M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Cette mention ne paraît pas utile dans la mesure où les modalités de consultation des acteurs de la politique du handicap sont déjà prévues par la circulaire de la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle du 26 mai 2009. Celle-ci prévoit en effet la possibilité de créer des instances de consultation auprès du comité de pilotage du plan régional pour l’insertion des travailleurs handicapés, afin d’associer les partenaires sociaux et les représentants des personnes handicapées à l’élaboration et au suivi de cet outil.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Monsieur Fischer, en matière d’emploi des personnes handicapées, nous ne devons jamais oublier les difficultés tenant à leur niveau de formation initiale. Nous devons donc impérativement maintenir notre effort de scolarisation des enfants handicapés pour combler ce déficit à l’avenir.
M. le président. Je mets aux voix l'article 10 bis.
(L'article 10 bis est adopté.)
Article 11
(Non modifié)
I. – Après le 1° de l’article L. 5311-4 du même code, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Les organismes de placement spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées, avec avis consultatif ; ».
II. – Avant la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre II de la cinquième partie du même code, il est ajouté une section 1 A ainsi rédigée :
« Section 1 A
« Pilotage des politiques en faveur de l’emploi des personnes handicapées
« Art. L. 5214-1 A. – L’État assure le pilotage de la politique de l’emploi des personnes handicapées. Il fixe, en lien avec le service public de l’emploi, l’association chargée de la gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés et le fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, les objectifs et priorités de cette politique.
« Art. L. 5214-1 B. – Une convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens est conclue entre l’État, l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1, l’association chargée de la gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés, le fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
« Cette convention prévoit :
« 1° Les modalités de mise en œuvre par les parties à la convention des objectifs et priorités fixés en faveur de l’emploi des personnes handicapées ;
« 2° Les services rendus aux demandeurs d’emploi bénéficiaires de l’obligation d’emploi et aux employeurs privés et publics qui souhaitent recruter des personnes handicapées ;
« 3° Les modalités de mise en œuvre de l’activité de placement et les conditions du recours aux organismes de placement spécialisés mentionnés à l’article L. 5214-3-1, en tenant compte de la spécificité des publics pris en charge ;
« 4° Les actions, prestations, aides ou moyens mis à disposition du service public de l’emploi et des organismes de placement spécialisés par l’association et le fonds mentionnés au premier alinéa du présent article ;
« 5° Les modalités du partenariat que les maisons départementales des personnes handicapées mettent en place avec le service public de l’emploi, l’association et le fonds mentionnés au premier alinéa et les moyens qui leur sont alloués dans ce cadre pour leur permettre de s’acquitter de leur mission d’évaluation et d’orientation professionnelles ;
« 6° Les conditions dans lesquelles un comité de suivi, composé des représentants des parties à la convention, assure l’évaluation des actions dont elle prévoit la mise en œuvre.
« Pour son application, la convention fait l’objet de déclinaisons régionales ou locales associant les maisons départementales des personnes handicapées et l’ensemble des acteurs concourant à l’insertion des personnes les plus éloignées de l’emploi. Les organismes de placement spécialisés sont consultés pour avis. Ces conventions régionales et locales s’appuient sur les plans régionaux d’insertion professionnelle des travailleurs handicapés. » – (Adopté.)
Article 11 bis
(Non modifié)
L’article L. 323-8-6-1 du même code est ainsi modifié :
1° Le sixième alinéa du I est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Peuvent bénéficier du concours de ce fonds :
« 1° Les employeurs publics mentionnés à l’article L. 323-2 ;
« 2° Les organismes ou associations contribuant par leur action à l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique et avec lesquels le fonds a conclu une convention ;
« 3° La Poste jusqu’au 31 décembre 2011.
« Peuvent également saisir ce fonds les agents reconnus travailleurs handicapés au sens de l’article L. 5212-13 et rémunérés par les employeurs publics mentionnés à l’article L. 323-2. » ;
2° Le III est ainsi rédigé :
« III. – Les crédits de la section “Fonction publique de l’État” doivent exclusivement servir à financer des actions réalisées soit à l’initiative des employeurs mentionnés à l’article 2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État et, jusqu’au 31 décembre 2011, de La Poste, soit, à l’initiative du fonds, en vue de favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées au sein de la fonction publique de l’État, ainsi que la formation et l’information des agents participant à la réalisation de cet objectif.
« Les crédits de la section “Fonction publique territoriale” doivent exclusivement servir à financer des actions réalisées soit à l’initiative des employeurs mentionnés à l’article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, soit, à l’initiative du fonds, en vue de favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées au sein de la fonction publique territoriale, ainsi que la formation et l’information des agents participant à la réalisation de cet objectif.
« Les crédits de la section “Fonction publique hospitalière” doivent exclusivement servir à financer des actions réalisées soit à l’initiative des employeurs mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, soit, à l’initiative du fonds, en vue de favoriser l’insertion professionnelle des personnes handicapées au sein de la fonction publique hospitalière, ainsi que la formation et l’information des agents participant à la réalisation de cet objectif.
« Des actions communes à plusieurs fonctions publiques peuvent être financées par les crédits relevant de plusieurs sections. »
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mme Pasquet, MM. Fischer et Autain, Mmes David, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les salariés de la fonction publique reconnus travailleurs handicapés au sens de l'article L. 5212-13 du code travail peuvent saisir le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Pendant trois ans à compter de la publication de la présente loi, cette saisine n'est possible que pour les aides qui sont directement attachées à la personne, et notamment les prothèses, orthèses, fauteuils roulant et les aides humaines.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.
Je mets aux voix l'article 11 bis.
(L'article 11 bis est adopté.)
Article 12
(Non modifié)
Après la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre II de la cinquième partie du même code, il est inséré une section 1 bis ainsi rédigée :
« Section 1 bis
« Organismes de placement spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées
« Art. L. 5214-3-1. – Des organismes de placement spécialisés, chargés de la préparation, de l’accompagnement et du suivi durable dans l’emploi des personnes handicapées, participent au dispositif d’insertion professionnelle et d’accompagnement spécifique prévu pour les travailleurs handicapés mis en œuvre par l’État, le service public de l’emploi, l’association chargée de la gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés et le fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique.
« Ils sont conventionnés à cet effet et peuvent, à cette condition, mobiliser les aides, actions et prestations proposées par l’association et le fonds mentionnés au premier alinéa.
« Les organismes de placement spécialisés assurent, en complémentarité avec l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1, une prise en charge adaptée des demandeurs d’emploi bénéficiaires de l’obligation d’emploi dans des conditions définies par une convention. » – (Adopté.)
Article 12 bis A
(Non modifié)
I. – Le premier alinéa de l’article L. 4111-3 du même code est ainsi modifié :
1° Après le mot : « professionnel », sont insérés les mots : « , ainsi que ceux des établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 2°, a du 5° et 12° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles accueillant des jeunes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation et au 4° du même I, ainsi que ceux des établissements et services conventionnés ou habilités par la protection judiciaire de la jeunesse, dispensant des formations professionnelles au sens du V du même article, » ;
2° Les mots : « leurs élèves » sont remplacés par les mots : « les jeunes accueillis en formation professionnelle ».
II. – L’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles est complété par un V ainsi rédigé :
« V. – Participent de la formation professionnelle les actions de préformation, de formation et de préparation à la vie professionnelle menées dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 2°, a du 5° et 12° du I du présent article accueillant des jeunes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation et au 4° du même I, ainsi que dans les établissements et services conventionnés ou habilités par la protection judiciaire de la jeunesse. » – (Adopté.)
Article 12 bis
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – L’article L. 5213-19 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5213-19. – Les entreprises adaptées et les centres de distribution de travail à domicile perçoivent pour chaque travailleur handicapé employé, dès lors que celui-ci remplit les conditions mentionnées à l’article L. 5213-13, une aide au poste forfaitaire versée par l’État, dans la limite d’un effectif de référence fixé annuellement par la loi de finances.
« En outre, compte tenu des surcoûts résultant de l’emploi majoritaire de ces travailleurs handicapés, les entreprises adaptées et les centres de distribution de travail à domicile reçoivent de l’État une subvention spécifique, destinée notamment au suivi social, à l’accompagnement et à la formation spécifiques de la personne handicapée, pour favoriser son adaptation à son poste de travail.
« Les modalités d’attribution de l’aide au poste et de la subvention spécifique sont précisées par décret. »
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l’article.
Mme Isabelle Pasquet. L’aide au poste joue un rôle très important dans l’accessibilité à l’emploi des personnes en situation de handicap. Elle est destinée à apporter une compensation financière aux entreprises adaptées qui emploient majoritairement des travailleurs handicapés à efficience réduite.
L’article 12 bis prévoit une nouvelle rédaction de l’article L. 5213-19 du code du travail. Il tend notamment à supprimer la référence à la notion « d’efficience réduite ». Si cette notion est floue et peut engendrer des situations différentes d’un département à un autre, sa suppression ne manque pas d’inquiéter.
Nous avons été contactés par des représentants de plusieurs associations œuvrant dans le domaine du handicap et par des représentants des organisations syndicales. Ceux-ci redoutent que cette suppression n’entraîne de manière indirecte la suppression même de ces aides au poste, pourtant indispensables pour les entreprises adaptées.
Le contexte est particulier : cette nouvelle rédaction de l’article 12 bis fait suite à la décision prise par le Gouvernement, dans la loi de finances pour 2011, de supprimer 500 aides au poste. Cette décision, lourde de conséquences, constitue une véritable aberration d’un point de vue économique. C’est la traduction d’une conception de la politique sociale de notre pays à destination des personnes en situation de handicap qui repose sur les seules dépenses qu’elles génèrent.
Si une personne qui travaille en secteur adapté coûte en effet un peu d’argent à l’État, il ne faut pas perdre de vue que, en travaillant, elle crée également des richesses dont elle- même, l’entreprise adaptée et celles pour qui elle opère profitent.
Selon Emmanuelle Dal’Secco, journaliste au magazine Déclic-Handicap International : « Ces dépenses d’État sont donc, avant tout, un investissement et pas seulement un coût. » D’ailleurs, une étude menée par KPMG pour l’Union nationale des entreprises adaptées, l’UNEA a très clairement démontré que, au final, les ressources fiscales et sociales générées par l’emploi des personnes travaillant en entreprises adaptées étaient, pour l’État, supérieures aux dépenses engagées. Toujours selon cette journaliste, « les indemnités de chômage que les licenciés ont touchées sont supérieures aux aides allouées lorsqu’ils sont en poste. Cette mesure n’aura pas d’autre effet que d’aggraver le déficit public ».
Les craintes sont donc grandes. Aussi, sous réserve de l’affirmation que cette disposition n’aura pas pour effet de réduire les subventions dont il est question, nous ne voterons pas cet article.
M. le président. Je mets aux voix l'article 12 bis.
(L'article 12 bis est adopté.)
Article 12 ter
(Non modifié)
L’article L. 5212-7 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’ouverture de droits à la prestation de compensation du handicap, à l’allocation compensatrice pour tierce personne ou à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé à l’égard des jeunes de plus de seize ans qui disposent d’une convention de stage vaut reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Cette reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé n’est valable que pendant la durée du stage. » – (Adopté.)
Article 12 quater
(Non modifié)
Au second alinéa de l’article L. 5212-10 du même code, après la référence : « L. 5212-6 », sont insérés les mots : « d’un montant supérieur à un montant fixé par décret ».
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le second alinéa de l'article L. 5212-10 du même code est ainsi rédigé :
« La limite de la contribution annuelle par bénéficiaire non employé est portée, dans des conditions définies par décret, à 1 500 fois le salaire horaire minimum de croissance pour les entreprises qui n'ont occupé aucun bénéficiaire de l'obligation d'emploi, qui n'appliquent aucun accord collectif mentionné à l'article L. 5212-8 pendant une période supérieure à trois ans et dont l'ensemble des contrats prévus à l'article L. 5212-6 qu'elles ont passés n'excède pas, en volume de travail fourni, un seuil fixé par décret. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. La loi handicap dispose que toute entreprise de plus de vingt salariés doit employer au minimum 6 % de travailleurs handicapés.
Lorsqu’une entreprise ne remplit pas complètement son obligation, elle doit verser une contribution de six cents fois le salaire horaire minimum de croissance par bénéficiaire non employé.
Mais lorsqu’une entreprise néglige vraiment trop son obligation – c'est-à-dire qu’elle n’a employé aucun bénéficiaire de l’obligation d’emploi –, cette contribution est majorée à 1 500 fois le salaire horaire minimum de croissance. On parle alors de « sur-contribution ».
Selon le code du travail, une entreprise mérite cette majoration si elle réunit trois conditions : quand elle n’emploie pas de bénéficiaire de l’obligation d’emploi ; quand elle n’a passé aucun contrat de fourniture ou de sous-traitance avec des entreprises adaptées, des centres de distribution de travail à domicile ou des établissements ou services d’aide par le travail ; quand elle n’applique aucun accord collectif prévoyant la mise en œuvre d’un programme en faveur des travailleurs handicapés.
Or, pour l’entreprise qui souhaite éviter la sur-contribution, l’une des trois conditions est plus facile que les autres à contourner. En effet, comme le code du travail ne prévoit aucun seuil minimum d’achat de fourniture pour bénéficier de l’exonération, on peut imaginer qu’une entreprise commande trois stylos, pour un montant dérisoire, et puisse quand même être exonérée de la sur-contribution.
C’est pourquoi le rapporteur de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a souhaité éviter cet effet d’aubaine, en proposant un amendement qui instaure un montant minimal d’achat auprès d’une entreprise adaptée ou d’un établissement et service d’aide par le travail, un ESAT, permettant aux entreprises dites « à quota zéro » de s’exonérer de la surcontribution.
Mais, en fait, la rédaction qui nous a été proposée ne résout pas le problème. En effet, la question de la part de main-d’œuvre de travailleur en situation de handicap dans les fournitures achetées à l’entreprise adaptée ou à l’ESAT reste entière.
Prenons un exemple : les fournitures de bureau.
Pour 200 euros, on peut acheter une imprimante de taille moyenne. Pour 200 euros, on peut aussi acheter environ dix cartons de papier pour impression, en gros cinquante ramettes. Le travailleur en situation de handicap, qui effectue par exemple de la manutention, doit fournir dix fois plus d’efforts pour transporter les dix cartons de papier que l’imprimante. Alors que, dans tous les cas, le montant du contrat pour les entreprises est toujours de 200 euros, dans un cas, le temps de travail du travailleur handicapé varie de un à dix. Or c’est le travail de personnes handicapées que la loi veut favoriser, pas le simple commerce de biens ou de services dont les personnes handicapées seraient l’alibi.
C’est d’ailleurs précisément pour cette raison que les montants de la contribution et de la sur-contribution sont définis comme des multiples du salaire minimum, et non pas un simple montant libellé en euros. D’où l’intérêt de préciser, grâce à cet amendement, qu’il faut prendre en compte le « volume de travail fourni ».
Cette modification est tout à fait dans l’esprit du code du travail. L’article L. 5212-6, qui définit ces contrats, fait en effet référence à la proportion de travail fourni dans les ateliers et les centres qui emploient des travailleurs handicapés.
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement qui, dans l’esprit de celui du rapporteur de l’Assemblée nationale, rend effectivement impossible un usage abusif des contrats de fourniture ou de sous-traitance pour éviter la sur-contribution.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. L’intérêt de cette nouvelle rédaction n’est pas évident.
La rédaction proposée par le texte actuel de l’article 12 quater est satisfaisante. La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, car la précision apportée par cet amendement est de nature non pas législative, mais réglementaire.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Mme la secrétaire d'État vient de dire que cette disposition était de nature réglementaire. Si j’ai bien compris, cela signifie qu’elle y accorde de l’importance, qu’elle la trouve sensée et qu’elle prendra en compte toute sa pertinence au moment de rédiger les décrets d’application…
M. le président. Pour le Gouvernement, un amendement sénatorial est toujours sensé, que l’avis soit favorable ou défavorable ! (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 12 quater.
(L'article 12 quater est adopté.)
Article 14 ter A
(Non modifié)
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 111-7-1 du code de la construction et de l’habitation, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les logements destinés à l’occupation temporaire ou saisonnière dont la gestion et l’entretien sont organisés et assurés de façon permanente, un décret en Conseil d’État, pris après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées, fixe les exigences relatives à l’accessibilité prévues à l’article L. 111-7 et aux prestations que ceux-ci doivent fournir aux personnes handicapées.
« Ces mesures sont soumises à l’accord du représentant de l’État dans le département après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité. »
II. – Dans les trois ans suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application du dispositif visé au I.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Permettez-moi, mes chers collègues, de revenir un instant sur la genèse de l’article 14 bis, qui n’est plus en navette – puisqu’il a été adopté conforme par l’Assemblée nationale –, mais qui suscite toujours beaucoup d’inquiétudes.
Vous le savez, j’ai beaucoup tenu à ce que le principe d’accessibilité généralisée figure dans la loi du 11 février 2005. Nous avions alors résumé ce principe dans la formule « l’accès de tous à tout ». Et celui-ci devra pleinement s’appliquer dès 2015, c’est-à-dire dans quatre ans.
À l’époque, j’avais également beaucoup insisté pour que le bâti neuf, mais aussi les nouveaux matériels roulants soient immédiatement rendus accessibles, sans exception.
En revanche, pour l’existant, la loi a dû tenir compte d’éventuelles contraintes d’aménagements, notamment pour les bâtiments les plus anciens, et a prévu des dérogations.
Aussi, c’est sans fondement légal que des mesures réglementaires autorisant des dérogations pour des constructions neuves ont été prises en mai 2006, avec l’aval du Conseil national consultatif des personnes handicapées.
M. Paul Blanc, rapporteur. Fort heureusement, mais malheureusement trop tardivement, la vigilance des associations représentatives des personnes handicapées a permis au Conseil d’État de déclarer l’illégalité de ces deux textes.
Mais, entre temps, des permis de construire ont été accordés sur le fondement de ces mesures. Alors que faire ? Démolir les logements sociaux et les établissements qui sont sortis de terre ou essayer de trouver un moyen de « légaliser » ces constructions sans ouvrir la boîte de Pandore ?
L’éthique de conviction m’inclinerait au maintien des principes sans prendre en compte les dommages que causeront ces destructions ; l’éthique de responsabilité, autrement dit le principe de réalité, m’a conduit à rechercher une solution qui permette de concilier le principe que nous nous sommes fixé d’une accessibilité sans faille pour le neuf, et la poursuite des projets de construction déjà autorisés.
Aussi, pour résoudre cette difficulté juridique, j’ai dû me résoudre à prévoir, la mort dans l’âme, des mesures de substitution pour le bâti neuf. J’ai personnellement veillé à ce que le dispositif soit très encadré.
Premièrement, le maître d’ouvrage doit apporter la preuve de l’impossibilité « technique » – précision apportée en séance publique par Sylvie Desmarescaux – avérée de respecter les normes en matière d’accessibilité et doit obligatoirement proposer une solution alternative pour que le bâtiment soit accessible.
Deuxièmement, le décret en Conseil d’État prévoyant les cas où ces mesures de substitution pourront être prises sera soumis à l’avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées.
Troisièmement, les souplesses accordées ne peuvent être de portée générale ; par exemple, une mesure de substitution prise pour permettre le passage de poussettes ou de fauteuils roulants n’exonère pas de l’application rigoureuse des normes concernant l’accessibilité aux malvoyants.
Quatrièmement, la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité aura à se prononcer sur les mesures de substitution proposées par le maître d’ouvrage ; le Sénat a souhaité que cet avis soit conforme, c’est-à-dire que le préfet soit tenu de le suivre. Il s’agit là d’une garantie supplémentaire.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l'article.
Mme Isabelle Pasquet. J’ai bien entendu les propos de M. le rapporteur, mais, malheureusement, le groupe CRC-SPG votera contre cet article 14 ter A, et il regrette fortement que l’article 14 bis ait été adopté conforme, ce qui nous empêche de redéposer un amendement de suppression.
Avec ces deux articles, c’est bien le principe d’accessibilité universelle, tel que prévu dans la loi du 11 février 2005, qui est remis en cause. Même si on nous parle de substitution, on a renoncé à l’accessibilité universelle.
Certes, le terme « dérogations » n’est pas utilisé et vous lui préférez la notion sans doute plus neutre de « mesures de substitution ». Pour autant, si les mots changent, les réalités demeurent identiques. L’accessibilité est pour les personnes en situation de handicap un véritable parcours.
Celles et ceux qui, dans cet hémicycle ou au Gouvernement, soutiennent ces articles considèrent que le chemin pris pour réaliser ce parcours et aller d’un point à un autre ne compte pas tant finalement que le fait pour les personnes en situation de handicap d’arriver à destination.
Pour nous, tel n’est pas le cas et l’accessibilité se pose à la fois en termes de finalité et en termes de moyens.
Que des personnes en chaise roulante puissent aller d’un lieu à un autre et se retrouver au même endroit que des amis ou des concitoyens valides est effectivement une chose importante.
Qu’elles soient pour le faire obligées d’emprunter un parcours différent n’est pas acceptable, particulièrement si des mesures d’aménagement auraient pu éviter cette situation. Cela a pour effet de les placer de fait en situation de marginalité par rapport aux autres citoyens.
Si nous voulons faire changer collectivement le regard sur les différents handicaps, nous devons tout leur faire toute leur place dans la cité, ce qui est radicalement différent de ce qui est proposé ici et qui revient, au final, à leur aménager une place congrue dans notre société.
Cette idée de substitution a d’ailleurs conduit l’un de nos collègues, M. Doligé, à proposer, dans un rapport sur la simplification des normes applicables aux collectivités locales remis à Nicolas Sarkozy le 16 juin 2011, de généraliser ces mesures de substitution. Non seulement parce que les normes d’accessibilité seraient compliquées à mettre en œuvre, mais également parce qu’elles reviendraient cher aux collectivités locales.
De la même manière, l’article 14 bis a été, disons-le, clairement imposé à la suite des pressions des entreprises du bâtiment et des travaux publics et des promoteurs,…