et se dispensent d’examiner aussi les conséquences qu’emportent leurs analyses sur ceux qui vont percevoir les pensions.
Bien sûr, on peut penser a priori que le rapport sur les paramètres intégrera des éléments sur les prestations, mais cet amendement, qui tend à prendre en compte l’évaluation des prestations issue de ces analyses, est de bon sens.
Par ailleurs, autant j’ai apprécié le plaidoyer de M. Boyer sur le monde agricole et son évolution, autant je crois, monsieur Savary, qu’il faudrait tout de même examiner avec attention, dans la période de crise que traversent les agriculteurs, les modalités de production qui prévalent aujourd'hui dans l’agriculture. En fait, il y a maintenant un ensemble d’agriculteurs qui ne relèvent plus du modèle agricole traditionnel : ce sont des gens qui mettent en place des équipements et qui n’entretiennent presque plus aucun rapport avec la terre et l’animal.
M. Jean-François Husson. C’est un cliché !
M. Jean Desessard. Une émission récente a montré que l’industrie agroalimentaire française refusait la traçabilité des produits agricoles français. Pourquoi donc ? On pourrait imaginer qu’elle voudrait au contraire la défendre… Mais non ! Elle la refuse parce qu’elle entend continuer à jouer sur les différentes productions d’Europe et même d’autres pays, afin de produire à moindre coût dans le cadre d’un élevage intensif, ne respectant plus ni l’animal ni le consommateur.
M. Jean-François Husson. Je ne sais pas ce que vous fumez, mais il faut arrêter ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. Je vous le dis, les exploitations agricoles ne parviendront pas à se développer ainsi. Elles doivent au contraire respecter le consommateur et revenir à une agriculture de qualité et de proximité.
Aujourd’hui, quel est l’avenir économique de la France, sinon la qualité, qui permet au consommateur achetant un produit français de savoir qu’il s’agit d’un bon produit ? Il faut que s’installe l’idée que les Français savent produire dans des conditions garantissant la qualité, qu’ils bénéficient d’un système de contrôle tel qu’on peut être certain de la qualité d’un produit français lorsqu’on l’achète. C’est cela que nous devons défendre, car c’est ainsi que nous retrouverons une activité économique intéressante.
M. Jean-François Husson. Il dit tout et son contraire, mais il est content !
M. Jean Desessard. En prétendant copier les pays en développement, en empruntant leurs modes de production, de manière que cela coûte le moins cher possible, on ne fera qu’accélérer la crise. Il faut au contraire revenir à des valeurs fondamentales de défense de la qualité et de la proximité.
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, pour explication de vote.
M. Jean Boyer. Je voudrais dire à mon collègue et ami Jean Desessard qu’il existe en France différents types d’agriculture.
Mme Françoise Férat. Bien sûr !
M. Jean Boyer. Il y a de grandes exploitations, s’étendant sur des centaines d’hectares, et puis il y a encore des éleveurs, particulièrement en zone de montagne – je pense à la Haute-Loire, dont le président du conseil général est des nôtres –, qui traient les vaches à la main, il y a des régions où existe l’agriculture familiale reste très présente.
Nous avons voté l’incitation au développement des circuits courts. De quoi s’agit-il ? De faire en sorte que les produits aillent plus directement de la France rurale à la France urbaine, du producteur au consommateur. La réglementation permet à nos collectivités locales d’accorder aux produits de proximité, grâce au coefficient référence, une sorte de priorité lors des adjudications de marchés.
J’ajoute que ce sont tout de même les consommateurs qui font la loi du marché. Qu’on le veuille ou non, les candidats à la consommation de produits bio, bénéficiant de la véritable traçabilité offerte par cette filière, sont encore peu nombreux.
M. Jean Desessard. Mais leur nombre augmente, mon cher collègue !
M. Jean Boyer. Tout le monde, y compris moi-même, aspire à consommer des produits naturels, mais les prix sont parfois dissuasifs.
Il reste que nous avons, ensemble, mené à bien une démarche de valorisation des circuits courts. Mon propos ne visait pas à contredire mon collègue Jean Desessard, que j’apprécie, mais bien à compléter ses paroles : les premiers pas ont été réalisés, et nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à adhérer à la teneur de son discours.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je souhaite répondre à M. Desessard.
On peut, certes, partager l’idée que l’agriculture est très diversifiée et que certaines zones sont particulièrement difficiles, comme la montagne ou les zones d’élevage. Je viens d’un département où se trouvent des zones d’élevage et où s’est mis en place un système agro-industriel particulièrement performant, qui permet de produire à base de biomasse ce que l’on produit aujourd’hui à base de pétrole, tout en créant des emplois et des richesses qui vont dans le sens du développement durable. J’espère donc que mon collègue les soutiendra,…
M. Jean Desessard. On ne soutiendra pas le projet de ferme des mille vaches !
M. René-Paul Savary. … de même que les dérogations fiscales dont ils bénéficieront sans doute avec la prochaine loi de finances.
Rappelons que ces projets contribuent à réduire le déficit de notre balance commerciale tout en créant des emplois non délocalisables. Il y a là la possibilité de développer des savoir-faire qui nous permettront peut-être, demain, de redresser notre balance commerciale.
Il faut donc se garder des idées toutes faites, qui ne correspondent pas à la réalité économique du terrain.
M. Jean Desessard. Mais vous n’êtes pas compétitifs par rapport à l’Allemagne et aux pays de l’Est !
M. le président. L'amendement n° 345 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I.- Alinéas 6 et 7
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
« 3° L’article L. 732-59 est ainsi rédigé :
« Art. L. 732-59. - I. – Les cotisations visées à l’article L. 732-58 sont calculées sur la totalité des revenus professionnels ou de l’assiette forfaitaire obligatoire des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, tels que pris en compte aux articles L. 731-14 à L. 731-21. Elles sont fixées de manière progressive dans les conditions prévues au présent article :
« 1° Pour les personnes visées à l’article L. 732-56 dont les revenus sont inférieurs à 1820 fois le montant du salaire minimum de croissance en vigueur au 1er janvier de l’année précédente, le taux de prélèvement est égal à 4,5 % ;
« 2° pour les personnes visées à l’article L. 732-56 dont les revenus sont supérieurs à 1820 fois le montant du salaire minimum de croissance en vigueur au 1er janvier de l’année précédente et inférieurs au plafond annuel prévu à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, le taux de prélèvement est égal à 6 % ;
« 3° pour les personnes visées à l’article L. 732-56 dont les revenus sont supérieurs au plafond annuel prévu à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, le taux de prélèvement est égal à 9 %.
« II. – Les cotisations sont dues par les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole visés au I de l’article L. 732-56 à compter du 1er janvier 2003.
« III. – Les frais de gestion visés à l’article L. 732-58 sont couverts par un prélèvement sur le montant des cotisations, dans une limite fixée par décret.
« IV. – En aucun cas, le revenu professionnel pris en compte pour l’attribution annuelle de points portés au compte de l’assuré, ne peut être supérieur au plafond mentionné à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. »
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour les caisses de mutualité sociale agricole du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Actuellement, 74 % des cotisants agricoles ont un revenu inférieur au SMIC annuel mais doivent acquitter une cotisation minimum calculée sur ce SMIC. La majorité des paysans subissent donc une surcotisation, et celle-ci est parfois très lourde. Il convient de remédier à cette situation. C’est l’objet du présent amendement, par lequel est proposé un système progressif de prélèvement.
Cet amendement vise ainsi à supprimer l’assiette minimum de niveau de cotisation, afin d’éviter une surcotisation des plus modestes. Ses rédacteurs souhaitent tendre vers un équilibre budgétaire en réajustant les taux de cotisation pour les revenus les plus élevés, tout en plafonnant l’attribution de points jusqu’à un certain revenu. En effet, les hauts revenus sont aujourd’hui très clairement favorisés puisque, soumis au même taux de cotisation, ils bénéficient de points sans aucun plafonnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement est dans la ligne de l’amendement n° 344 rectifié en ce sens qu’il vise à instituer la progressivité dans les cotisations de retraite agricole, cette fois pour le régime de RCO des non-salariés. Toutefois, il conduit à ne plus faire de distinction entre les exploitants et les collaborateurs familiaux, qui ne jouissent pas d’un niveau de revenu égal et qui, aujourd’hui, ne cotisent pas sur la même assiette. Son adoption, en outre, augmenterait très sensiblement le taux de cotisation, qui est à l’heure actuelle de 3 %.
Je ne suis pas certaine qu’il faille augmenter ainsi les prélèvements sur les non-salariés agricoles alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit des recettes spécifiques pour financer l’extension de la retraite complémentaire obligatoire, ainsi que nous le verrons dès la semaine prochaine.
En outre, sur un plan formel, la fixation des taux relève du pouvoir réglementaire.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 31.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l’article 31.)
Article 32
I. – Le chapitre Ier du titre IV du livre VI du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 641-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 641-2. – I. – La Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales a pour rôle :
« 1° D’assurer la gestion du régime d’assurance vieillesse de base des professionnels libéraux et la gestion des réserves du régime, dans les conditions prévues au présent titre. Elle établit à cette fin le règlement du régime de base, qui est approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ;
« 2° D’animer et de coordonner l’action des sections professionnelles ;
« 3° D’exercer une action sociale et d’assurer la cohérence de l’action sociale des sections professionnelles ;
« 4° (Supprimé)
« 5° De créer tout service d’intérêt commun à l’ensemble des sections professionnelles ou à certaines d’entre elles ;
« 6° De s’assurer des conditions de maîtrise des risques pour la gestion du régime de base pour les sections professionnelles ;
« 7° D’arrêter le schéma directeur des systèmes d’information de l’organisme mentionné à l’article L. 641-1.
« Le conseil d’administration de la caisse nationale exerce, au titre des attributions énoncées aux 1° à 7°, un pouvoir de contrôle sur les sections professionnelles. Il est saisi pour avis, dans le cadre de ses compétences, de tout projet de mesure législative ou réglementaire ayant des incidences sur l’équilibre financier du régime d’assurance vieillesse de base, des régimes de retraite complémentaire et des régimes d’assurance invalidité-décès des professions libérales, dans les conditions prévues à l’article L. 200-3.
« Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article. » ;
2° Après l’article L. 641-3, il est inséré un article L. 641-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 641-3-1. – I. – Le directeur est nommé par décret, pour une durée de cinq ans renouvelable une fois, sur proposition du conseil d’administration, à partir d’une liste de trois noms établie par le ministre chargé de la sécurité sociale. Avant ce terme, il ne peut être mis fin à ses fonctions qu’après avis favorable du conseil à la majorité des deux tiers.
« II. – Le directeur dirige la caisse nationale. Il recrute le personnel de la caisse nationale et a autorité sur lui.
« III. – L’agent comptable est nommé par le conseil d’administration de la caisse nationale. » ;
2° bis (nouveau) L’article L. 641-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 641-4. – La Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales est administrée par un conseil d’administration composé des présidents de ses sections professionnelles et de six représentants des organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales.
« Chaque président de section peut être suppléé par un membre du conseil d’administration de sa section professionnelle.
« Chaque président de section ou, le cas échéant, son suppléant dispose d’un nombre de voix fixé annuellement par le conseil d’administration de la caisse nationale en fonction du nombre de personnes immatriculées dans chaque section professionnelle.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article et notamment les conditions de désignation des représentants des organisations syndicales et la fixation du nombre de voix de chacun des administrateurs. » ;
3° La section 1 est complétée par un article L. 641-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 641-4-1. – I. – L’État conclut avec la caisse nationale, pour une période minimale de quatre ans, un contrat pluriannuel comportant des engagements réciproques.
« Ce contrat détermine notamment des objectifs de qualité de gestion communs aux régimes de base et aux régimes complémentaires mentionnés aux articles L. 644-1 et L. 644-2. Pour le régime de base, le contrat détermine des objectifs pluriannuels de gestion et les moyens de fonctionnement dont disposent la caisse nationale et les sections professionnelles pour les atteindre ainsi que les actions mises en œuvre à ces fins par chacun des signataires.
« II. – La mise en œuvre du contrat pluriannuel fait l’objet de contrats de gestion conclus entre la caisse nationale et chacune des sections professionnelles.
« III. – Un décret en Conseil d’État détermine la périodicité, le contenu et les signataires du contrat pluriannuel et des contrats de gestion. » ;
4° Les deux derniers alinéas de l’article L. 641-5 sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Elles peuvent, dans les conditions prévues par un règlement élaboré par la caisse nationale et approuvé par décret, exercer une action sociale.
« Les statuts des sections professionnelles, conformes aux statuts types approuvés par décret, sont soumis à l’approbation du conseil d’administration de la caisse nationale.
« Ils sont réputés approuvés, à défaut d’opposition par le ministre chargé de la sécurité sociale, dans un délai d’un mois à compter de leur réception. » ;
5° La section 2 est complétée par un article L. 641-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 641-7. – I. – Les sections professionnelles peuvent créer entre elles des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou des groupements d’intérêt économique. La création d’un groupement fait l’objet d’une convention constitutive, qui doit être approuvée par les conseils d’administration des sections concernées et par l’autorité compétente de l’État.
« L’association ou le groupement d’intérêt économique est dirigé par un directeur, choisi parmi les directeurs des sections concernées, et est doté d’un agent comptable, choisi parmi les agents comptables desdites sections.
« II. – Sous réserve d’adaptations prévues par décret en Conseil d’État, les dispositions du présent code applicables aux sections professionnelles sont applicables à leurs groupements. »
II (nouveau). – Le directeur de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales en poste à la date d’entrée en vigueur de la présente loi est réputé avoir été nommé dans les conditions prévues à l’article L. 641-3-1 du code de la sécurité sociale et est nommé pour cinq ans à compter de cette date.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 295 est présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 355 est présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 380 rectifié est présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 295.
M. Jean-Noël Cardoux. L’article 32 vise d’une part, à mettre sous tutelle la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, la CNAVPL, en prévoyant la nomination de son directeur par décret à partir d’une liste de trois noms déterminée par le ministre chargé de la sécurité sociale, et, d’autre part, à fixer un contrat d’objectifs et de moyens pour quatre ans.
Je rappelle que cette caisse présente un excédent de 15 milliards d’euros et que ses réserves lui assurent dix ans d’autonomie. On peut donc s’interroger sur la démarche qui sous-tend cet article, d’autant que le chiffre que je viens de vous citer, mes chers collègues, prouve une gestion rigoureuse et indépendante de cette même caisse. Par ailleurs, le fait que la plupart des professionnels exerçant une activité libérale prennent leur retraite à soixante-cinq ans montre qu’un recul de l’âge de départ à la retraite permet de dégager des excédents.
Alors, pourquoi toucher à cette caisse ? Tout simplement parce qu’il s’agit de professions libérales et parce qu’il ne faudrait pas que vienne à d’autres l’envie d’imiter un système qui marche, car cela n’irait pas dans l’air du temps, qui promeut un assistanat général. Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage !
Cela étant, au cours des dernières années, la CNAVPL a subi – excusez du peu ! – quatre contrôles de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, et deux contrôles de la Cour des comptes. Forcément, on trouve toujours des arguments pour reprendre la gouvernance de cette caisse, et donc pour mettre la main sur le trésor de guerre que sa gestion rigoureuse lui a permis de constituer.
Je voudrais également rappeler que certains régimes ayant suivi ce modèle concentré ne fonctionnent pas bien. Je prendrai l’exemple du sinistre régime social des indépendants, le RSI, récemment qualifié par la Cour des comptes de « catastrophe industrielle ».
Je citerai quelques chiffres pour illustrer mon propos.
Si l’on compare les frais de gestion, ceux de la Caisse autonome de retraite des médecins de France, – mes collègues médecins qui sont présents dans l’hémicycle apprécieront ! – s’élèvent à 1,3 % des cotisations, contre 5,8 % pour le RSI.
Pour ce qui concerne les impayés, ils représentent 2,2 % des cotisations de la caisse précitée, contre 22,4 % de celles du RSI.
Voilà l’exemple d’un régime centralisé soumis à un contrôle de l’État – le directeur est nommé par ce dernier – et qui ne fonctionne pas.
Or ce que le Gouvernement propose, c’est de transférer le même système à une caisse qui, elle, fonctionne bien, qui ne demande rien à personne et qui dégage des excédents !
Je veux bien que ce soit une nouvelle façon de gouverner le pays, mais, en tout cas, ce n’est pas la nôtre ! Telle est la raison pour laquelle le groupe UMP a déposé cet amendement de suppression de l’article 32. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Roche, pour présenter l'amendement n° 355.
M. Gérard Roche. Comme le précédent, cet amendement a pour objet de supprimer l’article 32 qui réforme les missions et la gouvernance de la CNAVPL.
Les professionnels concernés craignent que cette réforme n’aboutisse à une mise sous tutelle par l’État des caisses de retraite des libéraux.
En effet, l’article 32 a pour objet de compléter et de modifier le code de la sécurité sociale, afin de préciser les compétences de la CNAVPL et de son conseil d’administration.
Il vise à encadrer les compétences du directeur et les modalités de sa nomination, ce qui soulève un problème, et à mettre en place les bases d’une contractualisation avec l’État au moyen d’un document contractuel signé pour quatre ans avec ladite caisse, et décliné en contrats de gestion entre celle-ci et les sections professionnelles.
L’article 32 tend également à préciser que les statuts des sections professionnelles devront être conformes à des statuts types, approuvés par décret, afin d’en simplifier la gestion.
Enfin, il prévoit la possibilité de créer des groupements de moyens entre les sections, avec une gouvernance ad hoc.
Les professionnels libéraux craignent que, sous couvert de bonne gestion, cet article ne soit en réalité qu’un moyen de remettre en cause l’indépendance et l’autonomie de leur régime.
Ils nous ont aussi fait part de leurs craintes de voir l’État leur dicter ses choix et se mettre en position de gérer les réserves significatives qu’ils ont constituées depuis trente ans grâce à leur seul effort en matière de cotisations.
Les caisses de retraite libérales ont aujourd’hui les frais de gestion les plus bas de tous les organismes de sécurité sociale et présentent les meilleurs résultats. À l’inverse des autres organismes qui sont centralisés, avec une caisse nationale et des caisses de base, elles ont une organisation décentralisée qui s’appuie sur les caisses professionnelles autonomes. La caisse nationale est l’émanation des caisses professionnelles, et son conseil d’administration est composé des présidents des caisses.
Afin de préserver ce modèle qui fonctionne bien, il convient de supprimer l’article 32 et de laisser la priorité à la concertation en cours entre les représentants des actifs libéraux et le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l'amendement n° 380 rectifié.
Mme Françoise Laborde. L’article 32 réforme profondément la gouvernance de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales.
Or nous ne comprenons pas très bien les raisons d’une telle réforme. Pourquoi vouloir remettre en question l’autonomie de gestion du système de retraites des professionnels libéraux ?
Vous le savez, mes chers collègues, ces derniers sont très inquiets. Ils craignent que l’organisation proposée ne dégrade la gestion de leur caisse. Le modèle qui nous est soumis est calqué sur la réforme du RSI. Force est de constater que la création de ce régime, qui devait permettre de réaliser des économies d’échelle en termes de gestion et de moyens humains et de garantir une meilleure information des assurés, a finalement eu l’effet inverse. Elle a conduit à une dégradation de la qualité de service pour les assurés et à un déséquilibre entre charges et produits qui s’est élevé, entre 2007 et 2010, à environ 4,5 milliards d’euros chaque année.
Dans un rapport du mois de septembre 2012, la Cour des comptes a d’ailleurs dénoncé une « situation qui a abouti à faire du RSI, cinq ans après [la] fusion [de certaines caisses de protection sociale], une structure plus coûteuse et moins efficace que les caisses qui l’ont précédé. »
Aussi, nous vous proposons, mes chers collègues, de supprimer l’article 32.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ces trois amendements ont pour objet la suppression de l’article 32, qui tend à améliorer l’organisation des régimes de retraite de base et complémentaire des professions libérales.
Cet article vise en particulier à renforcer le rôle et les moyens de la CNAVPL, à encadrer les compétences et les modalités de nomination de son directeur et à permettre une contractualisation entre l’État et cette même caisse.
Je tiens à préciser, comme le fera certainement Mme la ministre, qu’il n’est en aucun cas question de ponctionner les réserves de la Caisse nationale. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mes chers collègues, je n’ai pas beaucoup abusé de la parole pendant ces journées de débat sur le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites…
M. Jean Desessard. C’est bien dommage !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. J’ai dit l’essentiel, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Avec clarté !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. En cet instant, je voudrais rappeler les limites du dispositif actuel.
La loi d’août 2003 portant réforme des retraites a révisé les règles de fonctionnement du régime de retraite de base des professions libérales, en le transformant, à compter du 1er janvier 2004, en un régime unique proportionnel par points.
L’objectif était d’accroître l’équité du régime de base et de renforcer son pilotage pour lui permettre de faire face aux conséquences du vieillissement démographique de la catégorie professionnelle concernée, vieillissement qui touche d’ailleurs également d’autres professions.
La réforme de 2003 a ainsi cherché à renforcer la CNAVPL en tant que caisse nationale, en lui conférant un rôle d’animateur du réseau des dix sections professionnelles. Force est de constater que, en pratique, le rôle de la Caisse nationale demeure pour le moins limité, celle-ci ne faisant qu’un faible usage de ses compétences, tandis que les sections professionnelles jouissent d’une autonomie historiquement très ancrée. Il existe une forte disproportion de moyens entre la première et les secondes.
Par ailleurs, je rappelle que la CNAVPL est le seul organisme de base à ne pas avoir conclu depuis 2003 – ce n’est pas récent ! – de contrat de gestion avec l’État ou pour lequel une telle contractualisation n’est pas en cours.
Pour toutes ces raisons, et en cohérence avec ce que vous-mêmes, chers collègues de l’UMP, aviez mis en place, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je veux à mon tour répondre aux orateurs qui ont exprimé trois inquiétudes, pour autant qu’ils soient de bonne foi. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
La première de ces inquiétudes, c'est que l’État souhaiterait faire main basse sur les réserves de la CNAVPL.
La deuxième, c’est qu’au travers des dispositions que nous vous proposons, nous voudrions mettre en place l’étatisation de cette caisse.
La troisième, c'est que nous chercherions à remettre en question un fonctionnement qui aurait fait ses preuves depuis plusieurs années.
D’abord, comme l’a indiqué Mme le rapporteur, il ne s’agit nullement de ponctionner les réserves constituées par les sections professionnelles, que ce soit au profit des régimes de retraite des professions libérales eux-mêmes ou d’autres régimes. Au contraire, je le dis très fermement, ces réserves sont les garantes de l’équilibre des régimes de retraite complémentaire gérés par les sections en leur permettant de faire face à d’éventuels aléas conjoncturels et démographiques. Le Gouvernement et ceux qui gèrent le régime de retraite n’auraient aucun intérêt à chercher à ponctionner ces réserves.
S’agissant de l’étatisation supposée de la CNAVPL, je vous rappelle que le régime en cause, comme l’ensemble des autres régimes de base et complémentaire, est déjà sous la tutelle de l’État.
M. Gérard Longuet. C’est vrai qu’il peut donner des leçons en matière d’équilibre !
Mme Marisol Touraine, ministre. De ce point de vue, l’article 32 n’apporte pas de modification substantielle à la situation actuelle.
Enfin, en ce qui concerne la bonne gestion de la CNAVPL, je veux rappeler que les excédents qui ont pu être constitués, et qui sont d’ailleurs extrêmement différents selon les sections professionnelles, tiennent non pas à une bonne gestion – de même que le déficit ne s’explique pas forcément par une mauvaise gestion –, mais à des situations démographiques objectives. Quand la situation démographique est favorable, les résultats financiers le sont aussi !
En revanche, et là je rejoins les propos de Mme le rapporteur, la réforme de 2003 en créant la CNAVPL, avait voulu mettre en place un dispositif de gestion mieux coordonnée, une gouvernance qui soit davantage affirmée et assumée.
Or, au cours des dernières années, un certain nombre de rapports réalisés par l’IGAS et la Cour des comptes ont constaté certains dysfonctionnements, appelant, dans le prolongement de la réforme de 2003, à mettre en place des mécanismes de gestion plus resserrée, qui passe notamment par la conclusion d’une convention d’objectifs et de moyens.
Les dispositions qui vous sont proposées ont bien pour objet d’assurer le bon fonctionnement d’une caisse nationale de sécurité sociale. Il est donc normal que le Gouvernement, que l’État s’en préoccupe.
Je précise que l’actuel article 32 a subi quelques ajustements par rapport à la rédaction initiale. Ces modifications résultent de l’adoption, lors de la discussion du présent projet de loi à l’Assemblée nationale, d’un amendement que le Gouvernement avait déposé afin de tenir compte des échanges que nous avons eus avec la CNAVPL et l’Union nationale des professions libérales, ce dont se sont d’ailleurs félicitées ces dernières dans un communiqué commun du 10 octobre dernier.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur les trois amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Madame la ministre, madame le rapporteur, j’ai écouté avec attention vos réponses. Si l’on en croit vos propos, il ne s’agit nullement de ponctionner les réserves – nous voilà rassurés ! Il ne s’agit pas davantage d’une étatisation, puisque l’État exerce d'ores et déjà une tutelle, qui n’a jamais été contestée. Enfin, la gestion de la caisse serait bonne. En somme, tout va bien, et le Gouvernement n’aurait d’autre objectif que d’en assurer un meilleur fonctionnement.
Dans ces conditions, madame la ministre, pourquoi proposer une nouvelle gouvernance ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Pour faire ce que vous aviez prévu en 2003 !
M. Jean-François Husson. Pour ma part, je constate que cette nouvelle gouvernance est beaucoup plus étatique : elle relève de l’économie administrée. Dans le même temps, vous confiez de nouvelles attributions au conseil d’administration. Très honnêtement, on a beaucoup de mal à s’y retrouver !
Le dialogue social a été évoqué. Puisque vous assurez que tout va bien, faites confiance à celles et ceux qui, aujourd'hui, administrent la CNAVPL !
En outre, au début de votre propos, madame la ministre, vous avez mis en cause la bonne foi d’un certain nombre de parlementaires ici présents. Sachez que lorsque nous proposons, dialoguons ou contestons, c’est toujours en toute bonne foi ! Pour ma part, je n’oppose pas votre bonne foi à la nôtre. Respectons les convictions de chacun !
Cela dit, en tant que ministre, vous ne pouvez rester sourde aux appels répétés de celles et de ceux qui, sur ces travées ou à la tête de la CNAVPL, ne rejoignent pas vos propositions d’aujourd'hui.
Enfin, vous voir défendre la réforme de 2003, à laquelle vous vous étiez alors opposée, à l’instar d’un certain nombre de vos collègues de l’actuelle majorité – un peu brinquebalante, notamment au Sénat –, ne manque pas de sel, et me procure un certain plaisir. Il faut avoir un peu de suite dans les idées !
En tout état de cause, vous l’avez compris, nous ne cautionnerons jamais le recul qu’opère le texte en matière de gestion de la caisse par les personnes intéressées.
M. Antoine Lefèvre. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Les rapports de l’IGAS et de la Cour des comptes méconnaissent profondément les réalités économiques des professions libérales. C’est le fond du malentendu.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ce malentendu vous arrange !
M. Gérard Longuet. Par la loi de 2003, nous avons créé la CNAVPL, mais nous avons maintenu les dix sections professionnelles, une fraction importante des professions libérales présentant la particularité d’être réglementées. Les liens entre l’organisation d’une profession, l’accès à son exercice, sa démographie et, par conséquent, l’équilibre de son régime de retraite sont extrêmement étroits.
J’appuierai ma démonstration sur deux exemples : celui des médecins et celui des avocats.
L’accès à l’enseignement supérieur des jeunes qui se dédient aux études de médecine est géré par l’État, alors que l’accès à la profession d’avocat est complètement libre. La situation de ces deux professions est donc très différente : dans un cas, l’État régule la démographie et prend des responsabilités et, dans l’autre, il n’intervient pas.
La liberté d’accès à la profession d’avocat a pour conséquence une démographie très largement positive. Si ces effectifs croissants permettent à cette section professionnelle de ne pas rencontrer de problèmes en matière de retraite, ils engendrent des difficultés pour ce qui concerne les conditions d’exercice de la profession. Ainsi, les revenus de certains avocats se sont singulièrement dégradés, et les très jeunes avocats – je rappelle que la moyenne d’âge des avocats inscrits au barreau de Paris est inférieure à trente-cinq ans – connaissent des situations matérielles difficiles et disposent de capacités contributives limitées.
À l’inverse, en organisant un certain malthusianisme des professions médicales, l’État consolide la situation économique de chaque médecin, en vertu de la loi de l’offre et de la demande. Le fait que la population médicale soit jeune et pas assez nombreuse peut sembler dangereux en matière de retraite, mais c’est peut-être un avantage en termes de confort pour la profession.
Au demeurant, un grand nombre de professions se situent dans des situations intermédiaires.
Avocats et médecins ont également des perspectives différentes pour ce qui concerne la durée de leur carrière : beaucoup de médecins s’arrêtent d’exercer plus tôt. Il faut dire que la relation d’un médecin avec son patient est sans doute plus exigeante que ne l’est celle d’un avocat avec son client. A contrario, la maturité, la confiance en soi et la sagesse qui se développent avec l’âge permettent de poursuivre plus longtemps des métiers de conseil.
J’en viens à l’objet de mon intervention.
Le régime de retraite que doit gérer chaque section professionnelle est lié à l’équilibre économique ainsi qu’à l’organisation de la profession. C'est pourquoi la CNAVPL rencontre des difficultés extraordinaires pour tout coordonner. Aujourd'hui, le nombre de professions libérales en dehors de toute réglementation se multiplie, notamment dans le secteur du « bien-être », pour lequel la demande est forte ; je pense, par exemple, à la sophrologie. Ces professions peuvent-elles bénéficier des mêmes règles en matière de retraite que celles dont l’accès est extraordinairement réglementé à l’extérieur de la profession ? Je ne le pense pas.
C’est en raison de cette complexité que nous défendons le principe de la responsabilité des sections professionnelles et refusons tout mécanisme de compensation systématique et automatique entre l’ensemble des sections. La CNAVPL ne peut être prisonnière de la politique de telle ou telle section, qui s’imposerait aux autres.
Les différences doivent être reconnues. Le conseil d’administration de la CNAVPL doit pouvoir choisir son dirigeant, lequel doit être capable de comprendre la complexité de l’ensemble des professions libérales. En effet, ces dernières, qui se caractérisent aujourd'hui par une diversité extraordinaire, ne sauraient être régulées par une personnalité extérieure. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Tout va très bien, madame la ministre. Tout va très bien ! (Sourires.) Cependant, les acteurs de terrain nous font part d’un certain nombre de problèmes…
Je salue la façon dont vous avez mené la négociation avec les professions libérales ! D’aucuns se demandent comment le Gouvernement a pu se mettre à dos 800 000 libéraux…
Permettez-moi de vous lire des extraits de deux courriers pris au hasard parmi les nombreux que je reçois.
Le premier évoque « un article 32 qui nous est proposé sans concertation », « un traitement avec une urgence qui ne se justifie pas », « le procès d’une gouvernance qui a fait ses preuves », « une réforme sur fond d’idéologie administrative, qui a montré ses limites », « trop de mensonges pour manipuler les parlementaires ».
Le second fait allusion à « une réforme qui nie le principe même du dialogue, de la concertation et de la démocratie », à « des propositions sur les modalités de gestion qui n’ont pas trouvé d’écoute ». Or il s’agit de propositions formulées par les différents partenaires de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales.
On le constate, ces courriers témoignent d’un malaise. Ils témoignent aussi de la volonté de ces professionnels d’engager la discussion, d’accepter le dialogue et de consentir des efforts supplémentaires. Comme l’a très bien décrit notre collègue Gérard Longuet, les professions concernées ont montré qu’elles se prenaient actuellement en main pour gérer leur système de retraite.
Madame la ministre, s’il n'y a pas de volonté d’étatisation, puisque la tutelle de l’État s’exerce déjà, pourquoi proposer que le directeur de la CNAVPL soit nommé par le Gouvernement ? Cela ne se justifie pas ! Il faut laisser à la caisse la liberté de formuler des propositions à l’État, qui devra les accepter. C’est tellement simple !
C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons cautionner ce que vous proposez et souhaitons la suppression de l’article 32. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Le groupe socialiste votera contre ces amendements de suppression, pour les raisons qu’a évoquées Mme le rapporteur, et sur lesquelles je ne m’étendrai pas plus longtemps.
Pour ma part, je m’interroge.
Certains suspectent le Gouvernement de vouloir faire main basse sur les 15 milliards d’euros de réserves dont disposerait la CNAVPL.
Je dois dire qu’en écoutant Mme la ministre la question qui m’est spontanément venue aux lèvres est : pourquoi pas ?
M. Gilbert Barbier. Ben voyons ! Et comment paie-t-on les retraites ?
M. Claude Domeizel. J’avais cru comprendre que notre système par répartition était basé sur la solidarité : solidarité entre les générations et entre les régimes.
C’est d’ailleurs pour cette raison que le système de compensation avait été créé, en 1974 : ceux qui avaient des possibilités devaient aider ceux qui étaient en difficulté. C’est du moins ce que j’avais compris.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale et l’ai très souvent répété, je suis de ceux qui considèrent que ce système de compensation doit être revu, les capacités financières des différents régimes n’ayant pas été prises en compte lors de sa création.
Ainsi, le ratio de dépendance démographique de la Caisse nationale des industries électriques et gazières ne lui permet normalement pas d’acquitter les 50 ou 60 millions d’euros qu’elle verse chaque année ! La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL, que les sénateurs connaissent bien, a payé 60 milliards d’euros depuis 1974, et 1,4 milliard d’euros rien qu’en 2012. Pourtant, ne disposant plus d’aucune réserve, elle ne pourra plus supporter le moindre prélèvement en 2017. Ces deux régimes vont au-devant de difficultés. Dans le même temps, la CNAVPL verse 700 millions d’euros : je reconnais que c’est une somme considérable, mais je rappelle que ce régime détient 15 milliards d’euros !
Dans ces conditions, vous comprendrez, mes chers collègues, que je me pose des questions. Je le répète, il est urgent de revoir ce système de compensation, qui est absolument injuste. S’il était peut-être adapté en 1974, il ne l’est plus du tout aujourd'hui ; il est à bout de souffle. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Les propos de M. Domeizel sont particulièrement instructifs.
M. Jean-François Husson. Oui !
M. Gilbert Barbier. D’un côté, Mme la ministre nous assure qu’il n’est surtout pas question de toucher aux 15 milliards d’euros dont dispose la CNAVPL. De l’autre, le parti socialiste déclare qu’on va les récupérer rapidement…
M. Claude Domeizel. Mes propos n’engagent que moi !
M. Gilbert Barbier. En réalité, le Gouvernement s’obstine à vouloir supprimer le principe fondamental de l’autonomie de gestion de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, allant jusqu’à ce que certains appellent – peut-être à tort, mais ce n’est pas loin de la vérité – une « étatisation », en raison des nouvelles modalités de nomination de son directeur.
Pour ce faire, le Gouvernement invoque une prétendue mauvaise gestion de la caisse, plus particulièrement de la Caisse autonome de retraite des médecins de France, la CARMF, à laquelle, on le sait, certains médecins et syndicats s’opposent et reprochent cette mauvaise gestion.
Je rappelle tout de même que, selon la Cour des comptes, la pérennité de la caisse est assurée jusqu'en 2040. Certes, on peut toujours le contester…
Le projet de loi prévoit également d'enfermer la CNAVPL dans le cadre d’un contrat déterminant des objectifs de gestion qui semble particulièrement superfétatoire.
Comme notre collègue Gérard Longuet l'a rappelé, nous avons affaire à dix caisses différentes, qui ont chacune leurs propres problèmes. Il a évoqué le cas des médecins et des avocats. Des fusions surviennent parfois– par exemple celle de la caisse des chirurgiens-dentistes avec celle des sages-femmes. C'est pourquoi l'on ne peut pas fixer les évolutions d'une manière figée dans un contrat d'objectifs et de gestion.
Aujourd'hui, chacune des dix caisses gère librement les régimes complémentaires et les régimes supplémentaires – notamment l'ASV, l'avantage social vieillesse –, la Caisse nationale gérant le régime de base. Le système actuel, tout à fait particulier, comporte une entraide au sein de la CNAVPL.
Par ailleurs, il est singulièrement choquant qu’il ne puisse être mis fin aux fonctions du directeur de la CNAVPL, choisi parmi trois noms proposés par le ministre chargé de la sécurité sociale, qu’à la majorité des deux tiers du conseil d'administration. Ce dernier comprend les présidents de chacune des dix caisses, si bien que le directeur susvisé devrait être en mesure d'exercer ses fonctions pendant cinq ans tout en ayant six opposants dans son conseil d'administration, puisqu'il en faut sept pour pouvoir, éventuellement, le démettre. Il me paraît vraiment difficile qu’un tel système puisse fonctionner…
Par ailleurs, un avantage doit être souligné : si certains régimes rencontrent des difficultés, les conditions de cotisation sont modifiées.
En réalité, je vois surtout dans la réforme que souhaite le Gouvernement une opposition fondamentale au fonctionnement par points des régimes en cause !
Et j’en reviens au début de notre discussion : vous n’admettez pas, madame la ministre, l'avancée que représenterait une retraite par points, possibilité que souhaitait pourtant étudier la majorité des membres de la Haute Assemblée. C'est là le nœud fondamental de notre désaccord.
Pour toutes ces raisons, les membres de mon groupe voteront en faveur des trois amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’irai dans le sens des propos des précédents orateurs. Je ne représente pas les professions libérales, mais nombre de leurs représentants nous ont sollicités.
L’article 32 pose un réel problème, car la réforme qu’il prévoit a été élaborée sans la moindre concertation avec le conseil d'administration de la CNAVPL, comme l'ont souligné les pharmaciens et d'autres professionnels du secteur de la santé.
De plus, M. Barbier et d'autres collègues ont estimé que se profilait la mainmise de l’État sur les régimes de retraite des professions libérales dans la volonté de nommer le directeur de la Caisse nationale par décret. Cette nomination devrait être de la responsabilité du conseil d'administration, qui a toute légitimité.
De surcroît, je crains une fusion des caisses des libéraux…
C’est pourquoi je voterai les amendements de suppression de l’article 32.
M. le président. La parole est à M. René Beaumont, pour explication de vote.
M. René Beaumont. Après les brillantes interventions de membres de la commission des affaires sociales – je pense à Gérard Longuet, à Jean-Noël Cardoux, à René-Paul Savary et à Jean-François Husson –, je n’avais pas l'intention d'intervenir. Cependant, en ma qualité, depuis une dizaine d'années, d’administrateur de la caisse autonome de retraite et de prévoyance des vétérinaires, profession que j’exerce, l'intervention de M. Domeizel m’y force.
M. Claude Domeizel. Allez-y, je vous en prie !
M. René Beaumont. Au cours des débats qui se sont déroulés sur le présent projet de loi et que j’ai suivis de nombreux soirs, en particulier la semaine dernière, vous m’avez semblé, monsieur Domeizel, sincère, honnête et assez franc.
M. Claude Domeizel. Poursuivez encore !
M. René Beaumont. Mais aujourd'hui, votre franchise vous a perdu, tout le monde l'a remarqué : alors que Mme le rapporteur et Mme la ministre viennent de nous dire de ne pas nous inquiéter car aucun prélèvement ne sera effectué sur les réserves de la CNAVPL, vous, vous nous dites qu’il faudra piocher dans nos régimes par souci de solidarité ! Vous avez l'air de nous accuser de ne pas être solidaires… Mais la solidarité doit s'exercer dans des conditions à peu près égales, vous en conviendrez.
M. Claude Domeizel. Mais oui !
M. René Beaumont. Or, actuellement, les professionnels libéraux travaillent tous jusqu'à soixante-cinq ans, voire soixante-sept ans à l’instar des vétérinaires – cette mesure sera d’ailleurs généralisée à partir de 2020. Et vous voulez qu’ils fassent preuve de solidarité envers ceux qui s'arrêtent de travailler à cinquante ans, cinquante-deux ans ou cinquante-cinq ans !
M. Claude Domeizel. Mais de qui parlez-vous ?
M. René Beaumont. C'est une solidarité désorganisée ! C'est du vol du travail des uns au profit d’autres qui n’auront pas assez travaillé ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) C'est scandaleux !
M. Claude Domeizel. Ce sont vos propos qui sont scandaleux !
M. René Beaumont. On puise directement dans les poches des travailleurs indépendants pour servir les retraites de ceux qui ne travaillent pas assez ! (Mêmes mouvements.)
M. Claude Domeizel. Encore une fois, de qui parlez-vous ?
M. René Beaumont. Mais telle est la réalité ! Quant à la solidarité, tout comme vous – pas plus, pas moins -, je tiens à l'organiser, mais dans des conditions équitables ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 295, 355 et 380 rectifié.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe UDI-UC et, l'autre, du groupe UMP.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 41 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 185 |
Contre | 159 |
Le Sénat a adopté. (Bravo ! sur les travées de l'UMP.)
En conséquence, l’article 32 est supprimé et les amendements nos 296, 403, 297, 310, 402, 415, 298, 300, 356, 309, 388 rectifié, 416, 299, 404, 301 rectifié et 302 n’ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes.
L'amendement n° 296, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après la première occurrence du mot :
sociale
insérer les mots :
au titre du régime de base
L'amendement n° 403, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« 4° De coordonner et d’assurer la cohésion de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales, de donner son avis aux administrations intéressées au nom de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales et plus généralement de la représenter auprès des pouvoirs publics, des autres organisations de protection sociale ainsi qu’auprès des chambres et des ordres professionnels, associations, syndicats professionnels et leurs unions et fédérations, etc. ; »
L'amendement n° 297, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
Les amendements nos 310 et 402 sont identiques.
L'amendement n° 310 est présenté par M. Beaumont.
L'amendement n° 402 est présenté par M. Barbier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
«7° De s’assurer des équilibres de gestion par la recherche de maîtrise des coûts de gestion et de la coordination efficace des systèmes d’information de l’organisation mentionnée à l’article L. 641-1.
L'amendement n° 415, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 7° D’assurer la cohérence et la coordination des systèmes d’information de l’organisme mentionné à l’article L. 641-1.
L'amendement n° 298, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après le mot :
arrêter
insérer les mots :
, en cohérence avec les systèmes d’information des sections professionnelles,
L'amendement n° 300, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 641-3-1.- I. – Le directeur est nommé par décret sur la base d’une liste proposée par le conseil d'administration de la caisse nationale.
L'amendement n° 356, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 641-3-1. – I. – Le directeur est nommé par décret du ministre chargé de la sécurité sociale à partir d'une liste de trois noms proposée par le conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales. Il est révoqué par le conseil d'administration de la caisse à la majorité des deux tiers de ses membres.
L'amendement n° 309, présenté par M. Beaumont, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
« Art. L. 641-3-1. – I. – Le directeur est nommé par décret, pour une durée de cinq ans renouvelable, sur proposition du conseil d’administration à partir d’une liste de deux noms proposée par le conseil d'administration de la caisse nationale.
L'amendement n° 388 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Bertrand, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
« Art. L. 641-3-1.- I. - Le directeur est nommé par décret, pour une durée de cinq ans renouvelable, à partir d’une liste de trois noms proposée par le Conseil d'administration de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales.
L'amendement n° 416, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Supprimer les mots :
renouvelable une fois
L'amendement n° 299, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Supprimer les mots :
une fois
L'amendement n° 404, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 14, seconde phrase
Remplacer les mots :
des deux tiers
par le mot :
simple
L'amendement n° 301 rectifié, présenté par Mme Deroche et MM. Milon et Savary, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18
Supprimer les mots :
et de six représentants d’organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales
II. – Alinéa 21
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article. » ;
L'amendement n° 302, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 27
Rédiger ainsi cet alinéa :
4° Le dernier alinéa de l’article L. 641-5 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
II. – Alinéa 28
Supprimer cet alinéa.
Article 32 bis (nouveau)
I. – L’article L. 723-3 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après la première occurrence du mot : « par », la fin de la seconde phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « la Caisse nationale des barreaux français. » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa, la deuxième occurrence du mot : « à » est remplacée par les mots : « au versement à ladite caisse d’ » et le mot : « ladite » est remplacé par les mots : « cette même ».
II. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2014.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, sur l'article.
M. Claude Domeizel. Le groupe socialiste votera évidemment l’article 32 bis.
Si je reprends la parole, c'est pour signaler que les propos spontanés, dont je ne retire rien, que j'ai tenus sur l’article 32 concernant la compensation n’engagent que moi. (Ah ! sur les travées de l'UMP.) Je laisse aux uns et aux autres la liberté de s'y associer…
M. le président. Je mets aux voix l’article 32 bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'article 32 bis.)
Article 33
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de protéger les intérêts des travailleurs salariés et des personnes ayant déjà quitté l’entreprise ou l’établissement de l’employeur à la date de la survenance de l’insolvabilité de celui-ci, en ce qui concerne leurs droits acquis, ou leurs droits en cours d’acquisition, à des prestations de retraite supplémentaire d’entreprise.
L’ordonnance est prise dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
Le projet de loi portant ratification de cette ordonnance est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l’ordonnance. – (Adopté.)
(M. Didier Guillaume remplace M. Jean-Pierre Raffarin au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume
vice-président
Articles additionnels après l'article 33
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
I. - Le deuxième alinéa de l’article L. 3314-10 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces sommes peuvent également être affectées en tout ou partie aux régimes de retraite supplémentaire auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »
II. - L’article L. 3315-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même si ces sommes sont affectées à un régime de retraite supplémentaire auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »
III. - L’article L. 3315-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même si ces sommes sont affectées à un régime de retraite supplémentaire auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L.911-1 du code de la sécurité sociale. »
IV.- La perte de recettes pour l’État et pour les organismes de sécurité sociale résultant des I, II et III ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. La série de quatre amendements que nous présentons, inspirée par le même principe, vise le système, non politiquement correct, de la retraite par capitalisation, ce qui va certainement susciter des réactions dans cet hémicycle. (Oh ! sur les travées du groupe socialiste.)
L’amendement n° 303 concerne l’article 83 du code général des impôts. Le développement des régimes de retraite supplémentaire, collectifs et individuels, constitue un levier pertinent pour garantir aux retraités un revenu de remplacement global satisfaisant. C’est pourquoi ces dispositifs représentent un complément nécessaire à des régimes obligatoires dont la capacité à maintenir des pensions de retraite d’un montant satisfaisant est altérée par le vieillissement de la population, qui dégrade mathématiquement le rapport entre cotisants et retraités.
Il est donc proposé de développer largement les contrats d’entreprise à cotisations définies, dont une partie est financée par l’entreprise. Je rappelle qu’il s’agit de contrats collectifs financés à la fois par la société et le salarié.
Ceux-ci représentent aujourd'hui un stock de 34 milliards d’euros d’engagements à l’égard des salariés, qui peuvent y effectuer des versements volontaires, profitant ainsi des choix négociés par l’entreprise. Il conviendrait d’élargir les possibilités de versement sur ces contrats, en cohérence avec les autres produits assurantiels concernant les retraites dont nous avons débattu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement prévoit la possibilité d’affecter les sommes provenant de l’intéressement à des régimes de retraite supplémentaire. Cette faculté s’ajouterait donc à celle qui est déjà offerte aux salariés par l’intermédiaire du plan d’épargne pour la retraite collectif, le PERCO, qui permet de se constituer une épargne, accessible au moment de la retraite, sous forme de rente ou de capital.
Dans la mesure où cette possibilité n’est pas prévue par le présent projet de loi, nous pensons qu’elle pourrait figurer à l’ordre du jour des prochains travaux du Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat des salariés, le COPIESAS, chargé par le Premier ministre de formuler des propositions sur une réforme globale de l’épargne salariale.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. La réponse qui vient de nous être apportée ne nous a pas davantage convaincus que les échanges que nous avons eus en commission. En tout cas, saisir le COPIESAS de la question ne nous paraît pas suffisant.
Notre proposition est en parfaite cohérence avec les propos que nous avons tenus, notamment sur les articles 1er et 2 du projet de loi. Nous avions en effet rappelé que le système de retraite français avait la particularité d’être composé de trois piliers : un régime obligatoire par répartition, complété par un système assurantiel par capitalisation – et ce n’est pas un gros mot, puisque ce dernier permet aux salariés et aux entreprises de financer un système de retraite complémentaire, qui s’inscrit pleinement dans le pacte social en fidélisant les salariés, et ce quel que soit le statut, qui dépend du choix de l’entreprise –, puis une partie individuelle de retraite par capitalisation, point que nous avons évoqué mais qui n’est pas concerné par cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 305, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 2° de l’article L. 3323-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3° À des régimes de retraite supplémentaire auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – Après le premier alinéa de l’article L. 3324-12 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces mêmes salariés ou bénéficiaires peuvent obtenir de l’entreprise que les sommes qui leur sont attribuées par celle-ci, au titre de la participation, soient affectées aux régimes de retraite supplémentaire auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »
III. – Le deuxième alinéa de l’article 163 bis AA du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L’exonération est également totale lorsque les sommes reçues sont à la demande des salariés affectées en tout ou partie à des régimes de retraite supplémentaire auxquels l’affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Debré.
Mme Isabelle Debré. Par le biais de cet amendement, il est proposé que les contrats d’entreprise à cotisations définies, dont une partie est financée par l’entreprise, soient développés largement. Aujourd’hui, ils représentent un stock de 34 milliards d’euros d’engagements à l’égard des salariés, qui peuvent effectuer des versements volontaires sur ces contrats en profitant ainsi des choix négociés par l’entreprise auprès de l’assureur.
Il conviendrait donc d’élargir les possibilités de versement sur ce type de contrats, visés à article 83 du code général des impôts, dans un souci de cohérence avec les autres produits de retraite d’entreprise créés par la loi du 21 août 2003.
L’objectif est d’encourager ainsi le financement de ces contrats par des sommes provenant de la participation en prévoyant la possibilité d’affecter des sommes constituant la réserve spéciale de participation à des régimes de retraite supplémentaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. L’amendement précédent portait sur l’affectation des sommes provenant de l’intéressement. Le présent amendement concerne les fonds provenant de la réserve spéciale de participation à des régimes de retraite supplémentaire.
Pour la même raison que précédemment, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Je tiens très succinctement à rappeler que nous avons examiné voilà peu de temps, dans ce même hémicycle, une proposition de loi visant à employer une partie de la réserve de participation pour encourager la consommation. Nous avions alors longuement débattu de l’opportunité d’une telle relance.
L’efficacité du dispositif n’a pas encore été évaluée. Doutant de celle-ci, nous avions d'ailleurs présenté des amendements tendant à prévoir l’emploi des sommes en cause à des fins durables, par exemple, à la réalisation de travaux dans le bâtiment, qui ne sont pas délocalisables.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cela a été intégré dans le dispositif.
M. Jean-Noël Cardoux. Par notre amendement, nous revenons à la véritable philosophie de la participation telle que la concevait le général de Gaulle, les sommes en question étant destinées à constituer une épargne supplémentaire, versée au salarié sous forme de rente ou de capital à l’âge de la retraite. Nous avons donc estimé que l’utilisation de la réserve de participation pouvait faire l’objet d’un amendement spécifique dans ce débat sur les retraites.
Mme Isabelle Debré. Absolument !
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le a) du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même des sommes versées sur ces mêmes plans par une entreprise employant moins de cinquante salariés pour le compte de ceux adhérant à un plan. »
II. - Les sommes versées par l'entreprise mentionnées au a) du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts sont assimilées aux contributions relevant du sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et ne sont pas prises en compte dans l’assiette définie au premier alinéa du même article.
III. - Les sommes versées par l’entreprise mentionnées au a) du 1 du I de l’article 163 quatervicies du code général des impôts doivent être identiques pour une même catégorie de salariés.
IV. - La perte de recettes pour l’État et pour les organismes de sécurité sociale résultant des I, II et III ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. Le présent amendement est de la même veine que ceux que nous venons d’exposer, mais il concerne les plans d’épargne retraite populaire, les fameux PERP, issus de la loi du 21 août 2003, et vise les mêmes facultés de financement. Cette disposition est particulièrement importante pour les salariés des petites et moyennes entreprises comportant moins de cinquante salariés, qui ne disposent pas de contrats de retraite supplémentaire.
Les petites entreprises sont singulièrement maltraitées dans plusieurs dispositions du présent projet de loi, dont certaines, je pense en particulier à celles qui concernent la pénibilité, n’ont d'ailleurs pas été adoptées. Pourtant, ces sociétés représentent probablement le plus grand gisement d’emplois potentiels dans notre pays.
Cela étant, offrir la possibilité à une entreprise de moins de cinquante personnes de verser des sommes sur un PERP ouvert par ses salariés dans le cadre de la retraite par capitalisation serait bénéfique. Pour le salarié, il s’agit d’un complément de salaire imposable. Du point de vue social, les sommes versées sont assimilées à des contributions de l’employeur relevant du sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et traitées comme telles. Elles sont exonérées de cotisations sociales dans la limite d'un plafond déterminé par cet article. Cet avantage n’est pas pris en compte dans l’assiette des cotisations du salarié et de l’employeur.
Si ce mécanisme était adopté, ce serait, je le répète, une excellente chose pour les salariés des petites entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement tend à ouvrir la faculté aux employeurs de verser des sommes sur les plans d’épargne retraite populaire qui auraient été ouverts par leurs salariés.
Cette faculté s’accompagnerait d’un régime d’exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises, ce qui priverait les régimes de retraite par répartition de recettes. La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 306, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia et M. Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Tout salarié lié par un contrat de travail de droit privé et relevant du régime d’assurance vieillesse de base mentionné au titre 5 du livre 3 du code de la sécurité sociale ainsi que des régimes de retraite complémentaire mentionnés au titre 2 du livre 9 du code de la sécurité sociale peut adhérer à un plan d’épargne retraite répondant aux conditions fixées par la présente loi. Les avocats salariés relevant de la Caisse nationale des barreaux français mentionnée à l’article L. 723-1 du code de la sécurité sociale peuvent également adhérer à un plan d’épargne retraite.
Au terme d’un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, les salariés qui ne bénéficient d’une proposition de plan d’épargne retraite ni au titre d’un accord collectif d’entreprise, professionnel ou interprofessionnel, ni au titre d’une décision unilatérale de leur employeur ou d’un groupement d’employeurs, peuvent demander leur adhésion à un plan d’épargne retraite existant. Si, postérieurement à cette adhésion, un plan d’épargne retraite est proposé dans leur entreprise, ils peuvent demander que les droits qu’ils ont acquis soient transférés intégralement et sans pénalité sur ce plan. Un décret fixe les conditions d’application du présent alinéa.
II. – Les citoyens français établis hors de France peuvent demander leur adhésion à un plan existant, lors même qu’ils ne relèvent pas d’un régime de retraite complémentaire.
III. – Le plan d’épargne retraite ouvre droit, au profit de ses adhérents, au paiement d’une rente viagère à compter de la date de leur cessation définitive d’activité et, au plus tôt, à l’âge fixé en application de l’article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, en contrepartie de leurs versements ou des abondements de leur employeur.
À cette date, les adhérents ont également la possibilité d’opter pour un versement unique qui ne peut excéder 20 % de la provision mathématique représentative des droits de l’adhérent, sans que le montant de ce versement puisse excéder 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
Par dérogation aux dispositions des alinéas précédents, la rente d’un montant annuel inférieur à une valeur fixée par arrêté du ministre de l’économie est liquidée en totalité sous la forme d’un versement unique.
L’adhérent à un plan d’épargne retraite peut également demander que tout ou partie de la rente servie au titre de ce plan soit versée, après son décès, à ses enfants mineurs, incapables ou invalides ou à son conjoint survivant.
IV. – Les plans d’épargne retraite peuvent être souscrits par un ou plusieurs employeurs, ou par un groupement d’employeurs, au profit de leurs salariés.
La souscription peut résulter d’un accord collectif d’entreprise ou d’un accord de branche, professionnel ou interprofessionnel, conclu à un échelon national, régional ou local. Ces accords sont régis par le titre III du livre II de la deuxième partie du code du travail, à l’exclusion de ses chapitres III et IV ; ils peuvent déroger au second alinéa de l’article L. 2252-1 et au second alinéa de l’article L. 2253-2 dudit code. Les plans d’épargne retraite sont proposés à l’adhésion de tous les salariés de l’entreprise et, en cas d’accord de branche, professionnel ou interprofessionnel, à tous les salariés compris dans son champ d’application professionnel et territorial. Les conditions d’adhésion sont alors définies de façon identique pour des catégories homogènes de salariés.
En cas d’impossibilité de conclure un accord collectif ou, à défaut de conclusion d’un tel accord dans un délai de six mois à compter du début de la négociation, la souscription peut également résulter d’une décision unilatérale de l’employeur ou d’un groupement d’employeurs constatée dans un écrit remis par ceux-ci à chaque salarié. Les salariés d’une même entreprise adhèrent au plan d’épargne retraite qui leur est proposé dans les conditions prévues à l’alinéa précédent.
V. – La mise en place de plans d’épargne retraite est subordonnée à la conclusion d’un contrat entre un employeur, un groupement d’employeurs, d’une part, et un organisme mentionné au 1° du VIII du présent article, d’autre part.
Les fonds d’épargne retraite ne peuvent s’engager à servir des prestations définies.
VI. – Les versements du salarié et l’abondement de l’employeur aux plans d’épargne retraite sont facultatifs. Ils peuvent être suspendus ou repris sans pénalité dans des conditions fixées soit par les accords collectifs visés au IV du présent article, s’ils existent, soit, à défaut, par décret.
L’abondement de l’employeur ne peut excéder chaque année le quadruple des versements du salarié.
VII. – En cas de rupture du contrat de travail, l’adhérent à un plan d’épargne retraite peut demander le maintien intégral des droits acquis au titre de ce plan. Il peut également demander le transfert intégral sans pénalité, dans des conditions fixées par décret, des droits attachés à ce plan sur un autre plan d’épargne retraite ou contrat d’assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d’activité professionnelle.
En l’absence de rupture du contrat de travail, l’adhérent peut demander, à l’expiration d’un délai de dix ans à compter de son adhésion, le transfert intégral, sans pénalité, des droits acquis en vertu de ce plan sur un autre plan d’épargne retraite. Cette demande ne peut être renouvelée qu’une fois.
VIII. – Les fonds d’épargne retraite.
1° Les fonds d’épargne retraite sont des personnes morales ayant pour objet exclusif la couverture des engagements pris dans le cadre de plans d’épargne retraite. Les fonds d’épargne retraite doivent être constitués sous la forme d’une société anonyme d’assurance, d’une société d’assurance mutuelle, d’une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale ou d’un organisme mutualiste du code de la mutualité.
Lorsque le fonds d’épargne retraite est constitué sous la forme d’une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale, le chapitre 2 du titre 3 du livre 9 dudit code est applicable aux plans d’épargne retraite souscrits auprès de ce fonds.
Lorsque le fonds d’épargne retraite est constitué sous une autre forme juridique, les titres Ier, III et IV du livre Ier et le titre IV du livre IV du code des assurances sont applicables aux plans d’épargne retraite souscrits auprès de ce fonds.
2° Lorsque l’accord collectif ou la décision unilatérale visés au IV du présent article désignent le fonds d’épargne retraite auprès duquel est souscrit le plan, il comporte une clause déterminant dans quelles conditions et selon quelle périodicité le choix de ce fonds ainsi que des intermédiaires et délégataires des opérations relatives aux plans d’épargne retraite peut être réexaminé. La périodicité du réexamen ne peut excéder cinq ans.
Lorsque le souscripteur d’un plan d’épargne retraite décide de changer de fonds d’épargne retraite, la contre-valeur des actifs représentatifs des droits et obligations attachés à ce plan est intégralement transférée, sans pénalité, vers le nouveau fonds d’épargne retraite dans un délai et selon des modalités fixées par décret.
3° Les fonds d’épargne retraite ne peuvent commencer leurs opérations qu’après avoir obtenu un agrément administratif délivré après avis de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article.
Les dispositions de l’article L. 310-27 du code des assurances s’appliquent lorsque des opérations visées au 1° du VIII du présent article sont pratiquées sans cet agrément. Cet agrément est délivré par arrêté du ministre chargé de l’économie lorsque les fonds d’épargne retraite sont constitués sous la forme d’une société anonyme d’assurance ou d’une société d’assurance mutuelle et par arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de la sécurité sociale lorsqu’ils sont constitués sous la forme d’un organisme mutualiste régi par le code de la mutualité ou sous la forme d’une institution de prévoyance.
La délivrance de l’agrément prend en compte :
– les moyens techniques et financiers dont la mise en œuvre est proposée et leur adéquation au programme d’activités de l’entreprise d’assurance, de l’organisme mutualiste ou de l’institution de prévoyance ;
– l’honorabilité et la qualification des personnes chargées de diriger l’entreprise d’assurance, l’organisme mutualiste ou l’institution de prévoyance ;
– la répartition du capital et la qualité des actionnaires de la société anonyme d’assurance ou, pour les sociétés d’assurance mutuelles, les organismes mutualistes et les institutions de prévoyance, les modalités de constitution du fonds d’établissement.
La liste des documents à produire à l’appui d’une demande d’agrément est fixée par arrêté du ministre chargé de l’économie.
4° a) Les règles propres à la forme juridique sous laquelle est constitué le fonds d’épargne retraite continuent de s’appliquer, sous réserve qu’elles ne soient pas contraires aux dispositions de la présente loi.
b) Lorsque le fonds est constitué sous la forme d’une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale, les articles L. 931-9 à L. 931-33 dudit code lui demeurent applicables.
Lorsque le fonds est constitué sous la forme d’un organisme mutualiste régi par le code de la mutualité, les chapitres II à VIII du titre II, le titre III et le titre IV du livre III du code des assurances, à l’exception des articles L. 322-26-1 à L. 322-26-2-1 et L. 322-26-5, lui sont applicables en tant qu’ils visent les sociétés d’assurance mutuelles. Lorsque le transfert de portefeuille de contrats est réalisé selon les modalités prévues à l’article L. 324-1 du code des assurances, l’arrêté du ministre chargé de l’économie autorisant le transfert doit être contresigné par le ministre chargé de la sécurité sociale lorsque l’entreprise à l’origine ou bénéficiaire du transfert est une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale ou un organisme mutualiste régi par le code de la mutualité.
5° a) En cas de délégation de la gestion des actifs des fonds d’épargne retraite, celle-ci ne peut être confiée qu’à une entreprise d’investissement agréée pour effectuer à titre principal les services visés au 4 de l’article L. 321-1 du code monétaire et financier.
Dans ce cas, le fonds d’épargne retraite procède, au moins tous les cinq ans, au réexamen du choix de l’entreprise d’investissement.
b) L’Autorité des marchés financiers désigne deux de ses membres qui participent avec voix délibérative aux travaux de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article.
6° a) Les fonds d’épargne retraite sont tenus d’exercer effectivement, dans le seul intérêt des adhérents, les droits de vote attachés aux titres, donnant directement ou indirectement accès au capital de sociétés, détenus par ces fonds.
Le non-respect de l’obligation posée à l’alinéa précédent est sanctionné par l’Autorité des marchés financiers dans les conditions prévues au titre II du livre VI du code monétaire et financier.
Un décret fixe les conditions d’application du présent paragraphe et, notamment, les conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux dispositions du premier alinéa dans le cas où l’exercice effectif des droits de vote entraînerait des coûts disproportionnés.
b) Les actionnaires d’un fonds d’épargne retraite doivent s’abstenir de toute initiative qui aurait pour objet ou pour effet de privilégier leurs intérêts propres au détriment des adhérents.
Les dirigeants d’un fonds d’épargne retraite doivent, dans l’exercice de leur activité, conserver leur autonomie de gestion afin de faire prévaloir, dans tous les cas, l’intérêt des adhérents des plans d’épargne retraite dont ce fonds couvre les engagements.
IX. – Les comités de surveillance.
1° Dès la mise en place d’un plan d’épargne retraite, le souscripteur est tenu de mettre en place un comité de surveillance.
Ce comité est composé, au moins pour moitié, de représentants élus des adhérents du plan. Il peut comprendre des personnalités n’adhérant pas au plan, compétentes en matière de protection sociale ou de gestion financière et n’ayant aucun lien de subordination ou d’intérêt avec le fonds.
2° Le comité de surveillance définit les orientations de gestion du plan d’épargne retraite. Aucune modification du contrat instituant ce plan ne peut être prise sans que le comité en soit informé préalablement.
Le comité de surveillance émet au moins deux fois par an un avis sur la gestion du plan et, le cas échéant, sur la gestion du fonds.
Un décret précise les modalités de fonctionnement du comité de surveillance, notamment les conditions dans lesquelles les avis mentionnés à l’alinéa précédent sont portés à la connaissance des adhérents au plan.
3° Un tiers au moins des membres du comité de surveillance peut interroger les dirigeants du fonds d’épargne retraite sur une ou plusieurs opérations relatives à la gestion du plan d’épargne retraite.
À défaut de réponse sous trente jours, ou si la réponse ne satisfait pas les membres du comité de surveillance visés au premier alinéa, ces derniers peuvent demander en justice la désignation d’un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur la ou les opérations de gestion concernées.
Le ministère public est habilité à agir aux mêmes fins.
S’il est fait droit à la demande, la décision de justice détermine l’étendue de la mission et des pouvoirs des experts. Elle peut mettre les honoraires à la charge du fonds.
Le rapport est adressé au comité de surveillance, au ministère public, au commissaire aux comptes du fonds qui gère le plan d’épargne retraite, aux organes de direction dudit fonds ainsi qu’au président de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article. Ce rapport doit en outre être annexé à celui établi par le commissaire aux comptes en vue de la prochaine assemblée générale du fonds.
Un décret fixe les conditions d’application du présent IX.
X. – Le contrôle des fonds d’épargne retraite.
1° Le contrôle de l’État sur les fonds d’épargne retraite est exercé par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution mentionnée aux articles 612-1 et suivants du code monétaire et financier, et dans l’intérêt des salariés adhérant à un plan d’épargne retraite et de leurs ayants droit au titre de la présente loi.
La présidence de la réunion des deux commissions instaurée à l’alinéa précédent est assurée.
2° L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution adresse chaque année un rapport d’activité au Président de la République et au Parlement.
3° Les membres de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article ne peuvent, pendant la durée de leur mandat et dans les cinq ans qui suivent l’expiration de celui-ci, recevoir, directement ou indirectement, de rétribution d’un fonds d’épargne retraite ou d’un prestataire de services d’investissement mentionné au 5° du VIII du présent article, ou de toute société exerçant sur le fonds ou le prestataire un contrôle exclusif au sens de l’article L. 233-16 du code du commerce.
XI. – Information des adhérents.
1° Le souscripteur d’un plan d’épargne retraite est tenu :
- de remettre à l’adhérent une notice établie par le fonds qui définit les garanties et leurs modalités d’entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir lors de la liquidation de sa rente viagère ou, le cas échéant, du versement unique ;
- d’informer, le cas échéant, les adhérents par écrit des modifications qu’il est prévu d’apporter à leurs droits et obligations lors d’une modification du contenu ou des conditions de gestion du plan d’épargne retraite.
La preuve de la remise de la notice à l’adhérent et de l’information relative aux modifications contractuelles incombe au souscripteur.
Le fonds d’épargne retraite communique chaque année, deux mois au plus après la date de clôture de ses comptes et au plus tard le 31 août suivant la clôture de l’exercice considéré, à chaque souscripteur d’un plan d’épargne retraite ainsi qu’au comité de surveillance du plan un rapport sur la gestion du plan, établi dans des conditions fixées par décret.
En outre, le fonds doit indiquer chaque année aux adhérents des plans d’épargne retraite, dans des conditions fixées par décret, le montant de la provision mathématique représentative des droits qu’ils ont acquis dans le cadre du plan par leurs versements et, le cas échéant, l’abondement de leur employeur.
2° Le comité de surveillance peut demander aux commissaires aux comptes et aux actuaires de fonds d’épargne retraite auprès desquels les plans sont souscrits tout renseignement sur l’activité et la situation financière des fonds. Les commissaires aux comptes et les actuaires sont alors déliés, à son égard, de l’obligation de secret professionnel. Les membres du comité de surveillance sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par les commissaires aux comptes.
XII. – Règles prudentielles applicables aux fonds d’épargne retraite.
1° Les fonds d’épargne retraite sont soumis à des règles spécifiques d’évaluation de leurs actifs, de provisionnement afférent à ces derniers et de participation aux excédents, fixées par décret en Conseil d’État. Ces règles tiennent compte de la nature et de la durée de détention de leurs actifs ainsi que de leurs besoins de solvabilité.
2° Les engagements réglementés des fonds d’épargne retraite ne peuvent être représentés pour plus de 65 % par des titres de créance visés au 2 de l’article L. 211-1 du code monétaire et financier ou par des parts ou actions d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières investies à titre principal dans ces mêmes titres de créance. Un décret fixe les conditions d’application du présent article.
3° a) Les engagements réglementés des fonds d’épargne retraite ne peuvent être représentés pour plus de 5 % par des parts ou actions d’un même organisme de placement collectif en valeurs mobilières, ou par l’ensemble des valeurs émises et des prêts obtenus par une même société ou par des sociétés contrôlées par cette société au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce.
Cette règle ne s’applique pas aux parts ou actions d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières représentatives des engagements des plans d’épargne retraite à capital variable pour lesquels la somme assurée est déterminée par rapport à une valeur de référence. Dans ce cas, ces organismes de placement collectif en valeurs mobilières ne peuvent employer plus de 5 % de leurs actifs en titres d’une même société ou de sociétés contrôlées par cette société au sens de l’article L 233-3 précité. Aucune autre dérogation à la règle posée au premier alinéa n’est admise.
b) Les engagements réglementés des fonds d’épargne retraite peuvent être représentés, à concurrence de 10 % et dans la limite de 0,5 % par émetteur, appréciée dans les mêmes conditions qu’à l’alinéa précédent, par des actions, parts ou droits émis par une société commerciale et non admis à la négociation sur un marché réglementé ainsi que par des parts de fonds communs de placement à risques mentionnés à l’article L. 214-36 du code monétaire et financier et de fonds communs de placement dans l’innovation institués par l’article L. 214-41 du même code.
XIII. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le 1° bis de l’article 83, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« …° Les versements des salariés et les contributions complémentaires de l’employeur aux plans d’épargne retraite prévus par l’article L. 137-5 du code de la sécurité sociale dans la limite de la plus élevée de ces deux valeurs : 5 % du montant brut de la rémunération ou 20 % du plafond annuel moyen retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale ; l’excédent est ajouté à la rémunération.
« La différence entre, d’une part, la limite définie au précédent alinéa et, d’autre part, les versements et les contributions complémentaires de l’employeur effectués au titre d’une année peut être utilisée au cours de l’une des trois années suivantes pour effectuer des versements complémentaires bénéficiant de l’exonération prévue au précédent alinéa. Un décret fixe les conditions d’application de ces dispositions, et notamment les obligations déclaratives des employeurs et des salariés ; »
2° L’article 206 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 12. Les fonds d’épargne retraite prévus par l’article L. 137-5 du code de la sécurité sociale sont assujettis à l’impôt sur les sociétés, dans les conditions de droit commun. » ;
3° L’article 219 quater est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux fonds d’épargne retraite mentionnés au 12 de l’article 206. »
XIV. – Au sixième alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, après le mot : « prévoyance », sont insérés les mots : « , y compris les abondements des employeurs aux plans d’épargne retraite, ».
XV. – Les fonds d’épargne retraite ne sont pas assujettis à la contribution des institutions financières.
XVI. – La perte de recettes résultant pour l’État des I à XV ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
XVII. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à XV ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
XVIII. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration du prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Debré.
Mme Isabelle Debré. Le système de retraite français comporte trois étages : les régimes de base obligatoires par répartition, les régimes de retraite complémentaire obligatoires reposant sur le mécanisme de la répartition mais assortis d'un système de points, et l'épargne retraite collective ou individuelle.
La loi du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, dite « loi Thomas », avait mis en place un mécanisme offrant la possibilité d'une retraite par capitalisation accessible à un plus grand nombre de bénéficiaires. En effet, elle permettait la création de fonds de pension en France. Elle résultait de l’adoption – ce fut la seule – d’une proposition de loi relative à ce sujet. Aucun décret d'application n’a cependant été publié, du fait de l'alternance politique intervenue lors des élections législatives de 1997.
Cette loi créait, pour l'ensemble des salariés de droit privé, un système de retraite supplémentaire à cotisations définies, par capitalisation, donnant droit à une rente viagère lors de la cessation d'activité ; elle prévoyait une option de sortie partielle en capital, limitée à 20 % du capital et à hauteur de 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale.
Elle allait dans le sens de la mise en place d'un système équilibré avec la création, je le répète, de fonds de pension en France, privilégiant la sortie en rente par rapport à la sortie en capital et instaurant un système de gestion externe à l'entreprise. Or ce mécanisme a été supprimé lors de l'abrogation de cette loi par l'article 48 de la loi du 17 janvier 2002. Nous proposons donc de rétablir le mécanisme institué par la loi Thomas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Madame Debré, avouez que l’argument selon lequel le mécanisme de retraite par capitalisation prévu par la loi Thomas du 25 mars 1997 n’a pas pu être mis en œuvre du fait de l’alternance – cette période a duré de 1997 à 2002 – doit être relativisé : depuis, vous avez tout de même eu dix ans pour rétablir ladite loi !
M. Jean Besson. Bien sûr !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Le dispositif que vous présentez repose, comme celui de l’amendement précédent, sur une exonération de cotisations sociales qui priverait de recettes les régimes de retraite par répartition. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Sur les dix ans, peut-être ?... (Sourires.)
M. Jean-François Husson. Ce dossier mérite que nous nous y arrêtions quelques instants. Nous arrivons au terme de l’examen du présent projet de loi et il a été affirmé, sur certaines travées, que le système de répartition était le plus juste et le plus équitable, en termes de rentabilité, dans le temps. C’est inexact !
Il suffit de regarder les courbes de tous les organismes officiels sur les cinquante dernières années ou, si l’on veut être parfaitement objectif et honnête, de partir de la crise de 1929, pour s’apercevoir que dans le temps, – car la retraite ressort aussi du temps long – les actions offrent le meilleur rendement.
Le terme « actions » n’est pas un gros mot ! Ces dernières permettent aux entreprises de se financer et, ce faisant, apportent un soutien direct à l’économie. Comme je nous sais tous animés de l’envie de conforter le dynamisme économique de notre pays, nous devrions nous réjouir de cette proposition.
Cela n’a pu être fait hier, ni avant-hier…
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Que ne l’avez-vous fait en 2003, 2008 et 2010 !
M. Jean-François Husson. … mais nous voulons y revenir, car il s'agit d’offrir aux Françaises et aux Français la possibilité de s’associer et de participer à la création de richesses et d’activité dans notre pays.
M. Jean Besson. Vous réservez cette faculté à ceux qui ont de l’épargne !
M. Jean-François Husson. À ceux qui ont peu d’épargne ! Cela étant, nous avons vu vos reculades, et ce n’est pas fini ! Les propositions du Gouvernement feront encore l’objet de modifications : changer les règles du jeu avec effet rétroactif est proprement inacceptable, notamment pour les plus petits épargnants !
La loi Thomas prévoyait une contribution de l’employeur et du salarié, ce qui est important pour les personnes qui perçoivent les plus petits revenus. En effet, ceux qui disposent de plus de biens ont la possibilité de diversifier plus facilement leur patrimoine et leurs placements.
Il est encore temps, mes chers collègues, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, de reconsidérer votre position, comme l’a fait le groupe écologiste tout à l'heure, car il y va de l’intérêt de la France.
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Madame le rapporteur, nous n’avons pas eu l’opportunité de rétablir la loi Thomas.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ah bon ? Vous n’avez rien pu faire, ni en 2003, ni en 2008, ni en 2010 ?
M. Jean-Noël Cardoux. Vous n’aimez pas trop que l’on vous interrompe, alors rendez-moi la pareille, madame le rapporteur !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Je ne l’ai pas beaucoup fait, monsieur Cardoux !
M. Jean-Noël Cardoux. Nous présentons quatre amendements cohérents, dont la logique est couronnée par cette proposition d’instiller, je l’ai dit dans mon propos liminaire, un système de retraite par capitalisation.
En cet instant – notre collègue Husson a rappelé que la réforme systémique que nous appelions de nos vœux nous a été refusée –, je voudrais simplement exprimer le regret que la dépendance ait été la grande absente de cette discussion.
La dépendance, nous en parlons depuis des années. Au moment de l’alternance, en 2012, on nous a dit que le Gouvernement avait beaucoup travaillé sur ce sujet et qu’il était prêt à faire des propositions. Soit, mais depuis deux ans, le moins que l’on puisse dire est que celles-ci se font attendre ! Nous sommes impatients de voir ce qui va sortir de toute cette réflexion !
Comment a-t-on pu aborder un débat sur l’avenir des retraites en occultant totalement l’incidence que peut avoir la dépendance sur le sort des personnes retraitées ?
Le phénomène commun à ces deux notions, c’est la démographie : l’espérance de vie augmente, et donc le risque de dépendance également, sinon proportionnellement, du moins rapidement.
Mais il existe une différence. Contrairement aux propos quelque peu bizarres qu’ont pu tenir certains experts lors des auditions, la retraite ne ressort certainement pas d’une logique assurantielle ! Il s’agit d’un événement certain. Le seul aléa en la matière, c’est le décès du titulaire de la pension avant l’âge de la retraite, hors possibilité de réversion. Hormis cette hypothèse, la personne qui a cotisé et qui est en vie au moment de la retraite percevra sa pension
En revanche, la dépendance est en elle-même un aléa. Comment savoir à vingt-cinq ans que l’on deviendra dépendant ?
Lors du débat sur la dépendance, nous ne pourrons échapper à l’évocation d’une démarche assurantielle privée. Je crois d’ailleurs savoir que certains d’entre vous, chers collègues siégeant sur les travées de la majorité, ont déjà envisagé cette possibilité.
Les amendements portant sur le complément de retraite par capitalisation prennent ici tout leur sens : à partir du moment où l’on permet à un retraité d’avoir une rente complémentaire ou de choisir, comme les auteurs du dernier amendement le souhaitent, qu’une partie de ces versements se matérialise sous forme de capital, cela permet de responsabiliser – j’insiste sur ce mot – les bénéficiaires de ces mesures.
Nous sommes aujourd’hui dans une logique d’assistanat général. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Je maintiens : nous sommes dans une logique d’assistanat général ! Les salariés qui ont le courage de financer des comptes de capitalisation auront cette faculté de choix quand ils sortiront du régime…
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vos paroles vous trahissent, monsieur Cardoux !
M. Jean-Noël Cardoux. … et pourront ainsi s’assurer contre un certain nombre d’événements liés à la dépendance. Un versement partiel en capital peut leur permettre de faire face à certaines dépenses, tel un changement de domicile, par exemple. Vous savez très bien que les personnes âgées préfèrent souvent les rez-de-chaussée ou ont besoin d’adapter leur logement.
Par ailleurs, nous avons abondamment parlé des études longues, dans lesquelles les étudiants s’engagent afin d’obtenir un diplôme leur permettant de prétendre à une rémunération confortable. Pourquoi ne pas autoriser de compenser ces années passées à étudier, sans avoir cotisé, par des versements sur un compte de capitalisation ?
J’en terminerai en répondant par avance à un argument que l’on nous opposera : rentrer dans la logique financière des fonds de pension, c’est prendre un risque en raison de la spéculation inhérente à ce système. Si nous raisonnions à cinq ans, je ne pourrais qu’approuver. Or une retraite est liquidée à l’issue de quarante ans de carrière et, sur une telle durée, il n’y a pas d’exemple de fonds de pension n’ayant pas été profitable ou n’ayant pas produit d’augmentation sensible du capital investi.
Les amendements qui vous sont soumis apportaient tous les ingrédients nécessaires pour faire entrer notre système de retraite dans une ère moderne qui corresponde à l’évolution démographique de notre pays.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je soutiendrai l’amendement n° 306, présenté avec beaucoup de franchise et de professionnalisme par Isabelle Debré. Je ne reviendrai pas sur les arguments que viennent d’exposer MM. Husson et Cardoux.
Mme le rapporteur a rappelé l’alternance survenue entre 1997 et 2002. Depuis dix ans, il s’est passé beaucoup de choses, mais, quelles que soient les personnes exerçant le pouvoir, dont les prises de position doivent être respectées, elles doivent faire preuve de bonne gestion.
Le présent amendement, dense – sept pages –, a le mérite de poser les réels problèmes, évoqués par notre collègue Cardoux : démographie, dépendance, évolution de la société.
Cela étant, je ne suis pas convaincu de l’existence d’une volonté de changement...
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Si jamais j’avais nourri quelques doutes à l’égard de la position que j’adopterai sur cet amendement – ce qui n’est pas arrivé –, votre franchise m’aurait ouvert les yeux, chers collègues !
M. Jean-Noël Cardoux. Comme toujours !
M. Jean Desessard. Vous venez enfin de nous livrer le fond de votre pensée sur le système de retraite.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Tout à fait ! Vous avez parlé d’« assistanat » !
M. Jean Desessard. Nous devons, selon vous, nous diriger vers un système de capitalisation. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Noël Cardoux. Vous m’avez mal écouté ! J’ai parlé d’un complément de retraite !
M. Jean Desessard. Certes, un complément… Mais ce n’est qu’un début !
Vous aviez pourtant commencé doucement en nous expliquant que vous étiez favorables à la répartition par points, à l’instar des membres du groupe UDI-UC. Puis, au fur et à mesure de la discussion, presque sur le ton de la confidence, vous en êtes maintenant à parler de la capitalisation et des services qu’elle peut rendre pour rattraper les trimestres perdus lors des longues études, et ainsi de suite !
Mme Isabelle Debré. Nous voulons laisser aux gens la liberté de choisir !
M. Jean Desessard. Nous voyons clairement dans quelle direction vous vous orientez. Vous avez même employé le mot « assistanat » pour qualifier le système actuel. De solidarité, en revanche, il n’est pas beaucoup question dans votre discours… (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Il faudra nous expliquer quelle différence vous faites entre assistanat et solidarité ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Jean Bizet. Regardez dans un dictionnaire !
M. Jean Desessard. Quoi qu’il en soit, merci de cette franchise et de ce moment de vérité. Nous savons maintenant vers quoi vous tendez : un système de répartition a minima et de capitalisation a maxima !
Mme Isabelle Debré. Vous caricaturez mes propos ! Je n’ai jamais proposé cela !
M. Jean Desessard. C’est pourtant ce que j’ai cru comprendre à entendre M. Cardoux !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Votre intervention, monsieur Cardoux, aura eu le mérite de témoigner de votre logique politique et de vos choix en matière de retraite.
Pour nous, la réforme des retraites est un projet de société à part entière. Fidèles à vous-mêmes, chers collègues de l’opposition, après avoir réussi à faire voter à l’article 1er une première entrée dans la capitalisation, vous persévérez avec cet amendement. Toutefois, cette constance ne correspond en rien à notre projet.
Votre présentation ne tient pas compte de la réalité des faits. Pourriez-vous nous indiquer quels sont les dégâts causés par les régimes par capitalisation ? Il n’est que de regarder ce qui se passe aux États-Unis ou dans d’autres pays d’Europe pour comprendre où peuvent nous mener de tels choix !
Selon vous, de nombreuses personnes ne travailleraient pas suffisamment, seraient en quelque sorte des feignants qui refuseraient d’aller vers un système plus juste. Il s’agit là de jugements de valeur extrêmement péjoratifs. Vous semblez oublier une partie de la réalité, celle qui montre combien cette recherche effrénée de toujours plus de capitalisation met les peuples à genoux !
Nous avons évoqué l’exemple de la Suède que vous avez omis de citer. Dans ce pays, les cotisations et le partage des richesses sont gelés. Le seul objectif, c’est l’équilibre des comptes, état de fait que nous avons dénoncé dans nos différentes interventions. Aujourd’hui, les pensions de retraite servent véritablement de variables d’ajustement. Nous ne voulons pas d’un tel système en France. Et pour cause, en cinq ans, les retraites en Suède ont connu une perte cumulée de 40 % !
Alors, si vous voulez effectivement que notre régime de retraite soit calqué sur ce genre de modèle, ne comptez pas sur le concours du groupe CRC.
Nous voterons contre le présent amendement. Tout au long du débat, nous avons justement cherché à montrer que d’autres choix politiques que ceux que vous proposez étaient possibles. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC – M. Jacky Le Menn applaudit également.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 306.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 33 bis (nouveau)
I. – Après l’article L. 921-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 921-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 921-2-1. – Les agents contractuels de droit public sont affiliés à un régime de retraite complémentaire obligatoire relevant de l’article L. 921-2, dénommé “Institution de retraite complémentaire des agents non-titulaires de l’État et des collectivités publiques” et défini par voie réglementaire.
« Les articles L. 243-4 et L. 243-5 s’appliquent aux cotisations versées à l’institution mentionnée au premier alinéa du présent article. Le premier alinéa de l’article L. 355-2 s’applique aux prestations servies par cette institution.
« L’institution mentionnée au premier alinéa du présent article est soumise au contrôle de l’inspection générale des affaires sociales. »
II. – Les salariés des personnes morales de droit public embauchés, à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, par un contrat relevant du chapitre IV du titre III du livre Ier de la cinquième partie du code du travail sont affiliés au régime de retraite complémentaire mentionné à l’article L. 921-2-1 du code de la sécurité sociale.
Les salariés des personnes morales de droit privé embauchés, à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, par un contrat relevant du chapitre IV du titre III du livre Ier de la cinquième partie du code du travail sont affiliés aux régimes de retraite complémentaire mentionnés à l’article L. 921-4 du code de la sécurité sociale.
III. – À titre transitoire, jusqu’au 31 décembre 2016 :
1° Le premier alinéa de l’article L. 921-2-1 du code de la sécurité sociale n’est pas applicable aux salariés, y compris ceux embauchés après la date de promulgation de la présente loi, des employeurs qui, à la même date, sont adhérents, pour l’ensemble de leurs salariés, à un régime de retraite complémentaire obligatoire mentionné aux articles L. 921-2-1 ou L. 921-4 du même code ;
2° Les adhésions mentionnées au 1°, ainsi que les affiliations qui en résultent, sont maintenues quelle que soit la nature juridique des contrats de travail des salariés, sauf en cas de modification de la nature juridique de l’employeur ;
3° Par dérogation au second alinéa de l’article L. 922-2 dudit code, lorsque la modification de la nature juridique d’un employeur le conduit à adhérer à un régime de retraite complémentaire qui ne relève pas des régimes mentionnés à l’article L. 921-4 du même code, les affiliations, antérieures à la date de l’opération, des salariés dont la nature du contrat de travail n’est pas modifiée et qui étaient affiliés conformément au critère défini par l’article L. 921-2-1 dudit code sont maintenues dans les régimes mentionnés à l’article L. 921-4 du même code. Les droits acquis avant la date de l’opération par les salariés qui ne sont pas mentionnés à la première phrase du présent 3°, ainsi que les droits des anciens salariés et assimilés bénéficiaires directs d’avantages de retraite complémentaire, sont maintenus dans les régimes mentionnés au même article L. 921-4.
Lorsque la modification de la nature juridique d’un employeur le conduit à adhérer à un régime de retraite complémentaire qui relève des régimes mentionnés audit article L. 921-4, les affiliations, antérieures à la date de l’opération des salariés, dont la nature du contrat de travail n’est pas modifiée et qui étaient affiliés conformément au critère défini à l’article L. 921-2-1 du même code sont maintenues dans le régime antérieur. Les droits acquis avant la date de l’opération par les salariés qui ne sont pas mentionnés à la première phrase du présent alinéa, ainsi que les droits des anciens salariés et assimilés bénéficiaires directs d’avantages de retraite complémentaire, sont maintenus dans le régime antérieur.
Les transferts induits par les deux alinéas précédents donnent lieu à compensation financière entre les régimes concernés. La compensation financière s’organise, dans les conditions décrites par une convention-cadre conclue entre les régimes concernés et approuvée par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en tenant compte des charges et des recettes respectives de chacun des organismes.
Les modalités d’application du présent III sont définies par décret en Conseil d’État.
IV. – Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 921-2-1 du code de la sécurité sociale, les affiliations à des régimes de retraite complémentaire déjà réalisées à la date du 1er janvier 2017 sont maintenues jusqu’à la rupture du contrat de travail des salariés concernés.
Une compensation annuelle est organisée entre les régimes mentionnés à l’article L. 921-4 et le régime institué par l’article L. 921-2-1 du même code. Une convention entre les fédérations mentionnées à l’article L. 921-4 et l’institution mentionnée à l’article L. 921-2-1 dudit code, approuvée par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, organise cette compensation, en tenant compte des charges et des recettes respectives de chacun de ces organismes résultant du présent article. À défaut de signature de la convention dans les douze mois qui suivent l’entrée en vigueur du présent IV, un décret en Conseil d’État organise cette compensation.
Les modalités d’application du présent IV sont définies par décret en Conseil d’État.
V. – La première phrase du second alinéa de l’article L. 922-2 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « , à l’exclusion des salariés visés à l’article L. 921-2-1 ».
VI. – Les IV et V du présent article entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2017. – (Adopté.)
Article 34
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi tendant :
1° Pour Mayotte, à étendre et adapter la législation en matière d’assurance vieillesse applicable en métropole ;
2° Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, à rapprocher les dispositions de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon de la législation applicable en métropole.
II. – Les ordonnances sont publiées au plus tard le dernier jour du dix-huitième mois suivant celui de la promulgation de la présente loi.
Les projets de loi portant ratification de ces ordonnances sont déposés devant le Parlement au plus tard le dernier jour du sixième mois suivant celui de leur publication. – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me doutais bien que nos amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 33 allaient susciter quelques réactions et donner, ainsi, un peu de relief à la fin de notre débat sur les retraites !
Quitte à vous décevoir, chers collègues du groupe CRC, même si nous avons obtenu quelques succès au cours de l’examen de cette réforme, nous estimons être encore loin du compte.
Sans refaire l’histoire, je voudrais rappeler succinctement ce qui a été reproché à cette réforme.
J’ai qualifié le présent projet de loi de « rustine sur une jambe de bois » : il s’agit d’une réforme comptable, qui procède à un ajustement arithmétique, à seule fin de gagner un peu de temps. Alors que le déficit en termes de financement s’élève, pour les années à venir, à 20 milliards d’euros, ce texte n’en comble à peine que la moitié. On le sait donc pertinemment : d’autres rustines devront bientôt être collées.
En effet, les problèmes de fond n’ont pas été abordés. Je pense à la réforme systémique, à la convergence entre secteurs public et privé, ou encore à la gouvernance. Sur ce dernier point, je rappelle que le système de retraite français est le plus cher d’Europe, et de loin, puisqu’il coûte 6 milliards d’euros par an en frais de fonctionnement, somme qui n’est que de 3 milliards d’euros environ dans les autres pays.
Au lieu de s’attaquer à ces problèmes structurels, on a préféré prendre des mesures qui grignotent toujours plus la marge les entreprises.
Bien sûr, je l’ai déjà indiqué, nous avons obtenu quelques succès. Ainsi, certains articles ont été supprimés : l’article 2 sur l’allongement de la durée de cotisation, l’article 3, l’article 4, l’article 6 sur le compte personnel de prévention de la pénibilité, l’article 10 sur la date d’entrée en vigueur des mesures sur la pénibilité, l’article 12 sur les nouvelles règles du cumul emploi-retraite, l’article 16 sur le rachat d’années d’études, l’article 31 sur le pilotage de la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles et, enfin, l’article 32 sur la gouvernance de la caisse des professions libérales.
Même si les objectifs de ceux qui ont voté comme nous n’étaient pas les mêmes que les nôtres, nous avons donc pu corriger, en partie, ce que nous estimions non profitable.
Certains amendements émanant de membres de l’opposition ont été adoptés. Je pense notamment à un amendement du groupe UDI-UC déposé à l’article 1er qui visait à mettre en œuvre une réforme systémique instituant un régime universel par points à compter du premier semestre 2017 et à organiser une conférence sociale pour en débattre en 2015. Je pense aussi à un amendement présenté à l’article 12 bis qui reprenait la proposition de loi d’Isabelle Debré sur la possibilité de cumul d’un emploi avec l’allocation de solidarité aux personnes âgées.
Ces éléments sont positifs mais, puisque les critiques de fond demeurent – Gérard Longuet et d’autres orateurs de mon groupe les ont soulignées lors de nos débats –, et puisque nous n’allons pas assez loin, les membres du groupe UMP ne voteront pas cette réforme.
Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. Jean Desessard. Mais qui va voter ce texte ? (Sourires sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je n’ai pas pu être présent lors de la discussion générale, mais, à la lecture du projet de loi et des comptes rendus des débats, j’ai le sentiment que le Gouvernement se trouve dans une situation de grande ambiguïté, pour ne pas dire de grande incohérence.
Effectivement, ce gouvernement participe aux réunions du Conseil européen à Bruxelles. Il y est partisan d’une coordination étroite des politiques économiques et budgétaires. Il y défend même l’idée d’un gouvernement économique européen. De cette étroite coordination résultent des recommandations adressées à la France, et approuvées par les institutions de l’Union.
À lire ces recommandations, on comprend que, en revenant partiellement sur la réforme de 2010, la France est allée à leur encontre. On apprend aussi qu’il conviendrait de relever de nouveau l’âge légal de départ à la retraite. On découvre, enfin, qu’il faut éviter d’augmenter les niveaux de cotisations de sécurité sociale, en raison des incidences négatives sur le coût du travail et, par conséquent, sur la compétitivité et l’emploi.
Si ce gouvernement faisait preuve de cohérence et de sens de la prospective, nul doute qu’il appliquerait les recommandations européennes, puisqu’il est partisan d’une étroite coordination des politiques sur le continent !
Pourtant, ce n’est pas le cas : à Paris, le discours est tout autre. Je dirais même que le Gouvernement fait à peu près le contraire de ce que préconisent les institutions de l’Union européenne. À croire qu’il y aurait deux gouvernements, l’un à Bruxelles, l’autre à Paris ! En France, en effet, le Gouvernement ne veut pas toucher à l’âge de départ à la retraite, et il finance ce refus par une hausse des cotisations.
J’ignore combien de temps ces deux gouvernements français vont pouvoir cohabiter. Nos partenaires vont finir par se lasser de ce double langage. Nos économies sont interdépendantes, nous avons la même monnaie : nous ne pouvons plus prendre de décisions économiques et sociales majeures sans considérer ce que disent et ce que font nos partenaires européens.
Tous les pays de la zone euro ont fixé l’âge légal de départ à la retraite à soixante-cinq ans – voire à soixante-six ans –, avec, il est vrai, parfois des règles plus favorables pour les femmes. Nous sommes les derniers à croire que, en éliminant précocement les seniors du marché du travail et en taxant toujours plus les actifs, nous allons donner du travail aux plus jeunes. Il se passe exactement le contraire : la France est le pays où l’âge effectif de départ à la retraite est le plus bas, et plus d’un jeune Français sur quatre est au chômage. En Allemagne, où le départ à la retraite a lieu en moyenne deux ans plus tard, le taux de chômage des plus jeunes y est trois fois plus faible !
Je ne peux souscrire à une réforme qui nous éloigne de nos partenaires européens, qui va à l’encontre des recommandations de l’Union européenne, et qui va nuire à notre compétitivité. Étant résolument pour la construction européenne, et voulant être cohérent avec moi-même, je ne la voterai donc pas. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Nous voici parvenus à la conclusion d’une semaine de débats, qui ont été parfois intenses. On ne le dira jamais assez, débattre des retraites, c’est discuter d’un projet de société.
Au final, la copie sénatoriale est bien maigre. Quelques articles seulement ont été adoptés, dont l’article 1er. Or celui-ci, modifié à la suite d’une alliance entre la droite et le RDSE, consacre le passage, dès 2017, à un système de retraite par points, que le groupe CRC continue de combattre avec la plus grande détermination. En effet, ce basculement ferait des pensions de retraite la variable d’ajustement – avec les conséquences désastreuses que certains pays ont connues – et ouvrirait la voie au renforcement des mécanismes de capitalisation.
C’est donc bien d’un échec qu’il faut parler.
Cet échec est d’abord celui du Gouvernement, qui s’est obstiné à imposer le présent projet de loi, sans prendre en considération les pistes alternatives que nous n’avons eu de cesse de présenter. Les quelques amendements du groupe CRC adoptés au cours du débat l’ont d’ailleurs été, le plus souvent, contre son avis.
Ce texte contenait, c’est vrai, quelques avancées, au demeurant bien timides, en matière de réparation et de prévention de la pénibilité, notamment, et offrait quelques nouveaux avantages pour le calcul de trimestres cotisés.
Mais s’il est un échec, c’est que, pour l’essentiel, il tourne le dos aux valeurs de gauche.
Je pense en particulier au passage à quarante-trois annuités de cotisations pour les jeunes et les salariés âgés de quarante ans et moins qui leur impose de travailler jusqu’à soixante-six ans – voire plus – ou de partir avec des pensions de retraite amoindries.
Je pense aussi à la non-revalorisation des pensions de retraite au 1er avril, excepté celle de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA, comme si un retraité qui perçoit plus de 787 euros était un privilégié, qui doit, lui aussi, faire des sacrifices !
Je pense enfin au choix, effectué au nom d’une conception particulièrement étroite de la compétitivité, de faire porter tout le poids des efforts sur les salariés et les retraités, et d’en exonérer totalement les employeurs.
Tout au long de nos débats, nous avons constaté que le présent texte ne pouvait rassembler la majorité sénatoriale, ni même la mobiliser, face à une droite décomplexée.
Quelle erreur d’avoir ignoré le message de confiance en l’avenir délivré ici même par Pierre Mauroy, en 2010 ! Effectivement, ce message indiquait la voie à suivre – une voie progressiste ! –pour consolider la formidable conquête que représente la retraite à soixante ans.
Quelle erreur, encore, de présenter un projet de loi qui, pour l’essentiel, valide, et donc légitime, les réformes précédentes, notamment la réforme Sarkozy-Woerth de 2010, contre laquelle la gauche unie avait alors bataillé !
De fait, un espace politique a été ouvert à la droite. Elle s’y est engouffrée sans retenue et le groupe CRC a été souvent bien seul à la contredire. Comme le projet de la droite, pourtant, doit être combattu ! Ce qui a été soutenu par la droite dans cet hémicycle mérite d’être rappelé et porté à la connaissance de tous. Au nom du courage politique, la droite propose de faire reculer l’âge légal de départ à la retraite de soixante-deux ans à soixante-cinq ans. Au nom de la convergence avec le régime général du régime du secteur public et des régimes spéciaux, la droite veut punir les actifs qui dépendent de ces derniers. Cette convergence, d’ailleurs, est déjà en cours : elle se fait au prix de bien des sacrifices, qu’illustre, entre autres, le maintien du gel du point d’indice des fonctionnaires. Je ne reviendrai pas sur l’insistance de la droite à développer les systèmes de retraite par capitalisation, qui, partout, font faillite. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
C’est une autre réforme des retraites qu’il aurait fallu opposer à ce projet régressif. Oui, il était possible de faire autrement, de remuscler notre système de retraite par répartition, en prêtant l’oreille à nos propositions. Je pense à celle qui vise à taxer les placements financiers des entreprises et des banques qui nuisent à l’économie réelle, mais sont exemptés de toute cotisation sociale, par exemple. Je pense aussi à celle qui tend à faire des cotisations sociales des entreprises des outils intelligents : celles qui jouent contre l’emploi, et donc assèchent les comptes de la sécurité sociale, devraient cotiser plus ; les exonérations de cotisations, quant à elles, seraient conditionnées au respect de la loi.
Vous avez préféré ignorer ce qui aurait pu être une base de rassemblement et de résistance. Nous le regrettons, même s’il n’est jamais trop tard pour bien faire.
C’est donc avec le sentiment d’un rendez-vous manqué que le groupe CRC votera contre ce projet de loi, dont certaines dispositions, en plus de ne pas aller dans la bonne direction, ont été sérieusement aggravées par la droite. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, alors que nous achevons l’examen de ce projet de loi, je tenais, avant tout, à saluer la qualité de nos échanges et de nos débats. Quels que soient nos points de divergence, nos discussions ont été riches et approfondies. Je tenais surtout à remercier notre rapporteur, Christiane Demontès, de son travail, de la qualité de ses réponses et de sa grande capacité d’écoute, ainsi, bien sûr, que tous les membres de la commission des affaires sociales.
Avec ce texte, il s’agissait de rétablir l’équilibre des régimes de retraite et de répondre à des injustices sociales. Cela a été indiqué, si rien n’est fait, le déficit atteindra 20 milliards d’euros en 2020, et près de 27 milliards d’euros en 2040.
Au terme de ces six jours de débat en séance publique, le texte qui nous a été transmis par l’Assemblée nationale a été, c’est le moins que l’on puisse dire, remanié.
Certes, tel qu’issu de nos travaux, le projet de loi comporte de bonnes dispositions. Je pense notamment à la prise en compte de trimestres non cotisés pour le bénéfice d’un départ anticipé pour carrière longue, et à la possibilité, pour les apprentis, de valider l’ensemble de leurs trimestres d’apprentissage au titre de leurs droits à la retraite. Je pense également aux mesures en faveur des non-salariés agricoles. Surtout, je me félicite de la suppression de l’article 4. La mesure qu’il comportait, profondément injuste, excluait, j’en conviens, les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées. Mais vous avez oublié tous les autres retraités qui vivent sous le seuil de pauvreté et qui ne bénéficient pas de cette allocation. Un million de personnes est tout de même concerné ! Si une réforme des retraites suppose des efforts de la part de chacun, elle ne doit pas pénaliser les plus faibles.
Nous avons également obtenu le maintien du critère de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé pour un départ anticipé. C’est une très bonne chose à laquelle plusieurs membres de mon groupe tenaient. La suppression de cette reconnaissance pénaliserait bon nombre de travailleurs handicapés qui ne peuvent justifier d’un taux d’incapacité pendant suffisamment longtemps.
J’en viens maintenant à la mise en place d’une réforme systémique. Nous l’appelons de nos vœux depuis quelques années déjà et nous nous réjouissons de son adoption par le Sénat. C’est à ce titre que nous préparerons durablement l’avenir de notre système de retraite. Je le répète, le passage à un système par points n’implique pas l’abandon de notre système de retraite par répartition. Cela n’a rien à voir !
Pour autant, le projet de loi, tel qu’il résulte de nos travaux, n’est pas satisfaisant. C’est un texte détricoté, dénaturé, oserais-je dire !
Le Sénat a notamment rejeté l’une de ses mesures emblématiques : le compte personnel de prévention de la pénibilité. Nous le savons bien, tous les Français n’atteignent pas l’âge de la retraite en étant dans le même état de santé. L’exposition à des facteurs de pénibilité contribue pour une large part à réduire l’espérance de vie. Le port de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, l’exposition à des agents chimiques dangereux, le travail de nuit sont autant de facteurs susceptibles de laisser des traces irréversibles sur l’état de santé des travailleurs. Si l’espérance de vie a augmenté de façon générale, l’écart entre cadres et ouvriers, par exemple, ne s’est pas sensiblement réduit. Je regrette vraiment que le Sénat n’ait pas adopté cette disposition qui, même si elle n’est pas parfaite, aurait constitué une avancée indéniable et très attendue.
Dans ces conditions, vous l’aurez compris, madame la ministre, les sénateurs du RDSE n’approuveront pas le texte qui nous est aujourd’hui proposé. Celui-ci est très éloigné d’une réforme cohérente et approfondie de notre système de retraite, réforme que nous aussi appelons de nos vœux. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
Mme Isabelle Debré. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Gérard Roche.
M. Gérard Roche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen du présent texte par la Haute Assemblée représente pour le groupe UDI-UC un considérable progrès. Je veux parler, vous l’avez compris, de l’adoption de notre amendement ouvrant réellement la voie vers une réforme systémique des retraites.
Dès lors, la logique des réformes paramétriques s’est essoufflée. Je vous rappelle, mes chers collègues, les nouveaux termes de l’article 1er : « Afin d’assurer la pérennité financière et l’équilibre entre les générations du système de retraite par répartition, ainsi que son équité et sa transparence, une réforme systémique est mise en œuvre à compter du premier semestre 2017.
« Elle institue un régime universel par points ou en comptes notionnels sur la base du septième rapport du Conseil d’orientation des retraites du 27 janvier 2010.
« Le Gouvernement organise une conférence sociale et un débat national sur cette réforme systémique au premier semestre 2015. »
Telle est la réforme que nous attendions, aux antipodes de celle que l’on nous a servie.
Évidemment, nous ne nous faisions aucune illusion sur le sort de cet article, comme sur celui du reste du texte d’ailleurs. Mais l’adoption de notre amendement pose à nos yeux un jalon et constitue une étape supplémentaire vers ce qui nous paraît à la fois éminemment souhaitable, incontournable et inexorable.
D’ores et déjà, une partie substantielle des partenaires sociaux s’y est ralliée.
Vous-même, madame le rapporteur, aviez soutenu cette position dans les conclusions du rapport d’information de 2010 fait au nom de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, et que vous aviez cosigné avec notre ancien collègue Dominique Leclercq. Nous regrettons juste que vous vous soyez ravisée depuis.
Madame la ministre, comme notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe vous le faisait remarquer lors de la discussion générale, peut-être ne serez-vous pas la ministre de la réforme systémique, mais nous avons l’absolue conviction que, tôt ou tard, cette réforme se fera. Nous espérons juste qu’elle intervienne le plus rapidement possible, parce que c’est la seule voie de rénovation pérenne du système, et parce que nos concitoyens la souhaitent. Effectivement, un récent sondage a montré que l’évolution vers un régime unique est plébiscitée par 73 % des Français.
Pourquoi alors ne pas s’engager dans cette voie ? Pour acheter la paix sociale ? Doit-on céder aux corporatismes ?
L’adoption de notre amendement ne pouvait que condamner par avance la réforme qui nous était soumise, tant les deux options sont antinomiques.
Et qu’a sanctionné le Sénat en détricotant systématiquement votre texte ? Une énième réforme paramétrique, qui plus est à la fois trompeuse et très insuffisante au regard des enjeux en cause.
Contrairement à ce que son intitulé voudrait faire entendre, le projet de loi n’est absolument pas de nature à garantir l’avenir et la justice du système de retraites.
Sur le plan financier, le compte n’y est pas. Il faudra revoir le dispositif avant 2020.
Sur le plan de l’équité, le compte n’y est pas davantage. Madame la ministre, tâchez au moins de conserver l’objectif que nous avons fait introduire dans le texte d’un minimum vieillesse garanti à 75 % du SMIC pour tous, comme vous l’assurez déjà aux exploitants agricoles. Cette mesure ne soulèvera pas de problème financier du fait de l’extinction des régimes spéciaux.
Aujourd’hui, c’est par recours à un artifice purement juridique que l’on nous demande de nous prononcer sur ce texte issu de nos travaux, et qui est vidé de sa substance et de son sens.
En réalité, sur quoi vote-t-on ? Sur la réforme que vous nous proposez et allez mettre en œuvre. Or, cette réforme, nous la rejetons, comme en témoigne l’amendement précité, que nous avons présenté au début de nos débats.
Mais il ne faut pas brocarder le Sénat et le qualifier, on ne peut plus facilement, de « triangle des Bermudes des projets de loi ». En fait, le problème vient non pas de notre assemblée, mais des textes qui lui sont soumis.
M. Jean-François Husson. C’est vrai !
M. Gérard Roche. C’est pourquoi les membres du groupe UDI-UC voteront contre celui qui nous est présenté. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui résulte des débats qui se sont déroulés depuis une semaine dans cet hémicycle est complètement vidé de son sens, en raison de la suppression, notamment, des articles 2, 3, 4 et 6.
Ainsi, il n’a plus rien d’un texte garantissant l’avenir et la justice de nos retraites.
Il n’a plus rien d’un texte qui assure le redressement et des comptes des régimes de retraite et le financement de ceux-ci.
Il n’a plus rien d’un texte qui inscrit au rang de priorité la prise en compte des évolutions sociales et la diversité des parcours professionnels, en particulier pour les femmes et les plus jeunes.
Certains d’entre vous, mes chers collègues, ont fait le choix de renoncer à ce dispositif. Notre vote n’en prendra pas acte.
Assurer l’avenir de notre système de retraite par répartition est un véritable défi : conscients avant ce débat, nous en sommes encore plus convaincus aujourd’hui.
Nous le savons, certaines décisions ne sont pas faciles à prendre. Il n’est jamais aisé ni populaire de demander des efforts supplémentaires à nos concitoyens.
Les contributions envisagées représentent un effort pour chacun. Il ne s’agit pas de le nier et de faire comme si nous pouvions restaurer l’équilibre de nos régimes de retraite sans que chacun soit appelé à y contribuer.
Comme je l’indiquais voilà quelques jours au cours de la discussion générale, nous avons la responsabilité de ne pas trahir les règles immuables voulues par les fondateurs de ce modèle unique en 1945 et de préserver cet héritage.
Nous avons aussi la responsabilité d’assurer l’avenir en préservant les acquis et en protégeant ceux qui jusqu’à présent sont trop souvent passés à travers les mailles du filet de protection que la Nation doit à ceux qui en ont le plus besoin.
Nous avons enfin la responsabilité de cesser de faire peser sur les générations futures le poids de l’indécision du passé.
Il n’existe pas de remède miracle et le refus ou l’immobilisme ne sont pas des attitudes responsables face aux défis que nous devons relever, tels l’allongement heureux de l’espérance de vie, les conséquences du baby-boom, ou encore la crise économique.
Dans ce contexte, il est de notre responsabilité de regarder les choses en face, avec lucidité, et de dire la vérité à nos concitoyens, à savoir qu’aujourd’hui nous devons agir pour garantir notre système de retraite par répartition.
L’augmentation de la durée de cotisation a suscité des débats dans cette enceinte, mais elle est juste, parce qu’elle est en phase avec l’allongement de l’espérance de vie et parce qu’elle est assortie de mesures concernant la pénibilité et la diversité des parcours professionnels.
L’égalité entre les femmes et les hommes a été au centre des discussions. Il convient de le noter, c’est la première réforme des retraites qui tient compte de leur spécificité, laquelle a été longtemps ignorée par la précédente majorité. Le projet de loi comporte des avancées et des mesures ambitieuses. Il était temps !
Il n’est jamais trop tôt pour s’attaquer aux déficits, mais il est aussi parfois trop tard.
Alors que le projet de loi émanant de l’Assemblée nationale préparait l’avenir, la version qui résulte ce soir des travaux du Sénat l’hypothèque.
Aux côtés du Gouvernement, le groupe socialiste assume son choix de progrès et de justice, dans la clarté et dans la vérité. C’est la raison pour laquelle, vous l’aurez compris, mes chers collègues, nous nous opposerons au texte issu des travaux de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. Tout d’abord, je remercie les différents présidents qui se sont succédé à la tribune de la bonne animation des débats et du respect des horaires – le terme du présent débat avait été programmé cette fin d’après-midi ou ce soir –, dans la sérénité.
Je remercie aussi Mme le rapporteur de ses explications détaillées lors de l’examen des articles et des amendements.
Progressivement, madame la ministre, vous vous êtes accoutumée aux débats du Sénat et avez apporté des réponses de plus en plus positives, précises.
Nous nous félicitons qu’un dialogue se soit instauré au fur et à mesure des débats. Je salue la bonne qualité de nos différents échanges.
Mais peut-être aurions-nous dû être plus saignants, car le résultat n’est pas, à l’évidence, terrible : un texte déchiqueté, qui n’a plus aucune cohérence, dont les articles importants ont été supprimés. C’est en réalité un projet en lambeaux qui sort de nos échanges, que nous avons tous trouvé intéressants. Ainsi, parfois, les débats ne garantissent pas un résultat intéressant en termes de contenu.
J’en viens aux différents articles.
Pour ce qui concerne l’article 1er, nous avons défendu le système de retraite par répartition. J’ai pris note de la remarque de Mme Laborde selon laquelle même s’il est prévu un système à points, il n’est pas contradictoire avec un système par répartition, considéré comme un régime dans lequel une génération cotise pour d’autres qui en profitent.
La répartition en faveur de ceux qui bénéficient des retraites est aujourd’hui calculée en fonction d’annuités : le système à points serait, lui, davantage fondé sur l’accumulation de points par une personne que sur les montants qu’elle a pu cotiser au cours de sa carrière.
Mais, à l’instar du groupe CRC, nous craignons que le système à points ne conduise progressivement vers la capitalisation.
Pour autant, lors de l’examen de l’article 1er, nous avons indiqué que nous souhaitions un aménagement du système actuel afin qu’il soit davantage tenu compte des carrières heurtées et surtout de la précarité, ce qui n’est pas toujours facile. D’ailleurs, la majorité du Sénat semblait s’orienter dans ce sens.
Les écologistes n’ont pas voté en faveur de l’article 2. Mais je n’ai pas compris la raison pour laquelle la droite n’a pas voté en sa faveur, puisqu’elle prône l’allongement de la durée de cotisation, vous l’avez dit, monsieur Bizet, jusqu’à non pas soixante-deux, mais soixante-cinq ans. Il fallait prendre vos responsabilités au moment du vote, puisque vous étiez en accord avec les socialistes sur ce point.
Nous, nous ne partageons pas le même point de vue pour des raisons écologistes et sociales. Nous ne souscrivons pas à l’idée de travailler toujours plus. Alors que de nombreux jeunes, des seniors sont au chômage, nous trouvons paradoxale la volonté de faire travailler davantage les actifs. Nous ne comprenons pas cette logique.
Nous étions également opposés à l’article 4, qui prévoyait le report de la revalorisation des pensions en raison des petites pensions de 800, 900 ou 1 000 euros par mois. Nous estimons que l’on ne peut pas toucher au pouvoir d’achat de ces retraités.
Ces articles ont été supprimés. Mais, au vu du résultat, nous ne nous en réjouissons guère… Nous pensons qu’il faut retravailler sur le sujet.
Les articles sur la pénibilité nous intéressaient. Malheureusement, ils ont disparu. Pourtant, il y avait une convergence entre nous sur cette question.
Nous n’allons évidemment pas soutenir un texte aux allures de pantin désarticulé et inconsistant. Nous voterons donc contre l’ensemble du projet de loi. Et le scrutin risque de déboucher sur une grosse surprise : un rejet à l’unanimité ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
Mme Isabelle Debré. C’est incroyable !
M. Jean Desessard. Un certain nombre d’articles ont disparu, chacun s’y opposant pour des raisons diverses et variées. En fin de compte, il ne reste plus rien.
Quoi qu’il en soit, je regrette que le Gouvernement ait engagé la procédure accélérée sur un texte relatif aux retraites. (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Qu’a fait l’UMP en 2010 ?
M. Claude Jeannerot. La droite n’a pas de mémoire !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. C’est incroyable !
M. Jean Desessard. Le sujet méritait un débat approfondi, notamment, cela a été souligné, la pénibilité.
En outre, alors que les ministres nous avaient affirmé lors de leur arrivée aux responsabilités que les rapports entre le Gouvernement et le Parlement allaient changer et qu’il y aurait désormais plus de travail en amont, force est de constater qu’une plus grande concertation avec la représentation nationale ne serait pas de trop !
J’aimerais aussi évoquer nos relations avec nos partenaires et amis socialistes. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Husson. Opération déminage !
M. Jean Desessard. Au groupe écologiste, nous avons des valeurs fondamentales. Nous attendons de nos partenaires une collaboration, une solidarité…
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean Desessard. Nous voulons un travail commun…
M. Jean-Claude Lenoir. Pourquoi pas un « programme commun » ? (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. … et en amont.
Chers amis, chers partenaires, cette coopération, nous devons la penser ensemble. Ne croyez pas qu’il suffit de nous imposer votre bon vouloir en pensant que nous accepterons ! Je le répète, nous avons des valeurs !
Au demeurant, il est surprenant, voire désolant, de ne pas retrouver aujourd'hui les positions que certains défendaient voilà trois ans…
M. le président. Concluez, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. À l’avenir, si le Parlement devait être saisi d’un nouveau projet de loi sur les retraites, nous souhaiterions être pleinement associés à son élaboration. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Plusieurs sénatrices et sénateurs de l’UMP applaudissent ironiquement.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l’issue de la discussion du présent projet de loi, présenté comme devant garantir l’avenir et la justice du système de retraites, on ne peut qu’être déçu tant le texte a été verrouillé. Le Gouvernement s’est opposé à toute évolution, qu’elle vienne d’un côté ou de l’autre de l’hémicycle.
Je salue les efforts de notre rapporteur, Christiane Demontès, qui a essayé, tout au long de nos débats, de soutenir le projet du Gouvernement et d’éclairer nos travaux de sa connaissance du sujet.
En revanche, je regrette personnellement l’attitude que vous avez eue, madame la ministre. Vous m’excuserez de m’exprimer en termes peut-être moins fleuris que M. Desessard, mais, au cours de l’examen de ce texte, plus particulièrement au cours des premiers jours, j’ai eu le sentiment que vous nous disiez : « Causez toujours, j’ai une majorité à l’Assemblée nationale, et vos remarques importent peu ! »
Mme Isabelle Debré. Eh oui !
M. François Trucy. C’est exactement cela !
M. Gilbert Barbier. La plupart des économistes, toutes tendances confondues, considèrent que la présente réforme ne servira pas à grand-chose ; tout au plus permettra-t-elle de réduire très partiellement et très ponctuellement le déficit de la branche concernée.
Les régimes du secteur public et les régimes spéciaux ont été délibérément laissés de côté. Vos propositions, madame la ministre, sont une succession de petits ajustements paramétriques. Vous ciblez certaines catégories sociales, comme les salariés du privé et les retraités, c'est-à-dire des personnes qui n’ont pas pour habitude de défiler…
Ces ajustements sont pour le moins illusoires, voire dangereux. C’est le cas du report du 1er avril au 1er octobre de la revalorisation des pensions.
Si l’effet prévisible en 2014 peut effectivement être évalué à 800 millions d’euros, est-il sérieux d’affirmer, comme cela figure dans l’étude d’impact, que l’économie en 2040 sera de 2,6 milliards d’euros ? Vos experts ont une belle audace de préjuger le taux d’inflation dans vingt-sept ans ! Qu’en serait-il si celui-ci était de 5 % ou de 10 % ? Une telle proposition relève pour le moins d’une impréparation caractérisée. D’ailleurs, cela n’a pas échappé aux différents acteurs qui sont intervenus sur ce dossier.
La « grande affaire » du projet de loi est la prise en compte de la pénibilité. L’intention est louable ; une telle prise en compte est nécessaire.
La loi adoptée en 2010 n’avait effectivement pas entièrement résolu le problème. Mais votre approche collective, avec la mise en place de ce fichier de prévention, se révélera très difficilement réalisable, notamment dans les petites entreprises.
Je me suis penché, pendant le week-end, sur le cas d’une entreprise de charpente couverture de neuf salariés. Au titre des dix critères de pénibilité, hormis la secrétaire-comptable et, peut-être, un autre salarié travaillant en atelier, tous les autres employés seront reconnus comme exerçant un travail pénible. Quel sera leur sort ? Formation ? Reclassement ? Départ de l’entreprise ? Retraite anticipée ?
Selon la conception qui sera retenue des critères de pénibilité, près de 20 % à 25 % des salariés du privé pourraient se trouver dans cette situation de travail pénible. Là encore, l’étude d’impact est muette sur le coût de la disposition.
De plus, comme cela a été répété, une telle mesure sera source de tracas administratifs et de contentieux. Ajoutée à tout le reste, elle amènera probablement un certain nombre d’entrepreneurs à renoncer à leur activité.
Par ailleurs, vous ne voulez rien entendre sur l’article 32, que nous venons de rejeter. Vous voulez tout simplement mettre à bas un régime pourtant bien géré par les professions libérales. Vous espérez, et M. Domeizel vient de le confirmer, pouvoir accaparer un jour les réserves du fonds concerné et imposer une direction à vos ordres.
M. Claude Domeizel. Je n’ai jamais dit cela !
M. Gilbert Barbier. Cependant, avec le vote sur l’article 1er, la porte vers une réforme de fond, pouvant déboucher sur un fonctionnement par points, s’est entrouverte. Peut-être faut-il y voir un signe positif et considérer que, malgré l’occasion manquée aujourd'hui, nous aurons tout de même un jour la possibilité d’étudier une véritable réforme des retraites pour un système pérenne.
À titre personnel, et comme l’ensemble des membres de mon groupe, je ne voterai pas ce texte croupion. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme il l’avait fait en commission des affaires sociales, le groupe CRC votera unanimement contre cette réforme des retraites.
M. Jean-Noël Cardoux. Vous l’avez déjà dit !
Mme Isabelle Pasquet. Certes, le texte qui résulte des travaux du Sénat est radicalement différent de celui que le Gouvernement nous avait présenté après le vote de l’Assemblée nationale. Mais « différent » ne signifie pas pour autant « meilleur ».
Nous nous réjouissons évidemment de l’adoption des amendements de suppression des articles 2 et 4, qui organisent, pour l’un, l’allongement de la durée de cotisation et, pour l’autre, le gel des pensions. Mais nous ne nous faisons pas d’illusion. Je tiens à le dire, si la droite a voté en faveur de ces amendements, c’est par pur opportunisme ; chacun se souvient de ce qu’avait été son attitude en commission.
Et les réponses que la droite et le centre proposent en lieu et place de la présente réforme sont pires : allongement encore plus important de la durée de cotisation et report de l’âge légal de départ à la retraite.
Madame la ministre, plutôt que l’opposition tactique de la droite, je préfère retenir le rassemblement des sénatrices et sénateurs écologistes, d’une partie des sénatrices et sénateurs socialistes et de tous les membres du groupe CRC contre une mesure qui place votre gouvernement à contre-courant de l’histoire de la gauche.
Au cours de nos débats, nous avons fait la démonstration que l’argument derrière lequel vous vous abritez, celui d’un allongement de l’espérance de vie, n’est pas plus juste aujourd’hui qu’il ne l’était en 2010 quand, alors dans l’opposition, vous critiquiez l’augmentation de la durée de cotisation.
Entre 2003 et aujourd'hui, cette durée aura progressé, sous les effets conjoints de la droite et de votre gouvernement, de cinq ans et six mois. L’espérance de vie aurait-elle augmenté dans les mêmes proportions pendant la même période ? Nous ne le croyons pas.
Une telle option était envisagée dès 1986 par le Commissariat général au plan, qui préconisait déjà un allongement de la durée de cotisation à quarante-deux ans et demi. Une étude sur les conséquences de cette mesure sur le nombre de salariés privés d’emploi faisait apparaître que l’allongement induirait une progression de 15 % du chômage. Certes, le taux envisagé alors était sans doute surestimé. Mais il n’en demeure pas moins que l’allongement de la durée de cotisation s’accompagne systématiquement – nous l’avons vu en 2010 – d’une progression du nombre de licenciements, singulièrement à l’encontre des salariés les plus âgés.
À l’inverse, un élément nous semble certain. Les mesures contenues dans le projet de réforme sont assises sur un principe de départ que nous ne pouvons pas accepter : le refus, le vôtre, celui d’un gouvernement de gauche, d’opérer enfin une meilleure répartition des richesses. Pour preuve, les deux principales mesures de financement reposent sur les assurés. Certes, elles ont été supprimées. Mais aucune disposition de substitution n’a été adoptée pour garantir le retour pour toutes et tous à la retraite à soixante ans et pour rétablir l’équilibre des comptes sociaux, dont la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV.
Comme le souligne Henri Sterdyniak : « Le déficit des régimes de retraites en 2012, 16 milliards d’euros, provient essentiellement de la profondeur de la récession, qui a fait diminuer le niveau d’emploi d’environ 5,5 %, faisant perdre 14 milliards d’euros de ressources aux régimes de retraites. » Avec son collègue de l’Observatoire français des conjonctures économiques, l’OFCE, Gérard Cornilleau, il écrit ceci : « À court terme, le déséquilibre des régimes de retraites induit par la crise doit être accepté. Il faut éviter une baisse des retraites par une désindexation progressive, qui diminuerait la fiabilité du système et enfoncerait dans la crise en pesant sur la consommation. »
Nous partageons cette analyse. Nous en sommes convaincus, au-delà des mesures comptables et strictement économiques qui sont prises, il y avait de la place pour des réformes plus ambitieuses, mais surtout plus justes.
L’équilibre de la CNAV doit être la conséquence non pas de mesures injustes, mais d’une politique résolument tournée vers l’emploi, et plus précisément l’emploi de qualité et rémunérateur. À cet égard, les contrats de génération et les emplois d’avenir, parce qu’ils favorisent les emplois précaires et atypiques et parce qu’ils s’accompagnent d’exonérations de cotisations sociales, ne constituent pas les solutions adaptées à l’inversion de la courbe du chômage et, partant, au retour à l’équilibre des comptes.
Madame la ministre, nous souhaitons tout comme vous que la CNAV renoue avec l’équilibre, voire – pourquoi pas ? – avec l’excédent, non pas parce que le retour à l’équilibre serait une finalité en soi, mais parce qu’il sera la conséquence d’une politique de l’emploi enfin à la hauteur des enjeux.
Malheureusement, ce n’est pas ce texte, dans sa rédaction votée à l’Assemblée nationale comme dans sa version amputée au Sénat, qui y parviendra. Bien au contraire !
C’est pourquoi le groupe CRC votera contre ce projet de loi. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après les coups de ciseaux portés à ce que l’on nous avait présenté comme les plus beaux atours de ce projet de loi, le texte est aujourd’hui comme le Gouvernement : en haillons ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
En fait, madame la ministre, vous êtes face à une situation nouvelle : il n’y a plus de majorité au Sénat ! (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.) Voilà la vérité !
Comment un gouvernement qui avait théoriquement une majorité peut-il retrouver un texte en lambeaux ? En réalité, la réponse est connue ; notre collègue Jean Desessard l’a d’ailleurs apportée tout à l’heure. Certes, ce n’est pas à nous de juger la manière dont le Gouvernement doit s’entendre et travailler avec sa majorité. Mais la faute est partagée. Elle est imputable, bien sûr, au Gouvernement, qui a présenté un mauvais projet ; elle est également imputable aux parlementaires, lesquels n’ont sans doute pas pris les dispositions nécessaires pour que le Gouvernement écoute en amont, comme cela a été dit tout à l’heure, avant de se retrouver dans cette situation qui va être ridicule car inédite. Il semble en effet, d’après les intervenants qui m’ont précédé, qu’il n’y aura pas beaucoup de voix pour soutenir ce texte.
Madame la ministre, j’ai eu l’occasion de vous le dire, je vous ai connue plus loquace sur la question des retraites,…
Mme Isabelle Debré. Oui !
M. Jean-Claude Lenoir. … en 2003, puis en 2010, alors que vous et moi étions députés. Soit dit en passant, les parlementaires qui soutenaient le gouvernement d’alors ont fait preuve d’un grand courage, car il n’était pas facile de faire adopter un certain nombre de dispositions quand la rue était occupée, quand la contestation était forte, quand, dans l’hémicycle, les tirs de barrage étaient nourris et que les initiatives ne manquaient pas pour retarder l’issue des débats. Vous aviez animé à l’époque ces débats, madame la ministre, en tant que porte-parole du groupe socialiste. Que n’a-t-on pas entendu ?
Vous disiez alors, madame la ministre – il est d'ailleurs facile de retrouver vos propos dans le compte rendu des débats publié au Journal officiel – : « Quand nous serons au pouvoir, nous abrogerons les dispositions contenues dans les lois de 2003 et de 2010. »
Je vous pose donc la question, ce soir, à l’issue de l’examen de ce texte : quelles sont, dans votre projet de loi, les dispositions visant à abroger les lois de 2003 et 2010 ? Aucune !
Mme Isabelle Debré. Aucune, en effet !
M. Jean-Claude Lenoir. Tout à l’heure, un des membres du groupe CRC disait que, malgré tout, des avancées avaient été obtenues grâce à l’adoption d’amendements de leur groupe. Sur quelle base ? Mais à partir des textes de 2003 et 2010, que vous avez tant décriés ! Aucune des dispositions que vous aviez fortement contestées et qui avaient été présentées par le précédent gouvernement n’a été modifiée.
En réalité, votre texte est simple, et l’intitulé devrait être : « projet de loi portant augmentation des cotisations des personnes retraitées et des employeurs ». (Mme Isabelle Debré opine.)
M. Jean Bizet. Tout simplement !
M. Jean-Claude Lenoir. C’est le seul objet de ce projet de loi.
Que va-t-il se passer maintenant ? Une nouvelle lecture va nous être infligée puisque, à l’évidence, il n’y aura pas de majorité.
Tout cela donne l’impression d’un grand gâchis ; c’est votre problème, ce n’est pas le nôtre. (Protestations sur plusieurs travées du groupe socialiste.) Nous allons voter contre ce texte, mais pour des raisons différentes de celles qui ont déjà été avancées. Nous ne sommes pas seulement contre le texte qui a finalement été examiné par le Sénat, nous sommes contre le projet que vous avez présenté, contre l’absence de courage, contre le texte qui avait été délibéré en conseil des ministres.
Les retraités et ceux qui cotisent pour les retraites…
M. Jean Bizet. … jugeront !
M. Jean-Claude Lenoir. … jugeront en regardant le calendrier révolutionnaire, le calendrier républicain instauré à la fin du XVIIIe siècle : ils verront que le 5 novembre était le jour du dindon ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP. – Mme Françoise Férat applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. À l’occasion de mon intervention dans la discussion générale et tout au long de nos débats, je suis intervenue, notamment avec ma collègue Brigitte Gonthier-Maurin, sur les conséquences de cette réforme sur les femmes.
Après les travaux de notre Haute Assemblée, force est de constater qu’en la matière les choses sont appelées à évoluer extrêmement lentement – trop lentement – et pas de manière suffisamment efficace pour résorber les inégalités de pensions.
Ainsi, l’article 1er, tel qu’il résulte des travaux de notre assemblée, a pour seul objet de prévoir, après un âpre débat, que « La Nation assigne également au système de retraite par répartition un objectif de solidarité entre les générations et au sein de chaque génération, par l’égalité des pensions entre les femmes et les hommes », sans jamais préciser les conditions dans lesquelles cette égalité de pension doit être atteinte.
Or, nous le savons très bien – nous en avons beaucoup parlé –, si les pensions des femmes sont inférieures à celles des hommes, c’est d’abord et avant tout parce que leurs rémunérations sont inférieures.
En effet, à travail égal, les femmes demeurent moins bien rémunérées que les hommes ; de surcroît, les femmes sont, plus souvent que les hommes, recrutées à des emplois précaires, par des contrats atypiques comme les temps partiels.
Prétendre assurer l’égalité de pensions sans passer par l’égalité salariale, c’est au mieux un vœu pieu, au pire une méconnaissance des situations sociales et professionnelles des femmes.
Nous avions, pour notre part, fait la démonstration que des mesures concrètes étaient possibles, comme la suppression des exonérations de cotisations sociales à l’encontre des employeurs qui ne respectent pas l’égalité salariale ou bien en obligeant les employeurs qui recourent massivement aux temps partiels à cotiser à temps plein pour ces contrats.
Nous ne pouvons que regretter que ces propositions aient été rejetées par la droite et par le Gouvernement, qui nous a souvent répété qu’elles n’avaient pas leur place dans ce projet de loi. C’est d’autant plus regrettable que, lorsque nous avons examiné le projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, les mêmes arguments nous avaient été opposés au prétexte que de tels amendements ne répondaient pas à l’objet de ce texte, qu’il ne fallait surtout pas toucher au sacro-saint accord national interprofessionnel, l’ANI, qui rendait les femmes très captives des temps partiels.
Voilà évidemment une raison pour laquelle nous ne souscrivons pas à ce projet de réforme. Mais je dois également dire notre opposition à l’article 1er, qui ne prépare ni plus ni moins – certains s’en sont réjouis – qu’une réforme systémique.
Au-delà de cette réforme d’architecture, il s’agit de basculer d’un régime de retraite par répartition dit à prestations définies vers un système de retraite par points, c’est-à-dire à cotisations définies. Nous y sommes particulièrement opposés puisque la logique de ces systèmes de retraite consiste à garantir un certain taux de prélèvement, sans pour autant qu’une retraite donnée soit assurée.
Pourtant, c’est bien là, on le voit quotidiennement, la préoccupation légitime de nos concitoyennes et concitoyens, qui veulent savoir quand ils pourront partir à la retraite et avec quelle pension. Dans cet hémicycle, il est beaucoup question d’équilibre des comptes mais on ne parle pas des petites pensions, de la réalité de ce que vivent un grand nombre de nos concitoyennes et de nos concitoyens. (Mme Isabelle Debré s’exclame.)
Il ne s’agit pas, pour nous, d’équilibrer les comptes sans songer aux pensions ni formuler de propositions justes. C’est pourquoi nous répétons – et nous ne cesserons de le faire – qu’il existe d’autres choix. Nous les avons développés tout au long de nos amendements, et Dominique Watrin, notamment, dans son propos introductif et conclusif, l’a dit abondamment.
Je le répète, nous avons proposé des solutions de financement alternatives qui n’ont pas été retenues par le Sénat, comme la taxation des revenus financiers, la modulation des cotisations sociales en fonction de la politique salariale des entreprises, ou encore l’égalité réelle de rémunération entre les femmes et les hommes, qui engendrerait – une étude de la Caisse nationale d’assurance vieillesse le démontre – des recettes supplémentaires.
Beaucoup ont rendu hommage, tout au long de cette semaine de débats, à Ambroise Croizat. Malheureusement, je dois le dire avec beaucoup de consternation et aussi beaucoup de solennité, le projet de loi qui a été proposé par le Gouvernement, comme celui qui ressort de nos débats, est diamétralement opposé aux valeurs portées par Ambroise Croizat. Il ne faut donc pas se réclamer de son héritage lorsqu’on va à l’encontre des valeurs de solidarité qu’il a développées et qui ont été, tout au long de nos débats, foulées aux pieds.
Je tenais à le dire car il est un peu facile d’en appeler à la mémoire de grands hommes qui ont fait progresser l’humanité quand, à l’inverse, on fait tout pour que soit institué un système de retraite par capitalisation.
M. Jean-Claude Lenoir. Vous parlez du général de Gaulle ?
Mme Éliane Assassi. Guy Mocquet, Ambroise Croizat ; vous aussi, vous savez les utiliser !
Mme Laurence Cohen. Je parle de ceux qui se sentent concernés et, si vous vous sentez morveux, il faut vous moucher (Oh ! sur les travées de l'UMP. – M. Jean-Claude Lenoir rit.),…
M. Alain Gournac. La leçon des communistes !
Mme Isabelle Debré. Nos débats avaient pourtant été corrects !
Mme Laurence Cohen. … pour le dire de manière extrêmement familière, mais c’est aussi un proverbe, que chacun peut comprendre !
Nous allons en tout cas continuer à faire des propositions, à porter des mesures d’espoir pour l’ensemble des femmes et des hommes qui veulent que les choses évoluent et qui veulent vivre décemment avec des pensions convenables.
M. Alain Gournac. On n’est pas des dindons ! Les rois des dindons, c’est eux ! (M. Alain Gournac désigne les travées du groupe CRC.)
Mme Laurence Cohen. Lorsqu’on siège au Sénat, il est extrêmement important d’entendre les paroles de ces personnes pour transformer les choses.
M. le président. Je vous prie de conclure, madame Cohen.
Mme Laurence Cohen. Je n’ai dépassé mon temps de parole que d’une minute, monsieur le président, mais je vais conclure en disant que le débat est peut-être clos au Sénat pour l’instant, mais, pour nous, il va se poursuivre à la fois au niveau parlementaire et avec les femmes et les hommes qui vont se battre contre cette réforme inique. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de l’examen de ce projet de loi, intitulé « avenir et justice du système de retraites ». On pouvait difficilement trouver titre plus inapproprié, pour ne pas dire publicité plus mensongère.
En effet, ce projet de loi, malheureusement, ne règle en rien les questions d’avenir – on sait très bien qu’on n’aura à peine un tiers des 20 milliards à 22 milliards d'euros nécessaires – et ne fait en rien progresser la justice puisqu’il n’a trait qu’au régime général et ne vise nullement à combler les inégalités qui existent notamment entre les retraités du secteur public et ceux du secteur privé.
M. Pierre Martin. Très bien !
M. Hervé Maurey. Surtout, ce projet de loi est bien loin de la grande réforme ambitieuse qui nous avait été annoncée par la ministre ici présente. Je me souviens l’avoir entendue dire au Sénat, à l’occasion des questions au Gouvernement, qu’on allait voir ce qu’on allait voir, que le Gouvernement allait proposer une réforme ambitieuse, contrairement au précédent gouvernement qui avait manqué de courage.
C’était assez cocasse ou assez irritant, selon la façon qu’on a de réagir. Ainsi que Jean-Claude Lenoir l’a rappelé, ceux qui étaient parlementaires en 2010 se rappellent certainement le total déni dans lequel se trouvait l’opposition de l’époque, allant jusqu’à nier la nécessité de réformer le système des retraites.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. C’est faux, mais vous n’étiez pas souvent présent !
M. Hervé Maurey. C’était vraiment insupportable. C’est d'ailleurs à cette occasion que j’ai mesuré, moi qui étais jeune parlementaire, le manque de sens des responsabilités et la terrible démagogie qui régnaient sur certaines des travées de cet hémicycle.
On nous avait donc promis une réforme ambitieuse et, finalement, on a vu ce qu’on a vu :…
M. Alain Gournac. On n’a rien vu !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Bien sûr, vous n’étiez pas là !
M. Hervé Maurey. … on a un texte qui, comme cela a été souligné, vise uniquement à augmenter encore les cotisations qui pèsent sur les salariés.
Alors, où en sommes-nous ce soir ? On a un texte en lambeaux. Il a été rejeté par la commission, il a été détricoté tout au long de son examen.
Bien sûr, avec mon collègue Gérard Roche, je me réjouis que nous ayons adopté un système de retraite par points. Mais ce système, que le groupe centriste appelait de ses vœux depuis de nombreuses années, ne suffit pas à rendre ce texte cohérent ou ambitieux. Et naturellement, comme tout le monde, allais-je dire, ce n’est pas très original, nous allons voter contre ce texte.
Ce qui est très original en revanche, c’est qu’un texte fasse l’unanimité contre lui. C’est, me semble-t-il, quasiment une première dans l’histoire parlementaire.
M. Jean Bizet. C’est exact !
M. Hervé Maurey. Vous me direz que le Gouvernement est aussi en passe de faire l’unanimité contre lui. C’est quand même une situation assez exceptionnelle et, ce soir, nous allons collectivement, mais vous plus que d’autres, madame la ministre, entrer dans le Livre des records en ayant un projet de loi rejeté par l’ensemble de cet hémicycle.
Le problème, c’est qu’une fois de plus, sur ce texte, comme sur toutes les prétendues réformes qu’il nous propose, le Gouvernement manque singulièrement d’ambition. À vouloir ménager la chèvre et le chou, il aboutit à la situation tout à fait extraordinaire de voir son texte rejeté à l’unanimité. C’est un cinglant désaveu.
Déjà, à l’Assemblée nationale, il avait été adopté dans des conditions peu glorieuses puisqu’il n’avait même pas été voté par une partie du groupe socialiste. Mais, là, nous atteignons le paroxysme. Ce désaveu est une première, mais, je le crois, madame la ministre, bien d’autres suivront pour le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. Jean Bizet. Eh oui !
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot.
M. Claude Jeannerot. Je n’avais pas prévu d’intervenir parce que je considérais que, d’une certaine manière, tout avait été dit ce soir. (M. Jean Bizet s’exclame.)
M. Bruno Sido. Et non !
M. Claude Jeannerot. Néanmoins, je veux revenir sur les dernières interventions qui révèlent des manipulations. Je veux notamment défendre ici publiquement l’engagement du Gouvernement…
MM. Alain Gournac et Jean Bizet. Oh !
M. Claude Jeannerot. Eh oui ! Car, mes chers collègues, il ne faut pas tout mettre sur le même plan.
Lorsque ce texte a été examiné par l'Assemblée nationale, Mme la ministre ici présente a tenu les propos suivants : « Nous reprenons le flambeau des conquêtes sociales passées et nous renouons avec l’ambition d’un modèle de cohésion qui a forgé l’identité de notre pays. »
M. Alain Gournac. C’est nul ! Paroles, paroles !
Mme Éliane Assassi. C’est incroyable !
M. Claude Jeannerot. À l’issue d’une semaine de débats, qui ont parfois été intéressants en ce qu’ils ont porté sur de véritables questions, force est de reconnaître que la déception est au rendez-vous. Nous aurions aimé – en tout cas, une fraction de l’hémicycle – partager, ce soir, l’appréciation de Mme la ministre.
M. Alain Gournac. C’est purement déclaratif !
M. Claude Jeannerot. Non !
Chers collègues de l’opposition, vous prétendez que les réformes de 2003 et 2010 sont le support de ce qui nous est aujourd'hui présenté. Pour ma part, je veux souligner les éléments de rupture portés par ce texte, qui constitue, à mes yeux, un élément de progrès.
Il est, par exemple, incontestable que le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, puisque c’est celui qui a été soumis à notre examen, permettait de sécuriser le système de retraite par répartition : il comportait un certain nombre d’éléments allant en ce sens. Mais, surtout, ce texte instaurait des droits nouveaux, qui s’incarnaient tout particulièrement, reconnaissez-le, mes chers collègues, dans la prise en compte de la pénibilité, sous le double angle de la réparation et de la prévention.
Or il est tout à fait regrettable que nous n’ayons pas été collectivement en mesure de prendre en considération ce qui constituait un véritable progrès.
Je le dis simplement ce soir, nous aurions aimé, à l’instar de nos collègues députés, saluer la démarche de progrès présentée dans ce texte.
Comme cela a été dit, ce texte n’existe plus, et c'est tout simplement la raison pour laquelle – il ne faut pas chercher de raisons compliquées ! – nous ne le voterons pas. J’observe d’ailleurs qu’il est devenu totalement hybride, exhalant de très forts relents de libéralisme. Mais il ne va pas encore assez loin (Exclamations sur plusieurs travées de l’UMP.), puisque l’UMP refuse de l’approuver.
Point n’est besoin de faire de longs développements pour revenir sur les raisons qui nous conduisent à repousser ce texte. (M. Bruno Sido s’exclame.) Mais permettez-moi d’ajouter tout de même une chose.
Il y a quelques instants, un de nos collègues de l’opposition a longuement expliqué que nous manquions de courage dans la mesure où, en particulier,…
M. Alain Gournac. Vous en manquez en général !
M. Claude Jeannerot. Je n’ai pas pour habitude d’interrompre mes collègues ! Aussi, je vous saurai gré de faire de même !
Il a notamment souligné, disais-je, que nous n’avions pas encore eu le courage de présenter un texte sur la dépendance.
Alors qu’on nous promettait d’année en année un texte sur la dépendance, je n’ai pas le souvenir que nous ayons vu un embryon de texte sur ce sujet durant les cinq dernières années.
M. Roland Courteau. En effet !
M. Claude Jeannerot. Or le Premier ministre – je vous l’annonce, car vous n’avez peut-être pas été assez attentifs ! – présentera dans les tout premiers mois de l’année 2014 un texte dont je vous donne l’intitulé : projet de loi sur l’adaptation de la société française…
M. Alain Gournac. Oh là !
M. Claude Jeannerot. … au vieillissement. C’est un sujet, il faut le rappeler, que vous avez délibérément écarté au cours de ces cinq dernières années. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) C’est nous qui le porterons ici même !
M. Alain Gournac. On verra !
M. Claude Jeannerot. Il complétera ce qui a été engagé.
M. Alain Gournac. On verra, pour le courage !
M. Claude Jeannerot. Oui, nous en parlerons bientôt dans cette enceinte. (M. Bruno Sido martèle son pupitre en signe d’impatience). Ce texte n’est pas repoussé aux calendes grecques ; nous l’examinerons dans les prochaines semaines, au début de 2014. Nous aurons alors une nouvelle occasion d’accueillir Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Je voudrais revenir sur les propos de Claude Jeannerot.
Le texte qui nous a été présenté contenait un certain nombre de symboles, qu’il vous faudra éviter de reproduire si vous voulez que le texte sur la dépendance soit adopté.
Nous n’aurons rien à gagner à arriver à la même conclusion,…
Mme Christiane Demontès, rapporteur. On vous fait confiance, monsieur Savary !
M. René-Paul Savary. … et nos concitoyens non plus.
Le texte dont nous discutons est symbolique d’une méthode largement répétée, qui aboutit toujours à la même issue : faire l’unanimité contre vous, madame la ministre !
Vos méthodes, nous commençons à les connaître : vous commencez par critiquer la droite.
À cet égard, permettez-moi de revenir, madame la ministre, sur vos propos liminaires. Vous avez rappelé que la réforme de 2010 était injuste, qu’elle avait été menée avec force et brutalité (M. Alain Gournac s’exclame.)…
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Eh oui ! La preuve en est !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ça, c’est vrai !
M. René-Paul Savary. … et qu’elle n’était pas financièrement équilibrée.
M. Philippe Madrelle. La preuve !
M. René-Paul Savary. Eu égard aux débats que nous avons eus, la critique de la droite n’était pas le meilleur argument pour parvenir à vos fins !
Pour rester dans le registre de la méthode, nous retrouvons toujours dans les différents projets de loi qui nous sont soumis des prélèvements supplémentaires. À défaut d’une réforme structurelle, vous proposez toujours plus de prélèvements !
De surcroît – c’est un autre point tout à fait significatif –, nous y relevons toujours plus de rapports, de comités de suivi, de débats d’évaluation. (M. Alain Gournac s’exclame.) Vous touchez à certains régimes, mais pas à d’autres. On voit bien que vous n’avez pas la volonté de vous engager dans une réforme structurelle, pourtant nécessaire.
L’une de vos dernières spécialités est de repousser la mise en œuvre de la réforme après 2020, et 2035 pour ce qui concerne les quarante-trois annuités. On reporte sur les générations futures les décisions que l’on ne veut pas prendre aujourd'hui. Certes, elles sont, on le comprend bien, parfois difficiles à assumer, mais elles sont ô combien nécessaires pour l’avenir de nos concitoyens.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons, à l’unanimité, contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
J'ai été saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, du groupe UMP, la deuxième, du groupe socialiste et, la troisième, du groupe UDI-UC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 42 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 0 |
Contre | 346 |
Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Bravo ! C’est du jamais vu !
Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Ça s’arrose !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Mes chers collègues, rassurez-vous : je ne ferai pas de commentaires sur le débat qui a eu lieu cet après-midi…
M. Jean-François Husson. Consternant !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. … et tout au long des jours derniers. Chacun a fait valoir son point de vue sur le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.
Je tiens seulement à remercier tous nos collègues qui ont pris part à nos travaux depuis lundi dernier ; ils ont défendu leurs convictions, présenté leurs propositions et exposé leurs désaccords.
J’adresse des remerciements particuliers à Mme la présidente de la commission des affaires sociales, Annie David, qui a animé un important travail en amont de l’examen du projet de loi.
Je remercie également les fonctionnaires de la commission des affaires sociales pour l’aide qu’ils nous ont apportée ; j’observe que certains sont jeunes et bien loin de la retraite !
Je remercie, enfin, Mme la ministre des affaires sociales, ainsi que Mmes Bertinotti et Delaunay, ministres déléguées. Madame Touraine, vous avez été assidue et vous avez fait preuve d’une belle vigilance !
La discussion du projet de loi en première lecture se termine mal au Sénat, mais la commission mixte paritaire se réunira demain soir et nous nous retrouverons bientôt. Je forme le vœu que ce prochain débat dure moins longtemps que celui qui s’achève ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur la plupart des travées du groupe CRC. – Quelques sénateurs de l’UMP applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Au terme de ce long débat, je tiens à saluer le travail tout à fait remarquable de Mme la rapporteur. Madame Demontès, il est agréable de travailler avec vous et, ensemble, nous nous sommes efforcées d’enrichir le projet de loi de façon fructueuse et utile.
Je remercie aussi Mme la présidente de la commission des affaires sociales pour la manière toujours agréable et diligente dont elle mène les travaux de sa commission. Quelles que soient nos positions respectives, je la remercie très sincèrement pour la qualité du débat que nous avons eu.
Je remercie le groupe socialiste pour le soutien sans faille…
M. Alain Gournac. Efficace ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Jusqu’au bout !
Mme Marisol Touraine, ministre. … et qui l’a conduit, contre son gré, à voter contre le projet de loi, au vu de la rédaction qui résultait des travaux du Sénat.
Je remercie chaque sénatrice et chaque sénateur pour la part qu’il a prise à ces débats, que je n’ose pas qualifier de totalement constructifs… (M. Jean-Claude Lenoir s’exclame.) En tout cas, je salue le travail de celles et ceux qui, depuis le début de la semaine dernière, ont fait valoir leurs points de vue, quels qu’ils soient, pour défendre l’avenir des retraites.
Je remercie les fonctionnaires de la commission des affaires sociales, ainsi que la présidence et les fonctionnaires de la séance, en particulier les huissiers de séance. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jean-Vincent Placé applaudit également.)
5
Fin de mission de sénateurs
M. le président. Par lettre en date du 4 novembre 2013, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter du 5 novembre 2013, de la mission temporaire sur la contribution des collectivités territoriales à la préparation des négociations sur le changement climatique confiée à MM. Ronan Dantec et Michel Delebarre, auprès de M. Pascal Canfin, ministre chargé du développement, dans le cadre des dispositions de l’article L.O. 297 du code électoral.
Acte est donné de cette communication.
6
Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats a été affichée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :
Titulaires : Mmes Annie David, Christiane Demontès, MM. Claude Domeizel, Jacky Le Menn, Jean-François Husson, Gérard Longuet et Jean-Marie Vanlerenberghe ;
Suppléants : MM. Gilbert Barbier, Yves Daudigny, Mme Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Catherine Génisson, MM. Ronan Kerdraon et René-Paul Savary.
Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.
7
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 6 novembre 2013, à quatorze heures trente et le soir :
- Projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire (n° 805, 2012–2013) ;
Rapport de M. Marc Daunis, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 84, 2013–2014) ;
Texte de la commission (n° 85, 2013–2014) ;
Avis de Mme Christiane Demontès, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 69, 2013–2014) ;
Avis de M. Jean Germain, fait au nom de la commission des finances (n° 70, 2013–2014) ;
Avis de M. Alain Anziani, fait au nom de la commission des lois (n° 106, 2013–2014).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART