Article 57 ter (nouveau)
Le II de l’article 197 du même code est ainsi rétabli :
« II. – À compter du 1er janvier 2011, les pensions de retraite déjà liquidées et les droits acquis des élus locaux qui, avant l’entrée en vigueur de la loi n° 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d’exercice des mandats locaux, bénéficiaient de régimes de retraite à adhésion facultative sont considérés au regard de l’impôt sur le revenu, de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale et des prélèvements sociaux comme des traitements et salaires. »
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. Le débat sur la prétendue réforme des retraites a conduit à la mise en question de quelques-unes des niches sociales dont notre système de prélèvements est rempli, niches dont la portée est variable et qui ont un impact sur le rendement des cotisations d’assurance vieillesse.
Avec les articles 57 ter et 57 quater, nous constatons, sans grande surprise, que des niches qui concernent des populations et des montants relativement faibles sont remises en cause alors que, dans le même temps, les coûteuses exonérations de cotisations portant sur les heures supplémentaires ou le dispositif de ristourne dégressive sur les bas salaires perdurent. Nous pourrions d’ailleurs également envisager un relèvement de cotisations, notamment patronales, car cela fait quelques années qu’une telle augmentation n’a pas eu lieu.
Quoi qu’il en soit, avec les articles 57 ter et 57 quater, on revient sur le traitement fiscal des pensions versées aux anciens élus locaux et à leurs ayants droit, dans le cadre de systèmes de couverture personnelle facultatifs qui existaient parfois avant que la loi de 1992 ne mette en place de véritables dispositifs de prévoyance pour les élus locaux. Dans les systèmes antérieurs à la loi de 1992, les contributions des élus étaient assises sur le montant de leurs indemnités de fonction, qui – je le rappelle –n’avaient pas, par nature, le caractère d’un salaire.
Cette situation a d’ailleurs été établie par une décision du tribunal administratif de Paris en 1978. L’indemnité de fonction était versée aux élus pour l’accomplissement de leur mandat, celui-ci pouvant occasionner une interruption de leur activité professionnelle précédente, sans garantie de pouvoir la reprendre au terme de l’exercice de leurs fonctions.
Nombre d’élus, issus du monde du travail, ayant interrompu leur activité professionnelle, se retrouvaient avec une indemnité sur laquelle, en prévision de la retraite, ils ne pouvaient que souscrire une couverture complémentaire et volontaire, tous les compteurs étant provisoirement arrêtés.
Les choses ont évidemment changé depuis 1992, puisque le statut des élus, notamment au regard des droits à pension et de la reprise éventuelle des activités professionnelles, a fort heureusement évolué.
Il nous semble cependant qu’il y a quelque difficulté à assimiler la situation des droits à pension constitués antérieurement à la loi de 1992 à celle qui en est issue. Il est donc particulièrement délicat de procéder, comme le font les articles 57 ter et 57 quater, à l’intégration dans l’assiette de l’impôt sur le revenu des droits constitués avant 1992, qu’ils occasionnent aujourd’hui le versement d’une pension ou d’une réversion au profit d’un ayant droit.
Cela fait dix-huit ans que le régime de retraite des élus locaux a pris un caractère général et obligatoire et que les choses ont été ainsi fixées, dans le cadre de la loi relative aux conditions d’exercice des mandats locaux.
Après cette loi, la retraite des élus locaux découlait de l’adhésion des élus au régime général de la sécurité sociale, par des cotisations assises sur les indemnités de fonction, et de leur rattachement à l’IRCANTEC, l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques, en matière de retraite complémentaire.
La loi n’a pas transformé les systèmes facultatifs précédents en systèmes ordinaires et l’assimilation-réversion est donc extrêmement discutable, d’autant que les montants en jeu ne sont pas nécessairement très élevés. On peut donc fort bien laisser, au risque de s’exposer à une rétroactivité mettant en question la validité des articles 57 ter et 57 quater, s’éteindre doucement les dispositifs antérieurs de pension des élus locaux qui ne concernent qu’un nombre relativement faible d’anciens élus ou ayants droit. Ne prenons donc pas le risque d’adopter une disposition rétroactive !
Pour notre part, nous ne voterons donc pas ces articles.
M. le président. L'amendement n° II-396 rectifié, présenté par MM. P. Dominati et Pozzo di Borgo, Mme Dumas et MM. du Luart et Milon, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° II-397 rectifié. Notre collègue Bernard Vera a fort bien expliqué la problématique qui justifie, de ma part, le dépôt de ces deux amendements.
Le premier concerne l’ensemble des élus dans un certain nombre de collectivités territoriales. L’amendement n° II-397 rectifié vise plus particulièrement les élus de la Ville de Paris.
M. Vera vient de le souligner, le régime facultatif de retraite des élus a pris fin en 1992, date à laquelle le législateur a fiscalisé les indemnités des élus. Dès lors, un certain nombre de collectivités territoriales ont augmenté lesdites indemnités pour tenir compte de cette fiscalisation.
En ce qui concerne la Ville de Paris, les pensions perçues par les élus et versées par les régimes facultatifs de retraite mis en place avant l’entrée en vigueur de la loi de 1992 concernent à peu près 150 personnes, dont un grand nombre de veuves, qui bénéficient de la réversion. M. Vera l’a également souligné, le montant de ces retraites est relativement faible. De plus, par la force des choses, ce régime est en voie d’extinction.
Telles sont les raisons pour lesquelles j’ai déposé les amendements n° II-396 rectifié et II-397 rectifié, qui visent respectivement à supprimer les articles 57 ter et 57 quater. C’est une question d’équité ! Rappelez-vous en effet que, lorsque nous avons examiné le projet de loi portant réforme des retraites, il avait été convenu que ce texte ne viserait que les futurs retraités et en aucun cas ceux qui le sont déjà.
M. le rapporteur général propose un mécanisme extrêmement judicieux, plus modéré que celui de l’Assemblée nationale, qui vise à trouver un équilibre entre le texte adopté par les députés et la réalité de chacune de nos collectivités territoriales. Néanmoins, je préfère revenir au texte initial, que le Gouvernement avait défendu avec force devant l’Assemblée nationale. Le maire de Paris a d’ailleurs lui aussi réagi récemment sur cette question, tout comme l’avaient fait ses prédécesseurs.
Je le rappelle, pour la collectivité parisienne, ce dispositif concerne un peu moins de 150 personnes.
M. le président. L'amendement n° II-295, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Après l’article 80 undecies A du code général des impôts, il est inséré un article 80 undecies B ainsi rédigé :
« Art. 80 undecies B. - Les pensions de retraite versées par les régimes facultatifs de retraite des élus locaux mis en place avant l’entrée en vigueur de la loi n° 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d’exercice des mandats locaux sont imposables à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux rentes viagères constituées à titre onéreux. »
II. - Le I est applicable aux pensions de retraite perçues à compter du 1er janvier 2011.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-396 rectifié.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances estime que les pensions de retraite versées aux élus locaux par des régimes facultatifs de retraite mis en place avant l’entrée en vigueur de la loi de 1992 doivent être fiscalisées. Cependant, la référence aux traitements et salaires retenue par l’Assemblée nationale n’est pas adéquate.
La commission des finances propose une référence qui semble économiquement plus pertinente, à savoir le régime des rentes viagères à titre onéreux. Par voie de conséquence, ces prestations seront soumises à la contribution sociale généralisée et aux prélèvements sociaux applicables aux revenus du patrimoine. En effet, le régime auquel obéissent ces compléments de revenu est très proche de celui de l’assurance.
Au bénéfice de ces explications, la commission demande à M. Dominati de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos II-396 rectifié et II-295 ?
M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° II-396 rectifié et favorable à l’amendement n° II-295.
M. le président. Monsieur Dominati, l’amendement n° II-396 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-396 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-295.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 57 ter est ainsi rédigé.
Article 57 quater (nouveau)
Le III de l’article 197 du même code est ainsi rétabli :
« III. – À compter du 1er janvier 2011, les pensions de retraite déjà liquidées et les droits acquis avant le 30 mars 1992 des élus de la ville de Paris mentionnés à l’article L. 2123-30 du code général des collectivités territoriales sont considérés au regard de l’impôt sur le revenu, de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale et des prélèvements sociaux comme des traitements et salaires. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-296 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-397 rectifié est présenté par M. P. Dominati, Mme Dumas et MM. Pozzo di Borgo, du Luart, Lefèvre et Milon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° II-296.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° II-397 rectifié.
M. Philippe Dominati. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-296 et II-397 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 57 quater est supprimé.
Article 57 quinquies (nouveau)
I. – Le même code est ainsi modifié :
1° À la première phrase du dix-neuvième alinéa du I de l’article 199 undecies B et à l’avant-dernière phrase du premier alinéa du I de l’article 217 undecies, après la référence : « article 8 », sont insérés les mots : «, à l’exclusion des sociétés en participation, » ;
2° À la première phrase du premier alinéa du IV de l’article 199 undecies C, après les mots : « présent code », sont insérés les mots : «, à l’exclusion des sociétés en participation, ».
II. – Le présent article est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2011. – (Adopté.)
Article 57 sexies (nouveau)
Le même code est ainsi modifié :
1° L’article 200 quater C est abrogé ;
2° Aux 1°, 2° et 3° du a et aux b et c du 1 et à la première phrase du 4 de l’article 200 quater A, l’année : « 2010 » est remplacée par l’année : « 2011 ».
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, sur l'article.
M. Jean-Marc Todeschini. Votée en 2003 à la suite de l’accident de l’usine AZF de Toulouse en 2001, la loi « Bachelot » a instauré une obligation de mise en place de plans de prévention des risques technologiques, ou PPRT, dans les zones classées Seveso. Ainsi, les habitants situés dans les zones se trouvant hors du périmètre où le danger est jugé mortel peuvent demeurer sur place, mais ils ont l’obligation de réaliser des travaux très couteux, tels que des travaux d’étanchéité, l’installation de double vitrage, l’isolation des toitures, un local de confinement. La fédération d’associations France nature environnement estime que le montant des travaux de mise en conformité peut atteindre 15 000 euros par habitation.
En Moselle, par exemple, mais cela est vrai dans d’autres régions, de nombreuses communes accueillent depuis les années soixante-dix des sites à risque, particulièrement dans le secteur de la pétrochimie. À ce titre, leur plan de prévention des risques technologiques est en cours d’élaboration.
Les habitants de ces zones classées Seveso sont la plupart du temps des foyers à revenu modeste qui n’ont pas choisi de s’installer dans ces périmètres ; ils y ont souvent été contraints pour des raisons économiques. La mise en conformité de leur habitation, en vertu de la loi Bachelot de 2003, représente donc une charge financière particulièrement élevée.
Afin de les soutenir dans cet effort, l’Association nationale des communes pour la maîtrise des risques technologiques avait obtenu, dans le cadre de la loi Grenelle 2, que les propriétaires occupants situés dans des zones à risque puissent bénéficier d’un crédit d’impôt de 40 % sur ces travaux. Cette aide devait également pouvoir être complétée par la contribution des collectivités locales et des industriels.
Toutefois, en méconnaissance des engagements pris par le Gouvernement lors du Grenelle 2, engagement rappelé en octobre dernier par Mme Jouanno, alors secrétaire d’État chargée de l’écologie, qui précisait même dans un article du Monde du 22 novembre 2010 que l’objectif était celui d’une « prise en charge à 100% des travaux sous conditions de ressources », l’article 57 sexies ramène le crédit d’impôt à 15 % du montant des travaux. Pour justifier ce revirement, le Gouvernement n’hésite pas, de manière assez cynique, à assimiler ce dispositif lié à une exigence de sécurité à une niche fiscale qu’il conviendrait de raboter dans un souci de maîtrise des dépenses fiscales.
Pourtant, en ramenant à 15 % ce crédit d’impôt, l’article 57 sexies va rendre quasiment inapplicables les mesures de protection auxquelles nos concitoyens ont droit. En effet, de nombreux propriétaires à revenu modeste n’effectueront pas les travaux de mise en conformité avec une aide aussi faible. Ces habitants seront en conséquence placés dans une situation particulièrement injuste : souvent sans grande ressource économique, ils seront en outre privés de la capacité de se prémunir contre les risques liés à la présence d’industries potentiellement dangereuses situées dans leur environnement immédiat.
La sécurité de nos concitoyens installés dans les secteurs à risque, en Moselle ou ailleurs, ne saurait être remise en cause sous prétexte d’une prétendue rigueur budgétaire. Dans ces conditions, il est indispensable de supprimer cet article afin de maintenir le montant du crédit d’impôt à au moins 40 %, tel que prévu par la loi Grenelle 2.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, j’espère que mes explications sur cet article seront de nature à mieux ordonner nos idées, ce qui nous permettra de gagner du temps dans l’examen de ce dispositif.
Je commence par rappeler l’historique du sujet.
Avant la loi du 12 juillet 2010 dite Grenelle 2, les travaux résultant d’un PPRT étaient éligibles au crédit d’impôt en vertu de l’article 200 quater A du code général des impôts, lequel couvre aussi les dépenses d’équipement des logements pour les personnes handicapées.
L’article 200 quater A vise deux catégories de travaux : pour la première, le crédit d’impôt est égal à 25 % des dépenses ; pour la seconde catégorie, il est égal à 15 % des dépenses. Les travaux réalisés dans le cadre des PPRT relèvent de cette seconde catégorie.
Ces dispositifs s’appliquent jusqu’au 31 décembre 2010.
Qu’en est-il après la loi du 12 juillet 2010 ?
Les travaux rendus nécessaires par un PPRT sont toujours éligibles au crédit d’impôt en vertu de l’article 200 quater A. Cependant, il est créé un nouveau crédit d’impôt, spécifique aux PPRT, qui fait l’objet d’un article 200 quater C à un taux plus intéressant de 40 % des dépenses. Ce crédit d’impôt est censé s’appliquer dès le 1er janvier 2011, lorsque celui de l’article 200 quater A aura pris fin, et durer jusqu’au 31 décembre 2013.
Que s’est-il passé à l’Assemblée nationale ?
Mon homologue Gilles Carrez a fait adopter un amendement de suppression du crédit d’impôt instauré dans le cadre du Grenelle 2, c’est-à-dire de l’article 200 quater C.
Tout d’abord, le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale a avancé des raisons de principe, auxquelles je souscris : ce dispositif aurait dû figurer en loi de finances ; le double dispositif nuit à la clarté, par ailleurs toute relative, du code général des impôts.
Ensuite, il a donné des raisons de fond : les dépenses résultant d’un PPRT sont obligatoires. Elles n’ont dès lors aucune raison de bénéficier d’un crédit d’impôt ; il s’agit là d’une augmentation significative de la dépense fiscale.
Reste que l’Assemblée nationale, tout en supprimant l’article 200 quater C, a simultanément prolongé d’un an le crédit d’impôt de l’article 200 quater A.
Face à cette situation, mes chers collègues, la commission des finances vous propose de suivre l’Assemblée nationale et donc de supprimer le dispositif instauré par le Grenelle pour des raisons de cohérence des textes législatifs. Dans le même temps, elle vous propose de donner un « coup de pouce » à la prise en compte des dépenses liées au PPRT en les faisant changer de catégorie au sein de l’article 200 quater A, augmentant ainsi le taux du crédit d’impôt de 15 % à 25 %.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission demande que l’amendement n° II-553 rectifié de nos collègues Louis Nègre, Bruno Sido et Fabienne Keller, auquel elle est favorable, soit appelé en priorité. Si cet amendement devait être adopté, ce que nous espérons, nous comptons sur le retrait de tous les autres amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est de droit.
J’appelle donc par priorité l'amendement n° II-553 rectifié, présenté par MM. Nègre et Sido et Mme Keller, et qui est ainsi libellé :
I. - Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le a du 5 du même article est complété par les mots : « et du montant des travaux mentionnés au b du 1 » ;
...° Dans le b du 5 du même article, les mots : « du montant des travaux mentionnés au b du 1 et » sont supprimés.
II. - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
La parole est à Mme Fabienne Keller.
Mme Fabienne Keller. Mon intention initiale était de supprimer cet article afin de rétablir le taux de 40 %.
Comme vient de l’indiquer M. le rapporteur général, l’amendement n° II-553 rectifié, cosigné par Louis Nègre, Bruno Sido et moi-même, vise à conserver le dispositif adopté à l’Assemblée nationale et à relever le taux de 15 % à 25 %. Il s’agit donc d’une position de repli.
J’en viens au fond.
Les riverains d’installations dangereuses sont soumis à des dépenses obligatoires. C’est l’une des suites de l’explosion de l’usine AZF. À cet égard, je rappelle que les PPRT sont très insuffisamment prescrits. Seuls 10 % d’entre eux, dix ans après l’accident, doivent être mis en œuvre. Il s’agit pourtant d’une obligation légale. En effet, sur les 400 plans prescrits, une trentaine ont vu le jour. Reste que 200 d’entre eux pourraient aboutir assez rapidement.
Il faut aider les propriétaires à s’équiper très rapidement. En l’occurrence, nous parlons de vitres qui ne doivent pas exploser ou de la création d’une salle confinée, c’est-à-dire sans contact avec l’extérieur. Ces dépenses peuvent être importantes pour des ménages très modestes. C’est pourquoi l’amendement visant à passer de 15 % à 25 % permet de leur adresser un signe au moment où on les oblige à investir.
Il est toujours moins cher de dépenser pour prévenir que de supporter le coût de la catastrophe après, même si, tant qu’il ne se passe rien, cela semble toujours trop cher.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je le répète : avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je tiens à citer quelques chiffres quant à la portée de l’amendement n° 553 rectifié, ainsi qu’à rappeler la position défendue par le groupe socialiste au travers des amendements présentés par M. Massion, M. Todeschini et Mme Demontès.
Il faut rappeler que 9 millions d’habitants vivent dans 900 communes ou EPCI comptant des sites classés Seveso : ces habitants n’ont pas choisi de s’installer là par goût !
En définitive, Mme Keller et ses collègues de l’UMP proposent un compromis entre les dispositions du texte initial et les recommandations du groupe socialiste, puisque l’amendement n° 553 rectifié vise à porter de 15 % à 25 %, le crédit d’impôt en faveur des travaux réalisés dans les périmètres des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT.
Cependant, le compte n’y est pas, et je vais vous expliquer pourquoi.
Tout d’abord, le Gouvernement n’est pas cohérent avec les lois qu’il fait voter : je rappelle en effet que la loi Grenelle 2 prévoyait un crédit d’impôt de 40 % pour encourager les travaux. Ce rappel a son intérêt, car les collectivités locales s’étaient engagées, à partir de cette initiative du Gouvernement, à apporter leur concours à la mise en œuvre des PPRT.
Les collectivités locales devaient y contribuer à hauteur de 20 %, afin que les résidents n’assument qu’un cinquième de la charge financière. Je rappelle au passage que celle-ci représente entre 10 000 et 15 000 euros, ce qui est important pour les populations modestes qui habitent dans les zones industrielles concernées.
Bien évidemment, j’ai compris la manœuvre de la majorité sénatoriale, consistant à couper l’herbe sous le pied de l’opposition. Pourtant, le Gouvernement campe sur ses positions et n’est pas favorable à l’amendement de Mme Keller. Ce faisant, il s’assoit également sur la loi Bachelot, qui préconisait l’exécution de travaux de mise en sécurité essentiels.
Partant, le groupe socialiste souhaite maintenir ses amendements : le Gouvernement doit respecter l’engagement qu’il avait pris auprès des collectivités locales. Si le Gouvernement et sa majorité reviennent sur cet engagement, les collectivités ne pourront évidemment pas financer les PPRT à hauteur de 20 % ! Au moment où leurs ressources fiscales et leurs dotations budgétaires sont réduites, elles seront évidemment contraintes de faire des arbitrages.
L’amendement n° 553 rectifié les obligerait à contribuer davantage que ce qui était prévu au départ. Le groupe socialiste ne peut pas accepter cela.
M. le président. La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote.
M. Marc Massion. Mes chers collègues, certains d’entre vous savent que je suis très sensible au sujet dont il est question. En effet, le territoire du Grand-Quevilly, commune dont je suis maire, accueille une usine AZF-Grande Paroisse, identique à celle de Toulouse.
Mme Keller a opportunément rappelé la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003, dont M. Détraigne était le rapporteur au Sénat et qui préconisait que les PPRT soient prescrits d’ici à 2008. Seuls cinquante l’ont été jusqu’à présent. Au Grand-Quevilly, où une usine AZF-Grande Paroisse fabrique des engrais, le PPRT n’a été prescrit qu’en mars 2010, et il ne devrait être mis en œuvre que fin 2011, voire – d’après les indications de l’administration – en 2012, soit près de dix ans après la promulgation de la loi. Il y a manifestement un peu de laisser-aller du côté de l’administration centrale…
Aujourd’hui, le Gouvernement revient sur ses engagements et parle de niche fiscale : c’est tout de même un comble, alors que la santé, voire la vie, de certains Français est en jeu !
De toute façon, un élément fait défaut dans les interventions que nous venons d’entendre : qu’en est-il de la responsabilité des industriels ? Quand donc ces derniers participeront-ils financièrement aux PPRT ? Personne n’a évoqué cet aspect des choses.
Comme il le fait sur d’autres sujets, le Gouvernement sollicitera encore les collectivités locales. Pourtant, si j’en juge d’après la situation de mon département, l’ampleur de la tâche est telle que les collectivités ne pourront pas intervenir sur l’ensemble des travaux !
S’agissant de l’amendement présenté par Mme Keller, qui me semblait être un amendement de compromis ayant reçu l’accord du Gouvernement, le groupe CRC-SPG ne peut donc qu’émettre un avis défavorable. Par ailleurs, nous maintiendrons nos amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Mon intervention sera brève, car je souscris totalement aux propos tenus par mon collègue Marc Massion.
Je voudrais cependant dire quelques mots à la suite du débat de ce matin relatif aux « dodus dormants », dont le Gouvernement et la majorité entendent modifier la fiscalité, en taxant davantage les sociétés HLM et d’économie mixte.
J’évoque ce sujet à dessein parce que je suis, depuis 1982, le maire d’Oissel, une commune accueillant deux usines classées Seveso depuis plus d’une quinzaine d’années. La SIEMOR, société immobilière d'économie mixte d'Oissel et sa région, a longtemps été un « dodu dormant », précisément parce que les normes Seveso l’empêchaient de construire. Et maintenant qu’elle a emmagasiné suffisamment de ressources pour construire et faire face au problème du logement, le Gouvernement veut la taxer ! Cette parenthèse montre bien les incohérences de la politique gouvernementale.
J’irai plus loin encore que mon collègue Marc Massion : la démarche du Gouvernement ne prend pas au sérieux la protection des personnes. Pour autant, les habitants des zones classées Seveso doivent se plier aux injonctions qui leur sont faites.
En assimilant le présent dispositif à une niche fiscale, le Gouvernement laisse à penser que les habitants des zones à risques sont des spéculateurs immobiliers ou des opportunistes à l’affût de réductions d’impôts !
En outre, monsieur le ministre, vous envoyez aux collectivités et aux industriels un message totalement incompréhensible ! N’oublions pas que le crédit d’impôt prévu par l’article 200 quater C du code général des impôts doit largement sa création à la catastrophe de l’usine AZF de Toulouse, qui constitue l’événement le plus révélateur de risque industriel qu’ait connu notre pays.
Comme le groupe socialiste, le groupe CRC-SPG maintiendra bien entendu ses amendements.