M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois, pour explication de vote.
M. Louis Duvernois. J’appuie sans réserve cet amendement, et je voudrais en donner les raisons.
Selon M. le rapporteur général, ce dispositif prévoirait un avantage supplémentaire par rapport au régime en vigueur. Or M. le ministre vient de nous dire l’inverse, du moins l’ai-je compris ainsi. Cela prouve bien que le problème posé est réel.
L’offre éducative française hors du territoire national, mise en œuvre par deux grands opérateurs, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, et la Mission laïque française, connaît un succès croissant sur tous les continents : la seule AEFE a ainsi accueilli plus de 6 000 élèves lors de la rentrée scolaire 2009-2010. Parallèlement, nos deux systèmes éducatifs rencontrent de plus en plus de difficultés, tant en matière financière qu’en termes de ressources humaines, pour mettre en œuvre cette offre.
Nos établissements en gestion directe, conventionnés et homologués par le ministère de l’éducation nationale, ne peuvent faire face à des programmes urgents d’agrandissement, de création ou de rénovation, faute de fonds publics suffisants.
Cet amendement vise donc à venir en aide à un réseau d’enseignement exceptionnel, que beaucoup de pays d’ailleurs nous envient, constitué de près de 500 lycées, collèges, écoles et maternelle, en faisant appel à des partenariats innovants. Il s’agit de créer, d’innover avec le secteur privé, comme c’est déjà le cas dans d’autres domaines.
La situation actuelle n’est à l’évidence pas satisfaisante. Nous cherchons donc de nouvelles solutions, tout en ayant conscience que le budget de l’État est contraint, afin de renforcer l’influence de la France et d’améliorer les conditions d’accueil des élèves français et étrangers dont les familles font confiance à nos établissements.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Soyons clairs : nous sommes tous très attachés au réseau d’enseignement français à l’étranger, mais celui-ci a besoin de moyens.
On ne peut pas vouloir que ce réseau fonctionne, on ne peut pas encourager le partenariat public-privé, puis refuser une solution qui permettrait à l’État de dépenser moins et aux entreprises privées de payer plus.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Un dispositif existe déjà !
M. Christian Cointat. Dans ces conditions, monsieur le ministre, que l’État augmente les crédits pour combler le manque de moyens !
La situation est très difficile, j’y insiste, et toute solution permettant de l’améliorer mériterait d’être encouragée, surtout quand elle est pertinente, ce qui est le cas de cet amendement.
Louis Duvernois a parfaitement exposé la situation. Je ne vais donc pas m’étendre davantage. J’indique simplement que je voterai l’amendement présenté par Charles Revet avec, je l’espère, beaucoup d’autres de nos collègues. Je le répète, nous avons besoin de moyens pour financer l’enseignement français hors de nos frontières et pour faire connaître notre culture à l’étranger, pour le plus grand rayonnement de la France. (Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. Nos trois collègues ont plaidé avec talent un dossier lié à la défense de la francophonie.
Reste que, pour une fois, j’ai envie de pousser un coup de gueule ! À partir d’idées extrêmement généreuses, on est en train – pardonnez-moi cette expression familière – de marcher « à côté de nos pompes » !
Dans quelques minutes, nous allons engager un débat sur le déficit abyssal des finances de l’État français.
M. François Marc. Tout à fait !
M. Jacques Mahéas. Il y a de quoi faire !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien dit !
M. François Fortassin. Et que fait-on ici, sinon réclamer des dépenses supplémentaires ?
Notre première responsabilité de parlementaires, c’est de garantir les ressources de l’État, et surtout d’éviter toute forme de déduction fiscale.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bravo !
M. François Fortassin. C’est un principe républicain !
Même si cet amendement a été rédigé avec les meilleures intentions du monde, il est évident que l’on est ici hors cadre ! (M. le rapporteur général, Mme Janine Rozier et M. Auguste Cazalet applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais apporter une précision technique.
Je le répète, mes chers collègues, les textes visant le régime du mécénat sont rédigés en termes clairs et précis. Je peux donc vous dire qu’ils sont applicables au problème que vous soulevez. Quel est-il ?
En substance, l’amendement n° I-441 dispose que les sociétés ayant des filiales à l’étranger peuvent déduire de leur déclaration d’impôt les sommes versées. Franchement, je ne sais pas ce que cela veut dire. Que signifie « déduire » ? Déduire de quoi ? De leur déclaration d’impôt ? Dans quelles proportions ?
Votre dispositif – pardonnez-moi de vous le dire – n’est pas applicable. Au mieux, il pourrait s’inscrire dans le cadre d’un débat d’orientation ou être le support d’une discussion de portée générale, mais il ne peut manifestement pas être adopté. S’il l’était, il serait sans effet.
Réexaminons ce sujet à tête reposée, et voyons si le régime du mécénat ne pourrait pas être élargi ou intégrer un fléchage particulier.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J’irai dans le même sens que M. le rapporteur général. Auparavant, je remercie François Fortassin d’avoir rappelé les fondamentaux.
Je comprends l’intention de nos collègues Charles Revet, Louis Duvernois et Christian Cointat. Leur volonté de développer l’enseignement du français à l’étranger est extrêmement louable et certainement une nécessité. Reste, comme l’a rappelé M. le rapporteur général, qu’un dispositif existe déjà permettant une réduction fiscale de 60 % dans la limite de 5 ‰ du chiffre d’affaires. C’est considérable !
Puisque l’État ne peut pas payer, Christian Cointat suggère de mettre en application les dispositions prévues par l’amendement.
Il est vrai que la déduction sur la déclaration d’impôt n’est pas simple à appliquer. Mais, pour ma part, j’ai cru comprendre que ces dépenses devaient venir en déduction du bénéfice imposable. (M. Christian Cointat acquiesce.) Dans ces conditions, c’est quand même l’État qui paiera dans la proportion du taux d’imposition.
Par ailleurs, je vous rends attentifs au fait que l’enseignement français à l’étranger va commencer à revenir cher. Je pense aux dispositions qui prévoient le remboursement des frais de scolarité sans limite. Or un enfant scolarisé dans un lycée américain à San Francisco peut coûter 15 000 dollars par an à ses parents. Pour un lycéen, c’est pris en charge par l’État.
Veillons, chers collègues, tout en accompagnant votre démarche, à rester dans la soutenabilité financière.
M. Christian Cointat. Et dans l’équité !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Certes, mais il n’est pas dit que les frais sont toujours remboursés dans de telles proportions. Les sociétés qui emploient des collaborateurs expatriés ont certainement des politiques adaptées d’accompagnement pour ces derniers. La mondialisation a apporté quelques fruits … N’oublions pas en outre que certaines entreprises ont délocalisé leurs filiales pour des raisons fiscales et que certains de nos compatriotes se sont exilés pour des motifs identiques.
Dans l’immédiat, il serait donc plus sage de retirer cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Les dons d’une entreprise à l’AEFE sont déjà éligibles au régime du mécénat. La société peut donc déduire 60 % du montant de ses versements dans la limite de 5 ‰ du chiffre d’affaires. Pour une grande entreprise, un tel pourcentage représente beaucoup d’argent.
Ce régime est plus intéressant que celui qui est proposé dans l’amendement, qui ne ferait bénéficier l’entreprise que de 33 % de réduction.
Les textes actuels visent les organismes extérieurs. Une entreprise peut donc verser des subventions aux lycées français par l’intermédiaire de l’AEFE et profiter du régime du mécénat, qui est très développé en France.
Je pense donc que cet amendement est totalement satisfait. C’est pourquoi j’invite moi aussi ses auteurs à le retirer.
M. le président. Monsieur Revet, l’amendement n° I-441 est-il maintenu ?
M. Charles Revet. Je peux vous assurer que cet amendement améliorerait l’image de la France, laquelle n’est vraiment pas très bonne à l’étranger à force de financer des équipements qui ne correspondent pas aux besoins. En outre, il favoriserait le développement de notre culture.
Des moyens doivent être trouvés pour encourager les investissements et permettre aux familles françaises vivant à l’étranger, et qui participent donc au développement de la culture française, de scolariser leurs enfants dans de bonnes conditions.
Je veux bien admettre que la formulation que nous avons retenue n’est pas la meilleure. Je pense également que la réponse que nous a fournie M. le ministre doit être examinée de plus près afin de voir si elle apaise nos inquiétudes. Nous serons sans doute conduits à reparler de ce sujet. En attendant, je retire cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Je rappelle que les articles 13 à 20 ont été précédemment examinés par priorité.
Article additionnel avant l'article 21
M. le président. L'amendement n° I-359, présenté par Mme Bricq, MM. Sueur, Patriat et Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Il est créé un prélèvement sur recette destiné à compenser intégralement, chaque année, la perte de recettes résultant, pour les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties mentionnée à l'article 1383 I du code général des impôts et de l'exonération de taxe professionnelle mentionnée au I quinquies B de l'article 1466 A du code général des impôts.
Les modalités de mise en œuvre de cette compensation sont définies par la prochaine loi de finances.
II. - Les pertes de recettes pour l'État résultant de la compensation intégrale des exonérations de fiscalité locales au profit des entreprises installées dans une zone de restructuration de la défense, sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. L’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2008, nous avions alerté le Gouvernement sur les inquiétudes que la réforme de la carte militaire suscitait chez les élus locaux concernés. Les implantions militaires représentent en effet une source souvent essentielle de vitalité économique, voire démographique pour les territoires.
Notre collègue François Patriat, président de la région Bourgogne et cosignataire de cet amendement, cite souvent l’exemple de la ville de Joigny dans l’Yonne : cette dernière, reconnue zone de restructuration de défense en septembre dernier, a en effet perdu 10 % de sa population !
La loi de finances rectificative autorisait les collectivités territoriales à adopter des exonérations de taxe professionnelle et de taxe foncière pour attirer des entreprises. Le Gouvernement avait annoncé que des compensations seraient versées, mais les pertes de recettes du fait des exonérations fiscales adoptées restent aujourd’hui à la charge des collectivités locales.
Il n’est pas normal de faire peser sur ces collectivités la charge de ces exonérations, alors qu’elles n’ont pas été associées à la réforme de la carte militaire.
Il existe certes un fonds de soutien aux communes doté de 10 millions d’euros, mais cette somme est vraiment dérisoire comparée au coût des pertes pour les collectivités locales. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à instaurer une compensation intégrale au profit des collectivités locales touchées par la réforme de la carte militaire.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dans les territoires concernés par les restructurations de défense, l’État a mis en place des dispositifs d’aide qui intègrent des incitations fiscales et sociales. Le dispositif de crédit de taxe professionnelle créé en 2005 pour les zones d’emploi en grande difficulté a été étendu à ces territoires fortement touchés par les restructurations de défense. Cela représente un soutien de 5 millions d’euros pour 2010.
Par ailleurs, le dispositif des « bassins d’emploi à redynamiser » a également été étendu à ces territoires et combine exonérations fiscales et exonérations de cotisations sociales.
Je souligne que ces dispositifs sont clairement maintenus pour 2010 ; vous le savez, nous y prenons soin dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, qui, de ce point de vue, se fait à droits constants.
Mais il s’agit bien d’exonérations facultatives,…
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. …conformes aux décisions prises par les conseils compétents. C’est un aspect des choses auquel la commission des finances tient particulièrement. Et si une exonération est facultative, elle n’est pas compensée.
Mme Nicole Bricq. Mais les collectivités n’ont rien demandé !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est un principe de responsabilité, et, dans ce contexte que vous connaissez bien, la commission ne peut émettre qu’un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Le même problème existe à Caen, où notre collègue Philippe Duron bataille pour compenser les pertes des installations militaires. Je soutiendrai donc l’amendement de Mme Bricq.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-359.
(L'amendement n'est pas adopté.)
B. – Autres dispositions
Article 21
Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes créés et de comptes spéciaux ouverts antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi sont confirmées pour l’année 2010. – (Adopté.)
Article 22
Au II de l’article 302 bis K du code général des impôts, les montants : « 3,92 € », « 7,04 € » et « 1,17 € » sont remplacés respectivement par les montants : « 4,11 € », « 7,38 € » et « 1,23 € ». – (Adopté.)
Article additionnel avant l'article 23
M. le président. L'amendement n° I-146, présenté par M. Marini et Mme M. André, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Avant l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l'article 953 du code général des impôts est ainsi modifié :
1°) à la fin du deuxième alinéa, le montant : « 88 euros » est remplacé par le montant : « 79 euros » ;
2°) dans le quatrième alinéa, le montant : « 44 euros » est remplacé par le montant : « 35 euros » et le montant : « 19 euros » est remplacé par le montant : « 10 euros ».
II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant de la minoration du droit de timbre pour la délivrance du passeport en cas de fourniture par le demandeur de deux photographies d'identité est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement concerne les travaux menés au sein de la commission des finances, en particulier par Mme Michèle André, la rapporteure spéciale. Notez, ma chère collègue, que j’ai bien dit « rapporteure »… (Sourires.)
Mme Michèle André. Merci !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L'article 953 du code général des impôts prévoit que le droit de timbre pour un passeport s'élève à 89 euros pour un majeur, à 45 euros pour un mineur de quinze ans et plus, et à 20 euros pour un enfant de moins de quinze ans.
Cet amendement vise à réduire de 10 euros le montant de ce droit de timbre lorsque le demandeur fournit lui-même les deux photographies d'identité nécessaires à l'élaboration de son passeport.
Nous sommes attachés à un progrès en la matière, compte tenu des problèmes d’organisation que vous connaissez bien, monsieur le ministre, puisque, si je ne me trompe, la première station d’enregistrement des données, dans le département de l’Oise, a été mise en place à Chantilly.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Vous connaissez donc bien les charmes et les contraintes de cet exercice !
Nous souhaiterions, en particulier, pouvoir marquer notre considération pour les professionnels privés. L’an dernier, nous avions prévu, dans la loi de finances rectificative de fin d’année, une réduction d’un euro lorsque le demandeur fournit lui-même ses deux photos d’identité.
De plus, nous avons confié aux maires des compétences supplémentaires en la matière concernant les conditions d’accueil du public, mais ce dispositif ne nous semble pas être encore suffisant. Cet amendement a donc été déposé, au nom de la commission des finances, pour aller un peu plus loin sur ce point.
M. le président. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. L’an dernier, nous avions proposé cet amendement qui avait été adopté, puis rejeté en seconde délibération dans le cadre de la première partie de la loi de finances. Nous l’avions à nouveau présenté ensuite, et nous avions eu une difficulté réelle au cours de la commission mixte paritaire, celle-ci ayant admis que nous pouvions laisser aux photographes le bénéfice d’un euro symbolique, ce qui ne correspond pas tout à fait au travail qu’ils fournissent, comme nous nous en rendons tous compte.
Depuis cette dernière tentative, j’ai eu l’occasion comme rapporteure spéciale de mener une mission d’observation sur pièce et sur place très approfondie sur la question de la fabrication des passeports biométriques, préfigurant peut-être le cas des cartes nationales d’identité qui pourraient elles aussi devenir biométriques dans un avenir proche.
Beaucoup d’améliorations ont été apportées depuis l’été. En effet, la mise en œuvre de ces passeports s’est présentée au plus mauvais moment, alors que les Français partaient massivement en vacances, et un certain nombre de mairies ont dû faire face à un engorgement très important. Cette situation a donné lieu à beaucoup d’articles de presse, de commentaires, de questions écrites, et un travail approfondi avec les maires a été mené.
Aujourd’hui encore, nous n’avons pas pu établir de manière très précise le véritable coût du passeport, mais nous sommes certains d’une chose – et je remercie M. le rapporteur général de soutenir cet amendement –, c’est que les photographes doivent recevoir un salaire correspondant à leur travail.
Une série de réunions s’est engagée, après un moment de blocage, entre les photographes, l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS, et le ministère de l’intérieur, ce qui devrait aboutir à une dématérialisation de l’envoi de la photo. Un tel dispositif résoudrait sans doute une partie des problèmes qui se posent, y compris le temps parfois passé par les employés municipaux pour procéder à la prise de photographies, qui peut se révéler difficile en particulier pour les enfants.
Notre amendement tend donc à redonner un espace aux photographes, à redonner à chacun son métier. Peut-être lorsque je présenterai en séance au Sénat le rapport relatif à l’administration générale et territoriale de l’État serons-nous en mesure de vous faire des propositions plus précises.
Pour l’heure, l’adoption de cet amendement me semble correspondre à une nécessité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. C’est un sujet dont nous avons déjà débattu, et qu’un certain nombre d’entre nous connaissent pour l’avoir pratiqué.
Je pense que 10 euros c’est trop, monsieur le rapporteur. Cela coûterait à l’État 30 millions d’euros si tout le monde fait faire sa photo par un photographe, 15 millions d’euros si seulement la moitié des personnes concernées procèdent ainsi. D’après nos statistiques, une personne sur deux se présente avec une photo, et une personne sur deux fait prendre une photo sur place lorsque le maire n’a pas décidé d’imposer par arrêté la fourniture de photographie papier extérieure. C’est une possibilité qui avait été introduite d’ailleurs par le Sénat, et il y a donc bien une liberté de la puissance publique locale.
Par ailleurs, l’obligation de photographie sur la carte Vitale 2 qui est en cours donne un marché très supérieur à celui qui est perdu en partie par les photographes et les photomatons : 5 millions de cartes Vitale 2 ont déjà été produites en 2009, à comparer au 1,3 million de passeports délivrés par an avec prise de photo en mairie. Ce sont à terme 50 millions de cartes Vitale 2 pour lesquelles des photographies seront prises par les professionnels.
Je ne suis donc pas favorable à la diminution de 10 euros du droit de timbre, parce que c’est coûteux pour les finances publiques et qu’il y a aujourd’hui d’autres manières de faire qui respectent le droit des photographes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Jégou. En tant que praticien, puisque j’ai aussi une station d’enregistrement dans ma mairie depuis un certain temps, je remarque que les photos apportées par mes concitoyens ont quelquefois un paramétrage qui ne permet pas de scanner directement la photo.
Monsieur le ministre, je n’ai pas pris la décision d’imposer aux gens de venir avec une photo. Mais Mme André a raison de dire que nos collaborateurs rencontrent de graves difficultés pour prendre des photos, par exemple d’enfants en très bas âge, et que les photographes ont une meilleure pratique de cela.
Et je profite de l’occasion qui m’est donnée par cet amendement pour attirer votre attention sur le fait suivant : bien que les photographes professionnels aient un appareillage qui soit en parfaite adéquation avec les normes des stations d’enregistrement, près de 30 % de ces photos ne sont pas utilisables. C’est dire le désappointement de nos concitoyens lorsqu’ils ont payé 8 euros les photos ; le prix de ces dernières se situe en effet entre 8 et 10 euros, et c’est pourquoi l’amendement de Philippe Marini et de Michèle André était à peu près calé sur ce montant.
Le dysfonctionnement technique pose un véritable problème en ce qu’il fait perdre énormément de temps à nos collaborateurs. Je sais que, dans le département qui est le mien, le Val-de-Marne, beaucoup de mes collègues rencontrent exactement les mêmes difficultés. Je voudrais savoir s’il y a véritablement une inadéquation technique entre les stations d’enregistrement et les appareils des photographes qui sont normalement agréés et qui ont été fabriqués dans ce contexte.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. M. le ministre trouve que la réfaction de 10 euros est trop importante. La somme de 5 euros lui semblerait-elle convenable ? (Sourires. – M. le ministre fait un signe de dénégation.) Trois ?... Allons-y pour trois !
M. le président. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. Je ne sais pas si c’est bien l’endroit pour établir ce genre de troc ! Il me semble – et notre collègue Jean-Jacques Jégou vient de le dire – que le coût des photographies d’identité, maintenant numérisées, est plus élevé que vous ne l’indiquez, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général.
Ce dossier est tellement compliqué et fait tellement appel aux nouvelles technologies qu’il demande un peu de temps pour rentrer dedans. Les photographes négocient actuellement avec l’ANTS et le cabinet du ministre de l’intérieur un accord pour pratiquer une dématérialisation de l’envoi de la photo, ce qui supprimerait complètement tant le problème du temps perdu par nos collaborateurs pour prendre les photos que la question des renvois de photos non utilisables.
Monsieur le rapporteur général, nous devons rester convenables avec cette profession, et chiffrer de manière réaliste le prix de revient pour les photographes. Ces derniers y consacrent du temps, et ils ont adapté leur matériel.
Je considère qu’ils n’ont pas été concertés suffisamment au début de cette affaire pour que soit pris en compte leur travail. M. le ministre le sait bien puisque lui-même n’a pas activé les appareils photo dans sa mairie. Nombre de mairies ont fait de même, et quelques-uns de nos collègues ont déposé voilà quelques jours une proposition de loi pour que les appareils photos soient désactivés.
Si le système de numérisation en cours de négociation venait à fonctionner, le travail des employés municipaux serait largement amélioré. La photo arriverait parfaitement adaptée en numérique direct, avec un code. Il faut simplement que nous consultions la CNIL sur ce point, parce que nous sommes dans une difficulté liée à l’image. Mais cette photo doit être payée au moins 8 euros, car c’est ce qu’elle coûte réellement. Quand vous achetez une voiture, vous pouvez négocier un peu, certes, mais pas jusqu’à épuiser le fournisseur !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dans la période économique difficile que nous connaissons – nous avons entendu notamment notre collègue François Fortassin tout à l’heure, qui nous rappelait aux fondamentaux –, il faut avancer.
D’une part, les gros renouvellements de passeports biométriques sont intervenus, et les files d’attente dans nos mairies – nous pouvons en parler les uns et les autres en connaissance de cause – sont maintenant beaucoup moins importantes que voilà quelques mois ou que l’année dernière. La question s’est donc quantitativement dégonflée.
D’autre part, s’il faut maintenir la balance égale entre les modes de réalisation des photos, il ne faut pas non plus subventionner intégralement la réalisation de celles-ci. M. le ministre fait un effort important en multipliant par trois le ticket modérateur, et il serait donc sage d’en rester là. Nous demandions que la réduction soit portée de un à dix, et l’on nous accorde de un à trois : les sommes en jeu sont assez modestes, mais si l’on faisait pareil dans tous les domaines, ce ne serait pas si mal. Je rectifie donc l’amendement afin que les nouveaux montants soient respectivement portés à 86 euros, 42 euros et 17 euros.