M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Je voterai bien évidemment cet amendement, qui, ainsi que vous le soulignez, monsieur Ries, vise avant tout à apporter une précision rédactionnelle.
À cet égard, je regrette que l'amendement que nous avions déposé ait été déclaré irrecevable. Mais c'est ainsi…
M. le président. L'amendement n° 55, présenté par M. Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le présent article entre en vigueur six mois après la promulgation de la présente loi.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. L'article 5 prévoit d'élargir les possibilités de déclassement des sections de route nationale, dans l'hypothèse où la collectivité concernée formule un avis défavorable. La gestion de ces voies sera reprise par les communes, qui devront en assurer l'entretien.
Ce sujet a été abondamment commenté dans la discussion générale. Je tiens en cet instant à témoigner de ma perplexité et à me faire le porte-parole de l’inquiétude qui touche de nombreux territoires.
Plusieurs collègues ont exprimé à leur manière leur inquiétude devant les explications du Gouvernement, qui se voulaient certes rassurantes, mais qu’ils considéraient malgré tout comme un peu courtes.
Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué, avec talent d'ailleurs, que, finalement, il n’y avait rien de méchant dans tout cela. Toutefois, vous n’avez rien dit de plus, si bien que nous ne savons toujours pas quelle est la consistance du réseau routier qui est concerné ni comment seront consultées les collectivités – en clair, dans quel cadre celles-ci seront appelées à délibérer.
Nous souhaitons que le Parlement soit éclairé sur la consistance du réseau qui sera transféré aux collectivités. Et si nous devons passer par la loi pour décider ce transfert contre l’avis des collectivités, il ne nous paraît pas illégitime que nous connaissions les cas où l’article 5 s’appliquera, les arguments qui seront opposés, bref, que nous puissions délibérer en connaissance de cause.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, vous nous appelez pratiquement à délibérer à l’aveugle. Convenez que ce serait dommage !
C’est la raison pour laquelle l’amendement no 55 vise à repousser l’entrée en vigueur de cette mesure, afin de permettre au Gouvernement de communiquer aux parlementaires et aux élus la liste des voies concernées. Comme on nous l’a indiqué en commission, il s'agit de 251 kilomètres de voies – le chiffre est précis ! –, ce qui signifie que vous disposez d’une liste claire, établie au kilomètre près. Nous serions donc curieux de vous entendre sur ce point, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. Les dispositions de cet amendement révèlent évidemment les inquiétudes des membres de notre commission et, plus généralement, des élus locaux potentiellement concernés. Je m’en fais le relais en vous invitant, monsieur le ministre, à nous communiquer, tout de suite si c’est possible, ou du moins dans les plus brefs délais, la liste des routes concernées. Si celle-ci n’est pas disponible dans l’immédiat, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Monsieur Capo-Canellas, vous avez, comme certains de vos collègues, exprimé vos inquiétudes. Vous l’avez fait avec talent, mais je n’en attendais pas moins.
Je souhaite en cet instant vous rassurer, comme je l’ai fait dans mon propos liminaire. Il ne s’agit pas, comme ce fut le cas dans des périodes antérieures, notamment en 2004, de décentraliser, de donner la compétence d’une voirie aux collectivités. Non, il s’agit ici de délaissés routiers, c'est-à-dire de voies ou de morceaux de voies qui n’ont plus les caractéristiques de routes nationales et qui, par ailleurs, posent des problèmes de sécurité et d’entretien parce que, justement, elles sont très éloignées des directions interdépartementales des routes.
Au total, 251 kilomètres sont concernés, la voie la plus importante faisant 8 kilomètres. Ce sont parfois des délaissés de quelques centaines de mètres.
La liste a été transmise à plusieurs reprises ces derniers temps, mais il est vrai que, avec le week-end, la communication n’a peut-être pas été parfaite. Quoi qu’il en soit, nous la tenons à votre disposition. Elle est là !
Je tiens à lever les derniers doutes qui pourraient subsister. Il n’y a pas de volonté de la part du Gouvernement d’avoir recours à l’obligation. Les collectivités seront informées des délaissés concernés, puisque nous souhaitons obtenir leur avis, mais il pourra nous arriver de passer outre.
Ce sont 251 kilomètres, pas un de plus, qui nous occupent en cet instant. Même si je ne suis pas, sur le fond, convaincu de la nécessité de cet amendement, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
L’article L. 112-3 du code monétaire et financier est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° Les rémunérations des cocontractants de l’État et de ses établissements publics, au titre des contrats de délégation de service public, des contrats de partenariat et des concessions de travaux publics conclus dans le domaine des infrastructures et des services de transport. »
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par MM. Ries, Teston et Filleul, Mme Herviaux, MM. Camani, Chastan, Cornano, Esnol, Fichet, Le Vern, Navarro et Rome, Mme Rossignol, M. Vairetto et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
établissements publics
insérer les mots :
ainsi que des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements
La parole est à M. Roland Ries.
M. Roland Ries. Cet amendement tend à ouvrir aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics et à leurs groupements la possibilité d’indexer sur le niveau général des prix les rémunérations de leurs cocontractants au titre des contrats de délégation de service public, des contrats de partenariat et des concessions de travaux publics conclus dans le domaine des infrastructures et des services de transport, alors que l’article ne la prévoit, dans sa rédaction actuelle, que pour l’État et ses établissements publics.
La possibilité d’indexer les rémunérations des cocontractants de l’État et de ses établissements publics dans le domaine des transports répond à un objectif de gestion maîtrisée de la dépense publique. Il convient dans ces conditions d’offrir la même possibilité aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics et à leurs groupements.
Cet amendement a reçu un avis favorable de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 8 est présenté par MM. Ries, Teston et Filleul, Mme Herviaux, MM. Camani, Chastan, Cornano, Esnol, Fichet, Le Vern, Navarro et Rome, Mme Rossignol, M. Vairetto et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 42 rectifié est présenté par M. Grignon, Mme Sittler, M. Reichardt, Mmes Keller et Troendle, M. Lorrain et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L’article 285 septies du code des douanes est abrogé.
II. En conséquence, le code de la route est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 325-1, les mots : « et 285 septies » sont supprimés ;
2° Le I de l’article L. 330-2 est ainsi modifié :
a) Au 11°, les mots : « des taxes sur les poids lourds prévues aux articles 269 à 283 quinquies et 285 septies » sont remplacés par les mots : « de la taxe sur les poids lourds prévue aux articles 269 à 283 quinquies » et les mots : « ces taxes » sont remplacés par les mots : « cette taxe » ;
b) Au 12°, les mots : « des taxes sur les poids lourds prévues aux articles 269 à 283 quinquies et 285 septies » sont remplacés par les mots : « de la taxe sur les poids lourds prévue aux articles 269 à 283 quinquies » et les mots : « ces taxes » sont remplacés, deux fois, par les mots : « cette taxe ».
III. – La perte de recettes pour l’Agence de financement des infrastructures de transport de France est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs mentionnée aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Roland Ries, pour présenter l'amendement n° 8.
M. Roland Ries. Cet amendement vise à supprimer la taxe poids lourds alsacienne, c’est-à-dire la spécificité alsacienne en matière d’écotaxe ; il s'agit d’une question très importante pour l’élu d’Alsace que je suis.
Instituée tout d'abord en réponse aux reports de trafic suscités sur le réseau alsacien par la mise en place d’une taxe kilométrique en Allemagne, la Lastkraftwagen Maut, souvent appelée la Maut, à partir du 1er janvier 2005, cette taxe alsacienne avait ensuite été envisagée comme une expérimentation précédant l’instauration de l’écotaxe poids lourds nationale et devant disparaître avec elle.
Plusieurs fois retardée, l’entrée en vigueur de cette taxe alsacienne devrait finalement intervenir seulement trois mois avant la taxe nationale. Qui plus est, cette imposition devrait avoir une assiette différente, puisque seuls les poids lourds de plus de 12 tonnes en seraient redevables, alors que la taxe nationale concernera les poids lourds de plus de 3,5 tonnes.
En d’autres termes, à partir du 20 avril prochain, on mettrait en place une taxe alsacienne pour les poids lourds de plus de 12 tonnes et, à partir du 20 juillet prochain, l’Alsace devrait s’aligner sur la norme nationale en taxant les poids lourds de plus de 3,5 tonnes. Une expérimentation de cette nature sur une durée de trois mois ne me paraît pas raisonnable, car elle ne permet pas de tracer une évaluation, un bilan pour, le cas échéant, corriger le tir lors de la mise en place de la taxe nationale.
Dans ces conditions, il n’est plus possible de considérer cette taxe alsacienne comme une expérimentation. Elle est désormais une trace de l’Histoire, qui ne se justifie plus. Elle porte en outre atteinte à l’égalité de nos territoires.
Au-delà même du périmètre alsacien, nombre de transporteurs métropolitains ont souligné les difficultés à distinguer en amont, au sein de leur parc, les véhicules susceptibles d’être concernés par cette taxe, aussi bien en raison de leur poids que de leur éventuelle utilisation du réseau taxé alsacien, donc à les équiper en temps voulu du dispositif technique nécessaire à sa collecte.
Nous sommes là dans une situation héritée de l’Histoire, mais, une fois n’est pas coutume, monsieur le ministre, nous pourrions aligner l’Alsace sur le reste du pays. C’est en tout cas une demande unanime des sénateurs alsaciens, qui relayent en cela un souhait des transporteurs alsaciens.
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, pour présenter l'amendement n° 42 rectifié.
M. Francis Grignon. Monsieur le ministre, voici deux amendements identiques, signés l’un par des membres du groupe socialiste et apparentés, l’autre par des membres du groupe UMP, auquel je suis moi-même rattaché. Quelle majorité ! Que demande le peuple ! Je ne vois pas quels arguments vous pourrez opposer à une notre proposition. (Sourires.)
Si je ne suis pas toujours d’accord avec Roland Ries, je le rejoins sans réserve sur ce sujet.
Permettez-moi de rappeler que cette affaire a commencé avec l’instauration, par l’Allemagne, de la taxe sur les poids lourds, la Lastkraftwagen Maut. Un report de véhicules sur une route nationale qui traverse mon canton s’est ensuivi. Ce fut un tollé général ; le député Yves Bur a bien entendu réagi. Je n’en dirai pas plus, vous connaissez l’histoire.
À ce jour, cette route nationale étant devenue départementale, le conseil général a pu l’interdire au transit la nuit. Nous n’avons pu étendre cette interdiction à la journée, car nous ne parvenons pas à achever un petit tronçon colonisé par les hamsters. (Sourires.)
M. Ronan Dantec. C’est important !
M. Francis Grignon. Certes, mon cher collègue. Nous avons récemment eu un débat sur le loup et sur le danger qu’il représente pour les brebis. Le hamster n’est bien sûr pas dangereux pour les brebis, mais il est une catastrophe pour l’économie. On ne peut plus programmer aucun aménagement, créer aucune zone d’activité, ni procéder à la réfection des routes.
Monsieur le ministre, vous comprendrez que nous soyons mobilisés pour défendre cet amendement. J’espère que vous serez attentif aux arguments qui vous ont été présentés. La population en a assez de subir le transit des camions – voilà cinq ou six ans que cela dure –, mais elle accepte d’attendre trois mois de plus pour que les choses se règlent.
J’ajoute que les collectivités font un effort puisqu’elles ne toucheront pas leur part de taxe pendant ces trois mois ; cela représente 10 millions d’euros pour le Bas-Rhin et le Haut-Rhin. (M. le rapporteur manifeste son scepticisme.) Cet effort vise à ne pas ponctionner l’économie. Si, monsieur Ries, c’était prévu dans le fonds comme compensation pour le Grand contournement ouest de Strasbourg. Vous me répondrez sans doute que ce contournement n’est pas encore fait. Certes !
Mme Nathalie Goulet. Nous pouvons vous laisser entre vous, si vous le souhaitez !
M. Francis Grignon. Nous discutons ici d’un problème local, ma chère collègue.
Monsieur le ministre, j’espère que vous serez sensible à cette argumentation : trois mois, cela n’a vraiment plus de sens.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Au risque de me répéter, je rappelle que nous traitons ce soir non pas de la taxe proprement dite, qui a été votée en 2009, mais bien du mécanisme de répercussion.
Toute mesure concernant la taxe elle-même relève de la loi de finances et ne peut donc être insérée dans le présent projet de loi.
MM. Ries et Grignon, dans une belle unité territoriale, ont exprimé leurs préoccupations, qui sont, il faut le reconnaître, tout à fait légitimes.
L’objectif initial de la taxe poids lourd alsacienne était de limiter le report de trafic dû à la création de la Lastkraftwagen Maut, ce qui n’est plus d’actualité. En effet, le choix de l’écotaxe poids lourds nationale a transformé l’écotaxe poids lourds alsacienne en une simple expérimentation.
Cette expérimentation de trois mois, à blanc, n’a pas manqué de susciter quelques interrogations, d’autant qu’elle avait été réclamée en son temps, comme l’ont rappelé M. le rapporteur et M. Grignon. Toutefois, aujourd’hui, dans le contexte de l’écotaxe poids lourds nationale, sa revendication par le territoire n’est plus autant d’actualité.
M. François Rebsamen. Absolument !
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. La date d’entrée en vigueur de l’écotaxe poids lourds a été fixée par les textes au 20 juillet 2013 – même si vous avez eu raison de souligner, madame le rapporteur pour avis, combien cela n’est pas très pratique pour ceux qui y seront soumis –, ce qui conduit à limiter à trois mois la durée de cette expérimentation.
Pour autant, une expérimentation est nécessaire ; elle est même souhaitable. Il faut savoir que, d’après les chiffres qui ont été donnés tout à l’heure, ce sont 800 000 poids lourds qui vont être soumis à cette écotaxe, pour un réseau taxable de 10 milliards de kilomètres parcourus par an.
Il me semble donc important de réaffirmer la nécessité de mettre en place une expérimentation, la plus large qui soit, pour répondre au souhait du Gouvernement d’instaurer un dispositif sécurisé.
Madame le rapporteur pour avis, vous avez souligné que les enjeux de ce dispositif étaient importants en termes d’exemplarité et qu’il pourrait s’exporter, dans la mesure où d’autres pays examinent avec intérêt ce que nous faisons. Certes, cette expérimentation risque de ne pas être pleinement efficace dans un cadre territorial limité tel que celui qui a été prévu initialement. Néanmoins, je ne dispose pas, à ce jour, de dispositif de substitution à l’expérimentation alsacienne.
Nous réfléchissons à des modalités qui soient plus opérantes, notamment à une dimension nationale et une durée suffisamment pertinente, ainsi qu’à une période propice permettant d’adapter l’écotaxe telle qu’elle est. À cet égard, un comité de pilotage avec l’opérateur Ecomouv’ aura lieu dans quelques jours, le 18 février prochain – je cite cette date de mémoire.
En attendant, nous ne disposons pas précisément des informations nous permettant d’optimiser une expérimentation de cette nature, qui pourrait être plus générale et effectuée selon un délai d’observation plus adapté.
C’est pourquoi, sans autre disposition d’expérimentation, je ne puis malheureusement accepter la suppression de l’écotaxe poids lourds alsacienne, même si je rappelle, une fois encore, combien les propos de M. le rapporteur et de M. le sénateur sont très justes concernant la préoccupation qui est la leur.
J’ai dit à l’instant à M. Capo-Canellas que sa demande au sujet des délais ne m’avait pas convaincu, mais que je m’en remettais à la sagesse de la Haute Assemblée. Là, ce serait plutôt l’inverse : je suis convaincu, mais, compte tenu des contraintes entourant la date de la future rencontre avec l’opérateur Ecomouv’ le 18 février prochain, et en l’absence d’un système objectif alternatif, je suis contraint d’émettre un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, je voudrais d’abord vous dire que la date du 20 juillet est celle qui résulte du contrat de partenariat, non celle de la mise en service. La date du partenariat public-privé oblige le partenaire privé à s’assurer que, le 20 juillet, tout son dispositif est en état de fonctionnement. Cependant, cela ne veut pas dire que la mise en service doit avoir lieu au même moment. Ce sera à vous de le décider par arrêté.
Je m’exprimerai à présent au nom de la commission des finances, dont je suis le rapporteur pour avis, pour rappeler sa position.
M. le président. Je vous en prie, madame le rapporteur pour avis.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur pour avis. Sur le fond, nous approuvons totalement les amendements nos 8 et 42 rectifié. L’expérimentation alsacienne n’a plus de sens trois mois avant le lancement de l’écotaxe. Nous avons deux ans de retard, et aujourd’hui, très objectivement, cette expérimentation présente plus d’inconvénients que d’avantages, que ce soit pour les transporteurs ou pour Ecomouv’.
Pour les transporteurs, c’est évident. Contrairement à ce que l’on a cru au départ, la plupart des transporteurs en France seront concernés, et pas seulement les transporteurs alsaciens, dans la mesure où il est impossible de savoir à l’avance les camions qui vont passer par l’Alsace ; cela les oblige, comme ils nous l’ont dit lors de leur audition, à équiper dès maintenant, dès l’instauration de cette taxe alsacienne, une grande partie de leur flottille, dans des délais très tendus. C’est également le cas pour Ecomouv’.
Ajouter quelque chose à la taxe alsacienne serait une erreur, et ce ne serait pas forcément une bonne chose pour la sécurité technologique dont nous avons besoin sur ce dossier. Par conséquent, sur le fond, je le répète, nous sommes tout à fait d’accord avec les deux amendements identiques.
Dans mon propos, monsieur le ministre, j’ai parlé d’abandon et non de suppression – il y a une nuance –, car, sur la forme, la commission des finances estime souhaitable de laisser toute latitude au Gouvernement pour lancer une expérimentation nationale à blanc, comme je l’ai dit dans mon intervention, dans le cadre de la relation contractuelle entre l’État et son partenaire privé.
En particulier, on peut s’interroger sur d’éventuelles compensations pécuniaires – ce point n’a pas été évoqué – offertes au partenaire privé en cas de suppression pure et simple de la taxe alsacienne, alors qu’Ecomouv’ a déjà engagé des investissements pour la recouvrer. Il faut être extrêmement attentif à cet argument. Ne met-on pas le doigt, là encore, dans un engrenage compliqué ?
C’est pourquoi la commission des finances estime qu’il est préférable de s’en remettre à la négociation des parties plutôt que de supprimer, par un amendement à ce texte de loi, la taxe poids lourds alsacienne, et le comité de pilotage du 18 février pourrait justement être l’occasion de cette discussion avec Ecomouv’.
Toutefois, je le répète, sur le fond, la commission partage l’intention de M. le rapporteur de la commission du développement durable. C’est d’une véritable expérimentation que nous avons besoin, et, aujourd’hui, cette taxe poids lourds alsacienne n’en est pas une.
Tels sont les éléments que je voulais évoquer pour éclairer nos collègues.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je ne suis pas alsacienne, mais j’essaie de comprendre ce que l’on nous demande de voter, à savoir, en l’occurrence, la suppression d’une disposition qui n’est pas encore entrée en vigueur et qui va se télescoper avec une autre créant une expérimentation à l’échelon national, avec d'ailleurs, selon les auteurs des amendements nos 8 et 42 rectifié, un délai de trois mois de décalage par rapport à cette taxe nationale.
Quand on sait les difficultés que pose la publication des décrets d’application ou la mise en œuvre des lois – les retards sont fréquents à cet égard –, je ne vois pas du tout l’intérêt de maintenir une taxe totalement virtuelle qui va se télescoper avec le texte national.
Par conséquent, je pense que l’expérimentation pourrait être effectuée à l’échelon national. Sinon, il y aurait une rupture d’égalité flagrante avec l’Alsace et, pour le coup, je ne vois pas très bien ce qui la justifierait.
Il me semble donc tout à fait intéressant de supprimer une disposition qui n’existe pas. C’est la raison pour laquelle je voterai ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.
Mme Fabienne Keller. Je souhaiterais compléter l’orchestre alsacien, si mes collègues me le permettent ! (Sourires.)
Je confirme tout à fait les propos que vient de tenir à l’instant Mme Goulet. La loi Bur a été promulguée le 5 janvier 2006 et, huit ans plus tard, l’expérimentation alsacienne n’est toujours pas mise en place. Toutefois, nous ne sommes pas loin du but, et je profite de cette occasion pour saluer l’initiative de notre collègue député Yves Bur, qui a souhaité répondre à ce transfert de trafic.
Un peu de géographie : il existe deux autoroutes parfaitement parallèles de part et d’autre du Rhin. Au moment de la mise en œuvre de la Lastkraftwagen Maut, les camions ont instantanément trouvé le chemin, pourtant un peu tortueux, pour rejoindre l’autoroute alsacienne.
Ainsi, mes chers collègues, l’Alsace a été en quelque sorte en tête – j’espère que vous me pardonnerez de le signaler –, puisque, quelques années plus tard, le Grenelle de l’environnement a décidé courageusement cette écotaxe, qui constitue un élément important du rééquilibrage des transports.
Nous connaissons l’évolution du dossier ; je n’y reviendrai pas en détail. Nos dispositions séparées ont fini par converger. Aujourd’hui, l’écart s’est amenuisé et le dispositif est national, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Je parlerai d’une sorte de saine contamination européenne, et nous pourrions d’ailleurs espérer que ce dispositif s’étende, jusqu’à une écotaxe complètement harmonisée au niveau européen.
Par conséquent, mes chers collègues, sans vouloir fâcher M. le ministre, je souhaiterais que nous votions, tous ensemble, en ce sens. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Je n’ai pas voulu spontanément troubler le tête-à-tête alsacien que formaient, avec une forme de brio, Roland Ries et Francis Grignon, en défendant la même position, mais j’ai constaté que d’aucuns, à commencer par le ministre, commençaient à fissurer ce consensus qui semblait s’esquisser.
Bien que n’ayant pas cosigné les amendements de mes collègues alsaciens, je comprends leurs préoccupations et je dois dire que, au sein de la commission, lors des débats – M. le rapporteur peut en témoigner – une forme d’unanimité s’est dégagée devant cette spécificité alsacienne que nous ne comprenons plus et dont les Alsaciens eux-mêmes nous disent qu’ils ne la souhaitent pas.
Je proposerais volontiers que l’expérimentation ait lieu à l’échelon national, avant la mise en service de l’écotaxe, au lieu d’être simplement limitée à l’Alsace. Nous pourrions peut-être trouver là une solution de sortie. En effet, je comprends l’argument de M. le ministre invoquant des engagements contractuels qu’il faut tenir vis-à-vis du privé.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Monsieur le sénateur, nous allons discuter avec l’opérateur dans les prochains jours afin de parvenir au système le plus sécurisé qui soit et de l’expérimenter à blanc.
Néanmoins, nous ne pouvons le faire que dans le cadre de discussions, et Mme le rapporteur pour avis a tout à fait raison de souligner qu’il nous faut garantir la sécurité juridique et être en discussion avec l’opérateur afin que la suppression de l’expérimentation alsacienne ne résulte pas de la seule initiative du Gouvernement, c’est-à-dire d’un déséquilibre des engagements.
Cette discussion aura lieu dans quelques jours, et la navette se poursuivra sur ce texte le temps nécessaire. Pour autant, nous héritons d’un dispositif fort ancien, Mme Keller a raison de le souligner. S’il avait été mis en place, nous aurions certainement pu bénéficier de solutions plus opérantes à l’échelon national.
Pour l’heure, nous sommes en discussion avec l’opérateur, et, puisque cette expérimentation correspondait à une situation de fait, voire de droit qui se justifiait, nous œuvrons aujourd'hui à la mise en place de ce système. Par ailleurs, une disposition législative n’est pas obligatoire pour supprimer ainsi une expérimentation.