CHAPITRE II :
LES RECETTES : UNE
VARIABLE ALÉATOIRE DIFFICILE À PRÉVOIR
Les
recettes du budget général de l'Etat varient en fonction de la
conjoncture économique. Ainsi, selon le cas, le gouvernement disposera
de " marges de manoeuvre " pour la réduction du
déficit, la baisse des impôts ou l'accroissement des
dépenses, ou au contraire, sera contraint à faire des choix
d'amputation de la dépense ou d'augmentation des
prélèvements, afin de ne pas laisser se dégrader le solde
budgétaire.
Si le gouvernement dispose de moyens pour prévoir les rentrées de
recettes fiscales, qui constituent l'essentiel des recettes de l'Etat, il sait
que toutes les prédictions sont soumises à des aléas.
Souhaitant garder la maîtrise de l'évolution des finances
publiques, il agit donc sur les données qui sont à sa
disposition : il " pilote " à vue les recettes non
fiscales et joue sur les imputations comptables d'un exercice sur l'autre, sans
en informer le Parlement.
Ce jeu est particulièrement dangereux lorsqu'il est mal
maîtrisé et accentue les évolutions naturelles à la
hausse ou à la baisse des recettes.
I. LA PRÉPARATION DE LA LOI DE FINANCES EN RECETTES : UN EXERCICE DÉLICAT
Les
recettes du projet de loi de finances sont évaluées en fonction
de la croissance (évolution spontanée des recettes) et des
mesures fiscales nouvelles présentées par le gouvernement. Les
principaux avantages fiscaux, dénommés " dépenses
fiscales ", sont retracés dans le tome II du fascicule " Voies
et moyens " annexé au projet de loi de finances.
Il apparaît que le chiffrage des dépenses fiscales présente
quelques difficultés, alors que l'exercice d'évaluation des
mesures nouvelles est soumis à de fortes considérations
d'opportunité politique.
A. L'ÉVALUATION DE LA HAUSSE SPONTANÉE DES RECETTES
1. Un exercice fondé sur les prévisions de croissance...
Les prévisions de recettes se fondent avant tout sur des prévisions macro-économiques élaborées par la direction de la prévision.
Le rôle de la direction de la prévision
En
réponse au questionnaire qui lui a été adressé,
celle-ci a précisé son rôle dans l'élaboration de la
loi de finances : "
Le premier rôle de la direction de la
prévision consiste à prévoir, par la procédure
bisannuelle des budgets économiques, les principaux agrégats
macro-économiques
. La direction travaille dans le cadre de la
comptabilité nationale et sa prévision comporte à la fois
les différents agrégats macro-économiques relatifs
à l'équilibre des biens et services (croissance du PIB et de ses
différentes composantes, en volume et en valeur) et les comptes des
différents agents au sens de la comptabilité nationale :
ménages, entreprises, administrations publiques (...).
Les budgets économiques d'hiver, dont les travaux techniques
débutent en décembre et dont les résultats finaux sont
transmis au cabinet au mois de mars, traitent de l'année qui vient de
s'écouler, de l'année en cours et de l'année à
venir. Ils visent notamment à arrêter les hypothèses
macro-économiques utilisées pour préparer le projet de loi
de finances ....
Les budgets économiques d'été ont lieu de juillet à
septembre. Ils permettent également, à une date qui a
été variable selon les années, une confrontation des
prévisions de recettes fiscales pour l'année en cours et
l'année à venir, et un arbitrage similaire par le cabinet. Cet
exercice permet d'affiner la préparation du projet de loi de finances et
notamment du calibrage des différentes mesures fiscales
".
La direction de la prévision transmet "
souvent fin
janvier
" les résultats intermédiaires concernant ses
hypothèses macro-économiques aux directions du ministère
de l'économie, des finances et de l'industrie (direction du budget,
direction générale de la comptabilité publique, direction
générale des impôts, direction de la législation
fiscale, direction générale des douanes) pour qu'elles assoient
leurs prévisions de recettes fiscales sur des hypothèses
macro-économiques communes.
Les hypothèses de construction de la loi de finances, précisées par le directeur de la prévision lors de son audition
"
Nous avons une procédure séquentielle.
Pour
prendre l'exemple du projet de loi de finances, nous faisons une
première prévision
, à la fois macro-économique
et sur les finances publiques, en général à partir de la
fin juin et jusqu'à la mi-août.
Ensuite, ces comptes qui constituent une première étape, sont
présentés au cabinet du ministre, plus exactement au conseiller
économique et aux conseillers chargés de la fiscalité et
des finances publiques. A partir de là, nous avons des itérations
qui concernent souvent la prise en compte de nouvelles mesures de politique
économique, à savoir qu'il est possible de modifier le cadrage
sur la dépense ou, souvent, d'incorporer des mesures nouvelles en
recettes. Parfois, ce que nous disons à partir de ce premier jet modifie
le réglage de politiques fiscales ou budgétaires et nous avons
une discussion sur les hypothèses économiques avec les experts
(...)
Nous refaisons ensuite un deuxième tour qui incorpore les
modifications de variables exogènes que le cabinet a pu nous communiquer
dans la dimension de la politique budgétaire et fiscale et qui prend
en compte éventuellement le résultat de débats sur nos
hypothèses macro-économiques.
Cet exercice qui, d'après moi, est intéressant nous concernant,
se conduit dans le cas des hypothèses macro-économiques dans un
cadre malgré tout assez restreint.
L'ampleur des modifications que
l'on peut apporter à l'issue d'une discussion aux prévisions
macro-économiques est en général très
limité
, car nous savons qu'en tout état de cause nous avons
beaucoup d'interlocuteurs à qui nous présenterons ces
prévisions, tels que le groupe technique de la commission des comptes
qui se réunit en général au début du mois d'octobre
et dans lequel nous comparons nos prévisions avec celles des principaux
instituts de conjoncture
".