II. LES RELATIONS FRANCO-INDONÉSIENNES EN ATTENTE D'UNE RELANCE

Au cours des années récentes, la France a cherché à renforcer notablement ses relations avec l'Indonésie, tant sur le plan politique qu'économique. La crise actuelle a bien entendu entravé cet objectif, qui demande désormais à être relancé.

A. LES RELATIONS POLITIQUES ET LA COOPÉRATION FRANCO-INDONÉSIENNE : UN PARTENARIAT MODESTE

Les relations franco-indonésiennes s'appuient sur certaines convergences politiques et sur de nombreuses actions de coopération.

1. Un dialogue politique conforté par de réelles convergences

Si l'Indonésie tend naturellement à privilégier ses relations avec les grands partenaires de la zone Asie-Pacifique, en particulier avec le Japon, l'Australie ou les Etats-Unis, non sans quelques tensions avec ces derniers, elle cherche également à développer ses contacts avec l'Union européenne.

Parmi les pays européens, l'Allemagne, pour des raisons économiques, et les Pays-Bas, pour des raisons historiques, entretiennent des relations étroites avec l'Indonésie. La France, pour sa part, a développé des relations qui s'appuient sur un certain nombre de convergences politiques .

Tout d'abord, les diplomaties française et indonésienne se sont trouvées côte-à-côte au sujet de la question cambodgienne , l'Indonésie ayant co-parrainé les accords de Paris de 1991. L'implication française sur ce dossier, mais aussi l'aide importante de la France au Cambodge sont approuvées par l'Indonésie.

D'autre part, l'Indonésie reconnaît et approuve un certain nombre de lignes de force de la diplomatie française, qu'il s'agisse de l'action en faveur de l'allégement de la dette des pays en développement ou du dossier du Proche-Orient, qu'elle suit avec une particulière attention au sein de l'Organisation de la conférence islamique.

Enfin, la France bénéficie aux yeux de l'Indonésie de son implication active dans l'institution des sommets Europe-Asie (ASEM). A cet égard, le sommet de Londres en avril dernier a été perçu très positivement, comme un témoignage de l'intérêt que l'Europe apporte à l'Asie et une reconnaissance des implications mondiales de la crise asiatique, dont le règlement ne se limitait pas aux seuls pays de la zone.

Aux côtés de ces points positifs, la question du Timor oriental, sur laquelle la France, comme les autres pays de l'Union européenne, soutient la position des Nations unies, demeure la seule ombre au tableau de relations par ailleurs confiantes.

C'est sur ces bases que se sont amplifiés, après 1994, les contacts ministériels entre les deux pays, soit lors de visites bilatérales, soit en marge des sommets de l'ASEM.

En dernier lieu, la visite à Jakarta, au mois d'avril, de M. Jacques Dondoux, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, à l'occasion d'une exposition sur les technologies françaises, a montré qu'au delà de ses difficultés actuelles, la France porte sur le long terme un intérêt à l'Indonésie et à son développement.

Cet intérêt se manifeste également par la candidature au forum régional de l'ASEAN sur la sécurité , l'ARF, créé en 1993 qui associe autour des neuf pays de l'ASEAN, la Chine, la Russie, les Etats-Unis, le Canada, le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée du sud, l'Inde et l'Union européenne, représentée par sa présidence. Ainsi que l'a confirmé le ministre des affaires étrangères, M. Alatas, à la délégation, l'examen des nouvelles demandes d'adhésion, dont celle de la France, est pour l'instant suspendu et reporté à moyen terme. La présence de l'Union européenne d'une part et le souhait de ne pas déséquilibrer l'ARF au détriment des pays de l'ASEAN d'autre part ont en effet jusqu'à présent été invoqués pour différer une candidature française, tout comme d'ailleurs la candidature britannique.

L'intervention de la crise économique et politique a quelque peu remis en cause les jalons que notre pays avait posés pour intensifier son dialogue avec l'Indonésie.

La délégation a constaté qu'au delà des marques d'attention portées à l'évolution de la situation du pays, la France avait quelque peu hésité à apporter une réponse claire à des demandes telles que l'octroi d'une aide humanitaire d'urgence, formulée par les autorités indonésiennes.

Certes, la France a souligné à juste titre la part qu'elle prend au financement des nombreuses actions multilatérales d'aide à l'Indonésie . Mais sans doute y aurait-il intérêt à ce que notre pays apparaisse désormais comme partenaire plus visible et plus présent.

2. Une coopération bilatérale perturbée par la crise

En affectant la capacité politique et financière de l'Indonésie de conduire des projets conjoints, la crise a freiné la mise en oeuvre d'une coopération bilatérale qui prenait son essor.

Sur le plan financier , la France s'est affirmée comme l'un des principaux donateurs à titre bilatéral, le troisième, loin derrière le Japon mais juste après l'Allemagne, avec une aide de près de 10 milliards de francs au cours dix dernières années. Ainsi, des protocoles financiers d'un montant important ont-ils été signés avec l'Indonésie chaque année depuis 1990, pour permettre, à l'aide de prêts à long terme du Trésor français l'achat d'équipement d'origine française ou le financement de projets de développement. En dernier lieu, deux protocoles financiers totalisant plus de 500 millions de francs ont été signés au mois de décembre 1997, pour le financement d'un navire océanographique, l'aménagement de voies de communication et des projets dans le secteur de la santé. Mais l'impossibilité financière, pour la partie indonésienne, de mettre en place les contreparties aux financements français rend hypothétique la mise en oeuvre de ces protocoles.

En matière culturelle, scientifique et technique , l'Indonésie est notre deuxième partenaire de l'ASEAN et le sixième d'Asie, avec une enveloppe de 26 millions de francs en 1997. La coopération comporte un important volet scientifique et technique, avec la formation de cadres de l'administration et de l'industrie. Plus de 3 000 boursiers ont ainsi été formés en France. Notre coopération s'appuie également sur la présence d'experts français dans les ministères techniques tels que l'industrie, le développement technologique et les transports.

Sur le plan culturel, quatre centres culturels sont implantés à Jakarta, Surabaya, Bandung et Yogyakarta et on compte par ailleurs 4 Alliances françaises implantées dans le pays. Ces établissements enseignent la langue française, qui occupe cependant une place très modeste en Indonésie. Ici encore, les difficultés liées aux cofinancements indonésiens contraindront à réviser dans l'immédiat les programmes de coopération culturelle, scientifique et technique.

Trois écoles françaises assurent l'enseignement des enfants d'expatriés : le lycée international français de Jakarta, qui relève du réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, et les écoles mises en place respectivement par Total et Dumez à Balikpapan et Padang.

Une mention particulière doit être faite au sujet du lycée international français de Jakarta qui, avant la crise, scolarisait plus de 550 élèves, essentiellement français puisque le lycée n'est pas autorisé à accueillir des Indonésiens. Le retour en France de familles expatriées en raison de la crise va entraîner pour la rentrée scolaire 1998 une chute des effectifs inscrits au lycée français qui provoque de multiples difficultés de gestion.

On doit également signaler, toujours sur le plan culturel et scientifique, l'existence d'un centre de documentation scientifique et technique chargé de diffuser les informations sur l'actualité scientifique française.

En matière de recherche, le CIRAD, dans le domaine des plantations, des forêts et des technologies agro-alimentaires, et l'ORSTOM dans des activités liées à l'agronomie ou à l'océanographie, sont présents en Indonésie.

En matière militaire , une coopération s'est développée sur la base d'un arrangement conclu en 1985 et sous la forme de visites, d'organisation d'escales et d'actions de formation. S'agissant des équipements, l'armée de terre a acquis auprès de GIAT Industries des véhicules de l'avant blindés (VAB) qui lui avaient été prêtés, dans un premier temps, au titre des opérations de maintien de la paix en ex-Yougoslavie. L'armée de l'air possède des hélicoptères Super-Puma fabriqués sous licence en Indonésie et des radars de défense aérienne ont été fournis par Thomson. Alors que l'Indonésie ne consacrait déjà qu'un budget réduit à ses dépenses d'équipement et que la concurrence entre fournisseurs était vive, la crise suspend, dans le court terme, les perspectives de poursuite de certaines coopérations engagées, en particulier pour la construction d'une base navale à Teluk Ratai, sur l'île de Sumatra.

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