ANNEXE N° 4 :
LES GRANDES ÉTAPES DE LA
PROCÉDURE BUDGÉTAIRE
A.
LE RÔLE DE LA DIRECTION DU BUDGET
Le déroulement du processus administratif d'élaboration du projet
de loi de finances couvre une période de plus de dix mois,
constituée de plusieurs étapes, chacune d'entre elles donnant
lieu à des arbitrages ministériels et interministériels.
La procédure budgétaire comporte deux moments importants :
la définition de la stratégie budgétaire d'une part, et la
préparation du budget proprement-dite d'autre part.
• La définition de la stratégie budgétaire
Au cours de cette période, qui va du mois de décembre n-2 au mois
de mars n-1, l'information du ministre repose fondamentalement sur les
directions du budget et de la prévision. Il s'agit de disposer d'un
éclairage sur la situation économique probable à horizon
de quatre ans mais aussi sur les besoins des administrations et les souhaits
des ministres pour que le ministre des finances puisse proposer au Premier
ministre les grands choix, en matière de dépenses.
La direction du budget procède, entre les mois de décembre et
février, à un exercice interne de perspectives
budgétaires, qui se déroule en deux étapes :
- Première étape : la programmation pluriannuelle
stratégique
Les travaux de projection conduits par les différents bureaux et
synthétisés par le bureau 1A conduisent à retenir un
sentier d'évolution des finances publiques à horizon n+3.
Ce travail donne lieu à la rédaction d'un document
dénommé " programmation " qui comporte, outre une note
de synthèse sur la problématique définie par chaque bureau
sectoriel de la direction du budget, une description de la dépense.
Toutefois, les dossiers de programmation ne décrivent pas la
dépense au niveau des chapitres budgétaires, mais selon une
présentation simplifiée en postes fonctionnels. Il s'agit en
effet, pour la direction du budget, et alors que la loi de finances initiale de
l'année n-1 vient juste d'être adoptée, de mener un
exercice prospectif poursuivant un double objectif : s'assurer des
conditions d'application du programme pluriannuel de finances publiques, et
fournir une première esquisse macro-budgétaire du projet de loi
de finances de l'année n.
Cette première étape de la programmation donne lieu à la
rédaction de deux séries de documents :
• le programme pluriannuel de finances publiques, établi
conjointement avec la direction de la prévision, qui est notifié
aux institutions communautaires ;
• la note de programmation stratégique du directeur du budget,
accompagnée des dossiers thématiques et des documents horizontaux
qui la détaillent.
- Deuxième étape : l'analyse de la reconduction, qui
aboutit à la préparation de l'esquisse du projet de loi de
finances de l'année n.
Les résultats des travaux de programmation sont affinés à
partir de l'analyse de l'exécution du dernier exercice connu, celui de
l'année n-2, clos deux mois plus tôt. Les réunions de
reconduction avec les ministères, qui se tiennent en février,
permettent d'évaluer de manière contradictoire le niveau des
services votés et de préciser les mesures nouvelles et les
éventuelles économies.
L'esquisse macro-budgétaire du dossier de programmation est alors
affinée. Les dépenses de chaque secteur sont décrites au
niveau des chapitres budgétaires, et chacune des positions
proposées est justifiée de façon argumentée.
A la fin du mois de mars ou au début du mois d'avril, le directeur du
budget expose alors au ministre du budget le contenu de son esquisse
, en
particulier le rythme de progression des dépenses, une sélection
des priorités budgétaires, des propositions d'économies.
Cette esquisse est accompagnée d'une analyse de l'évolution des
comptes des autres administrations publiques - administrations de
sécurité sociale, organismes divers d'administration centrale,
administrations publiques locales - afin d'évaluer l'évolution du
besoin de financement et de la dette dans le cadre du périmètre
fixé par le traité de Maastricht. L'ensemble de ces documents
permettent au ministre du budget de valider ou d'amender l'esquisse
budgétaire, qui est ensuite présentée au Premier ministre.
• La préparation du budget
La préparation du budget proprement-dite comprend deux phases
principales :
- de mai à juillet : la phase de négociation et
d'arbitrage
Cette première phase donne lieu aux discussions entre la direction du
budget et les ministères, chacun d'entre eux préparant ses
propositions qui comprennent la reconduction des moyens indispensables au
maintien des services publics, des mesures nouvelles que le ministre souhaite
mettre en place et pour lesquelles des moyens financiers supplémentaires
sont nécessaires et, comme l'indique la direction du budget
elle-même, "
parfois, des propositions
d'économies
".
Comme on le voit, ces discussions sont essentiellement axées sur la
reconduction des services votés et sur la négociation de
crédits supplémentaires.
La direction du budget a toutefois
indiqué à votre commission que "
dans l'optique de la
réforme de la procédure budgétaire,
[...]
les
conférences budgétaires sont consacrées à l'examen
des économies et des mesures nouvelles prioritaires
", les
sujets techniques ayant été traités à l'occasion
des réunions de février.
C'est en effet au cours du mois de mai qu'ont lieu les conférences
budgétaires.
Les conférences budgétaires
Les
conférences budgétaires s'organisent en trois temps.
Une première réunion dite de " reconduction " marque le
point de départ des discussions interministérielles.
Les conférences budgétaires dites " de première
phase " devant se concentrer sur la recherche d'économies et de
marges de redéploiement au profit des priorités du gouvernement,
il est apparu nécessaire, en 1996, de rationaliser la procédure
de préparation du projet de loi de finances et d'examiner plus tôt
dans l'année les sujets d'ordre technique.
La direction du budget et les services de chacun des ministères se
rencontrent donc dès le mois de février afin de :
- dresser un bilan des conditions d'utilisation des dotations
budgétaires de l'année précédente de manière
à aboutir à une analyse critique de l'exécution de la
dépense publique ;
- confronter leur estimation du budget de reconduction, ou budget
préparatoire, qui constitue le socle des dépenses incompressibles
à politique publique inchangée, à partir duquel pourront
débuter les discussions sur les économies et les mesures
nouvelles au cours des conférences budgétaires.
Dans un second temps, débutent les conférences budgétaires
proprement-dites, " de première phase " puis " de seconde
phase ".
Le ministre est tenu informé des points de désaccord qui
nécessitent le cas échéant un arbitrage des cabinets, des
ministres eux-mêmes ou du Premier ministre. Des dossiers d'arbitrage
sectoriel sont ainsi constitués au mois de juin pour chaque budget.
Selon les informations communiquées à votre commission, il
n'existe pas de comptes-rendus des réunions d'arbitrage que sont les
conférences budgétaires. La direction du budget lui a en effet
indiqué que "
ces conférences budgétaires sont
organisées de manière très souple et ne sont soumises
à aucun formalisme particulier
", ajoutant que "
les
accords passés avec les ministères techniques sont le plus
souvent tacites. Il faut souligner qu'aucune procédure spécifique
n'a été formalisée en matière de compte-rendu de
ces conférences, bien que certaines tentatives en ce sens aient pu
être expérimentées dans le passé
".
Au cours des conférences budgétaires, la direction du budget
remplit une mission fondamentale : celle de " gardien du
temple " budgétaire.
En effet, elle doit alors faire respecter le cadre macro-budgétaire
défini en amont par le gouvernement, veiller à la
réalisation d'économies mais aussi au financement de ses
priorités, et respecter les limites des crédits. C'est sans doute
à cette occasion que la direction du budget a acquis sa
réputation de " dire toujours non ".
- en août et septembre : la phase de mise au point
définitive du projet de loi de finances
A ce stade, l'essentiel du volet dépenses est déterminé.
Il subsiste certains ajustements techniques à réaliser. Il faut
également préciser les mesures nouvelles accordées et
examiner les éventuels redéploiements de crédits
proposés par les ministères, dans le respect des plafonds
fixés. La direction du budget et les services de différents
ministères se rencontrent alors de nouveau :
ce sont les
conférences budgétaires de deuxième phase.
Elles
donnent également lieu à des arbitrages, mais qui sont beaucoup
moins nombreux qu'en première phase. Les " bleus "
budgétaires sont alors élaborés.
Une fois déterminé le solde budgétaire, le projet de loi
de finances est soumis au Conseil d'Etat, qui se prononce sur la
légalité des articles proposés et sur leur
rédaction. Puis il est présenté et adopté en
Conseil des ministres à la mi-septembre.
Débute alors la phase parlementaire d'examen du projet de loi de
finances.
B. LE RÔLE DES AUTRES DIRECTIONS DU MINISTÈRE
1. La direction de la prévision
Les missions de la direction de la prévision sont de trois ordres.
• Son premier rôle consiste à prévoir, par la
procédure bi-annuelle des budgets économiques, les principaux
agrégats macroéconomiques, élaborés dans le cadre
de la comptabilité nationale.
Les budgets économiques d'hiver
, dont les travaux techniques
débutent en décembre et dont les résultats finaux sont
transmis au cabinet du ministre au mois de mars, traitent de l'année qui
vient de s'écouler, de l'année en cours et de l'année
à venir. Pour cette dernière, ils visent notamment à
arrêter les hypothèses macroéconomiques utilisées
pour préparer le projet de loi de finances.
En matière de finances publiques, les budgets économiques d'hiver
permettent d'éclairer les termes de l'arbitrage entre dépenses
publiques, prélèvements obligatoires et déficit public, en
amont de la préparation du projet de loi de finances. Ils permettent
également d'apprécier l'incidence de la conjoncture sur le solde
public et l'impact macroéconomique des finances publics.
Les budgets économiques d'été
sont
élaborés entre les mois de juillet et septembre. Cet exercice
permet d'affiner la préparation du projet de loi de finances.
• Le deuxième rôle de la direction de la prévision
consiste à participer aux travaux du conseil de politique
économique qui concernent occasionnellement les questions
budgétaires.
Comme cela a déjà été indiqué, la direction
de la prévision participe à l'élaboration du programme
pluriannuel de finances publiques, régulièrement à l'ordre
du jour du conseil de politique économique.
• Enfin, la direction de la prévision réalise certains
documents publics tels que le rapport économique, social et financier
(RESF) annexé au projet de loi de finances. Elle élabore
également, conjointement à la direction du budget, le rapport
déposé par le gouvernement dans le cadre du débat
d'orientation budgétaire.
2. La direction du trésor
La direction du trésor intervient à plusieurs titres dans
l'élaboration du projet de loi de finances.
Elle participe, en liaison avec la direction du budget et la direction de la
prévision, à l'élaboration de la stratégie à
moyen terme d'évolution des finances publiques françaises dans le
cadre du programme pluriannuel de finances publiques transmis aux institutions
communautaires. Ledit programme est présenté devant le
comité économique et financier européen avant la
discussion par le conseil Ecofin, le représentant français au
comité étant issu de la direction du trésor.
La direction du trésor gère également plusieurs chapitres
budgétaires et, à ce titre, contribuent en liaison avec la
direction du budget, à l'élaboration de la loi de finances.
Les principaux chapitres sont les suivants :
- la charge de la dette négociable ;
- les dispositifs de financement du logement ;
- l'aide publique au développement, les dotations internationales, les
prêts du trésor, le commerce extérieur ;
- le compte d'affectation spéciale des produits de cession de titres du
secteur public ;
- les prêts du Fonds de développement économique et social
(FDES).
La prévision de la charge de la dette
La
prévision de la charge de la dette qui figure dans le projet de loi de
finances repose sur deux éléments :
- des hypothèses conventionnelles de financement de l'Etat pour
l'année n+1, élaborées en n à partir du
déficit budgétaire du projet de loi de finances et des
amortissements de l'année à venir : ces hypothèses
peuvent différer du programme de financement indicatif publié par
le ministre en début d'année n+1 pour tenir compte du
déficit budgétaire effectivement voté par le Parlement et
des éventuels rachats de dette effectués en fin d'année n
sur des titres de maturité n+1 ;
- des hypothèses de taux d'intérêt tirées de la
revue
Consensus forecast
: pour la France, cette revue reprend les
prévisions de dix-neuf banques, instituts de conjoncture et
entreprises ; la moyenne de ces prévisions permet de dégager
un
consensus de marché
sur les taux d'intérêt
à 3 mois et à 10 ans, dans trois mois et dans un an.
Le calendrier de prévision de la charge de la dette est le suivant :
- une première estimation de la charge de la dette est
réalisée en avril de l'année n dans la perspective de la
conférence budgétaire budget/trésor qui a lieu
traditionnellement au début du mois de mai ; les hypothèses
de taux d'intérêt sont celles du consensus de marché
publié à la fin du mois d'avril ;
- une deuxième prévision est effectuée à la fin du
mois de juin, avant la transmission des lettres-plafonds applicables, au budget
des charges communes ; les hypothèses de taux
d'intérêt utilisées sont celles du consensus de
marché du mois de juin ;
- enfin, de nouvelles prévisions sont réalisées lors de
l'élaboration des lois de finances rectificatives ou lorsque des
évolutions de marché le rendent nécessaire.
3. La direction générale de la comptabilité publique
Le rôle de la direction générale de la comptabilité
publique dans l'élaboration du volet dépenses du projet de loi de
finances est limité, puisqu'elle intervient essentiellement en
matière de prévision des recettes.
Il est plus important en revanche s'agissant du projet de loi de
règlement, puisque, outre le projet de loi lui-même, cette
direction générale élabore le compte général
de l'administration des finances, qui retrace les résultats annuels,
à la fois sous une optique budgétaire et patrimoniale.
Le document ci-après récapitule les grandes étapes de
l'élaboration du projet de loi de finances, tant du côté
des services de Bercy que de celui du Parlement :
GOUVERNEMENT |
PARLEMENT |
Au
cours du
premier trimestre
le ministère du budget
procède à une
PHASE INTERNE d'élaboration des
perspectives budgétaires
qui aboutissent à un
" cadrage ".
|
|
Au mois d'avril le premier ministre envoie à chaque ministre des " lettres de cadrage " qui définissent pour chaque département ministériel l'évolution de ses crédits au sein du budget de l'Etat. |
De janvier à septembre : PHASE DE CONTRÔLE. Le Parlement, à travers ses différentes commissions et notamment sa commission des finances procède à des contrôles de l'exécution du budget voté. |
Avril-mai
: une PHASE CONTRADICTOIRE
commence
entre le ministère du budget et les autres ministères (dits
" dépensiers ").
|
|
Juin
: PHASE D'ARBITRAGE.
Les dossiers de
désaccord sont soumis à l'arbitrage au niveau des ministres
" dépensiers " et du ministre du budget.
|
Mai-Juin
: débat d'orientation
budgétaire
à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Ce débat est préparé à partir d'un document
déposé par le gouvernement et par les rapports des commissions
des finances. Il intervient avant l'envoi des " lettres-plafonds ".
|
GOUVERNEMENT |
PARLEMENT |
Juillet-août
sont consacrés aux
" conférences de deuxième phase "
qui
réunissent les bureaux compétents du ministère du budget
et leurs équivalents de chaque ministère. Elles
définissent précisément les dotations budgétaires
par ligne de crédits (chapitres subdivisés en articles) à
l'intérieur du plafond arrêté.
|
Juillet-août : publication du rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances de l'année N-2. Elle permet un questionnement complémentaire des rapporteurs spéciaux aux ministères. |
Août : PHASE D'ELABORATION : les documents budgétaires législatifs (" bleus ") sont établis par chaque ministère et avalisés par la direction du budget. |
|
Septembre :
la commission des comptes
économiques de la nation
est réunie.
|
Septembre-octobre : travaux des commissions parlementaires, auditions et rédaction des rapports de la commission des finances (sur les recettes, les dépenses et l'équilibre) et des avis des autres commissions (sur les dépenses). |
|
2 octobre : ouverture de la session unique du Parlement. |
|
Discussion en première lecture à l'Assemblée nationale qui dispose de 40 jours pour discuter le budget. |
|
Discussion en premier lecture au Sénat qui dispose de 20 jours pour l'examen de la loi de finances. |
|
Navettes et commission mixte paritaire (environ 8 jours). |
|
Adoption définitive. |
|
Éventuelle saisine du Conseil constitutionnel. |
|
Promulgation le 31 décembre. |