Article 29
Les articles L. 622-10-1, L. 622-10-2 et L. 622-10-3 sont ainsi rédigés :
« Art. L. 622-10. - Supprimé.
« Art. L. 622-10-1. - A tout moment de la période d'observation ou si celle-ci n'est pas poursuivie, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office peut :
« a) Ordonner la cessation partielle de l'activité ;
« b) Convertir la procédure en un redressement judiciaire, si les conditions de l'article L. 631-1 sont réunies ;
« c) Prononcer la liquidation judiciaire, si les conditions de l'article L. 640-1 sont réunies.
« Il statue après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, l'administrateur, le mandataire judiciaire, les contrôleurs et les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, et avoir recueilli l'avis du ministère public.
« Lorsqu'il fait application du b, le tribunal peut, si nécessaire, modifier la durée de la période d'observation restant à courir.
« Art. L. 622-10-2. - Lorsque le tribunal prononce la liquidation, il met fin à la période d'observation et, sous réserve des dispositions de l'article L. 641-10, à la mission de l'administrateur.
« Art. L. 622-10-3. - Lorsque disparaissent les difficultés qui ont justifié l'ouverture de la procédure, le tribunal, à la demande du débiteur, y met fin. »
M. le président. L'amendement n° 37 rectifié, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
I. Remplacer les deux premiers alinéas de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les articles L. 622-10, L. 622-10-1 et L. 622-10-2 sont ainsi rédigés :
II. En conséquence,
a) au début du troisième alinéa de cet article, remplacer la référence :
Art. L. 622-10-1
par la référence :
Art. L. 622-10
b) au début de l'avant-dernier alinéa de cet article, remplacer la référence :
Art. L. 622-10-2
par la référence :
Art. L. 622-10-1
La parole est à Mme le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est un amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Remplacer les quatre premiers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 622-10-1 du code de commerce par deux alinéas ainsi rédigés :
A tout moment de la période d'observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, peut ordonner la cessation partielle de l'activité.
« Dans les mêmes conditions, il convertit la procédure en un redressement judiciaire, si les conditions de l'article L. 631-1 sont réunies ou prononce la liquidation judiciaire, si les conditions de l'article L. 640-1 sont réunies.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Selon l'article L. 622-10-1 du code de commerce, à tout moment de la période d'observation ou lorsque celle-ci n'est pas poursuivie en raison de l'absence de capacité de financement suffisante de l'entreprise, le tribunal peut : ordonner la cessation partielle de l'activité ; convertir la procédure de sauvegarde en une procédure de redressement judiciaire ou en une procédure de liquidation judiciaire.
Bien que la rédaction proposée fasse apparaître ces deux dernières mesures comme de simples facultés, le tribunal aurait en réalité une compétence liée pour convertir la procédure en redressement judiciaire ou pour prononcer la liquidation judiciaire, dès lors que les conditions prévues par les articles L. 631-1 et L. 640-1 du code de commerce seraient réunies.
En outre, mentionner le fait que la décision du tribunal peut également intervenir alors que la période d'observation n'est pas poursuivie est sans doute superflu.
Le présent amendement tend donc à proposer, sur ces points, une rédaction plus précise, tout en prévoyant une renumérotation d'article, ce que nous faisons d'ailleurs à plusieurs reprises au cours de la discussion du texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 234, présenté par Mmes Assassi, Mathon, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
les contrôleurs
rédiger ainsi la fin du cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 622-10-1 du code de commerce :
, et avoir recueilli l'avis du ministère public, des représentants du comité d'entreprise, ou à défaut, des délégués du personnel s'ils existent, à défaut les salariés eux-mêmes.
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. Cet amendement a un double objet.
Tout d'abord, l'amendement vise à assurer que les salariés seront dûment consultés sur la décision que prendra le tribunal. Tel qu'il est rédigé, le cinquième alinéa de l'article L. 622-10-1 nous paraît insuffisant. C'est pourquoi nous proposons de spécifier : « à défaut les salariés eux-mêmes ».
Ensuite, l'amendement tend à préciser que le tribunal ne doit pas se contenter d'entendre ou d'appeler les représentants des salariés, afin de statuer sur la décision à prendre : il doit recueillir leur avis, comme il recueillera celui du ministère public.
Nous faisons preuve de ténacité, mais cela confirme notre position à l'égard des salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Madame la sénatrice, votre ténacité est récompensée. Cette demande est déjà satisfaite par le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article L. 622-10-1 du code de commerce : lorsque l'entreprise n'a pas de délégué du personnel, un salarié, élu par le personnel, est entendu.
A ce stade de la procédure, je ne comprends pas pourquoi vous avez déposé cet amendement. C'est la raison pour laquelle je vous demande de le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Il est compréhensible que le groupe CRC insiste sur le rôle du personnel. Les amendements qu'il présente en témoignent. L'assemblée me semble tout à fait informée de son souhait.
M. le président. Madame Mathon, l'amendement n° 234 est-il maintenu ?
Mme Josiane Mathon. Cet amendement est loin d'être satisfait : l'article 29 du projet de loi ne prévoit pas que l'avis des salariés sera recueilli !
Je relis le cinquième alinéa de l'article L. 622-10-1 : « Il statue après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, l'administrateur, le mandataire judiciaire, les contrôleurs et les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, et avoir recueilli l'avis du ministère public. »
On recueille, certes, l'avis du ministère public, mais pas celui des salariés, qui sont juste entendus.
Mme Eliane Assassi. Ce n'est pas la même chose !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Vous avez relu l'alinéa dont il est question, madame la sénatrice, et vous pouvez donc constater que tout le monde est entendu. Lorsqu'il s'agit du ministère public, on parle d'avis, car il n'est pas entendu. C'est normal : on ne consulte pas le parquet. Mais lorsque l'on consulte les gens, c'est pour qu'ils donnent leur avis ! Autrement, cela n'a pas de sens !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Madame la sénatrice, il s'agit d'expressions juridiques qui varient en fonction des personnes appelées à formuler un avis.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Voilà !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Les unes sont consultées, les autres émettent un avis. Le parquet, lui, n'est pas consulté, on lui demande son avis.
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 622-10-3 du code de commerce :
« Art. L. 622-10-2. - Lorsque les difficultés qui ont justifié l'ouverture de la procédure ont disparu, le tribunal y met fin à la demande du débiteur. Il statue dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 622-10. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence et de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 30
L'article L. 622-11 est ainsi modifié :
1° La première phrase du cinquième alinéa est ainsi rédigée :
« Si l'administrateur n'use pas de la faculté de poursuivre le contrat ou y met fin dans les conditions du deuxième alinéa, l'inexécution peut donner lieu à des dommages et intérêts dont le montant doit être déclaré au passif au profit de l'autre partie contractante. » ;
2° A la seconde phrase du cinquième alinéa, les mots : « dommages-intérêts » sont remplacés par les mots : « dommages et intérêts » ;
3° Au sixième alinéa, les mots : « procédure de redressement judiciaire » sont remplacés par les mots : « procédure de sauvegarde ». - (Adopté.)
Article 31
L'article L. 622-12 est ainsi rédigé :
« Art. L. 622-12. - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 622-11, la résiliation du bail des immeubles affectés à l'activité de l'entreprise ne peut être constatée ou prononcée qu'à l'initiative de l'administrateur ou en application des dispositions qui suivent.
« A compter du jugement d'ouverture, le bailleur peut demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et des charges afférents à une occupation postérieure audit jugement. Cette action ne peut être introduite moins de deux mois après la publication du jugement d'ouverture.
« Si le paiement des sommes dues intervient avant l'expiration de ce délai, il n'y a pas lieu à résiliation.
« Nonobstant toute clause contraire, le défaut d'exploitation pendant la période d'observation dans un ou plusieurs immeubles loués par l'entreprise n'entraîne pas résiliation du bail. »
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 622-12 du code de commerce :
La résiliation du bail des immeubles donnés à bail au débiteur et affectés à l'activité de l'entreprise ne peut être constatée ou prononcée qu'à l'initiative de l'administrateur.
L'amendement n° 41, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 622-12 du code de commerce :
« Toutefois, le bailleur peut, au terme d'un délai de trois mois à compter de la publication du jugement d'ouverture, demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et des charges afférents à une occupation postérieure audit jugement.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L'amendement n° 40 est un amendement de précision qui tend à limiter le bénéfice de la disposition prévue à l'article 31 au seul cas où le débiteur est le locataire du local concerné par le contrat de bail. En effet, il ne paraît pas justifié de permettre au débiteur qui serait lui-même bailleur d'un local de profiter de ce dispositif dérogatoire au droit commun.
J'en viens à l'amendement n° 41. Aux termes de la disposition actuellement prévue à l'article 31, le bailleur qui voudrait faire constater la résiliation de plein droit ou solliciter la résiliation judiciaire du bail afférant à un immeuble affecté à l'activité de l'entreprise en cas de défaut de paiement des loyers et charges relatifs à une occupation postérieure au jugement d'ouverture ne pourrait agir qu'au terme d'un délai de deux mois.
Ce délai pose cependant des difficultés : il s'articule mal avec les dispositions qui prévoient que l'action en revendication peut être exercée dans un délai de trois mois à compter de la publication du jugement d'ouverture. En pratique, en effet, le débiteur est parfois tenu de louer de nouveaux locaux pour entreposer le matériel susceptible de faire l'objet d'une action en revendication.
Afin d'éviter cette situation préjudiciable et de simplifier la rédaction de ce dispositif, la commission des lois vous propose d'harmoniser le délai prévu à l'article 31 avec celui qui s'applique aux actions en revendication exercées par les créanciers du débiteur.
Il s'agit donc d'un amendement de cohérence, qui peut s'avérer très pratique. On m'a rapporté des exemples concrets à ce sujet. Si le délai de résiliation du bail et celui de l'action en revendication ne sont pas les mêmes, lorsque le délai de résiliation expire au bout de deux mois, il faut déplacer les machines, quand il y en a.
C'est pourquoi il semble judicieux de prévoir un délai identique. Une durée de trois mois paraît satisfaisante.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 31, modifié.
(L'article 31 est adopté.)
Article 32
A l'article L. 622-13, les mots : « inopposable à l'administrateur » sont remplacés par les mots : « réputée non écrite ». - (Adopté.)
Article 33
L'article L. 622-14 est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « redressement judiciaire » sont remplacés par les mots : « procédure de sauvegarde » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « dommages-intérêts » sont remplacés par les mots : « dommages et intérêts ». - (Adopté.)
Article 34
L'article L. 622-15 est ainsi modifié :
1° Les I et II sont ainsi rédigés :
« I. - Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, pour son activité, pendant cette période, sont payées à leur échéance.
« II. - Lorsqu'elles ne sont pas payées à l'échéance, ces créances sont payées par privilège à toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûretés, à l'exception des créances garanties par le privilège établi aux articles L. 143-10, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail et le privilège établi par l'article L. 611-11 du présent code. » ;
2° Au 3° du III, les mots : « de la présente disposition » sont remplacés par les mots : « du présent article » ;
3° Il est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. - Les créances impayées perdent le privilège que leur confère le présent article si elles n'ont pas été portées à la connaissance du mandataire judiciaire et de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné ou, lorsque ces organes ont cessé leurs fonctions, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur, dans le délai d'un an à compter de la fin de la période d'observation. »
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le I du texte proposé par le 1° de cet article pour l'article L. 622-15 du code de commerce, après les mots :
pour son activité
insérer le mot :
professionnelle
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement a pour objet de limiter le bénéfice de la règle du paiement à l'échéance aux seules créances qui seraient nées du fait de l'activité professionnelle du débiteur, pendant la période d'observation.
En effet, si ces créances sont nées du fait d'une activité non professionnelle, elles ne sauraient bénéficier de cette règle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 43, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le II du texte proposé par le 1° de cet article pour l'article L. 622-15 du code de commerce :
« II.- Lorsqu'elles ne sont pas payées à l'échéance, ces créances sont payées par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûretés, à l'exception de celles garanties par le privilège établi aux articles L. 143-10, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail, de celles garanties par le privilège des frais de justice et de celles garanties par le privilège établi par l'article L. 611-11 du présent code. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La rédaction proposée par le présent article a pour effet de faire passer le paiement des créances garanties par le privilège des frais de justice, visé à l'article 2101 du code civil, après celui des créances couvertes par le privilège de la nouvelle monnaie ou d'argent frais.
Afin de maintenir sur ce point l'état du droit en cette matière, la commission des lois vous propose, par cet amendement, de préciser que les frais de justice sont payés avant les créances bénéficiant du privilège établi par l'article L. 611-11 du code de commerce dans sa rédaction issue de l'article 8 du projet de loi, tout en corrigeant une erreur matérielle.
M. le président. L'amendement n° 235, présenté par Mmes Assassi, Mathon, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le II du texte proposé par le 1° de cet article pour remplacer les I et II de l'article L. 622-15 du code de commerce, remplacer les mots :
et L. 751-15
par les mots :
, L. 751-15 et L. 227-1
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. L'article 34 établit un classement dans le privilège des créances. Bien que critiquable au regard du rang accordé aux créances des établissements financiers, ce classement respecte malgré tout le superprivilège des salariés, disposition que nous considérons comme fondamentale et juste.
Toutefois, le texte ne prend pas en compte les droits des salariés acquis au titre du compte épargne-temps. En effet, s'appuyant sur l'argument « travailler plus pour gagner plus », la majorité a modifié de façon substantielle le concept de compte épargne-temps, en accélérant sa monétarisation.
Déjà, l'article 2 de la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, dite « loi Fillon », avait assigné au compte épargne-temps une nouvelle fonction en précisant, dans le deuxième alinéa de l'article L. 227-1 du code du travail, que ce compte avait pour objet de permettre au salarié qui le désire non plus seulement d'accumuler des droits à congé rémunéré, mais également « de se constituer une épargne ».
A l'issue de l'examen de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise, c'est une définition beaucoup plus générale et simpliste que la précédente qui figure désormais au deuxième alinéa de l'article L. 227-1 : « Le compte épargne-temps permet au salarié d'accumuler des droits à congé rémunéré ou de bénéficier d'une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises. »
Il s'agit donc bien d'une rémunération différée. Or, si l'entreprise est en difficulté et en cessation de paiement, que deviennent les droits du salarié ? Le flou le plus complet demeure sur le devenir de sa créance car, en contrepartie de son travail, le salarié s'est pourtant bien constitué un droit à l'égard de l'entreprise.
Des pistes de réponses existent, mais elles restent imprécises. Les éléments constitutifs du compte épargne-temps restent un droit, si la rupture du contrat de travail résulte d'un cas de force majeure. Les difficultés de l'entreprise et le plan de sauvegarde peuvent-ils être considérés comme tel ?
L'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, l'AGS, interviendra, nous dit-on. Pourtant, deux remarques s'imposent.
D'abord, tout employeur doit assurer ses salariés contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaires. Or ce n'est pas le cas : les employeurs ne sont pas régulièrement à jour de leur versement, c'est un fait. Nous avons déposé un amendement à ce sujet.
Ensuite, la garantie en question étant limitée à un plafond fixé par décret, compte tenu du nouveau régime plus souple d'accumulation des droits sur le compte épargne-temps, la question de la garantie des droits supérieurs à ce plafond se pose.
Face à ce flou juridique et légal, nous proposons que les droits acquis sur le compte épargne-temps soient payés au terme des différentes procédures collectives. Cet amendement vise donc à mettre le paiement des sommes du compte épargne-temps au rang des créances de superprivilège.
M. le président. L'amendement n° 360, présenté par MM. Badinter, C. Gautier, Yung, Frimat et Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et Guérini, Mme M. André, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Mahéas, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa (II) du texte proposé par le 1° de cet article pour les I et II de l'article L. 622-15 du code de commerce, après les mots :
et L. 751-15 du code du travail
insérer les mots :
et toutes autres créances nées du contrat de travail ou assimilées au salaire
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Les créanciers apporteurs d'argent frais en période de conciliation bénéficient d'un privilège de remboursement sur les créances salariales visées par les articles L. 143-11-1 à L.143-11-3 du code du travail.
Les créances salariales recouvrent notamment « les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire », « les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant pendant la période d'observation », les créances résultant de la rupture du contrat de travail des salariés auxquels a été proposée une convention de conversion, les indemnités de rupture ou encore « les sommes dues au titre de l'intéressement [et] au titre de la participation des salariés aux fruits de l'expansion » de l'entreprise.
Actuellement, ces créances ne sont pas visées par le II de l'article L. 622-15 et interviennent donc après les créances de superprivilège. Est-il légitime de faire passer les créanciers apporteurs d'argent frais avant les créances salariales ? De notre point de vue, non. Nous ne partageons pas l'orientation libérale et inéquitable de ce dispositif.
En effet, ce privilège crée un déséquilibre au profit des établissements bancaires, et au détriment de l'AGS et des salariés. Il convient par conséquent de rééquilibrer l'ordre des créanciers prévu à l'article 34 en intégrant, dans le privilège mentionné par l'actuel projet de loi, toutes les autres créances salariales, actuellement visées au III de l'article L. 622-15.
De surcroît, une incertitude jurisprudentielle demeure au sujet des créances visées par les articles L. 143-11-1 à L. 143-11-3 du code du travail. Pour certains, il ne s'agit que des salaires stricto sensu ; pour d'autres, il s'agit de toute créance née du contrat de travail, y compris les indemnités de rupture. Pour éviter cette incertitude, il convient de préciser explicitement qu'il s'agit de « toutes autres créances nées du contrat de travail ou assimilées au salaire ».
Cet amendement a ainsi pour objet de faire couvrir par le superprivilège l'ensemble des créances dues aux salariés, et notamment les créances générées par le compte épargne-temps. Créé par la loi Fillon, celui-ci permet au salarié d'accumuler des droits à un congé rémunéré et de bénéficier d'une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises.
Quel est le sort de ces créances ? Il importe de les réintégrer dans le superprivilège par l'intermédiaire de la formule générale que tend à insérer cet amendement.
L'adoption de cet amendement entraînera donc automatiquement la suppression de la déclinaison de ce privilège au niveau de la procédure de redressement, puisque l'ordre de paiement des créanciers est également régi par l'article 34.
M. le président. L'amendement n° 236, présenté par Mmes Assassi, Mathon, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le II du texte proposé par le 1° de cet article pour remplacer les I et II de l'article L. 622-15 du code de commerce par les mots :
et à l'exception du remboursement des aides publiques de toute nature.
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. Cet amendement vise à modifier l'ordre de paiement des créances et à préciser que les aides publiques seront payées avant les créances dites « d'argent frais ».
La bonne utilité des deniers publics est tout aussi importante, surtout quand, dans certains cas, les créances privées sont nées d'un soutien abusif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Tout d'abord, dans les termes actuels du code du travail, le superprivilège des salaires est maintenu dans ses conditions actuelles. N'allons pas au-delà ! Ensuite, les autres créances viennent à leur rang.
J'ajouterai que je ne comprends pas votre position. En effet, quand une entreprise - et pas nécessairement une grosse entreprise, il peut s'agir d'un artisan ou d'un petit commerçant - est en difficulté et que quelqu'un vient l'aider, si la procédure de sauvegarde réussit, il n'y aura plus de problèmes puisque l'on n'aura pas à mettre en jeu les privilèges prévus par cet article. Lorsque les difficultés sont grandes, il faut être courageux pour apporter son secours ! Il me paraît donc nécessaire qu'il y ait ensuite une contrepartie pour ce qui est apporté !
Les salaires en tant que superprivilège ont le caractère alimentaire et le compte épargne temps qui est une invention nouvelle - très bien ! - n'entre pas dans le cadre des superprivilèges. Nous ne changeons rien au fond du droit dans ce domaine s'agissant de la hiérarchie des privilèges.
Bien entendu, on crée un privilège d'argent frais, mais il est très limité et il est nécessaire à la procédure. Si vous n'en voulez pas, vous pouvez tuer les entreprises ! De toute façon c'est ce qui est fait depuis trente ans grâce à certaines politiques !
Si nous voulons changer les choses, il faut refuser tous ces amendements.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements n°s 235, 360 et 236.
M. Philippe Marini. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. L'amendement n° 43 rétablit le bon ordre s'agissant des frais de justice, qui avaient été oubliés à l'Assemblée nationale. Ainsi, ils passeront immédiatement après les créances salariales. Il s'agit donc d'un excellent amendement : avis favorable.
Concernant l'amendement n° 235, madame Assassi, et mon observation vaut également pour les membres du groupe socialiste, vous souhaitez charger les superprivilèges. Qui trop embrasse, mal étreint ! Vous voudriez tuer le superprivilège des salaires, vous ne vous y prendriez pas autrement ! A force d'ajouter des créances super privilégiées, vous ne pourrez plus payer les salaires des ouvriers ! Il s'agit donc franchement d'une mauvaise idée ! Dans l'intérêt des ouvriers, le Gouvernement ne peut pas y être favorable. Pour les mêmes raisons, il émet un avis défavorable sur l'amendement n° 360.
Quant à l'amendement n° 236, je pensais avoir fait réfléchir hier Mme Assassi et Mme Mathon.
Mme Eliane Assassi. Je réfléchis, ne vous inquiétez pas !
Mme Eliane Assassi. Venant de vous, cela ne me rassure pas !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. En effet, vous souhaitez, par votre amendement, que les créances publiques soient remboursées avant le privilège d'argent frais. Or la question ne se posera pas car comme il n'y aura pas d'argent frais l'entreprise ne pourra pas se redresser. Franchement, vous ne voulez vraiment pas que les entreprises se redressent ! Ce n'est pas possible !
M. Philippe Marini. C'est sans espoir !
M. Philippe Marini. Vous avez un grand mérite !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. ...mais je désespère. Le Gouvernement émet bien sûr un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 235, 360 et 236 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 361, présenté par MM. Badinter, C. Gautier, Yung, Frimat et Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et Guérini, Mme M. André, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Mahéas, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le 1° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... .° Le 1° du III est supprimé.
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Les amendements nos 361 et 362 sont des amendements de coordination avec l'amendement précédent que j'ai présenté tout à l'heure.
M. le président. Monsieur Charles Gautier, l'amendement n° 361 est-il maintenu ?
M. Charles Gautier. Non, monsieur le président, je le retire, comme je retirerai l'amendement n° 362.
M. le président. L'amendement n° 361 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 44 est présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 192 est présenté par M. C. Gaudin, au nom de la commission des affaires économiques.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger comme suit le 2° de cet article :
2° Le 3° du III est ainsi modifié :
a) Dans la première phrase, les mots : « par les établissements de crédit » sont supprimés ;
b) A la fin de la seconde phrase, les mots : « de la présente disposition » sont remplacés par les mots : « du présent article »
La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 192.
M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. L'alinéa 3° du III de l'article L. 622-15 du code de commerce prévoit que seuls les prêts consentis par les établissements de crédit bénéficient d'un classement avantageux lors d'un concours entre plusieurs créances bénéficiant de la règle de paiement à l'échéance. Une telle restriction ne paraît plus avoir de justification. Durant la période d'observation, d'autres personnes que les établissements de crédit, qu'il s'agisse des associés ou de personnes de l'entourage, peuvent accorder des prêts à l'entreprise et méritent, tout comme ceux-ci, le classement avantageux prévu par cet alinéa.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 44.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit d'un amendement identique à celui de la commission des affaires économiques qui, une fois encore, a fait preuve de perspicacité.
M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. Je vous remercie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Ces amendements sont tellement bons que j'avais compris le texte du projet comme ils le précisent. (Sourires.) Il s'agit de tout l'argent frais. Par définition, il n'est pas possible, dans l'argent frais, d'établir une distinction entre les établissements de crédit et un cousin germain qui apporte un peu d'argent. Merci de cette précision !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 44 et 192.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 362, présenté par MM. Badinter, C. Gautier, Yung, Frimat et Peyronnet, Mme Bricq, MM. Charasse et Guérini, Mme M. André, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Mahéas, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le 2° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... .° Le cinquième alinéa (4°) du III est abrogé.
M. Charles Gautier. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 362 est retiré.
Je mets aux voix l'article 34, modifié.
(L'article 34 est adopté.)