M. Richard Tuheiava. J'avoue que je suis quelque peu déçu s’agissant de l’amendement sur l'assistance administrative mutuelle.
Monsieur le ministre, je peux entendre que vous n'ayez pas tous les éléments permettant de comprendre comment fonctionnent les marges arrière dans l'ensemble des départements et collectivités d'outre-mer. Mais, si j’ai déposé cet amendement, c'est justement parce que je suis très au fait des marges arrière pratiquées en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
J’ai mené une vingtaine de consultations en Polynésie, y compris auprès des grandes surfaces qui pratiquent ces marges, même si elles ne l’ont pas confessé ! Je me suis rendu compte que la réglementation n'était pas applicable à la Polynésie française. Sans violer le secret des entretiens que j’ai pu avoir, c’est au terme de mon rendez-vous avec le chef du service des douanes de la Polynésie française que j'ai eu l’audace de déposer cet amendement. En effet, ce dernier m’avait fait part de son impuissance devant ce phénomène qui contribue directement à la cherté de la vie.
Je veux bien que l'on prenne le temps de finaliser cet aspect des choses en vue de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale. Je prends même cela comme un engagement du Gouvernement de ne pas laisser tomber cette question dans les oubliettes. C’est la raison pour laquelle je vais retirer mon amendement.
Par ailleurs, je suis surpris de la réponse de M. le ministre sur l'amendement n° 50. Les tarifs bancaires relèvent directement de la compétence du Gouvernement : on ne peut donc pas reprocher au gouvernement polynésien de ne pas réglementer sur cette question. Il est parfaitement légitime que nous en discutions au Parlement. Je serais satisfait si le Gouvernement s’engageait à aborder ce problème de manière définitive à l'Assemblée nationale. (M. le ministre fait un signe d’assentiment.)
Madame la présidente, je retire donc l’amendement n° 50.
M. Victorin Lurel, ministre. J'aimerais vraiment vous donner satisfaction sur l'amendement n° 51, mais je suis un peu gêné. Vous souhaitez que « les conventions signées et ratifiées par la France au titre du régime juridique d'assistance mutuelle administrative internationale s'appliquent au bénéfice des services douaniers de la Polynésie », mais je ne sais pas quel est le contenu des conventions auxquelles vous vous référez.
Je comprends votre amendement, auquel je pourrais donner un avis de sagesse, pour vérifier ensuite, d’ici à l’examen du texte par l’Assemblée nationale, si la chose est possible. Mais ne serait-ce pas une mauvaise façon de légiférer ? Je le répète, nous ne savons pas ce qu'il y a dans les conventions. Quel est le périmètre exact d’application ? Prévoir une application automatique me gêne.
Enfin, j’accepte de m’en remettre à la sagesse du Sénat. Nous ferons plus tard une analyse très approfondie du dispositif, qui risque d’être supprimé lors de son examen par l'Assemblée nationale. Je comprends le problème puisque nous travaillons également dessus, mais il est compliqué à résoudre.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
L'amendement n° 52, présenté par M. Tuheiava, Mme Claireaux et MM. Antoinette, Patient, Desplan, Antiste, Cornano, J. Gillot et Vergoz, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le gouvernement peut assister techniquement et financièrement les autorités de la collectivité de la Polynésie française, par convention, à l’organisation périodique d’une étude sur la structure de consommation des ménages de la Polynésie française.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Il s'agit de prévoir que l’État apporte une assistance technique et financière – c'est la raison pour laquelle j’ai inséré un gage dans mon amendement – à la Polynésie française dans l'organisation périodique d'une étude sur la structure de consommation des ménages.
J’ai déposé cet amendement après avoir mené une consultation locale d’une vingtaine d'opérateurs, dont les services administratifs du pays mais également de l'État. Il est apparu à la lumière de ces consultations que la dernière étude sur le budget des familles en Polynésie française date de 2000 : elle a douze ans !
Alors même que nous sommes en pleine refonte de notre modèle de développement et de notre système fiscal, qui relèvent de la compétence locale, nous manquons d'éléments nous permettant de prendre nos décisions. Nous ne savons pas qui nous devons satisfaire au titre de la fiscalité et de la consommation.
Voilà pourquoi cet amendement vise tout simplement à permettre à l’État d’apporter un appui pour l’organisation de l’étude sur la structure de la consommation des ménages.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis. Sur le plan strictement juridique, cet amendement a trait aux relations entre l'État et la Polynésie française et devrait relever du domaine de la loi organique, et ce d'autant plus qu'il conduit, certes par la voie de la convention, l’État à appuyer la Polynésie française dans son champ de compétences.
De surcroît, la situation socio-économique en Polynésie fait régulièrement l'objet d'études de la part de l'Institut d’émission d'outre-mer et surtout de l'Institut de la statistique de la Polynésie française, qui dresse notamment une note de conjoncture trimestrielle.
Il semble donc préférable de s'en remettre à ces organismes pour obtenir les données économiques souhaitées. En conséquence, la commission des lois a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Tuheiava, pour explication de vote.
M. Richard Tuheiava. Il ne s’agit pas de toucher à la répartition des compétences. La consultation de l'assemblée de la Polynésie française n’est pas nécessaire, sinon j’aurais été obligé de la prévoir dans l’amendement. Nous n’avons pas non plus besoin d'une loi organique pour organiser ce que j’ai prévu, sauf erreur ou omission de ma part.
Cela étant dit – je reviens, monsieur le rapporteur, sur votre second argument – ce n’est pas un rapport de l’Institut d’émission d’outre-mer qui remplacera une enquête sur la structure des ménages ! Les rapports de l’IEOM sont très précis et exacts, ils ont le mérite d’exister mais ils ne donnent aucun élément d’information permettant de lutter contre la vie chère, sujet qui nous réunit ce soir. Du reste, telle n’est pas leur vocation.
Autant votre premier argument, relatif à la compétence organique, éveille en moi un léger doute, autant je ne peux me satisfaire du second ! En effet, je ne saurais rassurer le Gouvernement polynésien, ni surtout la population polynésienne, en leur affirmant que nous avons, avec ces rapports de l’Institut d’émission d’outre-mer, les éléments décisionnels de nature à nous permettre de travailler à la lutte contre la vie chère !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Victorin Lurel, ministre. Permettez-moi de compléter les propos du rapporteur de la commission des lois.
En Polynésie, ce n’est pas l’INSEE qui est compétente ; c’est l’Institut de la statistique de la Polynésie française, l’ISPF.
Vous sollicitez la possibilité d’une assistance du Gouvernement par voie de convention. Or une telle assistance – y compris financière – est d’ores et déjà possible, et même simple à mettre en œuvre ! Du reste, nous nous y engageons. Ce n’est donc pas la peine de la prévoir dans ce projet de loi.
Mme la présidente. Monsieur Tuheiava, l'amendement n° 52 est-il maintenu ?
M. Richard Tuheiava. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 52 est retiré.
L'amendement n° 62, présenté par M. Laufoaulu, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois suivant la publication de la présente loi, un rapport sur les conditions d'application à Wallis et Futuna de l'aide au fret prévue à l'article 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, et sur la possibilité d'étendre cette aide à d'autres produits que ceux pour lesquels elle est actuellement prévue.
La parole est à M. Robert Laufoaulu.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Un rapport de plus !
M. Robert Laufoaulu. Permettez-moi tout d’abord de préciser qu’il s’agit d’un amendement par défaut – c’est d'ailleurs également le cas de l’amendement n° 65, que je présenterai juste après. En effet, le carcan dans lequel nous enserre l’article 40 de la Constitution m’a empêché de déposer des amendements pour élargir le champ de l’aide au fret ou encore pour créer un fonds d’aide à l’électricité, sur le modèle du fonds de péréquation.
Ces amendements me permettent néanmoins de mettre en exergue des points qui me semblent cruciaux pour la lutte contre la vie chère à Wallis-et-Futuna.
J’en viens à l’amendement n° 62.
L’aide au fret ne bénéficie qu’aux produits importés utilisés pour entrer dans un cycle de production ou pour les produits exportés vers l'Union européenne. Pour Wallis-et-Futuna, le dispositif est donc inefficient.
Cet amendement vise à lancer une réflexion pour rendre ce dispositif réellement utile pour les consommateurs de Wallis-et-Futuna. Il me semble que l’on pourrait, par exemple, envisager une liste de quelques produits de consommation courante qui pourraient bénéficier de l’aide au fret.
Bien évidemment, si elle était adoptée, chacun voudrait bénéficier de la mesure ! Mais, à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle, et des dispositifs spécifiques peuvent être prévus pour une collectivité sans que toutes les autres en bénéficient pour autant.
Monsieur le ministre, vous l’avez rappelé tout à l'heure, notre électricité est sans doute l’une des plus chères au monde. Dans ces conditions, l’aide au fret ne pourrait-elle pas bénéficier au fioul importé, qui sert à produire de l’électricité ? Ne pourrait-elle pas aussi bénéficier à quelques produits de base, comme le riz, qui, bien qu’actuellement exonéré de taxe douanière à Wallis-et-Futuna, se vend à un prix supérieur à sept euros le kilo ?
Monsieur le ministre, j’espère que le Gouvernement, dans un geste de solidarité, saisira la perche que je lui ai tendue.
Mme la présidente. L'amendement n° 65, présenté par M. Laufoaulu, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement saisit, dans un délai d'un mois suivant la publication de la présente loi, la Commission de régulation de l'énergie. Celle-ci formule des propositions pour la transition énergétique à Wallis et Futuna dans un délai de six mois après sa saisine.
La parole est à M. Robert Laufoaulu.
M. Robert Laufoaulu. Cet amendement vise lui aussi à ouvrir des pistes de réflexion, cette fois sur le problème crucial du prix de l’électricité à Wallis-et-Futuna.
Pour faire baisser le prix de l’électricité, d’autres moyens de production électrique que le fioul doivent être explorés et développés, comme le photovoltaïque ou l’hydroélectrique.
Toutefois, cela a un coût que le budget du territoire ne peut assumer.
Grâce à l’action de l’homme politique calédonien Maurice Ponga, député européen, des aides européennes autres que le Fonds européen de développement pourront sans doute bénéficier aux pays et territoires d’outre-mer, les PTOM. Cependant, nous aurons besoin de tout l’appui du Gouvernement, et pourquoi pas de l’expertise de la Commission de régulation de l’énergie, dans notre démonstration du bien-fondé de cette demande.
S’agissant du photovoltaïque, l’État pourrait sans doute nous aider également sous d’autres formes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. Je considère l’amendement n° 62 comme un amendement d’appel.
La LODEOM a mis en place une aide au fret pour les produits importés dans les outre-mer pour entrer dans un cycle de production ou pour les produits exportés vers l’Union européenne.
Cette aide est d'ailleurs restée « fictive » jusqu'en 2011, le décret d'application n'ayant été publié que tardivement.
Le cas de Wallis-et-Futuna est spécifique, l’archipel semblant ne pas pouvoir entrer dans le champ de cette aide.
Mon cher collègue Robert Laufoaulu, je pense que M. le ministre pourra vous donner des assurances qui vous permettront de retirer cet amendement. À défaut de retrait, la commission émettra un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 65, il vise à ce que le Gouvernement saisisse la Commission de régulation de l’énergie, afin que celle-ci formule des propositions pour la transition énergétique à Wallis-et-Futuna.
Je comprends l’objet de cet amendement, au vu du niveau des prix de l’énergie dans cette collectivité, deux fois plus chère qu’en Nouvelle-Calédonie et six fois plus que dans l’Hexagone !
Mais, comme M. le ministre au cours de la discussion générale, je m’interroge : la Commission de régulation de l’énergie est-elle compétente à Wallis-et-Futuna ? Je l’ignore !
Par conséquent, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. Je demande à Robert Laufoaulu de bien vouloir retirer ses amendements, même si j’en comprends les tenants et aboutissants et les fondements.
Mesdames, messieurs les sénateurs, sachez que je reçois la plupart des élus de Wallis-et-Futuna le 2 octobre prochain. Nous discuterons des problèmes de développement de la collectivité, y compris de sa situation financière, qui est gravissime.
J’ai sur moi un rapport relatif à la transition énergétique. Je vous en fais grâce puisque le rapport que vous avez vous-même commandé en septembre 2011 a prouvé que l’électricité était six fois plus chère à Wallis-et-Futuna qu’en métropole.
Je sais qu’il y a une demande pour relever du système de la péréquation nationale : nous lancerons une enquête par les inspections générales, et nous passerons probablement une convention avec votre collectivité portant sur tous ces sujets.
Au bénéfice de ces engagements pris par le Gouvernement, je vous prie de bien vouloir retirer ces deux amendements.
Mme la présidente. Monsieur Laufoaulu, les amendements nos 62 et 65 sont-ils maintenus ?
M. Robert Laufoaulu. Non, je les retire, madame la présidente.
Je remercie le ministre de l’attention qu’il portera à ces sujets et qu’il a d’ailleurs déjà commencé à leur porter !
Mme la présidente. Les amendements nos 62 et 65 sont retirés.
Article 7 bis (nouveau)
I. – Le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de dix-huit mois suivant la publication de présente loi, à prendre par ordonnance toute mesure de nature législative :
1° Pour étendre et adapter la législation relative aux allocations logements à Saint-Pierre et Miquelon ;
2° Pour modifier les attributions et compétences de la caisse de prévoyance sociale de Saint-Pierre-et-Miquelon en matière d’action sociale et familiale.
II. – Le projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement au plus tard le premier jour du sixième mois suivant celui de la publication de l’ordonnance. – (Adopté.)
Chapitre II
Dispositions diverses relatives à l’outre-mer
Article 8 (réserve)
Au début du premier alinéa du III de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales, sont ajoutés les mots : « À l’exception des collectivités territoriales et groupements de collectivités territoriales de Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique, Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, ».
Mme la présidente. L'amendement n° 8, présenté par M. Labbé, Mmes Archimbaud, Aïchi, Ango Ela, Benbassa, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Desessard et Gattolin, Mme Lipietz et M. Placé, est ainsi libellé :
Après le mot :
exception
insérer les mots :
des opérations à caractère social ou environnemental
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. L’article 8 prévoit d’exclure les territoires d’outre mer du champ d’application de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales. Si cet article était adopté, les collectivités d’outre-mer ne seraient plus contraintes à une participation financière minimale de 20 % dans les projets dont elles assurent la maîtrise d’ouvrage.
L’objectif de cette mesure est de faciliter le financement des opérations structurantes dont ont besoin les territoires ultramarins et, par la prise en compte de la situation financière des collectivités territoriales concernées, de renforcer la solidarité territoriale à leur profit. Nous sommes donc favorables à son adoption.
Toutefois, dans un objectif de préservation des espaces et de la biodiversité, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement, qui vise à conditionner l’activation de cette solidarité à la réalisation d’investissements présentant un intérêt social ou environnemental.
En contrepartie d’un plus grand soutien de l’État, le développement structurel à venir devra être respectueux de l’environnement et répondre aux besoins des habitants. Il s’agit d’éviter la répétition des excès de bétonnage ou de bitumage sur des espaces naturels riches en biodiversité que l’on a pu constater par le passé.
Le développement durable de ces territoires est notre objectif commun. Cette préoccupation se traduira, par exemple, par le développement prioritaire de transports collectifs et de la production d’énergies renouvelables, par la construction de nécessaires centres de stockage des déchets ultimes, ou encore par la création et l’extension de réseaux d’assainissement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis. L’amendement propose de limiter l’exclusion générale prévue par le projet de loi aux seuls projets d’investissement à caractère social ou environnemental. Pour sa part, le projet de loi propose d’exclure l’ensemble des projets d’investissement du principe de participation de 20 %. En d’autres termes, l’amendement est plus restrictif.
Mon cher collègue, si je suis sensible à vos préoccupations, il me semble que, compte tenu des difficultés budgétaires des collectivités territoriales ultramarines, tous les investissements doivent être concernés par l’exclusion prévue à l’article 8.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
J’ai entendu ici ou là quelques critiques sur le dispositif prévu à l’article 8. Or ce dernier n’a pas vocation à engager l’État à tout financer ! Il ne vise qu’à créer une faculté pour l’État.
Du reste, l’État a objectivement intérêt à financer certains équipements structurants ou dits « de couverture », par exemple pour l’ouest guyanais et les communes du fleuve.
Les communes n’ont absolument pas les moyens de construire des équipements de nature « environnementale », de créer les centres de stockage de déchets ultimes, d’éliminer les déchets ménagers et assimilés. L’État, condamné par l’Europe à de très fortes amendes, a donc intérêt à prendre à bras-le-corps le problème.
Aujourd'hui, s’il veut le faire, il ne le peut car le dispositif le permettant a, hélas, été supprimé à l’occasion de la réforme territoriale de décembre 2010.
Or, compte tenu de la situation financière des collectivités, l’État a objectivement intérêt à avoir à sa disposition un tel instrument, même facultatif.
Ainsi, la restriction aux seules opérations à caractère social ou environnemental n’est pas satisfaisante. Je pense par exemple aux constructions scolaires : présentent-elles un caractère environnemental ou social ? Quid de la voirie ? Dans certaines parties de la Guyane, il n’y a pas de route ! Il faut recourir à l’hélicoptère ou emprunter le fleuve.
L’adoption de votre amendement conduirait donc à ce qu’on ne puisse, par exemple, construire des routes à Saint-Élie. Restons prudents, d’autant que le respect de toutes les conditions de protection de l’environnement conditionne déjà l’attribution des subventions d’équipement et d’investissement ; je pense notamment au respect de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement. L’obligation de respecter scrupuleusement les textes du code de l’environnement existe donc.
Mme la présidente. Monsieur Labbé, l'amendement n° 8 est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Non, je le retire, madame la présidente.
Nous sommes convaincus par l’argumentaire de M. le ministre et tenons à assurer de notre solidarité collective les territoires ultramarins.
Mme la présidente. L'amendement n° 8 est retiré.
L'amendement n° 32, présenté par MM. Patient, Antiste, Antoinette, Desplan et J. Gillot, Mme Claireaux et MM. Tuheiava et Vergoz, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un II ainsi rédigé :
II.- Le premier alinéa du même III est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les modalités de versement du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée demeurent inchangées. »
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Il s’agit d’un simple amendement de précision qui vise à assortir le dispositif prévu à l’article 8 d’une modification des modalités de versement du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis. Le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée est une dotation de l’État qui assure aux collectivités bénéficiaires visées à l’article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales la compensation à un taux forfaitaire de la TVA qu’elles acquittent sur leurs dépenses réelles d’investissement et qu’elles ne peuvent pas récupérer par la voie fiscale.
La Haute Assemblée a toujours été très attentive à ce que le principe de remboursement soit reconnu au FCTVA, ce qui a permis d’exclure les dotations versées au titre du FCTVA de l’enveloppe normée des dotations budgétaires de l’État en faveur des collectivités territoriales.
C’est pourquoi j’estime que l’introduction d’exceptions au principe de remboursement pourrait affaiblir le dispositif même du FCTVA, voire le remettre en cause. La commission des lois a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. Je reconnais dans cette proposition la subtilité du sénateur Georges Patient ! En effet, si son amendement était adopté, la collectivité qui n’a rien dépensé bénéficierait encore du remboursement de la TVA ! La démarche est assez astucieuse : pas de dépense et une recette supplémentaire.
Nous devrons d’ailleurs bien réfléchir à notre dispositif : si l’État finance l’investissement à hauteur de 100 % et si la collectivité reste maître d’ouvrage, un problème juridique se pose. En revanche, si l’on inscrivait dans le plan de financement, à la charge de la collectivité, une somme équivalant au montant de la TVA qu’elle aurait dû acquitter et qui lui sera remboursée deux ans plus tard, on pourrait dire que la collectivité a participé à l’investissement, même s’il est, de fait, financé à 100 % par l’État.
Je rappelle également que l’absence de TVA en Guyane et les taux réduits de TVA dans les autres départements et régions d’outre-mer font que nos collectivités bénéficient d’une surcompensation de la TVA – nous payons une TVA à 8,5 % et nous percevons une compensation dont le taux s’établit entre 14 % et 15 %.
Je demande donc à M. Patient de bien vouloir retirer son amendement.
Mme la présidente. Monsieur Patient, l’amendement n° 32 est-il maintenu ?
M. Georges Patient. Je le retire, madame la présidente, mais je voudrais insister sur le fait que, contrairement à ce qu’ont dit M. le rapporteur et M. le ministre, le FCTVA permet à nos communes, dont la situation financière est très précaire, d’amortir les premiers frais de fonctionnement induits par leurs investissements. Le financement à 100 % par l’État existait déjà en Guyane, notamment pour les petites communes, et le versement du FCTVA leur permettait, comme je viens de le dire, de faire face à leur fonctionnement. Il ne faudrait pas revenir sur cette mesure, ce qui risquerait de créer ultérieurement des difficultés de trésorerie à ces communes.
Mme la présidente. L’amendement n° 32 est retiré.
L’amendement n° 12, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un II ainsi rédigé :
II.- Le I du présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2012.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de prendre en compte les projets d’investissement engagés par les collectivités territoriales ultramarines à partir du 1er janvier 2012, c’est-à-dire après l’entrée en vigueur des dispositions de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales dans leur rédaction issue de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. La commission des affaires économiques est favorable aux amendements de la commission des lois, à laquelle elle avait délégué l’examen des articles du chapitre II, à l’exception de l’article 11.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable, car cet amendement tombe, à mon sens, sous le coup de l’article 40 de la Constitution. Vos deux commissions ont choisi de ne pas relever cette irrecevabilité, mais l’adoption de cet amendement aurait nécessairement pour effet de créer une charge pour le budget de l’État. La rétroactivité de la mesure que vous proposez induit un coût, ce que le Gouvernement ne saurait accepter.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur le rapporteur pour avis. Je suis bien conscient qu’il s’agit d’un amendement de la commission des lois, mais si l’on examine ses conséquences, en l’état, on comprendra que je sois obligé d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis. Je souhaite simplement demander à M. le ministre quel sera le sort réservé aux investissements réalisés après le 1er janvier 2012, compte tenu de l’esprit de cette loi.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Victorin Lurel, ministre. Seuls les investissements votés après le 1er janvier 2012 poseront un problème. Pour ceux qui ont été votés avant cette date, j’imagine que les collectivités avaient trouvé les ressources nécessaires et ne tablaient pas sur le vote hypothétique d’une loi qu’ils ignoraient. Je le répète, la rétroactivité induit une charge.
Mme la présidente. La parole est à M le rapporteur.
M. Serge Larcher, rapporteur. Nous rencontrons effectivement une difficulté. En toute logique, puisque la rétroactivité induit une charge, le Gouvernement devrait invoquer l’article 40 de la Constitution.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, invoquez-vous l’article 40 de la Constitution ?
M. Victorin Lurel, ministre. Disons que j’émets un avis défavorable sur la base de l’article 40 de la Constitution.
Mme la présidente. Il conviendrait de savoir si l’article 40 de la Constitution est applicable.
Je suggère donc de réserver le vote sur cet amendement le temps que nous puissions éclaircir ce point. (Assentiment.)
Dans ces conditions, le vote sur l’article 8 est également réservé.
Article additionnel après l’article 8
Mme la présidente. L’amendement n° 33, présenté par MM. Patient, Antiste, Antoinette, Desplan et J. Gillot, Mme Claireaux et MM. Tuheiava et Vergoz, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement avant la fin du premier trimestre de 2013 une étude sur une plus grande adaptation des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales d’outre-mer.
La parole est à M. Georges Patient.