2. Avec les exercices de programmation pluriannuelle des finances publiques
Lors de
son audition par votre commission M. Laurent FABIUS a relevé
l'intérêt de ces exercices qui permettent
"
d'éclairer la réflexion du gouvernement sur l'effort
envisageable pour atteindre les objectifs fixés
". Il
poursuivait en soulignant "
l'aspect absolument décisif de
la situation européenne et de nos engagements européens.
Désormais nous travaillons en liaison avec nos collègues. La
relation n'est pas seulement théorique
.
Cet
élément qui n'existait pas il y a 15 ans ou même 10 ans est
déterminant. C'est une donnée quand on réfléchit
aux marges de manoeuvre, c'est-à-dire à ce que l'on peut ou non
modifier
".
Cette réflexion repose principalement sur l'élaboration des
programmes de stabilité qui visent à présenter devant les
instances européennes une vision d'ensemble de la situation des finances
publiques ne se réduisant pas au seul budget de l'Etat mais
intégrant les régimes sociaux, les collectivités locales
et les organismes divers d'administration centrale (ODAC). Elle est
complétée par un exercice plus ponctuel de programmation portant
sur l'évolution des seules dépenses de l'Etat.
Récemment mise en oeuvre, une telle réflexion doit être
affinée et précisée afin de rendre plus
opérationnelle l'articulation entre la procédure
budgétaire de " droit commun " et la programmation
européenne.
a) Le programme de stabilité
La
direction du budget et la direction de la prévision jouent un rôle
de maître d'oeuvre dans l'élaboration du programme pluriannuel des
finances publiques déposé chaque année auprès des
institutions européennes.
Ainsi la première programmation pluriannuelle des finances publiques a
été déposée par la France en décembre 1998
et portait sur les années 2000-2002, la seconde déposée en
janvier 2000 auprès de la Commission européenne constitue son
actualisation en glissement sur les années 2001-2003.
L'exercice de programmation des finances publiques pour les années
(n+2 ; n+4) débute au mois de septembre (n) et s'achève en
principe fin décembre (n). Les travaux partent de projections
macro-économiques à moyen terme réalisées par la
direction de la prévision et concernent les comptes de l'ensemble des
administrations publiques dont elles apprécient par ailleurs la
sensibilité aux principales hypothèses macro-économiques
ou macro-budgétaires.
Plusieurs itérations ont lieu avec le conseil de politique
monétaire présidé par les ministres de l'économie
et des finances et la secrétaire d'Etat au budget, auquel participent
les directeurs du budget, de la prévision, du trésor et de
l'INSEE. La synthèse en est effectuée par la direction du budget
et la direction de la prévision qui transmettent le projet de document
pour arbitrage au ministre de l'économie et des finances et au
secrétaire d'Etat au budget.
b) Les instruments internes de programmation pluriannuelle des dépenses de l'Etat
Parallèlement à ce programme la direction du budget a mis en place depuis 1998, un exercice interne de programmation à moyen terme des dépenses de l'Etat qui a pour vocation de détailler la partie du programme de stabilité relative au seul Etat et d'éclairer le gouvernement pour le cadrage de l'année suivante. Pour les années 2001-2003 cet exercice a débuté en octobre 1999 et s'est achevé par la remise en février 2000 d'un document de synthèse aux ministres.
c) Les difficultés d'articulation des exercices de programmation avec la loi de finances
Comme l'a souligné M. Christophe BLANCHARD-DIGNAC lors de son audition : " L'articulation avec le programme de stabilité connaît un problème de date, celui-ci ne correspond pas au calendrier parlementaire ". Ce décalage par rapport aux calendriers internes de préparation et de suivi des budgets a eu pour effet de faire que, en 1999 et en 2000 les chiffres figurant dans ce programme ont du être corrigés quelques semaines après leur transmission : le poids de la dette publique dans le PIB a été minoré et celui des prélèvements obligatoires majoré en raison des résultats définitifs de l'exécution 1999 que le gouvernement n'a reconnu que tardivement.
Des chiffres présentés dans le programme de stabilité de janvier 2000 à la réalité de l'exécution en mars 2000.
Lors de
son audition, M. Jean-Philippe Cotis déclarait ainsi
" le
calendrier du programme de stabilité dont il est inévitable qu'il
se passe à l'automne, rend la situation extrêmement
compliquée, car il faut remettre en théorie le programme de
stabilité avant la fin du mois de décembre alors même que
nous n'avons pas encore l'exécution, ce qui peut donner lieu à de
vraies difficultés. Nous en avons eu l'illustration cette année.
C'est une procédure récente. Elle est très importante pour
les pays membres mais, conjointement, elle court le risque d'être assise
sur une année initiale éventuellement un peu
périmée. C'est complexe.
Si chacun attend de voir clair, nous remettrons ces programmes avec deux mois
de retard ; il est alors trop tard pour la Commission qui doit examiner
ces programmes et en tirer les conclusions au titre de ses grandes orientations
de politique économique qui ont lieu au printemps. Nous avons ce timing
qui s'impose à nous, qui a sa justifications bruxelloise, mais qui nous
met dans une situation éventuellement spectaculairement en
porte-à-faux, ce qui était le cas cette année ".
Ainsi, le mercredi 26 janvier 2000, votre commission procédait à
l'audition du ministre de l'économie et de la secrétaire d'Etat
au budget sur le programme pluri-annuel 2001-2003 tel qu'il avait
été transmis. A cette occasion, le gouvernement indiquait
notamment que le niveau des prélèvements obligatoires
augmenterait de 0,4 point en 1999 par rapport à 1998 pour
s'établir à 45,3 points de PIB. De même, il envisageait en
1999 la stabilisation du poids de la dette dans le PIB au niveau de 1998 (60,3
points) et sa décrue pour 2000 (- 0,9 point soit 59,4 % du PIB).
Le mercredi 15 mars 2000, votre commission entendait à nouveau les deux
ministres sur l'exécution budgétaire de 1999 et les perspectives
pour 2000.
En moins de six semaines, deux éléments avaient changé par
rapport au programme pluriannuel transmis aux autorités
européennes : le niveau des prélèvements obligatoires
était à nouveau réévalué : le
gouvernement le chiffrait à 45,6 points de PIB, il fut effectivement de
45,7. A contrario, eu égard à la réduction plus forte que
prévu du déficit public, et à une gestion active de la
dette publique, son poids dans le PIB diminuait dès 1999 et non à
partir de 2000.
1998 1999 2000
Chiffres donnés dans le programme de stabilité de 44,9 45,3
44,8
janvier 2000
Taux de prélèvements obligatoires effectivement
réalisé 44,9 45,7 ?
Aussi, lors de son audition, M. Laurent FABIUS a-t-il rappelé que
"
nous avons des dates - habituellement c'est au mois de
décembre que nous transmettons les documents concernés - mais ce
ne sont pas exactement les mêmes que celles de notre exercice interne, si
bien que c'est trop tôt pour les uns, trop tard pour les autres. Il faut
donc que nous réfléchissions à la façon dont nous
pourrions harmoniser les exercices
.
Je vous propose d'y
réfléchir et de faire des suggestions. Actuellement, j'en suis
d'accord, ce n'est pas très satisfaisant
".
De même, s'agissant de l'exercice propre à la direction du budget
de programmation des dépenses de l'Etat, celle-ci, dans ses
réponses écrites au questionnaire adressé par votre
commission, en a souligné le caractère récent et à
ce titre, certainement perfectible : "
Cette
procédure, en certains points expérimentale, n'en est donc
qu'à sa deuxième année d'exercice "
.
M. Denis MORIN, évoquant cette divergence qui ne serait pas propre
à la France a proposé une solution : "
Ce
problème pourrait être réglé en faisant une
transmission un peu plus précoce, dans le courant du mois de
décembre, d'un document provisoire qui pourrait ensuite, au début
du mois de février, être réajusté pour tenir compte
des données d'exécution budgétaire de la dernière
année. Je crois que c'est ainsi que les Allemands entendent
procéder à partir de l'année prochaine et c'est la
suggestion que nous pourrions retenir pour la France
également
". Interrogé sur cette même question de
l'articulation entre le programme de stabilité et le calendrier interne,
M. Christophe BLANCHARD-DIGNAC faisait référence à la
situation de nos partenaires : "
Comment font certains
pays ? Deux programmes : un temporaire et un définitif
.
Le calendrier européen veut que l'on dépose les programmes
pluriannuels avant le 1
er
mars, et qu'on notifie
ensuite au
1
er
avril et au 1
er
septembre la situation
prévisionnelle de l'année en cours
".