M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la garde des sceaux, je veux bien que les magistrats ne soient pas des fonctionnaires comme les autres et qu’il faille prévoir une palette très large de mesures pour sanctionner d’éventuels manquements, mais d’autres hauts fonctionnaires peuvent aussi commettre des actes très graves dans l’exercice de leurs responsabilités, sans pour autant être exposés à la suspension de leurs droits à pension, sanction qui ne figure plus dans le code de la fonction publique. Dans ces conditions, il ne me paraît nullement légitime que la suspension des droits à pension puisse continuer à être applicable aux seuls magistrats.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 rectifié et 15 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Article 16
(Non modifié)
L’article 49 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 49. – Le conseil de discipline des magistrats du siège est composé conformément aux dispositions de l’article 65 de la Constitution et de l’article 14 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature. » – (Adopté.)
Article 17
L’article 50 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du premier alinéa, avant le mot : « peut » sont insérés les mots : « saisi d’une plainte ou informé de faits paraissant de nature à entraîner des poursuites disciplinaires, » ; le mot : « avis » est remplacé par le mot : « consultation » et après le mot : « enquête » sont ajoutés les mots : « administrative ou pénale » ;
2° La deuxième phrase du premier alinéa est remplacée par les dispositions suivantes :
« Les premiers présidents de cour d’appel ou les présidents de tribunal supérieur d’appel, informés de faits paraissant de nature à entraîner des poursuites disciplinaires contre un magistrat du siège, peuvent également, s’il y a urgence, saisir le Conseil supérieur aux mêmes fins. Ce dernier statue dans les quinze jours suivant sa saisine. » ;
3° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La décision d’interdiction temporaire, prise dans l’intérêt du service, ne peut être rendue publique ; elle ne comporte pas privation du droit au traitement. » ;
4° Au dernier alinéa, après le mot : « mois » sont ajoutés les mots : « suivant la notification de l’interdiction temporaire prononcée par le conseil de discipline » ; les mots : « par le garde des Sceaux, ministre de la justice, » sont supprimés et les mots : « à l’article 50-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles 50-1 et 50-2 ».
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Collombat, Frimat et Sueur, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. L’article 17, pour les magistrats du siège, et l’article 24, pour les magistrats du parquet, instaurent une procédure d’urgence d’interdiction temporaire d’exercice.
Ainsi, sur demande du garde des sceaux ou du chef de cour, et en cas d’impossibilité pour le Conseil supérieur de la magistrature de se réunir dans un délai de huit jours, le président de chaque formation du Conseil supérieur de la magistrature pourra prononcer, à titre conservatoire, une mesure d’interdiction temporaire « dans l’intérêt du service ». Cette interdiction devra ensuite être confirmée par la formation disciplinaire compétente dans un délai de quinze jours.
L’instauration d’une telle procédure d’urgence est extrêmement grave et ne paraît pas justifiée. En effet, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature a toujours statué dans des délais compatibles avec l’urgence de la situation.
Si l’on peut, dans l’attente de la décision au fond, envisager d’imposer un délai butoir à la formation disciplinaire pour prononcer une interdiction provisoire, confier au seul président de cette formation une telle prérogative apparaît tout à fait exorbitant du droit commun et dénué de tout fondement.
Par ailleurs, à ce stade de la procédure – que l’on pourrait qualifier d’infraprocédural –, le texte ne prévoit aucune garantie pour le magistrat concerné, qui n’a pas encore accès à son dossier disciplinaire et ne peut donc se défendre valablement ni présenter ses observations.
Enfin, une fois cette décision prise, il sera difficile pour la formation disciplinaire concernée de désavouer son président en ne maintenant pas l’interdiction provisoire. C’est donc une espèce de « prédécision définitive » qui est prononcée par ce dernier.
Pour ces raisons, nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. L’argumentation de M. Michel me semble porter plutôt sur la rédaction initiale des articles 17 et 24, qui a été largement modifiée par la commission.
En effet, la commission a supprimé cette sorte de procédure de référé qui attribuait un pouvoir exorbitant au Premier président de la Cour de cassation, pour les magistrats du siège, et au procureur général près la Cour de cassation, pour les magistrats du parquet, avec le risque de mettre ces personnalités en situation difficile si elles devaient être désavouées ultérieurement par le Conseil supérieur de la magistrature.
La commission a donc supprimé cette procédure et simplifié quelque peu le dispositif du projet de loi organique. Il n’en demeure pas moins qu’il existe bien des situations d’urgence, où il faut agir dans les meilleurs délais. Certes, les chefs de cour disposent sans doute de moyens leur permettant d’écarter rapidement de ses fonctions juridictionnelles un magistrat soupçonné d’agissements particulièrement graves, mais il ne peut s’agir que d’une mesure de courte durée.
Le maintien de la procédure d’interdiction temporaire d’exercice est donc nécessaire. Le Conseil supérieur de la magistrature doit pouvoir se réunir dans des délais très brefs et être en mesure de s’organiser pour intervenir rapidement, y compris en plein mois d’août, par exemple dans les dix jours ouvrables.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je suis défavorable à cet amendement.
Des mesures similaires existent dans l’ensemble des corps de l’État et elles répondent à une nécessité, comme l’a rappelé M. le rapporteur.
En outre, la commission a modifié la rédaction initiale de l’article 17 dans un sens qui me semble de nature à apaiser les craintes exprimées par M. Michel, que j’invite donc à retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Michel, l’amendement n° 16 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Michel. Dans la mesure où Mme le garde des sceaux se rallie à la position de la commission, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 16 est retiré.
L'amendement n° 30 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 4, seconde phrase
Remplacer les mots :
quinze jours
par les mots :
dix jours ouvrables
La parole est à Mme le ministre d'État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Cet amendement est le fruit d’un travail commun avec la commission.
Aujourd’hui, les délais de prononcé de l’interdiction temporaire d’exercice sont le plus souvent supérieurs à quarante-cinq jours, ce qui n’a pas de sens.
Le Gouvernement a pris acte du souhait de la commission de ne pas retenir le dispositif permettant au Premier président de la Cour de cassation de prendre seul une décision d’interdiction temporaire d’exercice. Il faut laisser au Conseil supérieur de la magistrature un délai suffisant pour se réunir et examiner le dossier qui lui est soumis. Le fixer à dix jours ouvrables, quelle que soit la période de l’année, paraît raisonnable. Cela devrait permettre de donner au CSM le temps d’organiser l’audience tout en assurant la célérité indispensable compte tenu de la situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Nous sommes parvenus à un bon accord, et la commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Article 18
Après l’article 50-2 de la même ordonnance, il est inséré un article 50-3 ainsi rédigé :
« Art. 50-3. – Tout justiciable qui estime qu’à l’occasion d’une procédure judiciaire le concernant, le comportement adopté par un magistrat du siège dans l’exercice de ses fonctions est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire, peut saisir le Conseil supérieur de la magistrature. La saisine du Conseil supérieur de la magistrature ne constitue pas une cause de récusation du magistrat.
« La plainte est d’abord examinée par une commission des requêtes composée dans les conditions prévues par l’article 18 de la loi organique sur le Conseil supérieur de la magistrature.
« À peine d'irrecevabilité, la plainte ne peut être dirigée contre un magistrat qui demeure saisi de la procédure, sauf si les manquements évoqués et la nature de la procédure considérée le justifient. La plainte ne peut être présentée après l’expiration d’un délai d’un an suivant une décision irrévocable mettant fin à la procédure.
« La plainte doit contenir l'indication détaillée des faits et griefs allégués. Elle doit être signée par le plaignant et indiquer son identité et son adresse, ainsi que les éléments permettant d'identifier la procédure en cause.
« Le président de la commission des requêtes peut rejeter les plaintes manifestement abusives ou irrecevables.
« Lorsque la commission des requêtes du Conseil supérieur n’a pas déclaré la plainte irrecevable ou manifestement infondée, elle en informe le magistrat mis en cause. Elle sollicite du premier président de la cour d’appel ou du président du tribunal supérieur d’appel dont dépend le magistrat mis en cause ses observations et tous éléments d’informations utiles. Le premier président de la cour d’appel ou le président du tribunal supérieur d’appel invite le magistrat à lui adresser ses observations. Dans le délai de deux mois de la demande qui lui en est faite par la commission des requêtes du Conseil supérieur, le premier président de la cour d’appel ou le président du tribunal supérieur d’appel adresse l’ensemble de ces informations et observations au Conseil supérieur de la magistrature, ainsi qu’au garde des Sceaux, ministre de la justice.
« La commission des requêtes peut entendre le magistrat mis en cause.
« Lorsqu’elle estime que les faits sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, la commission des requêtes du Conseil supérieur renvoie l’examen de la plainte à la formation compétente pour la discipline des magistrats du siège.
« En cas de rejet de la plainte, les autorités mentionnées aux articles 50-1 et 50-2 conservent la faculté de saisir le Conseil supérieur de la magistrature des faits dénoncés.
« Le magistrat visé par la plainte, le justiciable, le chef de cour visé au sixième alinéa et le garde des Sceaux, ministre de la justice, sont avisés du rejet de la plainte ou de la poursuite de la procédure disciplinaire.
« La décision de rejet n’est susceptible d’aucun recours. »
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Collombat, Frimat et Sueur, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
judiciaire
insérer les mots :
devenue définitive
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Je ne suis pas certain de la qualité de cet amendement, dont l’objet est plutôt d’ouvrir un débat.
Dans mon intervention liminaire, j’ai souligné les difficultés inhérentes à la saisine du Conseil supérieur de la magistrature par le justiciable. L’une d’elles tient à la définition du moment auquel le CSM pourra être saisi sans déstabiliser le magistrat ni l’institution judiciaire.
Il faut, nous dit-on, attendre que le magistrat ne soit plus chargé de l’affaire. Cela peut aisément se concevoir pour un juge d’instruction ou pour un magistrat d’un tribunal correctionnel, mais plus difficilement pour un juge des enfants, qui suit le jeune faisant l’objet de mesures d’assistance éducative jusqu’à son vingt-et-unième anniversaire, ou pour un juge des tutelles, qui est chargé d’un dossier pendant toute la durée de la tutelle. Et je ne parle pas des magistrats du parquet !
La situation ne me semble donc pas très satisfaisante. De surcroît, l’autorité de nomination peut avoir la tentation d’affecter à une autre juridiction, contre son gré, un magistrat du parquet contre lequel une saisine est en cours, afin que celle-ci puisse s’exercer.
Pour remédier à ces difficultés, nous proposons que la saisine du Conseil supérieur de la magistrature par le justiciable ne puisse intervenir qu’après que la décision est devenue définitive. Je n’ignore pas que l’attente peut être très longue, mais il s’agit d’une échéance juridique bien définie. J’ajoute que, si la situation l’exige, un magistrat peut aussi être sanctionné par le biais de la procédure disciplinaire normale, par le garde des sceaux ou par les chefs de cour. Certes, ces derniers ne s’engagent pas volontiers dans cette voie, parce qu’ils risquent de se trouver placés en position d’être juges et parties et qu’ils ont intérêt à ce que leur cour fonctionne le plus harmonieusement possible. Il est donc en fait très rare que des procédures disciplinaires soient mises en œuvre directement par des chefs de cour.
Enfin, lorsque le cas le justifie, il est aussi possible de recourir à la procédure pénale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement se rapproche du texte initial du projet de loi organique. Fort curieusement – et je tiens à leur rendre hommage –, ce sont les organisations représentatives des magistrats qui ont attiré mon attention sur le caractère inégalitaire du dispositif.
En effet, alors que la plupart des magistrats cessent d’être saisis d’une affaire au terme d’un délai convenable, d’autres, en particulier les juges des tutelles ou les juges des enfants, qui assurent le suivi de mesures éducatives, traitent des dossiers au très long cours.
La commission a donc souhaité rétablir l’égalité entre tous les magistrats. À cette fin, elle a élaboré un texte prévoyant que le Conseil supérieur de la magistrature ne pourra être saisi par un justiciable si le magistrat en cause demeure chargé de la procédure, sauf si les manquements évoqués et la nature de la procédure le justifient. J’ajoute que la commission a adopté hier un amendement visant à préciser davantage encore ce dispositif, pour assurer la sérénité de la justice.
La commission souhaite maintenir une marge d’action utile pour le justiciable. Ce sera vraisemblablement une source de plaintes assez importante, en particulier en matière de tutelles, mais je considère qu’il ne serait pas satisfaisant de priver le justiciable de toute possibilité de saisine et de l’inviter à s’adresser au garde des sceaux ou au chef de cour, comme si la réforme n’existait pas.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je suis également défavorable à cet amendement, pour les mêmes raisons que M. le rapporteur.
Lorsqu’une décision devient définitive dans des temps raisonnables, le dispositif s’applique normalement, mais nous devons tenir compte de l’existence de procédures très longues. De ce point de vue, l’amendement est trop restrictif. Mais peut-être ses auteurs n’ont-ils pas perçu les difficultés qui pourraient résulter de son adoption. Dans un souci de pragmatisme, j’invite M. Michel à bien vouloir le retirer.
M. le président. Monsieur Michel, l’amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Michel. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Michel, Mme Klès, MM. Collombat, Frimat et Sueur, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
siège
insérer les mots :
, à l'exclusion des actes juridictionnels,
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement, comme le précédent, vise à mettre en exergue une difficulté.
La saisine du CSM par le justiciable doit concerner uniquement le comportement du magistrat. Cela étant, entraînés par une certaine presse, nos concitoyens risquent de penser qu’ils pourront saisir le Conseil supérieur de la magistrature dès que la décision d’un magistrat leur déplaira.
Or, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, les décisions des magistrats ne sont pas faites pour plaire. En matière civile, il y a toujours une des deux parties qui est déçue ; en matière pénale, à moins que le magistrat ne prononce la relaxe ou l’acquittement, le prévenu est forcément plus ou moins déçu de la décision qui est rendue.
C’est bien le « comportement » du magistrat qui est visé. Il peut s’agir d’une attitude injurieuse ou déplacée, bien entendu, mais le fait qu’un magistrat s’abstienne d’accomplir tel ou tel acte peut-il être considéré comme un comportement susceptible de recevoir une qualification disciplinaire ? Nous pensons que non. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’exclure les actes juridictionnels.
J’ajoute que cette disposition relative au comportement des magistrats devrait avoir une portée éducative, car certains d’entre eux – j’en ai connu –, notamment des présidents de tribunal correctionnel, croyant faire de l’humour, tiennent des propos totalement déplacés à l’audience. J’ai également entendu des juges des enfants se livrer à des écarts de langage à l’égard de parents d’enfants délinquants ou faisant l’objet d’une mesure d’assistance éducative. De tels comportements n’honorent pas l’institution judiciaire, et j’estime qu’il convient de faire comprendre aux magistrats qu’ils doivent s’en abstenir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission des lois a précisé, à l’article 14 bis, la définition de la faute disciplinaire, en reprenant une jurisprudence bien établie du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil d’État, confirmée en outre par le Conseil constitutionnel.
Ainsi, le Conseil supérieur de la magistrature ne pourra être saisi par un justiciable que si le comportement du magistrat mis en cause est susceptible de constituer une faute disciplinaire.
Les actes juridictionnels sont donc exclus de ce champ, monsieur Michel. Le Conseil supérieur de la magistrature ne pourra en connaître, sauf si le magistrat a violé de façon grave et délibérée des règles de procédure, de sorte qu’il a outrepassé ses fonctions et n’a plus que l’apparence d’un magistrat.
Dans ce cas, conformément à la jurisprudence précitée, le Conseil supérieur de la magistrature ne pourra être saisi que si une décision de justice devenue définitive a constaté la violation commise par le magistrat.
L’amendement paraît donc largement satisfait par l’article 14 bis. D’ailleurs, lors d’une récente émission de télévision, le président de l’Union syndicale des magistrats et la présidente du Syndicat de la magistrature ont déclaré qu’ils étaient totalement d’accord avec la rédaction de la commission des lois sur ce point.
En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. Jean-Pierre Michel. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 18 est retiré.
L'amendement n° 31 rectifié bis, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Remplacer les mots :
commission des requêtes composée
par les mots :
commission d'admission des requêtes composée de membres de la formation compétente à l'égard des magistrats du siège,
II. - Alinéa 6, alinéa 7, première et dernière phrases, alinéas 8 et 9
Remplacer les mots :
commission des requêtes
par les mots :
commission d'admission des requêtes
La parole est à Mme le ministre d'État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Il s’agit d’un amendement de coordination rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Favorable.
M. le président. L'amendement n° 40 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
À la fin de cette phrase, remplacer les mots :
sauf si les manquements évoqués et la nature de la procédure considérée le justifient
par les mots :
sauf si, compte tenu de la nature de la procédure et de la gravité des manquements évoqués, la commission d’admission des requêtes estime qu'elle doit faire l'objet d'un examen au fond
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement vise à préciser les conditions dans lesquelles la plainte d'un justiciable pourra viser un magistrat qui demeure saisi de la procédure.
Il ne s'agit en aucun cas de permettre à un justiciable de déstabiliser le magistrat ; il s’agit seulement d'assurer l'égalité des justiciables dans l’exercice de leur droit de saisir le Conseil supérieur de la magistrature.
Par exemple, un juge des tutelles ou un juge des enfants restent saisis des mêmes procédures pendant des années. Il ne serait pas acceptable, dans de telles situations, de contraindre le justiciable à attendre la fin de la procédure pour dénoncer auprès du CSM le comportement d'un magistrat qui constituerait une faute. Dans de tels cas, parce que la procédure est d'une durée indéfinie et lorsque les faits sont suffisamment graves, il faut que le justiciable ait le moyen de faire cesser le comportement fautif.
Afin de préciser le dispositif retenu par la commission, le présent amendement tend à prévoir que si le magistrat demeure saisi de la procédure, la commission d’admission des requêtes ne pourra engager un examen au fond de la plainte, c’est-à-dire vérifier l'éventuelle qualification disciplinaire des faits, que si la nature de la procédure – il doit s'agir, par exemple, d'une procédure de tutelle ou de mesures éducatives, dont le magistrat reste saisi pendant de longues années – et la gravité des manquements évoqués le justifient. Si ces conditions sont remplies, la commission d’admission des requêtes pourra, par exception, admettre la recevabilité de la plainte et déterminer si les faits dénoncés sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire.
L'appréciation de la commission d’admission des requêtes devra se fonder d'abord sur la nature de la procédure, puis sur les manquements évoqués. Il s'agit seulement de permettre que la plainte puisse passer la première étape de la recevabilité, pour que la commission d’admission des requêtes examine ensuite si les faits dénoncés sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, ce qui ouvrirait sur la troisième étape, à savoir la saisine de la formation disciplinaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Le Gouvernement partage totalement l’avis de la commission : il convient de prévenir les risques de déstabilisation des magistrats, tout en rendant effectif ce nouveau droit des citoyens, dans des conditions qui soient le plus égalitaires possible.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Notre proposition déplaît fortement à Mme la garde des sceaux, je ne l’ignore pas. Je persiste néanmoins à penser qu’accorder la possibilité au garde des sceaux et aux chefs de cour de saisir le Conseil supérieur de la magistrature des faits dénoncés après que la commission d’admission des requêtes aura rejeté la plainte pose problème.
On nous a expliqué tout à l’heure que lorsque la commission d’admission des requêtes aura un doute, la plainte sera tout de même transmise. Mais, en l’espèce, nous nous trouvons dans le cas où ladite commission aura jugé la plainte irrecevable : l’exécutif aura alors la faculté de saisir néanmoins le Conseil supérieur de la magistrature. Cela signifie donc que le pouvoir politique pourra décider de continuer la procédure, en fonction des circonstances et sans doute sous la pression de l’opinion publique…
Cela témoigne d’un manque de respect à l’égard des magistrats et de la procédure que le constituant a voulu instituer en faveur des justiciables. S’agit-il en fait de prévoir une voie de recours pour ces derniers ? Si tel est le cas, il faut le dire clairement, mais en tout état de cause cette immixtion de l’exécutif me paraît peu opportune.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Ouvrir au justiciable la possibilité de saisir le Conseil supérieur de la magistrature ne signifie pas que l’on doive la retirer au garde des sceaux ou aux chefs de cour !
En outre, la possibilité, pour le garde des sceaux ou les chefs de cour, de saisir le Conseil supérieur de la magistrature alors que la commission d’admission des requêtes aurait rejeté la plainte d’un justiciable peut constituer une forme de droit d’appel. Au fil du temps et, le cas échéant, après une enquête administrative de l’Inspection générale des services judiciaires, des informations complémentaires peuvent apparaître, justifiant une nouvelle saisine du Conseil supérieur de la magistrature.
Aussi semble-t-il préférable de maintenir cette possibilité de saisine par le garde des sceaux ou les chefs de cour. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?