M. le président. « Art. 9. - Le II de l'article L. 223-5 du code de la route est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ce délai est porté à un an lorsqu'un nouveau retrait de la totalité des points intervient dans un délai de cinq ans suivant le précédent. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 9 bis. - I. - Dans le II de l'article L. 223-5 du code de la route, les mots : "un examen médical" sont remplacés par les mots : "un examen ou une analyse médical, clinique, biologique".
« II. - L'article L. 224-14 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 224-14. - En cas d'annulation du permis de conduire prononcée en application du présent code ou en cas de suspension du permis de conduire dont la durée est fixée par décret en Conseil d'Etat, l'intéressé ne peut solliciter un nouveau permis sans avoir été reconnu apte après un examen ou une analyse médical, clinique, biologique et psychotechnique effectué à ses frais. »
L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Lanier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe II de cet article pour l'article L. 224-14 du code de la route :
« Art. L. 224-14. - En cas d'annulation du permis de conduire prononcée en application du présent code ou pour les délits prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal ou en cas de suspension du permis de conduire dont la durée est fixée par décret en Conseil d'Etat, l'intéressé ne peut solliciter un nouveau permis ou la restitution de son permis sans avoir été reconnu apte après un examen ou une analyse médical, clinique, biologique et psychotechnique effectué à ses frais. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. L'article 9 bis du projet impose un examen médical en cas d'annulation comme de suspension du permis de conduire. Il prévoit que l'intéressé ne peut solliciter un nouveau permis de conduire sans avoir été reconnu apte après cet examen médical.
Cependant, en cas de suspension du permis, l'intéressé sollicite non pas un nouveau permis, mais la restitution de son permis. Il convient de prévoir cette hypothèse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis, modifié.
(L'article 9 bis est adopté.)
Article 10
M. le président. « Art. 10. - I. - L'article L. 223-1 du code de la route est ainsi modifié :
« 1° Au troisième alinéa, après les mots : "le paiement d'une amende forfaitaire," sont insérés les mots : "ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée" ;
« 2° Le dernier alinéa est supprimé.
« II. - Le premier alinéa de l'article L. 223-3 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9.
« Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. »
« III. - Au premier alinéa de l'article L. 223-6 du même code, les mots : à compter de la date à laquelle la dernière condamnation est devenue définitive ou du paiement de la dernière amende forfaitaire sont remplacés par les mots : à compter de la date du paiement de la dernière amende forfaitaire, de l'émission du titre exécutoire de la dernière amende forfaitaire majorée, de l'exécution de la dernière composition pénale ou de la dernière condamnation définitive. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 11. - L'article L. 223-5 du code de la route est complété par un V ainsi rédigé :
« V. - Le fait pour toute personne de conduire un véhicule à moteur pour la conduite duquel le permis est nécessaire, malgré l'injonction qui lui a été faite de remettre son permis de conduire conformément au I, est puni des peines prévues aux III et IV. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 11
M. le président. L'amendement n° 60, présenté par M. Arnaud et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 212-1 du code de la route, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Un stage de maîtrise du véhicule en situation d'urgence est obligatoire dans la formation du permis de conduire dont les modalités seront fixées par décret. »
La parole est à M. Philippe Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Notre préoccupation commune est évidemment de tout mettre en oeuvre pour réduire le nombre d'accidents de la route et, par voie de conséquence, celui des morts sur la route.
Nous avons déjà largement évoqué les différents piliers d'une politique de sécurité routière : la sensibilisation, la formation et l'éducation, mais aussi la répression des comportements délictueux.
S'agissant de la formation, qui est extrêmement importante, cet amendement vise à rendre obligatoire, dans le cadre de l'apprentissage de la conduite, un stage de maîtrise du véhicule en situation d'urgence.
En effet, s'il est indiscutable que l'on peut parfaitement être habilité à conduire son véhicule dans des conditions normales après avoir satisfait aux épreuves actuelles du permis de conduire, dans des situations un peu exceptionnelles et difficilement prévisibles - plaque glissante, éclatement d'un pneu, obstacle survenant inopinément devant la voiture, etc. - nombreux sont les conducteurs, jeunes ou chevronnés, qui sont incapables de maîtriser leur véhicule, tout simplement parce qu'ils n'ont pas appris à le faire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission des lois est défavorable à cet amendement.
Il me semble que la mesure proposée par notre collègue devrait s'inscrire dans la continuité de la politique de prévention en matière de circulation routière que nous appelons tous de nos voeux puisque aussi bien, à nos yeux, ce projet de loi n'est qu'une étape. Or la meilleure des préventions consisterait sans doute à moderniser sensiblement l'enseignement de la conduite automobile, car celui-ci ne diffère guère actuellement de ce qu'il était voilà cinquante ans.
Il ne me paraît pas satisfaisant d'aborder le sujet de l'apprentissage de la conduite à travers la seule question de la maîtrise des situations d'urgence. Celle-ci devra faire partie de ces recherches quasiment scientifiques que j'espère voir menées à brève échéance sur tous les problèmes de la conduite automobile.
J'ajouterai que la mesure proposée me paraît de nature essentiellement réglementaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui viennent d'être exposées par M. le rapporteur.
Cela étant, M. Arnaud a raison de soulever cette question. D'une manière générale, l'apprentissage nécessaire pour réagir convenablement face à des situations critiques est un vrai sujet. A cet égard, il conviendrait sans doute de réfléchir à la manière dont les compagnies d'assurance pourraient inciter leurs clients à suivre de tels stages, notamment en accordant un avantage financier à ceux qui s'y soumettraient. Certaines compagnies ont d'ailleurs commencé à s'engager dans une telle voie.
Sans recourir à des mesures législatives, il serait possible d'encourager les compagnies d'assurance à suivre une telle piste. Ces stages pourraient, au demeurant, s'adresser aussi bien à ceux qui veulent se présenter au permis de conduire qu'à des conducteurs expérimentés.
Quoi qu'il en soit, comme M. le rapporteur, je pense que la mesure défendue par M. Arnaud ne relève pas du domaine législatif.
J'ajoute que, aujourd'hui, ni ceux qui passent le permis ni l'administration n'ont les moyens qui permettraient de rendre ce dispositif obligatoire.
M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Arnaud ?
M. Philippe Arnaud. Je ne suis pas totalement satisfait, chacun l'aura compris, par les réponses que m'ont apportées M. le rapporteur et M. le ministre. Mais j'ai bien entendu leurs objections.
En fait, selon moi, il s'agit de passer d'un apprentissage de la conduite - passer les vitesses, faire des créneaux, etc. - à l'apprentissage du pilotage d'une voiture. Au demeurant, de tels stages existent déjà.
Je crois, par ailleurs, qu'il faut mettre mon amendement en perspective avec ce qui nous préoccupe tous : les accidents sur la route. De ce point de vue, on ne peut contester l'utilité de ces stages.
Parmi les arguments avancés par M. le ministre, il en est un que je retiens : cette disposition serait d'ordre réglementaire et non pas d'ordre législatif. J'accepte donc de retirer mon amendement, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous mettiez tout en oeuvre, par voie réglementaire ou par la négociation avec les compagnies d'assurance, pour que, à défaut d'être obligatoires, ces stages d'apprentissage du pilotage des véhicules automobiles soient plus facilement accessibles. Il y va de la protection de la vie sur nos routes.
M. le président. L'amendement n° 60 est retiré.
M. le président. « Art. 11 bis. - Les candidats au permis de conduire sont sensibilisés dans le cadre de leur formation aux notions élémentaires de premiers secours.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 96 rectifié, présenté par MM. Poirier, Goulet, Lardeux et César, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« Après l'article L. 221-1 du code de la route, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Tous les candidats aux permis de conduire sont tenus d'acquérir, dans le cadre de leur formation, la connaissance des notions élémentaires de premiers secours.
« Cet apprentissage est assuré par les associations de secourisme agréées.
« Pour l'obtention de tout permis de conduire, il est institué une troisième épreuve obligatoire sanctionnant la maîtrise des notions élémentaires de secourisme.
« Un décret fixera les modalités de la mise en oeuvre de ce dispositif. »
L'amendement n° 77, présenté par MM. Mahéas et Lagauche, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Dreyfus-Schmidt, Frécon, Frimat, C. Gautier, Peyronnet, Sueur et Sutour, Mme Printz, M. Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« Le candidat au permis de conduire acquiert, dans le cadre de sa formation, la connaissance pratique des notions élémentaires de premier secours dites des cinq gestes qui sauvent. Cet apprentissage est assuré par les associations de secourisme agréées.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. »
L'amendement n° 39 rectifié, présenté par Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« Après l'article L. 212-5 du code de la route, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - A compter du 1er janvier 2004, les candidats au permis de conduire peuvent acquérir, dans le cadre de leur formation, la connaissance pratique des notions élémentaires de premiers secours dites des cinq gestes qui sauvent.
« Cet apprentissage et son suivi sont assurés par les associations de secourisme agréées.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. »
La parole est à M. Daniel Goulet, pour défendre l'amendement n° 96 rectifié.
M. Daniel Goulet. Avant de présenter cet amendement, qui s'inscrit dans le droit-fil de ce qui a été proposé tout à l'heure dans un autre domaine et peut aussi s'insérer dans un volet pédagogique supplémentaire, je voudrais faire une observation.
On serait tenté d'arrêter là le débat puisque toutes nos propositions relèvent, si j'ai bien compris, du domaine réglementaire. Je ne suis pas sûr que la manière dont se déroulent aujourd'hui les travaux de notre assemblée correspond vraiment à la volonté exprimée par le Président de la République de faire de cette affaire une véritable cause nationale.
De deux choses l'une, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur : soit nous engageons le dialogue, soit nous laissons l'administration décider.
Mais nous sommes tout de même l'un des deux éléments de la représentation nationale. Pour ma part, j'essaie, en conscience, d'être présent au maximum parce que la sécurité routière est bien, à mes yeux, une cause nationale. Quand bien même elle ne le serait pas, je considère que je faillirais à mon devoir en ne contribuant pas à l'effort de mobilisation de la conscience collective auquel a appelé le Président de la République.
Pourquoi avons-nous déposé cet amendement ? Parce que nous avons fait un constat et que nous ne pouvons pas rester indifférents, insensibles face à tout ce que nous savons.
Si le bilan de l'année 2001 de la sécurité routière en France permet de constater une baisse significative, de 3,7 %, du nombre d'accidents corporels, ce dont il faut se réjouir, il convient cependant de souligner une augmentation de 1 % du nombre de personnes tuées, qui s'explique partiellement par l'absence de premiers secours dans les minutes suivant un accident.
En effet, après un accident, l'intervention des secours spécialisés, principalement des sapeurs-pompiers, à l'action desquels nous rendons hommage, exige un laps de temps incompressible pour se rendre sur les lieux, soit dix à trente minutes.
De nombreux blessés en péril ne peuvent survivre à ce délai, puisque certains traumatismes réclament une intervention immédiate.
Outre l'alerte des secours et le balisage des lieux de l'accident, savoir ventiler, arrêter une hémorragie et placer le blessé en position latérale sont des gestes indispensables afin de sauver des vies humaines. Or la majorité des témoins d'accident les ignorent ou ne les connaissent qu'imparfaitement. Les stages de secourisme apparaissent donc nécessaires.
De surcroît, il faut prévenir les jeunes conducteurs que, s'ils doivent apporter un premier secours, il y a aussi des gestes qui tuent. Par conséquent, il s'agit bien en ce domaine de formation et de prévention. Ayons la responsabilité des discours que nous tenons et n'en restons pas aux incantations !
J'ajoute, enfin, que nous ne sommes pas là pour rechercher des droits d'auteur en quelque matière que ce soit. C'est la raison pour laquelle je vous demande instamment, mes chers collègues, de réfléchir avant de vous prononcer sur cet amendement n° 96 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour défendre l'amendement n° 77.
M. Jacques Mahéas. Cet amendement est très proche de celui que vient de défendre M. Goulet puisqu'il vise à rendre impératif, pour les candidats au permis de conduire, l'apprentissage des notions élémentaires de premiers secours, des « cinq gestes qui sauvent ».
On nous dira que notre proposition renvoie à un décret et que, par conséquent, cette disposition est d'ordre réglementaire. Certes, nous laissons au décret le soin de déterminer les modalités d'application du dispositif, mais nous tenons à préciser dans la loi que cet apprentissage est assuré par les associations de secourisme agréées. Je pense donc que M. le rapporteur ne pourra pas balayer cet amendement d'un revers de la main au motif qu'il ressortit au domaine réglementaire.
Enfin, après plus de trente ans de tergiversations, le Parlement prend la responsabilité d'inscrire dans la loi l'obligation de l'apprentissage pour tout candidat au permis de conduire des « cinq gestes qui sauvent » : alerter, banaliser, ranimer, compresser et sauvegarder. Ces cinq gestes sont fondamentaux, car ils permettent de sauver des vies dans les cas de blessures ou d'accidents traumatiques.
Sur tous les bancs de nos deux assemblées, de nombreux parlementaires ont soulevé cette question. Pour ce qui est du Sénat, je citerai MM. Poncelet, Bonnet, Barnier, Mme Derycke - elle est la dernière à avoir beaucoup insisté sur ce sujet - et, s'agissant de l'Assemblée nationale, MM. Bocquet et Delnatte. C'est d'ailleurs sur la proposition de ce dernier que l'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, un amendement relatif à la sensibilisation aux notions élémentaires de premiers secours, après avoir examiné sur le même sujet des amendements déposés par MM. Vercamer et Dosière.
A l'apprentissage des cinq gestes qui sauvent, il faut ajouter celui des gestes qu'il ne faut surtout pas faire en cas d'accident. En effet, la controverse qui, jusqu'à présent, a conduit à repousser l'adoption d'une telle mesure porte, justement, sur le risque que des gestes de secours mal effectués ne se transforment en gestes dangereux. L'apprentissage devra donc insister également sur ces gestes à ne pas accomplir.
La nouvelle rédaction de l'article 11 bis suggérée par l'amendement n° 77 est plus précise et insiste sur le caractère impératif de cet apprentissage.
Par ailleurs, nous proposons de spécifier d'ores et déjà, avant que soient prises les dispositions d'ordre réglementaire nécessaires, que l'apprentissage sera dispensé, afin d'en assurer la qualité, par des associations de secourisme agréées. M. le rapporteur avait en effet souligné, à juste titre, que certains gestes pratiqués sur des blessés pourraient se révéler plus néfastes que bénéfiques s'ils étaient dispensés par des personnes insuffisamment formées.
Les associations de secourisme agréées sont d'excellentes préceptrices en matière de gestes nécessaires au sauvetage de vies humaines. L'apprentissage de ces gestes au moment où l'on passe le permis de conduire a donc une valeur pédagogique indéniable. Il renforce l'idée que prendre le volant, c'est avoir une grande responsabilité vis-à-vis de soi-même comme vis-à-vis d'autrui.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 39 rectifié.
Mme Nicole Borvo. Je serai brève, car cet amendement va dans le même sens que ceux qui viennent d'ête défendus.
Je soulignerai simplement qu'au-delà de l'aspect technique - certains ont insisté sur le fait que le permis de conduire sera désormais plus efficace techniquement - se trouve aussi l'aspect humain. De ce point de vue, acquérir une connaissance des gestes de premier secours au moment de l'apprentissage de la conduite présente un avantage certain. Aborder les dangers de la route sous l'angle de l'accidentologie permet de mettre en situation le futur conducteur : l'accident n'est plus pour lui une simple éventualité théorique ou virtuelle, mais revêt un caractère concret. Cela peut également amener le futur conducteur à réfléchir sur le comportement à tenir.
Renvoyer systématiquement au domaine réglementaire n'est pas satisfaisant, et le législateur peut au moins poser des principes.
De plus, on déplore en France la faiblesse de la formation en matière de secourisme. A cet égard, il ne faut pas oublier la suppression du service militaire, qui permettait à certains de bénéficier d'une première formation de secourisme. Certes, je le sais, par le biais des formations professionnelles, il est possible de suivre des stages de secourisme, mais il serait heureux que le Parlement se prononce positivement sur nos amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. Les auteurs de ces trois amendements évoquent un même thème : les gestes qui sauvent. Tous procèdent de sentiments particulièrement généreux : faire en sorte d'épargner des vies. Il reste que le geste qui sauve n'est pas si simple que cela à définir.
M. Jacques Mahéas. Justement !
M. Lucien Lanier, rapporteur. En effet, il est difficile d'être infirmier, on ne s'improvise pas médecin, et chirurgien moins encore.
M. Jacques Mahéas. Il ne s'agit pas de cela !
M. Lucien Lanier, rapporteur. Moi-même, lorsque j'avais treize ou quatorze ans, j'appartenais à un important mouvement de jeunesse et j'y ai appris les gestes qui sauvent. Je croyais avoir découvert le Pérou ! En réalité, je ne savais rien et je risquais même quelquefois, par générosité, d'être dangereux. Il faut donc faire attention en la matière, et la commission des lois y a veillé.
Par ailleurs, ces dispositions relèvent vraiment du domaine réglementaire.
Je comprends bien, monsieur Goulet, que vous vouliez montrer l'importance du sujet en l'inscrivant dans la loi, mais cela ne lui donnera pas pour autant plus d'importance, d'autant que l'article 11 bis du projet de loi apporte une première réponse que la commission des lois a estimé satisfaisante. Je ne résiste pas à l'envie de vous en rappeler les termes : « Les candidats au permis de conduire sont sensibilisés dans le cadre de leur formation aux notions élémentaires de premiers secours. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. » Il semble à la commission des lois que cette disposition est amplement suffisante !
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
En effet, à l'Assemblée nationale, un certain nombre de députés ont souhaité l'introduction du texte que vient de lire M. le rapporteur, aux termes duquel l'apprentissage des notions élémentaires des premiers secours serait intégré à la formation au permis de conduire.
Cela nous paraît une démarche initiale suffisante. Lançons cette initiative et, au bout d'un an, de deux ans ou de trois ans, nous en dresserons le bilan.
Le permis de conduire a déjà été très substantiellement amélioré : comme vous le savez, dans le cadre des directives européennes, les épreuves vont être prolongées.
Par ailleurs, je ne me risquerai pas sur le débat un peu technique des gestes qui sauvent ou qui sont dangereux : j'avoue mon incompétence totale dans ce domaine ; pourtant, je prends le risque de conduire !
Il y a 35 millions de conducteurs, et il y en a de nouveaux chaque année. Il est bon que cette initiation soit prévue lors de la préparation au permis, qui offre l'occasion de faire passer des messages - vous l'avez dit, monsieur le rapporteur - et, donc, de sensibiliser les futurs conducteurs à un certain nombre de risques. Il serait extrêmement difficile d'aller plus loin dans l'immédiat, c'est-à-dire d'aller au-delà du texte tel qu'il vous est proposé à l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 96 rectifié.
M. Alain Vasselle. Je considère que l'initiative de notre collègue M. Goulet est tout à fait intéressante et je remercie M. le rapporteur ainsi que M. le garde des sceaux d'avoir rappelé la disposition qui a été introduite à l'Assemblée nationale et qui est devenue l'article 11 bis.
Je profite de l'occasion, monsieur le garde des sceaux, pour vous remercier de ne pas avoir opposé à notre collègue M. Goulet le caractère réglementaire du dispositif. Au demeurant, vous avez accepté l'amendement présenté à l'Assemblée nationale sans relever qu'il avait ce caractère.
A ce sujet, monsieur le président, ne serait-il pas possible de demander à la commission des lois de faire une bonne fois pour toutes la part entre ce qui est d'ordre réglementaire et ce qui ne l'est point ? J'ai en effet le sentiment que, à propos de certaines des dispositions que nous voulons introduire dans la loi, le Gouvernement ou les rapporteurs des commissions recourent un peu trop facilement à cette objection. Je ne dis pas cela à l'intention de M. Lanier, car cette attitude est celle de tous les rapporteurs : j'ai moi-même rapporté certains textes et il m'est arrivé parfois de faire valoir le caractère réglementaire d'un dispositif pour expliquer qu'il n'avait pas sa place dans la loi.
Aujourd'hui, je suis persuadé que, si vous reprenez le texte que nous examinons en ce moment de son premier à son dernier article, vous y trouverez des dispositions d'ordre réglementaire que le Gouvernement a néanmoins acceptées.
J'aimerais donc bien qu'un jour ou l'autre nous sachions faire la part des choses et que l'on ne nous oppose pas trop facilement le caractère réglementaire de certaines dispositions. Je préfère que, comme M. Lanier et M. le garde des sceaux à l'instant même, on invoque des arguments de fond pour justifier le rejet d'un amendement.
Certes, un certain nombre des principes affichés dans l'amendement n° 96 rectifié renvoient à un décret pour leurs modalités d'application et, comme M. Goulet, j'estime que, dans un domaine aussi sensible que celui des secours, il serait imprudent de notre part d'être trop précis dans la loi et de laisser le sentiment que chaque conducteur pourra exercer à tout moment le geste qui sauve. En effet, pour ne pas faire d'erreur, c'est-à-dire pour ne pas pratiquer le geste qui provoque la mort ou l'invalidité, il faut suffisamment d'expérience et de pratique. Renvoyons donc au décret la mise en oeuvre du dispositif que nous aurons déterminé dans la loi.
De plus, les connaissances acquises en matière de secours ne le sont pas pour la vie ! Si vous ne les avez pas mises en pratique pendant dix ou vingt ans, saurez-vous, face à un accident, faire le bon geste ? A ce moment-là, il vaudra mieux être prudent et vous abstenir. Si l'on accepte le principe d'une formation initiale, il faut donc envisager également la formation continue des conducteurs pour s'assurer qu'à tout moment ils feront le bon geste quand ils devront porter secours aux personnes, ce qui est, là aussi, d'ordre réglementaire.
En la matière, la prudence est tout à fait justifiée, mais l'affichage du principe dans la loi me paraît essentiel. Je remercie donc M. le garde des sceaux d'avoir confirmé à M. Goulet que son souhait correspondait bien à la volonté du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Arnaud, pour explication de vote.
M. Philippe Arnaud. Je voterai l'amendement n° 96 rectifié.
Je ne vais pas reprendre ce qu'a dit notre collègue M. Vasselle, mais je partage tout à fait son point de vue. Les gestes qui sauvent, les gestes élémentaires de survie - et je peux en parler, car j'ai été président pendant de nombreuses années d'une association départementale de protection civile qui dispensait des cours de secourisme - supposent une formation continue. Il est vrai aussi que l'apprentissage aux premiers secours et aux gestes élémentaires de survie informe surtout sur ce qu'il ne faut pas faire.
Toutefois, il existe un autre lieu pour rendre cet apprentissage plus généralisé : c'est l'école. Nous avons engagé des politiques à cet égard et, dans certains départements, elles fonctionnent bien : dans les classes de troisième ou de seconde, des équipes de spécialistes viennent assurer cette formation.
Certes, il vaut mieux que le conducteur bénéficie, au cours de sa formation de conducteur, d'un apprentissage des gestes de premier secours. Mais c'est après l'accident que c'est utile ! Or, très souvent, le conducteur lui-même peut être victime de cet accident, et cela n'a donc aucun sens dans beaucoup de cas. Il vaut mieux que ce soit un passager ou quelqu'un d'extérieur qui intervienne sur l'accident lorsque le conducteur lui-même est victime.
Deuxième observation, je trouve un peu curieux, mes chers collègues, que nous soyons amenés à nous prononcer sur un texte dont l'effet n'intervient qu'après l'accident, alors que, par mon amendement, tout à l'heure, je vous faisais des propositions pour limiter préventivement le nombre d'accidents. On m'a dit que ma proposition était d'ordre réglementaire, mais je reviendrai sans doute dans les mois qui viennent sur ce sujet, car il doit être pris en compte : plutôt que de souhaiter une formation aux gestes qui interviennent après l'accident, je préfère mettre tout en oeuvre pour réduire le nombre des accidents.
Quoi qu'il en soit, je le répète, je voterai cet amendement parce qu'il va dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet, pour explication de vote.
M. Daniel Goulet. Je me félicite que nos collègues de l'Assemblée nationale aient adopté l'amendement qui est devenu l'article 11 bis. Cela étant, la sensibilisation des candidats nous semble insuffisante ; il nous paraît préférable que les intéressés soient tenus de connaître les notions élémentaires de secourisme. Les quatre auteurs de cet amendement auraient d'ailleurs voulu aller un peu plus loin.
Nous nous félicitons toutefois, comme tout à l'heure Alain Vasselle, que nous n'ayez pas évoqué le seul argument du domaine réglementaire. Cela étant, je ne peux pas retirer cet amendement, parce que les collègues qui l'ont signé avec moi ne sont pas là pour m'y autoriser.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'amendement n° 77.
M. Jacques Mahéas. Nous allons tenter de faire adopter un amendement qui procède du même état d'esprit que le précédent.
Beaucoup d'entre nous ici sont d'accord pour dire que le texte adopté par l'Assemblée nationale traduit une avancée. Et ces différents amendements ont pour objet de préciser que la formation ne doit pas être dispensée par n'importe qui. Les uns et les autres, nous estimons que cet apprentissage doit être dispensé par des associations de secourisme agréées.
On a souvent l'impression qu'il faut être pompier, sauveteur ou médecin pour pouvoir apprendre les cinq gestes qui sauvent. Il ne s'agit pas de cela.
Comme on a pu le constater lors de certains accidents nécessitant parfois l'intervention de professionnels, le balisage de l'accident n'est pas toujours ce qui vient à l'esprit de la personne qui s'arrête. Alerter les secours n'est certainement pas non plus l'un de ses premiers gestes. Si l'on apprenait à tous les futurs conducteurs à baliser les lieux d'un accident pour éviter le suraccident, ce serait bénéfique pour tout le monde.
Très jeune, j'ai passé des examens de secourisme. La pratique des points des compressions n'est pas insurmontable et la technique de la respiration artificielle que l'on acquiert sur un mannequin est un geste simple de la vie courante.
J'insiste sur ces aspects, car je souhaite convaincre mes collègues d'adopter notre amendement. Je souhaite qu'une réflexion supplémentaire s'engage et que le législateur, dont c'est le rôle, précise qui fait quoi, en laissant au Gouvernement le soin de prendre les décrets nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.
M. Jean-René Lecerf. Je voterai l'amendement de M. Mahéas car je connais bien la formation aux cinq gestes qui sauvent. Elle est d'ailleurs largement dispensée par une association du département du Nord dont je suis l'élu et elle n'a guère donné lieu à critiques de la part des autorités médicales depuis tout ce temps.
Par ailleurs, voilà vingt-cinq ans, j'étais l'assistant parlementaire de Serge Charles, à l'époque député et maire de Marcq-en-Baroeul. Il avait essayé à l'époque de faire en sorte que cette formation figure dans les conditions permettant d'obtenir le permis de conduire. Le Gouvernement lui avait répondu que cela relevait du domaine réglementaire, mais qu'il allait s'en préoccuper. Cela fait vingt-cinq ans !
Je fais beaucoup plus confiance à ce Gouvernement, notamment après la réponse qui a été faite à mon collègue Patrick Delnatte à l'Assemblée nationale. Il n'en reste pas moins que, pour toutes ces raisons, je ne peux pas ne pas voter l'amendement de M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 77.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11 bis.
(L'article 11 bis est adopté.)