M. Thierry Repentin. Ah !
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Ainsi, monsieur Repentin, vous ne pourrez pas reprocher au Gouvernement de ne pas écouter le Sénat !
La mention « interventions et activités humaines », qui, à nos yeux, représentait une précaution apportant une meilleure protection, est donc supprimée de tout le corps du texte, comme vous le souhaitiez, monsieur le rapporteur.
Cette rectification permet de répondre aux préoccupations de la commission et de prouver que le Gouvernement sait s’adapter aux volontés des parlementaires dans la mesure où celles-ci restent, comme cet après-midi, dans le cadre de la réglementation.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 98 rectifié, présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :
Après l'article 5, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 414-4 du code de l'environnement est ainsi rédigé :
« Art. L. 414-4. - I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après « Évaluation des incidences Natura 2000 » :
« 1° Les documents de planification qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, sont applicables à leur réalisation ;
« 2° Les programmes ou projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations.
« II. - Les travaux, aménagements, ouvrages ou installations prévus par les contrats Natura 2000 ou pratiqués dans les conditions définies par une charte Natura 2000 sont dispensés de l'évaluation des incidences Natura 2000.
« III. - Les plans, programmes ou projets soumis à un régime administratif d'autorisation, d'approbation ou de déclaration au titre d'une législation ou d'une réglementation distincte de Natura 2000 ne font l'objet d'une évaluation des incidences Natura 2000 que s'ils figurent :
« 1° Soit sur une liste nationale établie par décret en Conseil d'État,
« 2° Soit sur une liste locale, complémentaire à la liste nationale, arrêtée par l'autorité administrative compétente.
« IV. - Tout plan, programme ou projet qui ne relève pas d'un régime administratif d'autorisation, d'approbation ou de déclaration au titre d'une législation ou d'une réglementation distincte de Natura 2000 peut être soumis à autorisation en application de la présente section et fait l'objet d'une évaluation des incidences Natura 2000. Une liste locale des plans, programmes ou projets concernés est arrêtée par l'autorité administrative compétente parmi ceux figurant sur une liste nationale de référence établie par décret en Conseil d'État.
« V. - Les listes arrêtées au titre des III et IV par l'autorité administrative compétente sont établies au regard des objectifs de conservation des sites Natura 2000, en concertation notamment avec des représentants de collectivités territoriales et de leurs groupements, de propriétaires, d'exploitants et d'utilisateurs concernés. Elles indiquent si l'obligation de réaliser une évaluation des incidences Natura 2000 s'applique dans le périmètre d'un ou plusieurs sites Natura 2000 ou sur tout ou partie d'un territoire départemental ou d'un espace marin.
« VI. - L'autorité chargée de l'autorisation, de l'approbation ou de recevoir la déclaration s'oppose à tout plan, programme ou projet si l'évaluation des incidences requise en application des III et IV n'a pas été réalisée, si elle se révèle insuffisante ou s'il en résulte que leur réalisation porterait atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000.
« À défaut pour la législation ou la réglementation applicable au régime d'autorisation, d'approbation ou de déclaration concerné de définir les conditions dans lesquelles l'autorité compétente s'oppose, celles-ci sont définies au titre de la présente section. En l'absence d'opposition expresse dans un délai déterminé, le plan, le programme, le projet, l'intervention ou l'activité humaine entre en vigueur ou est réalisé à compter de l'expiration dudit délai.
« VII. - Lorsqu'une évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 et en l'absence de solutions alternatives, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000. Ces mesures compensatoires sont à la charge de l'autorité qui a approuvé le plan ou du bénéficiaire des travaux, de l'installation, de l'ouvrage, de l'aménagement. La Commission européenne en est tenue informée.
« VIII. - Lorsque le site abrite un type d'habitat naturel ou une espèce prioritaires qui figurent, au titre de la protection renforcée dont ils bénéficient, sur des listes arrêtées dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, l'accord mentionné au VII ne peut être donné que pour des motifs liés à la santé ou à la sécurité publique ou tirés des avantages importants procurés à l'environnement ou, après avis de la Commission européenne, pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur. »
II. - Au premier alinéa du I de l'article L. 414-5 du code de l'environnement, les mots : « programme ou projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement » sont remplacés par les mots : « programme ou projet d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations ».
Quel est l’avis de la commission sur cet amendement n° 98 rectifié ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir répondu aussi rapidement aux interrogations exprimées par la commission.
M. Thierry Repentin. Tout cela est si spontané …
M. Jean Bizet, rapporteur. Disons que c’est travaillé !
M. Thierry Repentin. Vous travaillez tellement vite que l’on a du mal à vous suivre !
M. Jean Bizet, rapporteur. Figuraient dans l’amendement n° 98 les documents de planification, les programmes ou projets d’activité, de travaux, d’aménagements, d’ouvrages ou d’installations, ainsi que les interventions et activités humaines. Or l’objet de nos atermoiements en commission des affaires économiques portait sur le 3° du paragraphe I, à savoir les interventions et activités humaines.
Il était clair, d’emblée, que les zones Natura 2000 ne devaient pas être sanctuarisées. Cependant, ce point n’a pas toujours été bien compris par nos concitoyens, les acteurs locaux et les collectivités territoriales.
Les zones Natura 2000 ne doivent pas être des zones dans lesquelles les activités économiques ne peuvent pas s’exercer, car, contrairement à ce que l’on pourrait penser, celles-ci, lorsqu’elles sont encadrées, sont un gage de pérennité des biotopes.
M. Jean Desessard. Ce n’est pas ce qui est dit !
M. Jean Bizet, rapporteur. Je me réjouis que le Gouvernement nous ait entendus. C’est pourquoi, à titre personnel, puisque la commission n’a pas eu l’occasion d’examiner l’amendement n°98 rectifié, j’émets un avis favorable.
D’ici au vote du texte à l’Assemblée nationale et à la mise en place d’une commission mixte paritaire, puisque l’urgence a été déclarée, je compte organiser des auditions, auxquelles l’opposition sera bien évidemment conviée, afin d’approfondir l’examen de ce dispositif et de proposer éventuellement des améliorations. En attendant, l’adoption de l’amendement n° 98 rectifié nous permettrait d’envoyer le message à la Commission européenne que nous répondons à son avis motivé.
Il faut prendre très au sérieux le fait que la Cour de justice des Communautés européennes – je suis les affaires européennes avec beaucoup d’attention en tant que vice-président de la délégation pour l'Union européenne, qu’il s’agisse de problématiques environnementales ou autres – ait condamné les Pays-Bas. Je souhaite éviter une condamnation de la France.
Je n’ai pas l’habitude de tromper mes collègues. En supprimant la référence aux interventions et activités humaines, je pense très sincèrement que l’on met une clé de sécurité importante.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J’ai entendu M. le rapporteur dire que la transposition de la directive Natura 2000 avait été mal faite.
M. Jean Bizet, rapporteur. J’ai dit qu’elle avait été faite a minima !
M. Jean Desessard. Sans établir un lien direct avec le texte que nous examinons, il me semble que cette transposition avait fait l’objet d’une procédure d’urgence. Aujourd’hui, on transpose avec précipitation, c'est-à-dire encore plus dans l’urgence. Dès lors, ne risquons-nous pas de commettre les mêmes erreurs ?
Par ailleurs, je remarque, monsieur le rapporteur, que votre explication est très partiale. Vous nous dites qu’il faut supprimer les mentions aux interventions et activités humaines pour que celles-ci subsistent. Mais, dans l’amendement, il est simplement question d’évaluer les effets des interventions et activités humaines, ce qui est quand même normal ! Enlever cette disposition dénature complètement l’amendement présenté par le Gouvernement.
Le Gouvernement dit : on vous fait plaisir…
Mme Christiane Hummel. Il ne l’a pas dit comme ça !
M. Jean Desessard. La prochaine fois, il le dira ! Il dira : je fais plaisir à ma majorité conservatrice UMP…
Mme Christiane Hummel. C’est vous qui êtes conservateur !
M. Jean Desessard. …en donnant moins de saveur à mon amendement, en en réduisant la qualité ; ainsi, celui-ci sera moins dans l’optique de la directive européenne.
Ne dites pas, monsieur le secrétaire d'État, que vous écoutez le Sénat : vous écoutez les sénateurs UMP, et après tout, pourquoi pas, puisque c’est votre logique ! Mais c’est l’environnement qui paiera.
Je note, pour terminer, que M. Bizet est devenu l’expert en matière d’environnement ; il est même devenu le guide du Gouvernement ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye.
M. Dominique Braye. Après avoir entendu les propos quelque peu excessifs et pas très sérieux de notre collègue Jean Desessard, je souhaite rendre un hommage à notre excellent rapporteur ; il n’a pas l’habitude de tromper ses collègues de la commission des affaires économiques, pas plus que ses collègues de l’ensemble du Sénat.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Tout à fait !
M. Dominique Braye. Sur un problème aussi délicat que celui-ci, sur lequel nous n’avons pas eu l’occasion de travailler sérieusement, alors qu’il s’agit d’une question essentielle, …
M. Jean Desessard. L’évaluation des activités humaines !
M. Dominique Braye. … lourde est la responsabilité du rapporteur. Compte tenu du sérieux dont celui-ci a fait preuve, un certain nombre de sénateurs suivront la direction qu’il nous indique, avec une confiance totale quant à son expertise. J’espère, monsieur le rapporteur, au vu de l’importance du débat, que c’est la bonne direction. Personnellement, je n’en doute pas et je pense que les sénateurs de l’UMP vous soutiendront.
Monsieur le secrétaire d'État vous avez dit, à plusieurs reprises, entendre les demandes du Sénat et les prendre en compte. De grâce, écoutez-nous sur le fond ! Voilà encore quelques semaines, vous siégiez sur les travées de la Haute Assemblée et vous déploriez vous-même les conditions de travail lorsqu’elles étaient mauvaises. Maintenant que vous êtes au banc du Gouvernement, refusez de nous faire légiférer dans de telles conditions ; faites adopter au Gouvernement un comportement je dirai non pas un peu plus vertueux, mais moins inconséquent.
M. Thierry Repentin. Hou là, là !
M. Dominique Braye. Vous dites nous écouter : nous verrons, à l’occasion des prochains projets de loi que vous défendrez devant la Haute Assemblée, s’il ne s’agit pas simplement de propos d’homme du Sud !
M. Jean Desessard. Vous êtes un idéaliste, monsieur Braye, si vous croyez que le Gouvernement peut changer !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Il ne s’agit pas de légiférer dans l’urgence ! Mais à la veille de la présidence française de l’Union européenne, il nous faut effectivement, monsieur Braye, réajuster nos textes pour les mettre en conformité avec la législation européenne. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. Vous ne savez que depuis trois semaines que la France va présider l’Union européenne ?
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Nous prenons des précautions pour nous protéger, au vu de la jurisprudence relative aux Pays-Bas.
Vous ne pouvez pas me reprocher de tenir compte de l’avis du Sénat ! L’Europe verra que l’on a fait un pas, et j’espère qu’elle le jugera positif. Elle aurait peut-être préféré que l’on aille jusqu’au bout en adoptant les mesures indispensables que je vous avais proposées au travers de l’amendement n° 98, c’est-à-dire avant la rectification.
Je vous remercie cependant de votre réalisme et de votre volonté de nous aider à faire en sorte que la future présidence française réussisse.
M. le président. La parole est à M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. Il ne nous était pas possible d’accepter l’amendement n° 98. Je remercie M. le rapporteur d’avoir été notre avocat et d’en avoir obtenu la rectification. En effet, les interventions et activités humaines étaient une notion un peu floue, qui risquait de remettre en cause beaucoup de choses, notamment sur le plan économique.
Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour féliciter M. le rapporteur de tout le travail qu’il a accompli, ainsi que ses collaborateurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Je conseille à M. le secrétaire d'État, puisque nous avons été collègues dans cette assemblée, de se faire raconter les discussions que nous avons eues dans l’après-midi. Il se rendra compte combien les débats animés, les modifications ou les retraits d’amendements, les études, etc., sont finalement toujours nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes sans doute d’astreinte aujourd'hui. Vous auriez dû vous faire expliquer le contexte dans lequel nous examinons ce texte, car votre intervention est quelque peu décalée.
Nous n’avons eu de cesse, sur l’ensemble des travées, de dire que nous légiférons dans des conditions que nous jugeons inadmissibles sur le fond. Or vous prétendez que nous ne travaillons pas dans l’urgence !
Nous travaillons dans l’urgence, et ce à un double titre : d’abord, l’urgence a été déclarée sur le texte ; ensuite, s’agissant des amendements du Gouvernement, M. le rapporteur en a pris connaissance le week-end dernier et, pour notre part, seulement hier, en commission ! Si ce n’est pas de l’urgence, j’y perds mon latin !
Cela étant, monsieur le secrétaire d'État, nous vous avons écouté avec délectation. Vous avez su trouver les mots justes pour vous adresser au Sénat : vous avez parlé des activités humaines, de la chasse, de la pêche, de l’agriculture, sujets qui, pour nous, sont de première importance tant nous sommes, comme vous, attachés aux territoires dans lesquels nous sommes élus. Nous avons d’ailleurs, pour certains d’entre nous, des zones Natura 2000 sur nos territoires.
Quoi qu’il en soit, j’ai le sentiment que votre amendement améliore un peu les choses par rapport à une situation où rien n’est prévu. Il constitue donc un petit pas.
Vous avez modifié votre amendement en supprimant la référence aux interventions et aux activités humaines dans les zones Natura 2000.
M. Jean Desessard. Les évaluations sur les interventions et activités humaines !
M. Thierry Repentin. Certes !
Les programmes ou projets d’activités, de travaux, d’aménagements, d’ouvrages ou d’installations sont des activités humaines et permettent des activités humaines.
Nous ne sommes pas satisfaits sur la forme, c’est évident, et nous continuerons de dire partout que nous avons légiféré dans des conditions inadmissibles. Finalement, nos collègues députés travailleront mieux que nous n’avons pu le faire. Heureusement qu’il y aura une séance de rattrapage dans quelques jours !
Nous ne voterons pas contre cet amendement, mais nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. L’amendement du Gouvernement a fait l’objet d’un débat en commission et l’élément important qui nous a fait émettre un avis défavorable était la référence aux interventions et aux activités humaines.
M. Jean Desessard. Il n’était question que de l’évaluation des interventions et activités humaines !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Dans mon département, il existait un espace de dunes où était implantée une activité agricole. On y trouvait une flore diverse et la faune était constituée d’animaux d’élevage. On a voulu en faire une réserve et c’est devenu une friche. La flore et la faune ont été complètement modifiées et il y a maintenant des vipères.
Nous connaissons tous des problématiques dans nos départements s’agissant des activités agricoles.
M. Jean Desessard. Mais l’évaluation !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. S’il vous plaît, mon cher collègue, laissez-moi m’exprimer ! Je vous ai écouté tout au long du débat, qui a été assez large puisque nous terminons ce soir.
Il faut être réaliste ! Le Gouvernement nous propose une rectification de son amendement en supprimant la référence aux interventions et activités humaines ; c’est tout à fait adapté à la transposition de la directive européenne, que nous devons traduire d’urgence en droit interne. Ce point particulier a été négocié avec le Gouvernement, ce qui fait partie du rôle du président et du rapporteur de la commission.
J’invite donc mes collègues de la Haute Assemblée à voter en faveur de cet amendement rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Intitulé du projet de loi
M. le président. L'amendement n° 46, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter l'intitulé du projet de loi par les mots :
et à diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. C’est un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Le Gouvernement est, bien sûr, favorable à cet amendement.
Au terme de ce débat, je souhaite répondre aux remarques qui ont été formulées par M. Thierry Repentin.
Monsieur le sénateur, lorsqu’on est au banc du Gouvernement, on n’est jamais d’astreinte ! C’est un plaisir de défendre son pays, d’adapter la législation et de la faire évoluer ; ce sera un plaisir d’accompagner la présidence française de l’Union européenne.
Au-delà de nos convictions et de nos visions différentes sur l’ensemble des textes que nous examinons, nous sommes, dans cette assemblée, des républicains. Nous sommes tous, de la même manière, attachés à notre pays et fiers de savoir qu’il présidera, dans quelques semaines, l’Union européenne. La déclaration d’urgence sur ce texte vise à nous permettre d’aborder cette future présidence dans les meilleures conditions. Ce soir, le Sénat nous y a aidés, et je l’en remercie ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je comprends maintenant pourquoi il y a eu un tel défilé de ministres : c’était tellement agréable de travailler avec nous sur ce texte qu’ils se sont relayés pour partager le plaisir ! Ce bel exemple de solidarité gouvernementale explique que l’on ait eu droit à quatre ministres lors de ce débat !
Monsieur Emorine, tout en vous priant de bien vouloir m’excuser de vous avoir interrompu tout à l’heure, je vous invite à relire l’amendement n° 98 et à revenir sur l’interprétation que vous en avez faite.
Vous ne souhaitez pas que soient interdites les interventions et activités humaines dans les sites Natura 2000.
M. Dominique Braye. On a bien compris : c’est l’évaluation !
M. Jean Desessard. Mais ce n’est pas ce qui est écrit dans cet amendement. « Lorsqu’ils sont susceptibles d’affecter de manière significative » – il y a déjà une condition – « un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, » – voilà qui est intéressant, une cause n’est peut-être pas suffisante, mais la conjugaison de plusieurs causes peut créer un désastre écologique – « doivent faire l’objet » – non d’un arrêt de l’activité humaine, mais – « d’une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site. »
Avoir supprimé dans la version rectifiée de cet amendement les mots « les interventions et activités humaines », tout en maintenant la condition « lorsqu’ils sont susceptibles d’affecter », ce n’est pas sérieux. Cela signifie que l’on veut toujours transposer a minima. On ne fait pas confiance à l’autorité chargée de faire l’évaluation.
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous achevons la lecture de ce projet de loi, qui vise à transposer la directive européenne de 2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux.
À la veille de la présidence française de l’Union européenne, ainsi que vous l’avez à plusieurs reprises souligné, monsieur le secrétaire d’État, et comme l’ont également fait les différents ministres qui se sont succédé au banc du Gouvernement, il est d’autant plus important que nous respections nos engagements européens en transposant les directives pour lesquelles nous sommes en retard.
C’est pourquoi, au-delà de la transposition de la directive 2004/35/CE, nous avons été pleinement convaincus du bien-fondé de la démarche proposée par notre excellent rapporteur, M. Jean Bizet, de compléter ce projet de loi par diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire, ce qui nous a permis d’y ajouter la transposition d’autres directives environnementales.
J’ai moi-même, au nom du groupe d’études sur la gestion des déchets, saisi cette occasion pour la transposition de dispositions concernant les déchets.
M. Jean Desessard. Tant qu’à faire !
M. Dominique Braye. Comme l’a développé M. Raymond Couderc dans son intervention lors de la discussion générale, la directive sur la responsabilité environnementale est une innovation, puisqu’elle reconnaît, pour la première fois, le principe de la réparation du dommage écologique sans victime demanderesse.
Elle traite, plus particulièrement, de la pollution des sols, des atteintes graves à la qualité des eaux et aux espèces et habitats naturels ; elle est un régime non pas d’indemnisation financière, mais de réparation par une remise en état des milieux naturels ; elle vient s’ajouter aux régimes de responsabilité existants.
Certes, il s’agit d’un texte relativement complexe et pour lequel la marge de manœuvre du Parlement, est limitée puisque, pendant les quinze ans où ce sujet a été débattu au niveau européen, les questions fondamentales ont non seulement été discutées mais encore arbitrées.
C’est pourquoi nous nous en sommes tenus à la transposition, monsieur Desessard, la plus fidèle possible de la directive en respectant le calendrier communautaire, notamment à propos de la nouvelle directive sur la responsabilité sociétés mères-filiales, et les rapports d’étape prévus pour 2010 et 2014.
Parce que ce texte constitue une réelle avancée en matière de protection de l’environnement et parce que nous l’avons complété pour introduire dans notre droit plusieurs autres directives en instance, le groupe UMP y apportera son entier soutien. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, lors de son exposé, Mme la secrétaire d’État a souligné, comme l’ont fait de nombreux orateurs, la complexité et l’importance de ce texte, au regard du fait que, pour la première fois, la responsabilité environnementale est reconnue pour les atteintes à l’environnement.
Pourtant, les conditions nécessaires à un bon travail parlementaire n’étaient pas réunies : urgence, texte modifié par sous-amendements du Gouvernement, amendements cavaliers pour transposer d’autres directives, défilé de quatre ministres, qui - au moins pour l’un d’entre eux - ont fait preuve d’une méconnaissance du sujet ne permettant pas un échange constructif entre le Gouvernement et le Parlement.
De grâce, ne travaillons plus ainsi ! Ce n’est pas moi qui l’ai dit, c’est l’un de mes collègues en face.
M. Dominique Braye. À côté plutôt !
Mme Évelyne Didier. Mes questions sont les suivantes.
Premièrement, le MEDAD a-t-il les moyens de ses ambitions, notamment en personnels ? En effet, cette improvisation, cette impréparation doivent bien avoir une raison.
Deuxièmement, l’organisation du travail ministériel est-elle si difficile que quatre ministres doivent se succéder sur ce texte ?
Je ferai une autre remarque sur la terminologie.
À l’instar du président Jean-Paul Emorine, certains ont dit de ce texte qu’il était « technique » ou « formel ».
Des amendements de l’opposition, il est dit qu’ils sont toujours « satisfaits » ou « sans objet », de manière, comme l’a souligné l’une de mes collègues, à gommer les aspérités. En revanche, les amendements du rapporteur sont « de précision », « de clarification », « de simplification », « de coordination », « rédactionnels » ou « de conséquence ». Ils ne sont jamais politiques, comme si ces amendements n’étaient pas porteurs d’une certaine philosophie, d’une « politique », terme noble auquel je n’attache aucune connotation négative.
En tout état de cause, présenter l’ensemble des amendements de la commission comme étant techniques me paraît excessif.
On a systématiquement mis en avant les intérêts de l’exploitant. Je rappelle tout de même que ce texte touche l’intérêt de nos territoires, en tout cas de certains d’entre eux. Derrière ce texte technique et complexe, il y a une question simple : en cas de pollution grave, qui doit payer, qui doit réparer ? Si ce n’est pas l’exploitant, nous savons qu’au final ce sera la collectivité.
Or nos territoires sont, dans ce cas, victimes de la double peine. D’une part, la collectivité en question doit subir la pollution et ses dommages collatéraux et, en cas d’absence ou de défaillance des responsables, elle finit par payer la réparation ou la dépollution. On l’a bien vu à travers des exemples comme Metaleurop.
Tout au long du texte, vous avez interprété a minima les articles des différentes directives. Vous ne vous donnez pas les moyens de poursuivre les fautifs dans tous les cas : restriction sur la durée, sur les moyens, sur les droits, sur le champ d’application, sur la remontée dans la pyramide des responsabilités. Votre position sur la responsabilité des sociétés mères illustre votre politique.
Ce texte contient quelques avancées, mais trop peu. Le Sénat, qui représente prioritairement les collectivités, se doit de les défendre. C’est pourquoi le groupe CRC votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)