2. Un mouvement de rationalisation de l'intercommunalité qui doit être approfondi
a) Des progrès incontestables
Le bilan
établi par votre mission d'information a mis en évidence le
renforcement continu de l'intercommunalité de projet.
Ce mouvement engagé avant même l'adoption de la loi du 12 juillet
1999, a été conforté par les dispositions de ce texte
auquel le Sénat a apporté sa pleine contribution.
La
suppression
d'un certain nombre de structures (districts,
communautés de villes et, à terme, les syndicats
d'agglomération nouvelle) et une
meilleure hiérarchisation
des catégories d'établissements publics de coopération
intercommunale (communautés urbaines, communautés
d'agglomération, communautés de communes) sont de nature
à
rationaliser
le " paysage " de
l'intercommunalité.
Le nombre élevé (51) de
communautés
d'agglomération
créées avant le 31 décembre
1999 souligne l'impact positif d'un
dispositif incitatif
qui peut
permettre de remédier à l'échec des formules de
coopération en milieu urbain.
En outre, les incitations financières adoptées au profit des
communautés de communes
soumises au régime de la taxe
professionnelle unique, grâce à l'impulsion du Sénat, ont
contribué efficacement à un recours accru à ce
régime fiscal, facteur de rationalisation en ce qu'il évite les
concurrences abusives entre les communes pour attirer les entreprises. Elles
ont également permis, comme l'avait demandé le Sénat, de
réaliser un
indispensable rééquilibrage
entre le
milieu urbain et le milieu rural, que les communautés de communes ont
désormais vocation à concerner principalement.
Sur le plan des compétences, les fonctions
d'aménagement
et de
développement
- exercées à titre obligatoires
par les structures à fiscalité propre - sont désormais
placées au premier rang. Or elles jouent un
rôle
stratégique
dans le renforcement des territoires.
Le
régime juridique
de l'intercommunalité a
incontestablement été clarifié par la
réduction
du nombre de catégories d'établissements
publics de coopération intercommunale. La dispersion des structures
avait, en effet, constitué l'un des facteurs essentiels de la
complexité excessive du cadre juridique applicable. En outre, la mis en
place - conformément aux recommandations du groupe de travail de votre
commission des Lois - d'un
" tronc commun "
des dispositions
ayant vocation à s'appliquer à l'ensemble des catégories
d'établissements publics de coopération intercommunale constitue
un élément essentiel de simplification.
b) Des améliorations souhaitables
Votre
mission d'information souhaite que ce mouvement de rationalisation soit
poursuivi et approfondi.
Différentes interrogations soulevées par le Sénat lors des
travaux préparatoires de loi du 12 juillet 1999
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devront en particulier recevoir des
réponses dans les prochaines années.
L'objectif de simplification
du cadre juridique de
l'intercommunalité, déjà engagé, devra être
parachevé. Quels que soient les progrès qui ont
résulté à la fois de la réduction du nombre de
catégories d'établissements publics de coopération
intercommunale et de l'édiction de règles communes dans le code
général des collectivités territoriales, les dispositions
applicables demeurent encore
complexes.
Ce constat vaut
particulièrement pour le
dispositif fiscal
, sensiblement
corrigé par la loi du 12 juillet 1999.
Comme le Sénat l'a, à maintes reprises, souligné lors de
l'examen des projets de codification, l'effort de
rassemblement
et de
rationalisation
des textes applicables aux collectivités locales et
à leurs établissements publics doit nécessairement
être complété par une nécessaire
simplification
de leur contenu.
La
rationalisation des structures
devra également être
poursuivie. Outre la transformation des districts et des communautés de
villes, déjà acquise ou en voie de l'être, celle des
syndicats d'agglomération nouvelle apparaît souhaitable. Tel est
le sens des dispositions de la loi du 12 juillet 1999 les concernant.
Par ailleurs, la transformation des structures existantes devra s'inscrire dans
le cadre de la
hiérarchisation
souhaitée par le
législateur entre les catégories destinées aux grandes
agglomération (les communautés urbaines), celles destinées
aux agglomérations de taille moyenne (les communautés
d'agglomération) et celles concernant plus spécifiquement le
milieu rural (les communautés de communes).
Enfin, le législateur a souhaité maintenir, aux
côtés d'une intercommunalité à fiscalité
propre, une
intercommunalité syndicale
ayant vocation à
prendre en charge différents services. Le Sénat a veillé
à ce que les dispositions de la loi du 12 juillet 1999 ne mettent pas en
cause des syndicats de communes existant depuis de nombreuses années et
qui ont fait la preuve de leur efficacité.
Cependant le choix - opéré dès la loi d'orientation du 6
février 1992 qui a créé les communautés de communes
et les communautés de villes - de doter les établissements
publics de coopération intercommunale à fiscalité propre
de compétences optionnelles portant sur la gestion de différents
services ou équipements pose la question de la
conciliation
de
ces missions avec celles exercées par les structures syndicales
classiques.
La loi du 12 juillet 1999 a prévu un certain nombre de règles
destinées à assurer ces complémentarités.
Pour l'avenir néanmoins des
évolutions progressives
seront
probablement souhaitable, à mesure que les structures à
fiscalité propre s'affirmeront dans l'exercice de leurs
compétences optionnelles. La formule du
syndicat mixte
peut
être une formule adaptée pour faciliter la recherche des
complémentarités et favoriser les évolutions des
structures existantes. Telle a été la démarche du
législateur, la loi du 12 juillet 1999 ayant autorisé les
communautés d'agglomération et les communautés urbaines
à transférer certaines de leurs compétences à un
syndicat mixte dont le périmètre inclut en totalité le
périmètre communautaire.
En toute hypothèse, votre mission d'information juge indispensable que
ces différentes évolutions soient fondées sur une
démarche volontaire
des élus locaux, démarche seule
de nature à garantir le succès de la coopération
intercommunale. La
commission départementale de la coopération
intercommunale
- dont le Sénat a renforcé le rôle lors
des travaux préparatoires de la loi du 12 juillet 1999 - peut constituer
un cadre efficace pour favoriser les concertations nécessaires et
veiller au développement harmonieux de la coopération
intercommunale.
Le Sénat s'est, à ce titre, légitimement
inquiété du contenu de certaines dispositions relatives à
l'urbanisme
prévues par le projet de loi relatif à la
solidarité et au renouvellement urbains.
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)
Le périmètre des
nouveaux
schémas de cohérence territoriale
ne devra pas,
en effet, être un moyen de
remettre en cause les
périmètres de l'intercommunalité
définis dans
le cadre des dispositions de la loi du 12 juillet 1999. En outre, le contenu de
ces schémas ne devra pas conduire à faire prévaloir les
choix d'urbanisme de l'agglomération
sur les
préoccupations légitimes d'établissements publics de
coopération intercommunale situés dans sa
périphérie qui pourront avoir été
intégrés dans le périmètre du schéma.
Le Sénat avait adopté plusieurs dispositions de nature à
prévenir ces risques
, notamment en renforçant le
rôle de la commission départementale de la coopération
intercommunale
et en exigeant des
majorités qualifiées
pour surmonter des désaccords entre établissements publics de
coopération intercommunale parties prenantes au schéma. Ces
garanties n'ont malheureusement pas été maintenues par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture du projet de loi, après
l'échec de la commission mixte paritaire. Les réserves
exprimées par le Sénat demeurent donc d'actualité.
Sur le plan fiscal
, la promotion de la taxe professionnelle unique comme
outil de rationalisation des politiques fiscales, s'inscrit dans le contexte de
la réforme de la taxe professionnelle qui, opérée par la
loi de finances pour 1999, a prévu la suppression progressive de la part
" salaires ", soit le tiers des bases de cette taxe.
Cette démarche paradoxale et contradictoire, voulue par le Gouvernement
et la majorité de l'Assemblée nationale, pose la question de la
pérennité de cette taxe
, et donc soulève de fortes
interrogations
sur l'avenir de la taxe professionnelle unique
comme mode
de financement de l'intercommunalité.
Enfin, le
financement de l'intercommunalité par la dotation globale
de fonctionnement
soulève le problème des équilibres
de cette dotation et de sa capacité à financer
simultanément des objectifs très variées, au
détriment de sa fonction de base. Votre rapporteur développera
plus longuement cet aspect essentiel pour l'avenir, dans le cadre du chapitre
consacré aux perspectives du système de financement
local
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