M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’entends votre propos, monsieur le sénateur, et l’on me souffle même qu’Anne-Marie Escoffier était rapporteur du texte que vous avez mentionné.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Absolument !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je vais être très franche avec vous : vous me proposez de toucher au code pénal, dans un domaine où il existe une jurisprudence de la Cour de cassation.
Or je n’ai même pas fait de réunion interministérielle sur le sujet, et vous connaissez notre prudence dès lors qu’il s’agit de toucher au code pénal. Je regrette de ne pas avoir organisé une telle réunion et je m’engage à lancer une réflexion avec nos directions sur cette question. Toutefois, vous comprendrez aisément que je ne puisse pas m’engager pour le moment.
Je maintiens donc un avis défavorable, tout en entendant que j’ai un travail à faire, y compris dans la perspective du projet de loi qui sera prochainement soumis au Parlement.
M. François Grosdidier. Faites confiance à notre sagesse ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.
M. Alain Anziani. À titre personnel, je ne voterai aucun de ces deux amendements.
Tout d’abord, monsieur Hyest, et je rejoins en cela le raisonnement de Mme la ministre, je crois qu’il est toujours très délicat, en dépit de toutes les réflexions qui ont déjà pu être menées, d’amender un texte de droit pénal sans avoir pu tenir une concertation très large avec les professionnels concernés.
Comment peut-on modifier un tel texte sans avoir demandé aux magistrats de la Cour de cassation en charge de ce type d’affaires – je sais qu’ils sont mis en cause, mais justement ! – quelle est leur position et quelles seront les conséquences d’une telle modification ? Il me semble que procéder ainsi n’est pas de bonne administration.
Ensuite, je vois un effet certain de cette mesure : nous allons ouvrir un débat fracassant avec l’opinion, qui nous reprochera de nouveau de ne tempérer la législation pénale que pour nos propres intérêts.
J’insiste sur ce point. Je l’ai souligné en début d’après-midi, ce texte va faire l’objet de critiques, que nous devrons assumer et face auxquelles il nous faudra tenir bon. Toutefois, n’en rajoutons pas ! Or avec cette disposition pénale, nous en rajouterions justement. Et tout cela pour rien, à mon avis, je regrette de le dire aux auteurs des amendements. Car quand on remplace « intérêt quelconque » par « intérêt personnel distinct de l’intérêt général », où est la révolution ? (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Bas. C’est très différent !
M. Alain Anziani. On ne change strictement rien !
François Pillet nous explique que la notion d’intérêt moral suffit aujourd’hui pour faire condamner quelqu’un au titre de la prise illégale d’intérêts. Eh bien, demain, un intérêt personnel distinct de l’intérêt général pourrait être constitué également, par un intérêt moral. Tout cela ne change donc strictement rien.
Nous allons faire beaucoup de bruit pour, in fine, ne rien modifier. Nous devrons faire face aux mêmes condamnations que celles qui sont rendues aujourd’hui. Si je déplore que les tribunaux aient parfois la main trop lourde, ce n’est pas de cette façon-là que nous aboutirons à un meilleur résultat.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous voterons l’amendement présenté par François Pillet, pour deux raisons très simples.
Tout d'abord, ce texte n’est pas frappé par la procédure accélérée. La navette nous donnera l’occasion d’ajuster ce dispositif et de nous concerter avec les services du garde des sceaux.
Ensuite, le Sénat a déjà voté cette disposition…
M. Bernard Saugey, rapporteur. Unanimement !
Mme Nathalie Goulet. … à l’unanimité, qui plus est. Il s’agit d’un ajustement jurisprudentiel qui, en toute hypothèse, n’entrera pas en vigueur avant la fin de cette navette. Rien ne nous empêche d’avancer sur ce dossier.
Nous voterons donc l’amendement n° 1 rectifié.
M. le président. La parole est à M. François Pillet, pour explication de vote.
M. François Pillet. Je pense qu’il faut effectivement profiter de la navette pour travailler encore ce texte et permettre à Mme la ministre d’en affiner la portée avec ses services.
Quant à savoir si nous nous fracasserions contre l’opinion publique, mon excellent contradicteur, M. Anziani, qui est un non moins excellent juriste, sait très bien que nous ne proposons pas d’exonérer les élus ni, pour le dire clairement, d’amnistier d’une quelconque façon ceux qui se seraient rendus coupables de gestion de fait.
Nous ne faisons qu’apporter une précision, afin de savoir exactement quand une gestion de fait peut être poursuivie devant un tribunal correctionnel ou une cour d’appel. Encore une fois, je ne pense pas – je n’ai pas vérifié– que ce texte ait jamais été frappé d’une question prioritaire de constitutionnalité. Un « intérêt quelconque » ? Trouvez-vous vraiment qu’il s’agit là d’une rédaction à la hauteur d’un texte pénal ? Celle que nous proposons a au moins l’avantage d’avoir été éclairée par les débats parlementaires.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Tout d’abord, cela a été dit, la rédaction que François Pillet et moi-même proposons a tout de même été votée deux fois à l’unanimité au Sénat. Certes, nous en sommes restés là, mais vous sembliez plus enthousiaste à l’époque, monsieur Anziani. (Sourires.)
Comme l’a rappelé le président Hyest, le représentant du Gouvernement n’avait pas émis à l’époque de critiques particulières à son encontre.
S’agissant de la disposition relative au favoritisme, si ma mémoire est bonne, elle a également été votée une fois au Sénat. Ce n’est tout de même pas rien.
Quant au troisième point de mon amendement, relatif à l’article 122-4 du code pénal, il s’agit simplement d’expliciter cette disposition et de permettre aux maires de faire valoir l’autorité de leurs fonctions pour ne pas recevoir trop de horions de la part de leurs administrés. Quelle révolution ! (Sourires.)
Enfin, on me dit qu’il ne faut pas bricoler le code pénal. Très bien, madame la ministre, mais que ne nous proposez-vous alors un texte global sur le statut de l’élu, qui nous permette de discuter, en prenant le temps nécessaire, de toutes ces questions ? Or, si j’ai bien compris, nous n’aurons pas un tel texte !
Dès lors, nous en sommes réduits à utiliser le peu de pouvoirs dont nous disposons pour tenter de vous aiguillonner vers tel ou tel problème qui nous semble important. Cela ne va pas plus loin que ça. Proposez-nous un véritable statut de l’élu, qui puisse régler ce problème, et nous vous suivrons.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 1er.
Article 1er
I. – (Non modifié) Le second alinéa du I de l’article L. 2123-20-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Dans les communes de moins de 3 500 habitants, sous réserve de l’application des II et III de l’article L. 2123-20 et sans préjudice de l’application de l’article L. 2123-22, l’indemnité allouée au maire est fixée au taux maximal prévu par l’article L. 2123-23. »
II. – Au premier alinéa de l’article L. 5214-8 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « et L. 2123-18-4 » sont insérés les mots : « , ainsi que le II de l’article L. 2123-24-1 ».
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l'article.
M. Yves Daudigny. À rebours des propos qui ont été tenus tout à l'heure, je débuterai mon intervention en applaudissant l’arrivée, dans notre assemblée, de ce texte que j’oserai qualifier d’ambitieux et de courageux à la fois.
Dans la suite logique et directe des États généraux de la démocratie territoriale, organisés par le président du Sénat en octobre dernier, cette proposition de loi, au même titre que celle qui a été examinée hier, marque une réelle avancée pour la vie politique de notre pays.
Après une discussion générale riche d’arguments, nous entrons dans le vif du débat avec l’examen de l’article 1er de ce texte, qui a été nourri par les réflexions des membres de la commission des lois.
Les propositions émises dans cet article relèvent de la nécessité et de la justice : en décidant l’attribution automatique de l’indemnité allouée aux maires des petites communes au taux maximal, ce texte témoigne de notre reconnaissance pour le travail des élus locaux, au premier rang desquels se trouvent les maires.
L’exemple du département de l’Aisne mérite d’être évoqué : sur 816 communes, 92 dépassent le seuil des 1 000 habitants, soit à peine 11 %. Sur ces 92 communes, 13 comptent plus de 3 500 habitants, ce qui représente à peine 2 % du nombre total des communes axonnaises. Les plus petits villages comptent moins de 20 habitants.
Élu de la ruralité, je mesure quotidiennement la difficulté des défis à relever et j’entends les demandes légitimes des élus locaux.
Cette proposition de loi, particulièrement dans les dispositions énoncées à son article 1er, répond à ces demandes. Beaucoup de maires, dans l’Aisne et partout ailleurs dans notre pays, exercent leur mandat sur leur temps libre. Un grand nombre d’entre vous, mes chers collègues, qui ont été, sont ou seront maires, connaissent ou connaîtront ces contraintes de toute nature, savent ou sauront combien cette charge est rendue encore plus lourde par la complexité administrative qui s’impose à toutes les communes.
L’exercice d’un mandat local demande du temps, de l’énergie, de l’écoute, souvent aussi de la patience. Les maires sont les premiers acteurs de la proximité dans nos territoires, les premiers relais de notre République. Leurs tâches multiples, leurs compétences nombreuses, généralement acquises par la pratique, fondent notre cohésion sociale, bâtissent le premier niveau de citoyenneté, donnent réalité au vivre ensemble, ciment de notre société.
En décidant de fixer l’indemnité qui leur est allouée au taux maximal prévu à l’article L. 2123-23 du code général des collectivités territoriales sans autre décision du conseil municipal, nous revaloriserions la fonction de maire.
Les initiatives parlementaires en faveur d’une telle automaticité sont déjà nombreuses. De nombreux élus de petites communes refusent de percevoir, ou plutôt n’osent pas percevoir, l’indemnité qui leur est due, de peur d’alourdir un budget communal déjà bien souvent amaigri, ou l’utilisent pour offrir, par exemple, un repas aux personnes âgées de la commune.
C’est donc bien au Parlement, à commencer par le Sénat, qui « assure la représentation des collectivités territoriales » selon les termes de l’article 24 de la Constitution, de remédier à cette difficulté en créant un cadre pérenne d’indemnisation des maires, dont la fonction est tout aussi difficile, cela a déjà été dit, quelle que soit la taille de leur commune.
Ce faisant, la Haute Assemblée prouve son attachement à l’échelon communal et son investissement dans la sécurisation du parcours de l’élu. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
5
Renvoi pour avis
M. le président. J’informe le Sénat que le projet de loi (n° 260, 2012-2013) portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports (engagement de la procédure accélérée), dont la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique, est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Exercice par les élus locaux de leur mandat
Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, sur l’article.
M. François Grosdidier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, tout d’abord, on ne peut que se féliciter de l’égalité de traitement qu’institue le présent article entre les délégués des communautés d’agglomération et des communautés de communes, hélas souvent les parents pauvres des élus locaux, alors qu’ils font preuve d’un grand dévouement au sein de structures souvent chronophages et dans lesquelles ils exercent des responsabilités bien supérieures à celles qu’ils accomplissaient jusqu’alors dans leur commune.
Par ailleurs, l’article 1er comporte certes une avancée, mais celle-ci me paraît insuffisante. Ainsi, jusqu’à présent, généralement, l’indemnité de fonction du maire dans les communes de moins de 1 000 habitants était fixée à un taux unique. La présente proposition de loi vise à étendre de plein droit cette indemnité aux maires des communes de moins de 3 500 habitants.
Selon moi, cette disposition est indispensable, et cela non pas seulement, comme je l’ai entendu avancer, parce que de nombreux maires de petites communes répugnent à s’indemniser eux-mêmes ou parce qu’ils y renoncent eu égard à la modicité du budget communal. Une autre bonne raison justifie l’application d’une indemnité fixe aux maires de toutes les communes, indépendamment de leur taille : il me semble très préjudiciable que la première délibération d’un conseil municipal, qui intervient tout de suite après l’élection du maire et des adjoints, porte sur leurs indemnités.
Rappelons-nous le contexte : l’installation du conseil municipal est souvent l’aboutissement d’une campagne électorale qui a duré plusieurs semaines, voire plusieurs mois, au cours de laquelle chacun des protagonistes s’est attaché à identifier et à répondre aux problèmes de nos concitoyens et a souvent pris des engagements très forts devant eux et pour eux.
Or la disposition législative qui impose la fixation du montant des indemnités des élus lors de la première délibération du conseil municipal laisse croire que la principale préoccupation de ces derniers est leurs indemnités. Dans de nombreuses communes, des élus de l’opposition, de droite comme de gauche d'ailleurs, recourent à cet argument avec la plus grande démagogie, pourfendant ce qu’ils croient être la première préoccupation de leurs collègues de la majorité.
Toutefois, cela a été dit, ces indemnités légales sont parfaitement légitimes. Elles correspondent à une grille déterminée par la loi, à l’instar du traitement des fonctionnaires. Lorsque le conseil municipal délibère en vue de créer un emploi dans un grade, le salaire correspondant est défini par les textes. Il ne lui incombe pas de fixer la rémunération de l’agent public. Il devrait en être de même pour les élus.
Je le rappelle, la loi avait déjà été modifiée afin de permettre la mise en œuvre de plein droit de l’indemnité dans les communes de moins de 1 000 habitants. Si le présent texte est adopté, cette mesure sera étendue aux communes de moins de 3 500 habitants. Je regrette que le consensus se soit arrêté là, car il sera un jour nécessaire de généraliser cette disposition à toutes les communes. En effet, plus la commune est importante, plus les discours démagogiques relatifs aux indemnités des élus ont d’écho. Or c’est bel et bien cela qu’il faudrait éviter.
Par ailleurs, je regrette, une fois de plus, que l’article 40 de la Constitution ait été opposé à l’un des amendements que j’avais déposé.
Je suggérais de créer un statut particulier pour le premier adjoint. Dans l’ordre du tableau du conseil municipal, il occupe un rang légèrement supérieur au premier figurant. Il est souvent un peu plus que le remplaçant potentiel en cas de vacance du poste de maire. Il exerce fréquemment une mission de représentation bien plus lourde que les autres adjoints, ainsi qu’une tâche de coordination. Au sein de l’exécutif, il est très souvent chargé de missions transversales, alors que les autres adjoints bénéficient de délégations verticales. Pour toutes ces raisons, il aurait été juste qu’il obtienne une indemnité un peu supérieure ; je proposais 20 % de plus.
Enfin, je suis désolé de ne pas céder à la démagogie ambiante, mais je suis en total désaccord avec la proposition de M. Anziani tendant à interdire toute redistribution à d’autres élus de l’écrêtement, qui concerne les indemnités perçues par un élu cumulant plusieurs fonctions.
Mes chers collègues, vous le savez tous, les rémunérations d’un sénateur-maire, d’un député-maire, d’un député en même temps président de conseil général, ou encore d’un maire d’une commune de moins de 3 000 habitants présidant de surcroît des organismes intercommunaux et siégeant au conseil général et au conseil régional – que de cumuls ! – dépassent le plafond fixé par la loi et doivent faire l’objet d’un écrêtement.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. François Grosdidier. Surtout, dès qu’un maire, tout en étant garant des orientations de la mairie, occupe d’autres fonctions, il confie le plus souvent à son premier adjoint ou à des adjoints désignés une partie des tâches quotidiennes qui normalement lui incombent.
Je conçois que le reversement de cet écrêtement à un autre élu soit abandonné. Toutefois, ce qui me choque, c’est que nous-mêmes puissions présenter une telle redistribution comme anormale et amorale. Il est tout à fait légitime qu’un premier adjoint ou qu’un autre adjoint qui effectue du travail supplémentaire puisse bénéficier d’une majoration de son indemnité, laquelle n’est volée à personne, puisqu’elle est prélevée sur l’écrêtement résultant d’un cumul de fonctions.
M. le président. Il faut vraiment conclure, mon cher collègue !
M. François Grosdidier. Je regrette que l’on ne puisse aller plus avant sur ce point. Je déplore également le recours systématique à l’article 40 de la Constitution.
M. le président. La parole est à M. Roland Ries, sur l'article.
M. Roland Ries. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans les communes comptant de 1 000 à 3 500 habitants, une délibération fixant les indemnités, et non les rémunérations, des membres du conseil municipal, au premier rang desquelles celle du maire, doit intervenir dans les trois mois suivant l’installation d’un nouveau conseil.
Ainsi, en l’état actuel du droit, les maires de ces communes se trouvent placés dans la position politiquement peu confortable de faire voter, en début de mandat, une éventuelle augmentation de leurs indemnités de fonction, dans les limites des taux maximaux fixés par la loi. Nombreux sont ceux qui y renoncent pour cette raison.
L’article 1er de la présente proposition de loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat a justement pour objet de mettre un terme à cette situation. En effet, il prévoit de fixer automatiquement au taux maximal l’indemnité des maires de communes de moins de 3 500 habitants, soit une rémunération mensuelle brute de 1 634 euros. Il permet ainsi d’éviter la détermination de l’indemnité lors d’une délibération du conseil municipal et aligne le régime des maires des communes de 1 000 à 3 500 habitants sur celui des communes de moins de 1 000 habitants. Dans ces dernières, en effet, l’indemnité allouée au maire est déjà fixée automatiquement au taux maximal prévu par la loi, sauf si le conseil municipal en décide autrement.
Il me semble que cet article contribue ainsi tout à la fois à accroître la sécurité financière de l’élu dans l’exercice de son mandat, à le conforter dans ses missions d’intérêt général et à reconnaître l’évolution de son rôle en lui attribuant une juste indemnité, eu égard à l’ensemble des charges qui lui incombent.
De mon point de vue, cette modification, qui permet cependant toujours aux conseils municipaux d’adopter une autre disposition, me paraît de nature à favoriser, en toute sécurité financière, l’exercice du mandat de maire.
Pour ce qui me concerne, contrairement à l’orateur précédent, je souscris tout à fait aux dispositions de l’article 1er bis, ajouté lors des travaux de la commission des lois, dont je vous cite l’alinéa 5 : « La part écrêtée du montant total de rémunérations et d’indemnités de fonction […] ne peut faire l’objet d’un quelconque reversement, même indirect. Celle-ci est reversée au budget de la collectivité ou de l’établissement concerné. »
Cette disposition apportera, me semble-t-il, une plus grande transparence financière à l’égard des indemnités des élus qui cumulent plusieurs mandats – mais pour combien de temps encore ?... Elle s’inscrit en rupture avec les pratiques actuelles marquées, reconnaissons-le, par une certaine opacité lorsque, par exemple, le montant qui dépasse ce plafond est versé à un autre élu au choix – ce n’est pas forcément le premier adjoint –, sans que l’on sache exactement ce qu’il en est.
L’article 1er bis faisant toute la clarté sur ce point, je vous indique d’ores et déjà que je le voterai. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l'article.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne prends pas la parole pour magnifier les vertus du présent article – d’autres s’en chargeront –, ainsi que son caractère révolutionnaire.
Mme Jacqueline Gourault. À tort !
M. Pierre-Yves Collombat. Comme à mon habitude, je tiens à protester contre l’usage de l’article 40 de la Constitution. En effet, un amendement que j’avais déposé et qui visait à modifier, assez substantiellement j’en conviens, le tableau des taux maximaux autorisés selon les strates de communes a été jeté aux oubliettes au nom de cette disposition.
Autant je comprends que le Gouvernement puisse, lui, invoquer cet article – c’est, je le pense, l’esprit de la Constitution –, autant l’usage qui en est fait dans cette maison et qui empêche toute discussion d’une mesure avant même que le Gouvernement prenne sa décision me paraît constituer une entrave à l’exercice de notre mission, une façon de ligoter le Parlement. Je ne m’y ferai jamais et je le répéterai aussi souvent qu’il le faudra !
M. François Grosdidier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Je formulerai pour ma part quelques remarques générales.
Cela a été dit et répété : l’exercice d’un mandat local constitue une charge de plus en plus lourde, qui exige une disponibilité si grande que la conciliation de l’exercice de ce mandat et de la vie professionnelle est souvent en cause.
Or l’objectif premier est bien l’accès de toutes et de tous au mandat, ce qui implique une protection globale de l’élu – d’autres orateurs l’ont déjà indiqué, mais je tiens à le répéter – durant son mandat et à l’issue de celui-ci.
Certes, des avancées ont bien été réalisées par le passé, notamment à partir du rapport Debarge, qui avait identifié la plupart des pistes à emprunter. Je pense également aux lois de février 1992 et de février 2002, qui ont facilité l’exercice des mandats locaux.
Cependant, je crois qu’il fallait aller plus loin et effectuer un pas supplémentaire dans la bonne direction. Oui, il fallait avancer, car les responsabilités que confèrent les mandats locaux, la technicité qu’ils impliquent et les exigences de plus en plus fortes des citoyens compliquent les conditions d’exercice du pouvoir local.
Il s'agit, pour reprendre les termes employés par les auteurs de la proposition de loi, de « maintenir la vitalité de la démocratie locale », une vitalité elle-même soutenue par les milliers d’élus engagés au service de la chose publique. C’est ce à quoi contribue le texte qui nous est proposé aujourd'hui.
Environ 500 000 élus locaux, bénévoles pour la plupart, sont au service de leurs concitoyens. Prenons garde de ne pas décourager celles et ceux qui sacrifient leurs loisirs, leur vie familiale et parfois même leur vie professionnelle. Nous devons leur donner les garanties et les moyens leur permettant d’assurer leur mission. Les améliorations apportées aujourd'hui par cette proposition de loi contribueront à enrayer leur découragement et à favoriser l’accès de tous à toutes les fonctions électives. C’est un pas de plus, une étape supplémentaire, dont il convient de se féliciter.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 51, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le I de l’article L. 2123-20 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« I. – Les indemnités fixées pour l’exercice des fonctions de maires et de présidents de délégation spéciale et les indemnités maximales pour l’exercice effectif des fonctions d’adjoints au maire des communes, de conseillers municipaux des communes de 100 000 habitants et plus, de membres de délégations spéciales faisant fonction d’adjoint sont fixées par référence au montant du traitement correspondant à l’indice brut terminal de l’échelle indiciaire de la fonction publique. »
II. – L’article L. 2123-20-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2123-20-1. - I. – Lorsque le conseil municipal est renouvelé, les indemnités de ses membres, à l’exception de l’indemnité du maire, sont fixées par délibération. Cette délibération intervient dans les trois mois suivant l’installation du conseil municipal.
« II. – Sauf décision contraire des membres de la délégation spéciale, ceux d’entre eux qui font fonction d’adjoint perçoivent l’indemnité fixée par délibération du conseil municipal pour les adjoints.
« III. – Toute délibération du conseil municipal concernant les indemnités de fonction d’un ou de plusieurs de ses membres à l’exception du maire est accompagnée d’un tableau annexe récapitulant l’ensemble des indemnités allouées aux autres membres du conseil municipal. »
III. – L’article L. 2123-23 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2123-23. – Les maires des communes ou les présidents de délégations spéciales perçoivent une indemnité de fonction fixée en appliquant au terme de référence mentionné à l’article L. 2123–20 le barème suivant :
«
POPULATION (habitants) |
TAUX en % de l’indice 1015 |
Moins de 500 |
17 |
De 500 à 999 |
31 |
De 1 000 à 3 499 |
43 |
De 3 500 à 9 999 |
55 |
De 10 000 à 19 999 |
65 |
De 20 000 à 49 999 |
90 |
De 50 000 à 99 999 |
110 |
100 000 et plus |
145 |
« Le conseil municipal peut par délibération fixer une indemnité de fonction inférieure au barème ci-dessus.
« Lorsque le maire cesse d’exercer son activité professionnelle et dans les communes dont la population est comprise entre 10 000 et 99 999 habitants, les indemnités de fonction sont majorées de 10 %. »
IV. – Au IV de l’article L. 2123-24 du même code, les mots : « maximale susceptible d’être allouée au maire de la commune » sont remplacés par les mots : « fixée pour le maire ».
V. – Au V de l’article L. 2123-24-1 du même code, les mots : « maximale susceptible d’être allouée au » sont remplacés par les mots : « fixée pour le ».
VI. – Au premier alinéa de l’article L. 5214-8 du même code, après les mots : « et L. 2123-18-4 » sont insérés les mots : « , ainsi que le II de l’article L. 2123-24-1 ».
La parole est à Mme la ministre.