M. le président. L'amendement n° 2 rectifié quater, présenté par MM. Nègre, Beaumont, Bizet, Revet, Leleux, Tandonnet et Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - La seconde phrase de l'article L. 2121-7 du code des transports est supprimée.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Le maintien de la seconde phrase de l’article L. 2121-7 du code des transports pourrait exclure l'adhésion à un groupement européen de coopération territoriale, un GECT, de la région en cas d'absence d'autorité organisatrice dans la région limitrophe de l'État voisin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. Monsieur Bizet, vous avez raison de vouloir améliorer le service de transport ferroviaire transfrontalier. Aujourd’hui, et je suis bien placé pour en parler, nous sommes encore loin d’une continuité du service d’un côté à l’autre des frontières. C’est ce qui explique que 10 % à peine des travailleurs transfrontaliers empruntent les transports en commun pour passer d’un pays à l’autre.
L’article 2 vise à autoriser les régions qui le souhaitent à conclure une convention ferroviaire avec des autorités organisatrices étrangères afin de former des GECT.
Toutefois, l’amendement n° 2 rectifié quater et l’amendement n° 3 rectifié bis, qui viendra ensuite en discussion, ne me paraissent pas emprunter la bonne voie.
D’abord, vous proposez de supprimer la seconde phrase de l’article L. 2121-7 du code des transports, qui précise que, si l’État voisin n’a pas d’autorité organisatrice de transport, « la région peut demander à la Société nationale des chemins de fer français de conclure une convention avec le transporteur compétent de l’État voisin pour l’organisation de tels services ». Or pourquoi priver une région d’une telle faculté ?
Ensuite, vous proposez d’étendre la compétence à toutes les collectivités territoriales, alors que, actuellement, seule la région est compétente en matière ferroviaire.
Enfin, vous souhaitez supprimer une référence à la SNCF, qui est la conséquence directe de ce que les transports ferroviaires de voyageurs ne sont pas ouverts à la concurrence. En France, il n’y a pas d’autres opérateurs que la SNCF pour les transports régionaux de voyageurs.
Nous manquons effectivement d’une autorité organisatrice de transport transfrontalier de droit européen, une AOT, qui associe plus étroitement les régions d’un côté et de l’autre de la frontière. L’article 2 fait un pas dans la bonne direction, mais pas vos amendements. La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. L’article 2 permet à des régions, lorsque trois AOT sont concernées, dans des régions transfrontalières, de mettre en place un groupement européen de coopération territoriale, ce qui est une bonne chose.
Je ne suis donc pas favorable aux modalités d’organisation des services de transport transfrontalier que vous proposez, monsieur le sénateur. Aujourd'hui, en l’absence d’autorité publique assumant la compétence d’organisation des transports dans l’État limitrophe, la région peut déléguer à l’opérateur historique, la SNCF, le soin d’organiser les services de transport ferroviaire avec l’opérateur homologue. Il s’agit d’une option, d’une possibilité. Nous souhaitons qu’elle soit maintenue.
Par ailleurs, il n’est pas souhaitable – je doute même que ce soit légalement possible – de permettre à d’autres collectivités, comme par exemple les départements, de s’arroger des compétences que ne lui octroie pas le code général des collectivités territoriales.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. Je reconnais que ces amendements ne sont pas d’une grande pertinence. Je suis prêt à les retirer à condition d’obtenir l’assurance que, en cas d’impossibilité de créer un GECT, on pourra néanmoins aller plus loin en matière de coopération ferroviaire transfrontalière.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. L’article 2 témoigne de la volonté du Gouvernement, et j’espère que ce sera aussi celle du législateur, d’ouvrir des voies fructueuses en matière de coopération.
Par ailleurs, je répète qu’il ne faut pas reconnaître à des collectivités des compétences qu’elles n’ont pas.
M. le président. Monsieur Bizet, l'amendement n° 2 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Jean Bizet. Non, je le retire, monsieur le président, ainsi que l’amendement n° 3 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié quater est retiré.
L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Tandonnet et Bizet, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le groupement fixe en lieu et place de la région les conditions d'exploitation et de financement des services ferroviaires qu'elle organise. »
Cet amendement a été précédemment retiré par son auteur.
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
L’article L. 2122-4 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu’une entreprise exerce des activités d’exploitation de services de transport ferroviaire et de gestion de l’infrastructure ferroviaire, elle est tenue, lors du dépôt des comptes annuels au registre du commerce et des sociétés, de déposer également les comptes de profits et pertes séparés et des bilans séparés relatifs aux activités d’exploitation de services de transport des entreprises ferroviaires, d’une part, et ceux relatifs à la gestion de l’infrastructure ferroviaire, d’autre part. »
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.
Mme Mireille Schurch. Cet article tire les conséquences de la directive de 1991, qui impose la séparation comptable entre les activités de gestionnaire de réseau et de transport. Il prévoit ainsi l’obligation pour une entreprise ferroviaire de publier des comptes séparés – profits/pertes et bilan/compte de résultat – pour les activités relatives à la fourniture de services de transport, d’une part, et à la gestion de l’infrastructure ferroviaire, d’autre part.
L’obligation de séparation comptable est d’ores et déjà inscrite dans le code des transports français. En revanche, l’obligation de publication séparée n’apparaît pas explicitement en droit national. Dans ces conditions, et afin d’éteindre les griefs déjà exprimés sur ce point par la Commission européenne et éviter l’engagement d’une procédure contentieuse à l’encontre de la France, vous avez souhaité, monsieur le ministre, inscrire cette disposition dans le projet de loi. Sur le fond, il n’y a là rien de bien nouveau, cet article apportant simplement une précision juridique.
Pour ma part, je souhaite évoquer, dans le cadre de cette intervention, les enjeux du quatrième paquet ferroviaire ainsi que ceux de la réforme annoncée le 30 octobre dernier devant permettre la réunification de la famille ferroviaire.
La première ébauche du quatrième paquet ferroviaire, adoptée le 30 janvier dernier par la Commission européenne, nous inquiète.
Certes, la séparation totale entre entreprise ferroviaire et gestionnaire d’infrastructures a été plus ou moins sortie du jeu. Néanmoins, Bruxelles veut imposer une « muraille de Chine » entre les deux activités si elles sont réunies dans une même structure. Il faudrait ainsi conserver deux entités juridiques distinctes, sans possibilité de flux financier, et deux logiques différentes.
Nous espérons que le Gouvernement agira à l’échelon européen afin de permettre une plus grande souplesse dans les relations entre les différentes structures susceptibles de constituer le futur pôle public ferroviaire. En effet, nous considérons que c’est justement l’absence de porosité entre la SNCF et RFF qui a conduit à rendre inopérant le système ferroviaire, en raison d’un manque de lisibilité et du développement de stratégies différentes.
Enfin, monsieur le ministre, comme nous vous l’avons déjà dit, nous sommes opposés à l’ouverture à la concurrence en 2019 du marché national de transport ferroviaire de voyageurs, alors qu’aucune directive, qu’aucun règlement ne l’impose jusqu’à présent.
D’ailleurs, il n’est pas neutre que Bruxelles travaille à la révision du règlement européen sur les obligations de service public, les OSP, adopté par le Parlement européen et le Conseil en 2007. En effet, alors que le règlement n’impose pas la libéralisation du secteur et qu’il permet à la France de conserver le monopole aujourd’hui confié à la SNCF, la Direction générale de la concurrence souhaite en retirer l’article autorisant les compensations financières accordées par les collectivités locales aux opérateurs de transport.
Nous vous demandons une nouvelle fois, monsieur le ministre, de porter à l’échelon européen l’exigence d’un moratoire sur les trois premiers paquets ferroviaires avant tout engagement vers une libéralisation accrue du secteur et de faire preuve d’une extrême vigilance concernant la révision annoncée du règlement européen sur les obligations de service public.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Madame la sénatrice, n’anticipons pas les négociations européennes sur le quatrième paquet ferroviaire. Des discussions ont d’ores et déjà permis des inflexions concernant certaines dates, qui ne s’imposeront pas, notamment le maintien de structures séparées au 1er janvier de cette année. Un certain nombre d’avancées ont ainsi été obtenues dans le cadre de ce quatrième paquet.
Pour l’heure, vous nous appelez à la vigilance – nous sommes vigilants – et à l’exigence – nous serons exigeants. Notre rôle dans le cadre de l’élaboration d’une politique européenne est à la fois d’expliquer notre système et ses vertus et de garantir un certain nombre de principes. De ce point de vue, vous savez, car nous avons été assez clairs, quelle sera la position du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 5 rectifié, présenté par MM. Ries, Teston et Filleul, Mme Herviaux, MM. Camani, Chastan, Cornano, Esnol, Fichet, Le Vern, Navarro et Rome, Mme Rossignol, M. Vairetto et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2141-11 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'activité de transport régional de personnes de la Société nationale des chemins de fer français hors Île-de-France est identifiée, pour chaque convention, dans les comptes d'exploitation. La Société nationale des chemins de fer français transmet à l'autorité organisatrice correspondante le compte d'exploitation la concernant. »
M. le président. La parole est à M. Roland Ries.
M. Roland Ries. Cet amendement tend à permettre une plus grande clarté dans les relations entre l’autorité organisatrice régionale et l’opérateur historique.
J’ai souvent entendu, lors de colloques, des présidents de région critiquer la SNCF et se plaindre que les régions étaient considérés comme des guichets : elles ne savent pas ce qu’elles paient ni pour quoi. Cet amendement vise à permettre à ces collectivités de connaître plus précisément la comptabilité des trains dont elles ont la responsabilité, alors que cette comptabilité est fondue dans la branche « SNCF Proximités », avec les comptes de Keolis et d’Effia.
Certes, il faut le reconnaître et le saluer, la SNCF a fait des efforts de communication. Un accord de transparence financière a même été signé en juillet 2011 avec les régions : la SNCF devrait communiquer aux régions des comptes par ligne à partir du mois de juin prochain, ainsi qu’un rapport équivalant à ce qui se pratique en matière de délégation de service public pour le transport public urbain.
Cependant, ces progrès, qui ont été salués à juste titre, n’épuisent pas le sujet. La transparence sera mieux assurée grâce à une obligation légale. Cet amendement tend donc à prévoir que la SNCF devra communiquer le compte d’exploitation pour les lignes concernées. Ce sera plus précis, plus clair et plus transparent. Les régions sauront ainsi ce qu’elles paient.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Dès les premiers jours qui ont suivi ma prise de fonctions, de nombreux présidents de région m’ont sensibilisé aux difficultés qu’ils rencontraient pour obtenir de la part de la SNCF des précisions sur les comptes des activités de transport régional de personnes. À cet égard, vous avez raison de souligner, monsieur Ries, que la présentation des comptes sous une forme « fondue » peut nuire à leur lisibilité et à la transparence qu’en attendent les collectivités territoriales. C’est pourquoi j'avais demandé au président de la SNCF de reprendre langue, dans le cadre de l’Association des régions de France, avec les présidents de région afin de répondre à leur demande de clarification et de précision.
Vous proposez, dans votre amendement, de franchir une étape supplémentaire et de rendre obligatoire la transmission aux régions de comptes distincts. Je n’y vois pour ma part rien de choquant. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je soutiens avec énergie cet amendement et le voterai des deux mains !
Monsieur le ministre, il ne vous aura pas échappé que, dans ma belle région de Basse-Normandie, la fameuse ligne Paris-Granville fonctionne à l'insu de son plein gré, pour autant que les voies ne soient pas recouvertes de feuilles… Je parle sous le contrôle de mon collègue Jean Bizet, qui est confronté aux mêmes difficultés que moi.
La région Basse-Normandie et son excellent président, Laurent Beauvais, s’efforcent autant que possible de la faire fonctionner, et il est bien vrai qu’un peu plus de clarté dans la présentation des comptes et l’utilisation des fonds par la SNCF serait la bienvenue, tant pour la région que pour les usagers de la ligne.
À cet égard, je vous suggère de jeter un coup d’œil sur le blog qu’ont créé ces derniers et vous verrez à quel point cette malheureuse ligne Paris-Granville maltraite non seulement ceux qui l’empruntent, mais également la région, qui supporte bien des frais et éprouve bien des difficultés pour la faire fonctionner.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
Article 4
Le troisième alinéa de l’article L. 2232-1 du même code est complété par les dispositions suivantes : « , par les agents assermentés de la Société nationale des chemins de fer français agissant pour le compte de Réseau ferré de France au titre de l’article L. 2111-9 et par les agents assermentés des personnes ayant conclu une convention en application du dernier alinéa de l’article L. 2111-9 dans le périmètre de cette convention. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 4
M. le président. L'amendement n° 90 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Vall et Tropeano, est ainsi libellé :
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du 2° de l'article L. 342–2 du code du tourisme est complétée par les mots : « dont, le cas échéant, celles relatives aux biens financés par l'aménageur ou l'exploitant et non amortis en fin de contrat. »
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. En application de l’article L. 1411–2 du code général des collectivités territoriales, la durée des conventions de délégation de service public est déterminée en fonction de la nature et de l’importance des investissements consentis par l’aménageur ou l’exploitant. Cette durée, en règle générale, doit permettre de couvrir intégralement l’amortissement comptable des investissements initiaux, ce qui peut entraîner des durées de convention parfois trop longues.
L’arrêt du Conseil d’État du 4 juillet 2012 Communauté d’agglomération de Chartres métropole affirme que cette disposition n’interdit pas d’établir une durée inférieure à celle de l’amortissement, à la condition que soit prévue en contrepartie l’indemnisation du délégataire à hauteur des investissements non amortis à l’issue du contrat.
Afin de clarifier le régime juridique des biens de retour en matière de remontées mécaniques – je conviens que ce sujet n’a pas de lien direct avec la communauté d’agglomération de Chartres ; en revanche, il existe un rapport sur le plan juridique –, il est prévu dans cet amendement que les parties établissent, lors de la passation du contrat, les conditions d’indemnisation relatives aux biens financés par l’aménageur ou l’exploitant et non amortis.
Ce faisant, les choses s’en trouveront facilitées, et ce dans le respect de la jurisprudence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. M. Mézard propose d’améliorer la sécurité juridique des délégations de service public en matière de remontées mécaniques. Cette suggestion est pertinente. C'est pourquoi la commission a émis un avis favorable. (Ah ! sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Cet amendement répond à une préoccupation que nous faisons également nôtre, à savoir l'indemnisation des biens de retour correspondant à des investissements qui ne sont pas encore amortis au terme des contrats de concession des remontées mécaniques.
Il s’agit là d’une difficulté récurrente dont nous sommes régulièrement saisis et qui préoccupe aussi bien les collectivités territoriales que les professionnels du secteur. En effet, en la matière, les pratiques sont diverses : soit la concession ne fait l’objet d’aucune indemnisation, soit, au contraire, l’indemnisation accordée peut excéder sa valeur nette comptable. Bref, il est nécessaire de sécuriser ce dispositif, ce à quoi tend cet amendement, d’autant que le contexte jurisprudentiel a évolué à la suite de l’arrêt que vous avez cité, rendu en juillet dernier par le Conseil d’État.
Nous sommes parfaitement conscients de cette nécessité d’une plus grande sécurité juridique et, je le répète, sur le fond, nous partageons totalement votre préoccupation. Simplement, un travail de réflexion est actuellement mené par différents services ministériels et, surtout, la France négocie en ce moment à Bruxelles la touche finale de la proposition de directive relative à l'attribution de contrats de concession de travaux et de services, dite « directive Concession », qui traite de ces questions précisément. Ces négociations sont difficiles et c’est pourquoi il me paraît plus prudent que nous nous gardions de légiférer sur ce sujet, au moment même où nous nous efforçons de faire prévaloir le point de vue de la France auprès des instances européennes.
Aussi, monsieur le sénateur, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement dans l'attente de la conclusion des discussions avec la Commission européenne.
M. le président. Monsieur Mézard, l'amendement n° 90 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Pourquoi devrions-nous systématiquement attendre, pour agir, que l'Europe prenne des décisions ? En la matière, l’attente peut parfois être très longue, voire trop longue. De plus, il peut ne pas être inutile de délivrer un message afin de faciliter les négociations. Je maintiens donc mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je souscris aux propos de notre collègue et voterai cet amendement.
Je me souviens en particulier que, lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, nous avons adopté plusieurs dispositions dans le but d’indiquer à l'Europe la voie à suivre. Voter aujourd’hui cet amendement ne nuira pas aux négociations en cours à Bruxelles, ne les retardera pas, et pourrait même fournir au Gouvernement un argument supplémentaire. Laissons la navette suivre son cours.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Si j'étais certain que l’adoption de cet amendement renforce la position de la France dans sa négociation avec la Commission européenne, j'aurais émis un avis favorable.
Puisque M. Mézard a fait le choix de maintenir son amendement, le Gouvernement est désormais contraint d'émettre un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT ROUTIER
Article 5
L’article L. 123-3 du code de la voirie routière est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 123-3. – Le reclassement dans la voirie départementale ou communale d’une route ou section de route nationale déclassée est prononcé par l’autorité administrative lorsque la collectivité intéressée dûment consultée n’a pas, dans un délai de cinq mois, donné un avis défavorable.
« En cas d’avis défavorable dans ce délai, le reclassement d’une route nationale ou d’une section de route nationale ne répondant plus aux critères définis au quatrième alinéa de l’article L. 121-1 peut être prononcé par décret en Conseil d’État. Le transfert ouvre droit à une compensation financière correspondant aux coûts des travaux nécessaires à sa remise en état, hors accotements en agglomération. Ces coûts sont évalués à la date du reclassement contradictoirement entre l’État et la collectivité territoriale et, à défaut, par décret en Conseil d’État. »
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.
Mme Mireille Schurch. Cet article prévoit de faciliter les procédures de déclassement par l’État de routes ou de sections de routes nationales. Actuellement, ce déclassement ne peut s’opérer que de deux manières : soit avec l’accord de la collectivité qui récupère la responsabilité de la route, soit, s’il n’y a pas d’accord, par décret dans le seul cas où une nouvelle voie serait par ailleurs créée ou le tracé de la voie existante changé.
La volonté du Gouvernement est exprimée de manière limpide dans l’étude d’impact : « L’objectif [de cette mesure] est d’élargir les possibilités pour déclasser des sections de route nationale, dans l’hypothèse où la collectivité concernée formule un avis défavorable. »
Pour la mise en œuvre de cette disposition, le présent article prévoit, dans le cas d’un transfert par l’État de la responsabilité de la voirie, que les collectivités recevront une compensation financière correspondant aux coûts éventuels de remise en état.
Nous considérons, pour notre part, que cette compensation financière doit également intégrer une provision pour les charges afférentes à l’entretien de ces routes. En effet, à défaut d’une telle provision, ce transfert pourra être un cadeau empoisonné fait aux collectivités, qui devront supporter les charges d’entretien de ces routes, faute de quoi leur responsabilité pourra être engagée. Cela est d’ailleurs rappelé clairement dans l’étude d’impact, qui indique que « les usagers et les tiers devront donc se tourner vers la collectivité dans l’hypothèse de dommages de travaux publics éventuels postérieurs au déclassement ».
Voilà pourquoi nous avions déposé un amendement par lequel nous demandions qu’outre la compensation de la remise en état, l’État, par le biais de son représentant dans le département, finance également, par une sorte de soulte libératoire, un provisionnement pour les coûts futurs d’entretien.
M. le président. L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par MM. Ries, Teston et Filleul, Mme Herviaux, MM. Camani, Chastan, Cornano, Esnol, Fichet, Le Vern, Navarro et Rome, Mme Rossignol, M. Vairetto et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« En cas d’avis défavorable dans ce délai, le reclassement d’une route nationale ou d’une section de route nationale ne répondant pas aux critères définis au quatrième alinéa de l’article L. 121–1 peut être prononcé par décret en Conseil d’État.
« Le reclassement donne droit à une compensation financière correspondant aux coûts des travaux nécessaires à sa remise en état, hors accotements en agglomération. Ces coûts sont évalués à la date du reclassement contradictoirement entre l’État et la collectivité territoriale ou, à défaut d’accord, fixés par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Roland Ries.
M. Roland Ries. Il s’agit d’un amendement rédactionnel et de précision.
D’abord, nous proposons de remplacer le mot « transfert » par le mot « reclassement » afin d'éviter toute confusion entre les deux procédures, qui n'ont pas les mêmes conséquences.
Ensuite, nous proposons de remplacer les mots « ouvre droit » par les mots « donne droit » afin de lever toute ambiguïté sur le caractère automatique de la compensation.
Enfin, nous proposons de clarifier la procédure contradictoire d'évaluation de cette compensation : à défaut d'accord de la collectivité concernée, ces coûts seront fixés par décret en Conseil d'État. Cette précision semble utile au regard de la présentation sensiblement différente qui a été faite de cette procédure dans l'étude d'impact : « Le représentant de l’État dans le département, après avoir déterminé, avec l’accord, dans la mesure du possible, de la collectivité concernée le montant de ces travaux de remise en état, prendra un arrêté préfectoral fixant la somme ainsi due pour solde de tout compte à la collectivité. »
Si le transfert a lieu, il est plus que souhaitable – et sans aller jusqu'à ce que demande Mme Schurch – que celui-ci porte sur une voirie en bon état, à moins, si tel n’est pas le cas, que l’État apporte la compensation nécessaire à sa remise en état. S’agissant des charges ultérieures d’entretien, je ne me fais guère d'illusions…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Cette précision, certes rédactionnelle, mais néanmoins d’ordre juridique, permet de lever une ambiguïté entre ce qui pourrait être assimilé soit à un transfert de compétences, soit à un transfert de domanialité. En outre, les auteurs de l’amendement posent le principe du droit des collectivités à percevoir une juste compensation financière.
Le Gouvernement émet un avis favorable.