5. Intervention de M. Daniel CAILLE, président du Syndicat professionnel des entreprises de services d'eau et d'assainissement (SPDE)
M.
Daniel CAILLE
. - Quelques mots en tant que praticien du métier de
l'eau, quelques mots au titre d'ancien directeur au sein d'une agence de bassin
et quelques mots au titre de ma fonction de professeur.
Je crois que nous tenons au système de la gestion par bassin et de la
gestion par programme. Nous y sommes attachés non seulement par pure
règle doctrinaire, mais également par rapport à l'objectif
des agences de bassin qui est de contribuer à fournir une eau en
qualité et en quantité suffisantes. La dynamique de
rationalisation des investissements, la dynamique de la prioritarisation des
investissements autour des objectifs de qualité et de quantité de
l'eau, cette expérience française de la loi de 64 est
revendiquée haut et fort comme un modèle de gestion
écologique, ce qui nous paraît très sain puisqu'elle
entraîne tout acte individuel de décision dans une dynamique
cohérente d'ensemble.
Cette dynamique offre la meilleure chance d'avoir le moins mauvais
résultat en termes de gestion des priorités des investissements.
Elle ne se substitue pas au pouvoir de décision des acteurs locaux. Une
autre solution radicalement différente aurait été de
supprimer la responsabilité des décideurs locaux,
collectivités locales ou industriels.
Nous avons réaffirmé ce matin que la gestion de l'eau doit
être faite par bassin et par programme, que nous ne sommes pas dans un
système moral pollueur-payeur, mais dans un système où il
faut ajuster des moyens aux objectifs. Or, pour appliquer un principe
pollueur-payeur à l'état pur, cela me rappelle les discussions
engagées il y a 25 ans, il faudrait que le taux des redevances soit
incitatif. Qu'est-ce qu'un taux incitatif ? Comparons le taux de la redevance
avec le taux incitatif. Refaisons le calcul. Considérons le coût
moyen de l'exploitation d'un ouvrage qui permettrait de dépolluer, on se
rendrait compte que les redevances ne sont pas incitatives.
Quel est l'intérêt d'avoir un taux de redevance incitatif et
comment aller expliquer aux consommateurs d'eau ou aux industriels
l'intérêt d'avoir un tel taux ?
L'objectif est de définir un programme prioritaire pour que, dans les
meilleurs délais, en accompagnement de l'outil réglementaire, on
ait une politique de l'eau efficace, en qualité et quantité
disponibles pour les usagers de l'eau.
S'agissant de la TGAP, le problème est de savoir si tout l'argent de
l'eau doit aller à l'eau. Les distributeurs d'eau sont très
attachés au principe selon lequel l'argent de l'eau doit aller à
l'eau, mais si vous accordez des subventions de l'Etat en aide aux
investissements qui sont à faire, vous obtiendrez l'assentiment
général. C'est un principe sain de transparence, mais surtout de
priorité d'investissement. Les investissements sont à faire
demain. Les directives européennes sont devant nous, à
échéance 2003 à 2005, et le retard pris en matière
d'investissements est patent aujourd'hui. Nous ne respecterons pas, au rythme
des investissements actuels, les directives européennes de demain. C'est
d'abord un souci d'efficacité en matière d'investissements que de
respecter ce principe.
Et puis, au-delà du concept considérant que tout l'argent de
l'eau doit aller à l'eau, il faut sans doute rendre le système
plus lisible et plus transparent. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, pour les
consommateurs qui reçoivent leur facture d'eau. Il faut rendre les
choses plus claires, plus justes et plus efficaces, c'est une orientation
à laquelle la TGAP pourrait contribuer. Il faut avoir un système
explicable à ceux qui payent. Pour les collectivités locales,
c'est l'usager qui paye. Mais peut-être veut-on revenir sur ce
principe-là ?
C'est un débat possible, car, de par un arbitrage qui remonte à
1975, c'est l'usager qui paye sur la base d'une redevance brute qui est un
équivalent et non pas sur la base de la pollution nette. Sinon, il
faudrait alors adresser la facture aux collectivités locales et
l'intégrer dans leurs impôts comme la taxe foncière.
Aujourd'hui, la population paye sur la base d'une redevance brute qui est
incorporée à la facture d'eau. Si ce système doit
continuer, nous demandons qu'il soit plus clair, plus simple et plus efficace.
(Applaudissements).
M. Jacques OUDIN
. - Merci. On voit bien ici apparaître deux
écoles de pensée, deux théories d'approche. L'une beaucoup
plus pratique, l'autre beaucoup plus conceptuelle.
Un principe : l'eau doit aller à l'eau. C'est un principe qui recueille
l'avis de nombreux participants de cette salle, notamment les élus et
les praticiens sur le terrain. Et enfin, une amélioration
nécessaire. Plus on en demande, plus il faut être clair en
matière d'explication et de compréhension. Une plus grande
compréhension de la politique de l'eau est nécessaire.
Maintenant, M. Brice LALONDE, vous qui avez été ministre de
l'environnement quand on a doublé les programmes d'investissement, en
passant de 40 à 80 milliards de francs, l'a-t-on fait pour rien ?