M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote sur l'amendement n° 85.
M. Hervé Maurey. Je souhaiterais profiter de cette explication de vote pour répondre à certains propos tenus notamment par M. Fortassin et Mme Khiari qui m’ont paru erronés, excessifs, voire caricaturaux.
Ainsi, on nous a expliqué que les Américains, les Japonais, les Chinois, etc., ne venaient pas à Paris pour faire du shopping. Peut-être est-ce le cas, même si l’on sait que le shopping tend de plus en plus à être une motivation touristique et que les grands magasins sont aujourd’hui plus visités que certains monuments ; ce ne sont pas les sénateurs de Paris, de gauche comme de droite, qui me démentiront. Cela dit, si ces touristes trouvent les magasins fermés, ils ne feront pas d’achats ; ils n’attendront pas que les magasins ouvrent le lundi.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ont le samedi, pour faire des courses !
M. Hervé Maurey. En revanche, si les grands magasins sont ouverts le dimanche, ils consommeront, ce qui sera incontestablement bon pour le commerce, pour l’emploi et pour le pouvoir d’achat des salariés.
Comme M. le ministre ce matin, je me permettrai de prendre un exemple personnel. Voilà quelques mois, je me suis rendu à Rome avec mes enfants. Je n’y étais pas allé pour faire du shopping…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Heureusement !
M. Hervé Maurey. … mais pour visiter les musées, le Vatican, etc.
Nous avons cependant été très heureux de trouver des magasins ouverts le dimanche, puisque, à Rome, ville catholique, les magasins sont ouverts le dimanche !
M. Hervé Maurey. Pour tout vous dire, mes chers collègues, mes enfants, adolescents, ont été très heureux de faire du shopping. J’imagine que réciproquement des touristes, y compris des Romains, venant visiter Paris seront très heureux d’y faire des achats.
En outre, je vous rassure, je n’ai acheté ni tondeuse à gazon ni canapé… (Sourires.) Je dis cela pour montrer à quel point vos propos sont caricaturaux, mes chers collègues de gauche, et combien certains d’entre vous méconnaissent dramatiquement les réalités économiques. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Applaudissements sur les travées de l’UMP.) D’un certain point de vue, cela me rassure. Il y a encore des différences entre la droite et la gauche : d’un côté, on est conscient des réalités économiques tandis que de l’autre on vit sur une autre planète. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 17.
M. Jean Desessard. Mme le rapporteur a émis un avis défavorable sur cet amendement, au motif qu’il serait inutile de préciser les saisons touristiques puisque, comme l’a dit M. Fourcade, en l’absence d’acheteurs, les magasins fermeront. Je ne sais pas si c’est la droite ou la gauche qui a du mal à comprendre les réalités économiques mais on ne vend pas que des objets touristiques dans les zones touristiques. L’ensemble des magasins sont concernés.
Or que va-t-il se passer ? Un magasin pourra décider, pour amortir frais et investissements, d’ouvrir le dimanche, en dehors de la saison touristique. Même s’il n’y a pas plus d’argent à dépenser, il y a potentiellement des acheteurs le dimanche. Ouvrant, lui seul, le dimanche, ce magasin va attirer une clientèle ce jour-là. Dès lors, il réalisera davantage de bénéfices.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Eh bien, c’est très bien !
M. Jean Desessard. Que vont faire les autres magasins ? Ils vont se dire qu’ils sont obligés eux aussi d’ouvrir le dimanche.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Eh bien, ils le feront !
M. Jean Desessard. À la fin, ils ouvriront tous, alors qu’il n’y a pas plus d’argent pour consommer. Ainsi, même en dehors de la saison touristique, l’ensemble des magasins seront ouverts le dimanche… pour rien ! Tout cela parce que l’un d’entre eux aura pris l’initiative d’ouvrir le dimanche, qu’il aura réalisé des bénéfices et que les autres se seront trouvés obligés de s’aligner.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. N’importe quoi !
M. Jean Desessard. Cela s’appelle le capitalisme !
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote sur l'amendement n° 17.
M. Dominique Braye. Je ne voterai aucun des amendements en discussion et, après les engagements qu’a pris M. le ministre, je souhaite que Philippe Dominati retire les siens.
Je ne voterai donc pas les amendements déposés par nos collègues de gauche tout simplement parce qu’ils manifestent – je n’ai rien à ajouter à ce que vient de dire notre collègue Maurey – une totale méconnaissance de ce qu’est le commerce.
Je le dis notamment à la lumière de la dernière explication de vote de M. Desessard.
N’oubliez jamais que, dans les communes touristiques, un grand nombre de petits commerçants et de salariés ne gagnent leur vie qu’en travaillant sept jours sur sept, pendant une période limitée. Cela leur permet d’avoir des revenus suffisants pour vivre le reste de l’année car, naturellement, dans une station de ski, on travaille moins l’été, sinon pas du tout ; à l’inverse, dans certaines stations balnéaires, on travaille moins, sinon pas du tout, l’hiver.
Messieurs Jeannerot et Desessard, quoique parisiens, vous connaissez tout de même Deauville et Trouville ! Renseignez-vous pour connaître les sommes dépensées le week-end dans ces deux communes pendant l’hiver : elles sont bien supérieures à toutes les sommes dépensées pendant la semaine ! Comment les commerçants de ces villes ne travailleraient-ils pas le dimanche s’ils veulent faire vivre leurs salariés et leurs entreprises ?
Je le répète, vous faites preuve d’une méconnaissance absolument totale de ce qu’est le commerce !
Mme Raymonde Le Texier. Arrêtez ! C’est insupportable !
M. Dominique Braye. Notre collègue Maurey parlait de son voyage à Rome, mais regardez donc le nombre de Parisiens qui prennent l’Eurostar pour se rendre à Londres les jours de soldes et n’y faire que du tourisme commercial : il est considérable ! Alors, de grâce, atterrissez un peu ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Tenez compte des réalités du commerce et de ceux qui vivent du travail le dimanche, surtout des plus modestes !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 18 rectifié.
M. Jean Desessard. Mme le rapporteur, que je remercie d’avoir argumenté point par point lorsqu’elle a donné l’avis de la commission sur les amendements, a affirmé que seules 500 communes étaient concernées dans les zones touristiques…
M. Dominique Braye. Il n’a encore rien compris ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Annie David. Laissez-le parler !
M. le président. La parole est à M. Desessard. Monsieur Braye, vous avez été parfait pendant une heure, persévérez donc dans la perfection ! (Sourires.)
Veuillez poursuivre, monsieur Desessard.
M. Dominique Braye. Je n’entends que des bêtises !
M. le président. Monsieur Braye, je pourrai vous donner la parole pour explication de vote tout à l'heure, mais vous ne pouvez bénéficier d’un règlement spécifique. Je vous demande donc de bien vouloir laisser poursuivre M. Desessard, qui aura, pour sa part, la gentillesse de ne pas vous provoquer. Le débat y gagnera en sérénité.
Veuillez donc poursuivre, monsieur Desessard, sans vous interrompre.
M. Jean Desessard. Je voudrais rappeler à M. Braye que je ne suis pas du même parti que lui et que je ne défends pas les mêmes idées que lui.
M. Dominique Braye. Heureusement !
M. Jean Desessard. Si les idées que je défends ne sont pas appréciées par M. Braye, c’est normal, nous sommes élus par des électeurs différents !
Vous avez la majorité, je le reconnais ; vous allez nous conduire dans le mur, j’en ai conscience. J’aurais effectivement préféré que nous votions contre cette proposition de loi, mais je me soumettrai au vote final.
M. Gérard Longuet. Merci !
M. Jean Desessard. Cela étant, malgré tout, dans cette assemblée, nous avons encore le droit de nous exprimer ! D'ailleurs, c’est bien le seul droit que nous ayons puisqu’un vote conforme nous est, une fois de plus, imposé.
J’ai posé une question à Mme le rapporteur et à M. le ministre, mais ils ne m’ont pas répondu.
M. Jean Desessard. Pourquoi La Défense est-elle classée zone touristique ? C’est sans doute un détail pour vous, mais, si l’on peut dire aujourd’hui que La Défense est une zone touristique, rien n’empêchera demain que de multiples villes soient également classées ainsi !
Le fait que La Défense soit classée aujourd’hui zone touristique est une aberration, tout le monde le comprend. (Protestations sur les travées de l’UMP.) Il y a donc une anomalie.
M. Alain Gournac. Pas du tout !
M. Jean Desessard. Comme vous ne répondez pas, vous laissez entendre que cette anomalie est normale et peut donc se reproduire…
Donnez-nous au moins une explication plausible sur le fait que La Défense ait été classée, en janvier 2009, zone touristique !
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Je ne discute nullement les idées de M. Desessard – tout le monde a le droit d’avoir des idées ! Simplement, sur cette question de l’intérêt touristique, j’ai calculé que M. le ministre lui avait déjà répondu seize fois…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le ministre peut se défendre tout seul !
M. Dominique Braye. … et Mme le rapporteur, quatorze fois !
M. Jean Desessard. Pas sur La Défense !
M. Dominique Braye. Tout le monde a le droit de s’exprimer mais, si vous êtes malentendant, cher collègue, il faut vous faire appareiller ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Arrêtez !
M. le président. Mes chers collègues, dans le calme retrouvé, la parole est à M. le ministre.
M. Xavier Darcos, ministre. Monsieur Desessard, l’attractivité touristique du site de La Défense n’est pas discutable. (Exclamations sceptiques sur les travées du groupe socialiste.)
Le texte définissant une commune touristique impose un rapport entre la population permanente, la population saisonnière, le nombre d’hôtels, de gîtes, de camping, de lits, de places, et j’en passe.
Je vous donne les chiffres concernant La Défense. La Grande Arche reçoit, à elle seule, 250 000 visiteurs par an.
Mme Isabelle Pasquet. Et combien de salariés ?
M. Xavier Darcos, ministre. On y dénombre 2,6 millions de visiteurs occasionnels chaque année, 2 600 chambres d’hôtel, 50 terrasses de cafés et de restaurants, 20 000 habitants dans plus de 600 000 mètres carrés de logement, 60 sculptures monumentales d’art contemporain et le plus important nœud de transport d’Île-de-France.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En voilà, une preuve !
M. Nicolas About. Mais allez sur place, et vous verrez !
M. Xavier Darcos, ministre. Cette commune correspond donc tout à fait aux critères définis. (Bravo ! sur les travées de l’UMP.) Monsieur Desessard, je vous conseille de monter sur le toit de la Grande Arche, car ce monument se visite, et d’aller y respirer un peu d’air pur. Je suis sûr que vous en ressortirez rasséréné ! (Sourires.)
M. Dominique Braye. Il faut sortir le dimanche !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est lamentable !
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour explication de vote sur l'amendement n° 136 rectifié. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.)
M. Jean Desessard. Si cela ne vous plaît pas, vous pouvez partir !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. J’ai été très sensible à l’inquiétude de mon collègue François Fortassin, qui a constaté dans le tableau constituant l’annexe 1 du rapport que le département des Hautes-Pyrénées ne comportait aucune commune classée touristique.
J’ai donc téléphoné au directeur du comité départemental du tourisme de mon département, les Pyrénées-Atlantiques, pour confirmer le chiffre de 65 communes classées touristiques figurant dans le tableau. À ma grande surprise, mon interlocuteur m’a appris qu’il n’y en avait que 15.
De même, il paraît étrange que la Corse, toujours selon le même tableau, ne compte aucune commune classée touristique…
Il me semble pourtant indispensable que nous puissions évaluer les retombées de ce texte à partir de données initiales fiables.
Dans le même souci de pragmatisme, je souhaitais aussi obtenir des précisions concernant quatre communes classées touristiques de mon département, à savoir Pau, Bayonne, Anglet et Biarritz. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Xavier Darcos, ministre. Les explications de vote, ce ne sont pas les questions au Gouvernement !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le ministre, les commerces seront-ils ouverts tous les dimanches, toute l’année ? Quel sera le rôle des élus dans l’aménagement du territoire et dans la dynamique commerciale de leur commune ?
Enfin, comme l’a signalé mon collègue Jean-Jacques Mirassou, si la France est le premier pays touristique du monde, l’Espagne n’est pas en reste dans ce domaine. Pourtant, dans les provinces frontalières d’Euskadi, les régions autonomes de Guipúzcoa et d’Àlava, la législation est plus restrictive qu’en France puisque les commerces sont fermés du samedi, à quatorze heures, au lundi, à neuf heures. Seules les petites boutiques frontalières ouvrent le dimanche.
Ces pratiques ne sont pourtant pas préjudiciables au tourisme en Espagne. D’ailleurs, les Espagnols sont très soucieux de préserver leur repos dominical.
Les deux pays, dont le tourisme représente une part importante des ressources tant au niveau financier qu’en termes d’emploi – je suis d’accord avec M. Fourcade sur ce point –, n’ont jamais été mis à mal par la fermeture des commerces le dimanche.
En aucun cas le travail sept jours sur sept n’est de nature à donner le moindre coup de pouce à la croissance, comme l’a confirmé Mme Parisot en juillet dernier.
M. Jean Desessard. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote sur l'amendement n° 19.
Mme Bariza Khiari. Je profite de cette explication de vote pour répondre à Hervé Maurey, avec la courtoisie qui s’impose, puisque notre collègue a entrepris d’animer le centre de cet hémicycle. (Sourires.)
J’ai dit que les touristes venaient d’abord en France pour notre art de vivre, notre gastronomie et notre patrimoine architectural, culturel et naturel ; qu’ils ont déjà la possibilité d’acheter le lundi, le mardi (Protestations sur les travées de l’UMP), le mercredi, le jeudi, le vendredi et le samedi, ainsi que le dimanche dans les zones où s’appliquent déjà des dérogations ; que, de surcroît, avec la mondialisation des échanges qui conduit à l’uniformisation, ils trouvent souvent les mêmes produits chez eux. (Protestations renouvelées sur les mêmes travées.)
M. Alain Gournac. Ce sont des copies !
Mme Bariza Khiari. Bref, je le répète, les touristes ne sont pas des obsédés ou des addicts du shopping le dimanche parce que, le dimanche, nous avons mieux à leur proposer !
Pour en revenir plus précisément à l’amendement n° 19, l’avis défavorable donné tant par la commission que par le Gouvernement en dit long sur la volonté de maintenir le flou sur le périmètre des zones touristiques.
Madame le rapporteur, monsieur le ministre, vous aviez la possibilité de faire le choix d’une notion claire, celle de « station classée de tourisme ». Mais cette notion, de votre propre aveu, madame le rapporteur, est trop claire pour vous.
Vous le savez, du fait des avantages fiscaux qui s’attachent pour une commune à la qualité « classée de tourisme », la procédure de classement est extrêmement rigoureuse. L’instruction des dossiers se faisait encore très récemment en Conseil d’État. C’est dire que ce n’est pas à géométrie variable !
Votre refus de cet amendement marque une volonté pas même voilée de généraliser le travail dominical sur l’ensemble du territoire. C’est bien la preuve que vous voulez instaurer une catégorie à géométrie variable liée au poids des lobbies des grandes surfaces. Le préfet sera le bras armé d’une politique destinée à satisfaire les théologiens du marché ! (M. le ministre proteste.)
Enfin, je tiens à souligner que la régression démocratique qui s’abat sur la capitale est particulièrement choquante.
Comme tous les élus parisiens, je suis attachée au statut de droit commun de la capitale. Or la rédaction proposée pour le deuxième alinéa de l’article L. 3132-25 du code du travail bouleverse une situation équilibrée, puisque la liste des communes touristiques et le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle seront établis désormais par le préfet.
Cette mesure est particulièrement discriminatoire et méprisante envers les élus parisiens de tous bords, qu’elle met sous tutelle du préfet pour une disposition qui relève de la compétence des élus partout ailleurs en France.
C’est une disposition vexatoire et incompréhensible pour tous les élus parisiens quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent ici.
Cet affront méritait réparation dans l’hémicycle et dans la loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 52 et 90.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 50 et 95.
Mme Raymonde Le Texier. Je tiens à dire quelques mots sur le principe du volontariat.
Il aura fallu attendre la quatrième version de ce texte, que vous présentez une nouvelle fois devant le Parlement, de déconvenue en échec, de recul en passage en force, pour y voir apparaître les termes « salariés volontaires ». L’annoncer dès le titre, c’est ce que l’on appelle « déminer » le terrain !
Tout cela est tellement ambigu que M. Mallié, qui est censé être l’auteur de ce texte,…
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il en est le véritable auteur !
Mme Raymonde Le Texier. … lorsqu’il a été auditionné en tant que tel à l’Assemblée nationale, n’a pas hésité à parler de « volontariat obligatoire ». (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Très fort !
Mme Raymonde Le Texier. Si ce n’est pas freudien…
Que les Français n’aillent pas croire que, en matière de travail dominical, ils auront le choix ! Seuls les travailleurs des PUCE, ces grands complexes commerciaux à la périphérie de Paris, Marseille et Lille, pourront « officiellement » refuser.
Officieusement, en pratique, dans la vraie vie, ils n’auront pas plus le choix que tous les autres travailleurs des villes touristiques – c’est-à-dire toutes les grandes villes de France –, toutes les zones où le travail le dimanche, devenant de droit, devient également obligatoire !
Pourtant, je lis au II de l’article 2 que « Le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. » Mais, là encore, dans la vraie vie, cela ne se passe pas comme cela !
Voilà quelques jours à peine, trois salariés de l’enseigne ED, à Oyonnax, dans l’Ain, ont été licenciés pour avoir seulement refusé de travailler le dimanche. Ces salariés ont confirmé à plusieurs reprises qu’ils refusaient de travailler le dimanche ; on les a tout de même inscrits dans le planning des dimanches, ils ne sont pas venus, et on les a licenciés !
L’une des personnes licenciées a 45 ans. Elle était caissière depuis cinq ans dans ce commerce où elle travaillait déjà tous les samedis, de neuf heures à dix-neuf heures quarante-cinq. (Exclamations impatientes sur les travées de l’UMP.)
Elle a expliqué pourquoi elle refusait de travailler le dimanche : c’est édifiant ! (Protestations sur les mêmes travées.)
Mme Annie David. Quand on parle des gens, cela vous dérange !
Mme Raymonde Le Texier. Dans les commerces alimentaires, mes chers collègues, le bonus pour travail le dimanche n’est que de 20 %. Cette femme aurait donc bénéficié d’une prime de 5,03 euros par dimanche travaillé ! Convoquée par son employeur, elle lui a dit : « Ma vie de famille pour 5 euros ? Je ne peux pas ! » L’employeur lui a alors rétorqué : « On ne fait pas dans le social, cela se fera, avec ou sans vous ».
Le voilà, sans fard et sans masque, le monde que vous nous préparez avec cette proposition de loi.
Pour plagier notre collègue Hervé Maurey, je dirai qu’il y a sur les travées de droite de cette assemblée une totale méconnaissance des problèmes que rencontrent les salariés, notamment ceux du commerce, singulièrement les plus modestes.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous invite à voter ces amendements. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Hervé Maurey. Vous n’avez pas le monopole du cœur ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. À mon tour, je tiens à témoigner – brièvement, car chacun pourrait raconter son histoire – de ce qui se passe chez moi.
Le magasin Leroy Merlin de ma commune – 16 000 mètres carrés – a voté à 98 % pour le travail le dimanche alors que 52 % seulement des salariés sont prêts à travailler ce jour-là. En d’autres termes, ceux qui ne veulent pas travailler le dimanche ont considéré qu’ils n’avaient pas le droit de l’interdire aux autres.
Mme Raymonde Le Texier. Donnez-leur un salaire décent et ils ne travailleront pas le dimanche !
M. Dominique Braye. Les salariés de ce magasin – ils sont une centaine – ont voté à 98 % pour le travail le dimanche, ce qui fait d’ailleurs la joie des étudiants. En effet, le directeur m’a indiqué qu’il était meilleur d’avoir dans son magasin le dimanche pour moitié des salariés habituels et pour moitié des étudiants.
Madame Le Texier, vous apportez, là encore, la preuve de votre totale méconnaissance des métiers du commerce ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 50 et 95.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 53 et 91.
Mme Marie-France Beaufils. Puisque s’amorce malgré tout un début de débat, je souhaite à mon tour revenir sur les conditions dans lesquelles les salariés seront amenés à travailler le dimanche aux termes de cette proposition de loi, en particulier en ce qui concerne leur rémunération.
J’ai bien écouté M. Braye. Je pourrais lui citer d’autres exemples d’entreprises où l’on a obtenu un accord aussi massif des salariés tout simplement parce qu’on leur proposait d’être payés double le dimanche. Voilà ce que vous avez oublié de dire, monsieur Braye !
M. Dominique Braye. C’est ce que nous proposons !
Mme Marie-France Beaufils. Non, pas dans les secteurs touristiques. Voilà en réalité ce que vous êtes en train de préparer sans le dire (Exclamations et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.). C’est pour cette raison que je tiens particulièrement à l’amendement n° 91, qui tend à prévoir les conditions qui seront faites aux salariés travaillant le dimanche. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 53 et 91.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 22 et 54.
M. Jean-Pierre Caffet. Tout d’abord, je prie Mme le rapporteur de bien vouloir accepter mes excuses si elle a cru déceler dans mon comportement tout à l’heure quelques signes d’agressivité. Il s’agissait plutôt d’un mouvement de colère face à une décision que je considère comme profondément inique.
Je tenais à apporter cette précision, madame le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Merci, mon cher collègue.
M. Jean-Pierre Caffet. Je ne reviendrai pas sur le fond de ces amendements, car tout a été dit sur le sujet. En revanche, j’ai bien noté l’embarras de M. le ministre, dont les explications sur le parallélisme des formes concernant la ville de Paris m’ont paru pour le moins confuses ! Oui, monsieur le ministre, le préfet instruit, mais sur demande ou sur proposition du Conseil de Paris !
Il n’y a donc aucun parallélisme des formes dans cette affaire.
Je comprends votre embarras, monsieur le ministre, mais, de deux choses l’une : soit vous considérez, comme Mme le rapporteur, que, Paris étant la capitale du pays, elle a une vocation touristique sur l’ensemble de son territoire, auquel cas il faut rejeter tous les amendements et ne pas tenter de trouver un compromis avec votre propre majorité ; soit vous considérez que M. Dominati a raison et que son amendement est « légitime », ce que vous avez d’ailleurs déclaré, comme en attestera le Journal officiel, et alors il faut l’adopter.
M. Jean-Jacques Mirassou. Eh oui ! Bien sûr !
M. Jean-Pierre Caffet. Je note d’ailleurs que, alors que l’amendement n° 68 est assez proche du nôtre, vous avez répondu à M. Dominati, monsieur le ministre, mais pas à nous ! (M. le ministre s’exclame.) Ce n’est pas grave, nous n’allons pas nous formaliser pour si peu. Ce n’est rien en comparaison de l’importance du texte qui nous occupe.
Je n’ignore pas, monsieur le ministre, que vous avez une feuille de route et qu’il vous faut sortir de cet hémicycle avec un « conforme ». Fort bien ! Mais, ce faisant, vous prenez une lourde responsabilité.
Comme l’a fort justement dit mon collègue Philippe Dominati, vous revenez sur des libertés communales qui ont été votées par le Parlement, sur l’initiative du Président de la République, en 1975. C’est suffisamment important pour être souligné.
Monsieur le ministre, il vous faut trancher entre deux visions : celle de Mme le rapporteur – circulez, il n’y a rien à voir, Paris sera administrée par le préfet, en rupture avec le statut qui est le sien depuis 1975, statut, qui, je le répète, donne satisfaction à tout le monde – et celle de M. Dominati.
Je vous poserai une dernière question, monsieur le ministre : êtes-vous disposé à aller jusqu’à un avis conforme et pas seulement consultatif ?