M. le président. Je suis saisi de neuf amendements.
L'amendement n° 13, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
TITRE III bis
JARDINS COLLECTIFS
L'amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé:
I -Le chapitre Ier du titre VI du livre V du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« CHAPITRE IerCONSTITUTION
« Art. L. 561-1. - L'appellation "jardins collectifs" fait référence aux jardins familiaux, aux jardins d'insertion et aux jardins partagés.
« On entend par jardins familiaux les terrains divisés en parcelles, affectées par les collectivités territoriales ou par les associations de jardins familiaux à des particuliers y pratiquant le jardinage pour leurs propres besoins et ceux de leur famille, à l'exclusion de tout usage commercial. En outre, dans un but pédagogique ou de formation au jardinage, certaines parcelles de jardins familiaux peuvent être affectées à des personnes morales par convention conclue entre celles-ci et les collectivités territoriales ou les associations de jardins familiaux.
« On entend par jardins d'insertion les jardins créés ou utilisés en vue de favoriser la réintégration des personnes en situation d'exclusion ou en difficulté sociale ou professionnelle. Ces jardins peuvent être, le cas échéant, divisés en parcelles affectées à ces personnes à titre temporaire.
« On entend par jardins partagés les jardins créés ou animés collectivement, ayant pour objet de développer des liens sociaux de proximité par le biais d'activités sociales, culturelles ou éducatives et étant accessibles au public.
« Les jardins collectifs contribuent à la sauvegarde de la biodiversité des plantes cultivées, fruits, légumes, fleurs, en favorisant leur connaissance, leur culture, leur échange non lucratif entre jardiniers.
« Art. L. 561-2.- Les associations et fédérations de jardins collectifs doivent être constituées sous forme d'associations ou fédérations déclarées conformément à la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.
« Elles ont notamment pour objet :
« 1° La recherche, l'aménagement, la répartition ou la gestion des terrains visés à l'article L. 561-1 ;
« 2° Le groupement des affectataires de jardins collectifs en vue de faciliter l'exploitation et l'animation de ces jardins ;
« 3° Le développement des jardins collectifs par des actions de vulgarisation horticole ;
« 4° La conclusion des conventions prévues à l'article L. 561-1.
« Les personnes affectataires de parcelles de jardins familiaux sont tenues d'adhérer à l'association chargée de gérer le groupe de jardins familiaux considéré.
« Au sens du présent titre :
« 1° Les références faites aux associations de jardins collectifs s'entendent des associations constituées conformément aux dispositions du présent article ;
« 2° Le terme "associations de jardins collectifs" s'entend également des fédérations de ces associations.
« Art. L. 561-3. - Les organismes comportant dans leur objet social à titre non exclusif ou principal la création ou la gestion des jardins collectifs peuvent bénéficier pour ces jardins des dispositions s'appliquant aux associations de jardins collectifs. »
II - Dans toutes les dispositions législatives, les mots : « jardins familiaux » sont remplacés par les mots : « jardins collectifs ».
III - Le titre VII du livre IV du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« TITRE VII
« LOCATION DE TERRAINS À USAGE DE JARDINS COLLECTIFS
« Art. L. 471-1. - Les dispositions du présent titre s'appliquent aux associations de jardins collectifs, qu'elles soient locataires ou occupants de bonne foi, à l'exclusion de leurs membres bénéficiaires. Est réputé de bonne foi l'occupant dont l'occupation a été connue et autorisée, même tacitement, par le propriétaire, encore que celui-ci n'ait réclamé le paiement d'aucun loyer ou d'aucune indemnité.
« Toutefois, les associations de jardins d'insertion et de jardins partagés peuvent décider par convention avec les propriétaires des terrains que seules les dispositions du droit commun seront applicables.
« Art. L. 471-2. - Toute location aux associations de jardins collectifs est consentie pour une durée minimale de trois ans, renouvelable pour une durée au moins égale par tacite reconduction.
« Nonobstant toute clause et tous usages contraires, toute location de jardins collectifs ne cesse à l'expiration du terme fixé par la convention ou par la loi que par l'effet du congé donné par écrit par l'une des parties à l'autre, avec un délai de préavis au moins égal à six mois.
« En tout état de cause, le congé ne prend effet qu'après enlèvement des récoltes et au plus tard le 30 novembre.
« Art. L. 471-3. - Le congé est valablement notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
« Le bailleur doit, à peine de nullité, en faire connaître le ou les motifs, en indiquant, de façon non équivoque, la destination qu'il entend donner au terrain dans l'avenir.
« Si l'unique motif du congé est l'insuffisance du loyer, le bailleur est tenu d'indiquer le prix qu'il exige. À défaut d'accord, la partie la plus diligente a la faculté de saisir le juge, dans les conditions prévues à l'article L. 471-6.
« Art. L. 471-4. - Si le motif du congé formulé par le bailleur se révèle inexact, le preneur peut être autorisé par le juge à reprendre la jouissance du terrain, dans les conditions fixées à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 471-2 ; il peut également obtenir la condamnation du bailleur à des dommages-intérêts.
« Art. L. 471-5. - À l'expiration du bail, une indemnité est due à l'association locataire.
« À défaut d'accord amiable, cette indemnité est fixée judiciairement, selon les règles édictées à l'article L. 471-6. Elle tient compte de l'ancienneté de la mise en culture, des frais d'investissement et de tous éléments utiles.
« Si le motif de non-renouvellement du bail est un changement d'utilisation des sols, il sera fait application des dispositions de l'article L. 563-2.
« Art. L. 471-6. - Le tribunal d'instance connaît des contestations relatives à l'application du présent titre, selon les règles de compétence et de procédure applicables à cette juridiction.
« Art. L. 471-7. - Les dispositions du présent titre s'appliquent de plein droit aux locations conclues ou renouvelées à partir de la publication de la loi n° du relative aux jardins collectifs, ainsi qu'aux baux en cours. »
L'amendement n° 16, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dix-huitième alinéa (9°) de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé :
« 9° Localiser, dans les zones urbaines, les terrains cultivés à protéger, en particulier les terrains réservés au maintien ou au développement des jardins collectifs définis à l'article L. 561-1 du code rural. Ces terrains sont inconstructibles quels que soient les équipements qui, le cas échéant, les desservent. Toutefois, peuvent être admises les constructions directement liées à l'exercice des activités propres aux jardins collectifs ; ».
L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :
1° L'intitulé du chapitre VI du titre Ier du livre II est ainsi rédigé : « Dispositions particulières relatives aux jardins collectifs ».
2° L'article L. 216-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 216-1. - Conformément à l'article L. 562-2 du code rural et de la pêche maritime, les collectivités territoriales ou leurs groupements ayant compétence en matière d'urbanisme peuvent exercer leur droit de préemption conformément aux dispositions du présent code en vue de l'acquisition de terrains destinés à la création, au maintien ou à l'aménagement des jardins collectifs définis à l'article L. 561-1 dudit code. Les associations de jardins collectifs peuvent leur demander d'exercer ce droit. »
L'amendement n° 19, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 3° de l'article L. 2132-5 du code du travail, le mot : « ouvriers » est remplacé par le mot : « collectifs ».
L'amendement n° 20, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa du 5° de l'article 208 du code général des impôts, le mot : « familiaux » est remplacé par le mot : « collectifs ».
II - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 21 rectifié, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 1° du II de l'article 1052 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 1° Aux sociétés de bains-douches et aux organismes de jardins collectifs définis à l'article L. 561-2 du code rural et de la pêche maritime, lorsque leur activité, considérée dans son ensemble, s'exerce dans des conditions telles qu'elle peut être tenue pour désintéressée ; ».
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 22 rectifié, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 6° de l'article 1394 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 6° Les terrains qui appartiennent aux organismes de jardins collectifs, ou dont ils ont la jouissance, et qu'ils utilisent pour la réalisation de leur objet social, tel qu'il est défini aux articles L. 561-1 et L. 561-2 du code rural et de la pêche maritime, lorsque leur activité, considérée dans son ensemble, s'exerce dans des conditions telles qu'elle peut être tenue pour désintéressée ; »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une augmentation des taxes locales.
L'amendement n° 23, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 1461 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 4°, les mots : « et les sociétés de jardins ouvriers » sont supprimés ;
2° Au 5°, le mot : « familiaux » est remplacé par le mot : « collectifs ».
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une augmentation des taxes locales.
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. En 2003, par un cheminement à la fois familial et personnel, j’ai été saisi par des associations de jardins familiaux d’une demande visant à améliorer le cadre législatif qui régissait cette activité.
Ces associations m’avaient présenté les conclusions des réflexions qu’elles avaient conduites avec le ministère de l’agriculture. J’avais alors déposé une proposition de loi reprenant l’accord qui avait été conclu entre le ministère de l’agriculture et les associations.
L’objectif était simple : il s’agissait d’intégrer les jardins familiaux dans le développement des villes, d’étendre les avantages liés aux jardins familiaux, d’une part, aux jardins d’insertion, qui offrent à des personnes en grande difficulté la possibilité de se reconstruire, et, d’autre part, aux jardins partagés, qui permettent d’aménager en lieux de convivialité des landes ou d’autres terres laissées à l’abandon au sein des villes.
La commission des affaires économiques avait repris cette proposition de loi et chargé notre regretté collègue Hilaire Flandre de la présenter au Sénat. C’est d’ailleurs lui qui proposa à la commission d’élargir le champ de la proposition de loi aux jardins partagés et de regrouper les différentes catégories sous le terme générique de « jardins collectifs ».
Ce texte, pour ma plus grande satisfaction, fut adopté à l’unanimité de la Haute Assemblée.
Malheureusement, mes chers collègues, vous savez combien il est difficile de faire inscrire à l’ordre du jour d’une chambre les propositions de loi votées par l’autre chambre.
Mme Nathalie Goulet. Sauf en ce qui concerne les assistantes maternelles !
M. Christian Cointat. En dépit de mes efforts, de mes contacts réitérés avec les ministres de l’agriculture successifs – je les sollicitais au moins trois ou quatre fois par an –, le texte n’a jamais été inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
J’étais moi-même constamment interrogé par les associations de jardins familiaux, qui me demandaient ce que devenait la proposition de loi après le vote du Sénat, lequel avait suscité un immense espoir : la poésie végétale pouvait enfin l’emporter sur le minéral.
J’ai toujours reçu un soutien total des ministres de l’agriculture sur ce dossier, que ce soit oralement ou par écrit. Devant l’inertie de l’Assemblée nationale, l’un d’eux m’a même conseillé, après m’avoir confié qu’il ne voulait pas intervenir dans la fixation de l’ordre du jour du Parlement, de profiter d’un autre véhicule législatif pour faire adopter, par voie d’amendements, ces dispositions devenues consensuelles.
Tel est le sens de ma démarche. Les amendements que je présente aujourd’hui reprennent très exactement le texte qui avait été adopté en 2003, à l’unanimité de la Haute Assemblée, sur la proposition de Hilaire Flandre et de la commission des affaires économiques.
Je ne suis pas ce qu’il est convenu d’appeler « un sénateur territorial » et n’ai aucun intérêt direct à l’adoption de cette proposition de loi. Mais j’insiste sur le fait que les centaines de milliers de personnes qui composent ces associations sont autant d’électeurs potentiels qui, sept ans après le vote de la Haute Assemblée, espèrent toujours la concrétisation de ces dispositions.
Je vous demande aujourd’hui votre appui afin d’adopter un texte que nombre de nos concitoyens attendent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces neuf amendements ?
M. Gérard César, rapporteur. Comme l’a rappelé M. Cointat, cette question est posée depuis 2003. Je me souviens parfaitement du rapport de notre regretté collègue Hilaire Flandre sur le sujet.
Les jardins collectifs seraient, aux termes de ces amendements, une catégorie générique regroupant trois sous-catégories de jardins : les jardins familiaux, les jardins d’insertion et la nouvelle sous-catégorie des jardins partagés, ces derniers étant de petits enclos verts implantés aux abords des villes, et parfois même en leur sein, dans lesquels sont pratiqués différents types de cultures domestiques par des particuliers à des fins récréatives ou alimentaires.
J’ajoute que la production de ces jardins est consommée directement par ceux qui les cultivent, aucun produit ne venant concurrencer sur le marché les autres productions agricoles, qui font l’objet de ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.
La proposition de loi, et aujourd’hui les amendements visant à la transposer dans ce texte, a pour objectif de renforcer les prérogatives juridiques et fiscales des organismes gestionnaires des jardins collectifs, afin d’en garantir la pérennité.
Cet objectif est fort louable et nous ne pouvons qu’y souscrire. Cependant, il ne nous semble pas que le présent texte soit le support le plus indiqué : « une fois encore », pourrait me rétorquer M. Cointat. (M. Christian Cointat sourit.)
La problématique des jardins collectifs, qui avait fait l’objet d’un rapport ministériel et d’une proposition de loi spécifiques, ne figurait pas dans le cahier des charges du projet de loi de modernisation agricole. Elle constitue en effet un tout cohérent et relativement conséquent qui mérite un texte particulier.
Les jardins familiaux présentent un lien ténu avec l’objet du présent projet de loi qui vise à renforcer la compétitivité de l’agriculture professionnelle. Ils sont régis par le code rural, au même titre que… les animaux de compagnie !
Les amendements reprennent un texte de 2003, toujours en instance à l’Assemblée nationale, mais rien ne dit que la situation soit la même qu’il y a sept ans.
L’inscription d’amendements sur les jardins familiaux dans ce projet de loi n’est peut-être pas la meilleure solution. L’idéal serait bien sûr que l’Assemblée nationale inscrive ce texte à son ordre du jour. Et je ne dis pas cela pour botter en touche, mon cher collègue ! (Sourires.)
M. Christian Cointat. Cela y ressemble un peu !
M. Gérard César, rapporteur. Vous n’ignorez pas qu’une grande finale de rugby se joue ce soir ! (Nouveaux sourires.)
Le volet relatif au statut des jardins pourrait peut-être trouver sa place dans un texte relatif à la simplification du droit. Quant au volet fiscal, il pourrait être intégré dans une loi de finances.
Avant de me prononcer, je souhaite entendre l’avis du Gouvernement. Je vous transmets le ballon avant le match, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur le rapporteur, je comprends vos arguments, bien que vous n’ayez pas exprimé un avis tranché. (Sourires.) Sur le fond, je partage votre analyse : on ne peut qu’être favorable au développement de ces jardins.
Monsieur Cointat, vous souhaitez profiter de la discussion du présent texte pour faire adopter les dispositions prévues dans votre proposition de loi relative aux jardins collectifs. Je comprends fort bien que, lassé par une longue attente – et après avoir épuisé plusieurs ministres de l’agriculture –, vous saisissiez cette occasion, mais je ne vous cache pas que cette démarche me dérange quelque peu. Je ne souhaite pas qu’un projet aussi important pour la modernisation de l’agriculture soit détourné de sa finalité, que l’on y introduise des sujets sans rapport direct avec son objet.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable, pour des raisons de forme. Sur le fond, monsieur le sénateur, je soutiens votre proposition et je suis prêt à y revenir, dans un autre contexte.
M. le président. Monsieur Cointat, les amendements sont-ils maintenus ?
M. Christian Cointat. Je suis à votre disposition, monsieur le ministre ! Tout ce qui m’intéresse, c’est que l’on puisse aboutir.
M. Gérard César, rapporteur. Une fois pour toutes !
M. Christian Cointat. Vous me proposez de revenir sur ce sujet demain. Soit ! Mais je veux avoir la garantie que cette question ne sera pas renvoyée aux calendes grecques.
La proposition de loi relative aux jardins collectifs a été adoptée en 2003, voilà donc sept ans : un septennat ! Depuis, nous avons voté pour le quinquennat, j’aurais donc pu espérer avoir satisfaction plus tôt.
Cette situation me rappelle une phrase terrible de Jean Jaurès : « Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots.» Mes chers collègues, ne donnons pas raison à Jean Jaurès : changeons les choses et donnons satisfaction à ceux qui attendent depuis si longtemps.
Je le dis d’autant plus librement que je suis incapable de faire pousser une salade : elle finit toujours par ressembler à un arbre. (Sourires.) Mais je sais que beaucoup de personnes trouvent dans la pratique du jardinage un plaisir, une évasion…
M. Gérard César, rapporteur. C’est vrai !
M. Christian Cointat. Promouvoir les jardins collectifs, c’est concrétiser nos convictions écologiques, c’est faire venir la nature dans les villes – et non pas l’inverse. Mes chers collègues, je souhaite que nous nous engagions dans cette démarche extraordinaire ; cela en vaut la peine !
Monsieur le ministre, n’oubliez pas tous ces amoureux de la nature qui vivent dans nos cités ; ne donnez pas raison au tombereau de béton qui écrase la brouette de terreau. Faites en sorte que la brouette de terreau triomphe ! (Sourires.)
Le plus beau des jardins, vous le savez, c’est celui du cœur, dans lequel poussent deux des plus jolies fleurs : le sourire et l’espérance.
Confiant dans votre volonté de ne pas détruire tous ces jardins, je retire mes amendements. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Les amendements nos 13, 15 rectifié, 16, 17 rectifié, 19, 20, 21 rectifié, 22 rectifié et 23 sont retirés.
M. le président. La parole est à M. Gérard César, rapporteur.
M. Gérard César, rapporteur. Monsieur Cointat, je suis convaincu du bien-fondé de vos arguments. Je vous invite donc à déposer une nouvelle proposition de loi. Je m’engage, à titre personnel, à tout faire pour qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour réservé au groupe UMP. L’adoption d’une telle proposition de loi permettrait de préserver les jardins familiaux et de répondre à un besoin réel d’une partie de nos concitoyens.
M. Christian Cointat. Il serait plus rapide que M. le ministre dépose un projet de loi !
TITRE IV
MODERNISER LA GOUVERNANCE DE LA PÊCHE MARITIME ET DE L’AQUACULTURE
Article 18
Après l’article 2 de la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines, il est inséré un article 2-1 ainsi rédigé :
« Art. 2-1. – Il est créé auprès du Conseil supérieur d’orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire un comité de liaison scientifique et technique des pêches maritimes et de l’aquaculture.
« Le comité de liaison scientifique et technique peut être consulté sur toutes questions concernant notamment les domaines suivants :
« - la conservation et l’exploitation durable des ressources vivantes en tenant compte des aspects biologiques, économiques, environnementaux, sociaux et techniques ;
« - l’analyse conjointe des parties prenantes sur l’évolution des ressources et des flottilles ;
« - le développement de l’analyse scientifique effectuée à bord des navires de pêche en collaboration avec les marins-pêcheurs ;
« - les orientations en matière de recherche, de développement et d’expertise, notamment s’agissant de la collecte de données.
« Le comité de liaison scientifique et technique examine au moins une fois par an l’état de la ressource halieutique et les mesures prises pour sa gestion, et émet des recommandations sur celles-ci.
« Il est composé de représentants des ministères et établissements publics intéressés, de représentants des professionnels des pêches maritimes et de l’aquaculture, de la recherche et de la société civile, notamment des associations de consommateurs et des associations de protection de l’environnement.
« La composition et les règles de fonctionnement du comité sont précisées par décret. »
M. le président. La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, sur l'article.
Mme Marie-Agnès Labarre. L’article 18 du projet de loi crée un comité de liaison scientifique et technique des pêches maritimes et de l’aquaculture.
Dans le contexte actuel de raréfaction, voire de disparition des stocks halieutiques, il est proposé de faire travailler ensemble scientifiques et pêcheurs afin, sans doute, d’éviter les contentieux et les incompréhensions. Cette idée est intéressante. Cependant, face à l’ampleur des problèmes que posent la gestion et l’exploitation des ressources halieutiques, les dispositions du projet de loi sont insuffisantes.
Le constat est alarmant. Dans son dernier rapport, paru en avril dernier, sur la situation mondiale des pêches et de l’aquaculture, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO, constatait que plus de 80 % des stocks de poissons, pour lesquels des résultats d’évaluation sont disponibles, sont déclarés pleinement exploités ou surexploités. C’est le cas pour les dix principales espèces, qui représentent 30 % de la production totale des pêches de capture. La FAO conclut que « le potentiel maximal de prélèvement sur les stocks naturels des océans de la planète a probablement été atteint ».
Face à cette situation dramatique, l’échec, à Doha, de la conférence de la convention sur le commerce international des espèces sauvages menacées d’extinction est intolérable. Pourtant, l’Union européenne et une majorité de pays s’étaient engagés pour protéger le thon rouge et pour imposer une régulation du commerce international sur des espèces maritimes en danger.
La surexploitation des mers et des océans, mis à part le fléau de la pêche illicite aidée par les pavillons de complaisance, reste, nous en sommes conscients, une question qui se pose sur le plan international. Cependant, on ne peut, à l’échelon national, se limiter à constater les dégâts, comme nous le propose le Gouvernement avec ce projet de loi.
Monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour protéger la ressource en thon rouge et pour prévenir les conséquences désastreuses de son éventuelle disparition pour tout l’écosystème méditerranéen ?
Quels moyens vont être mobilisés par l’État pour lutter contre la pêche illégale et minotière, qui saccage la ressource et exerce une concurrence déloyale sur la pêche française ?
Face aux efforts déjà accomplis par les thoniers français pour mettre aux normes leurs bateaux et respecter les quotas de pêche, allez-vous engager un véritable accompagnement économique et social de la filière thonière française ?
Où en est le projet de création d’une véritable zone économique exclusive française en Méditerranée ?
Voilà autant de sujets que nous aurions souhaité voir aborder dans un projet de loi relatif à la pêche.
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, sur l'article.
Mme Odette Herviaux. Depuis 1997, le Conseil supérieur d’orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire supervise les actions et les décisions concernant la politique française des pêches : gestion de la ressource, des structures, production, transformation, commercialisation, marché, emploi, formation, relations sociales et recherche.
C’est un bel exemple de mise en cohérence des politiques, même si le champ d’action est très large et les compétences largement partagées, entre autres avec les organisations de producteurs ou les interprofessions. Mais cette cohérence est absolument nécessaire, car les pêcheurs étant interdépendants, la responsabilité collective de la filière est indissociable d’une gestion rationnelle des ressources.
L’amendement no 691 de la commission vise à donner une valeur législative au Conseil supérieur d’orientation dans la partie législative du code rural. Un parallélisme des formes étant absolument nécessaire, il convient de créer, à côté du Conseil supérieur d’orientation, un comité de liaison scientifique et technique des pêches maritimes et de l’aquaculture qui aura vocation à être un lieu de concertation et de dialogue entre les scientifiques, les représentants de l’État et les professionnels.
L’article 18 prévoit que ce comité comprendra des représentants de la société civile. J’ai déjà eu l’occasion de dire ce que je pensais de cette expression. Nous sommes tous membres de la société civile. Si le comité de liaison scientifique et technique est conçu comme un organe technique, il doit être réservé aux scientifiques, aux représentants de l’État et de la profession. Mais si sa représentation est élargie, il faut y intégrer les consommateurs.
J’espère que cet organe de concertation permettra de mettre fin aux polémiques entre les professionnels et les scientifiques, même si ces derniers, en pratique, travaillent en parfaite collaboration dans de très nombreux ports, souvent grâce au financement et aux aides des collectivités. Le partage de la vie à bord par les pêcheurs et les scientifiques pourrait – nous l’espérons – avoir des répercussions positives, même si je conçois difficilement comment il sera possible de rendre cette cohabitation systématique. Peut-être cet organe n’a-t-il pas vocation à durer après que la confiance se sera installée !