II. LA POSTE, C'EST LE TERRITOIRE
La formule constitue l'un des sous-titres du rapport de la
mission sur la présence postale
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demandée par le Gouvernement
à notre collègue, M. Gérard Delfau, en 1990. Elle est
juste car elle exprime bien, à la fois, l'importance des fonctions
postales dans la vie des territoires et la force de l'enracinement de La Poste
dans le pays profond. Dans l'esprit des Français et de nombre de leurs
élus, La Poste et le territoire ne sont-ils d'ailleurs pas
indissociablement liés ?
Ce lien étroit a été tissé par l'Histoire. Il a
aujourd'hui une triple composante : juridique, physique et affective.
A. UN LIEN JURIDIQUE OFFICIALISÉ RÉCEMMENT
1. Les textes spécifiques à La Poste
Même s'il est indéniable que la mission
d'aménagement du territoire impartie à La Poste s'exerçait
antérieurement, sa reconnaissance juridique date de la loi du
2 juillet 1990.
Proclamée dans ses principes par les articles de cette loi
déjà cités au début du présent chapitre,
cette mission n'est toutefois précisée que dans le cahier des
charges de La Poste et dans le contrat de plan État/Poste.
Rappelons, tout d'abord, que l'article 3 du
cahier des charges
,
cité in extenso ci-dessus, prévoit que pour le service public du
courrier, La Poste "
dessert l'ensemble du territoire en prenant en
compte les orientations générales de la politique
gouvernementale, notamment en matière d'aménagement du
territoire
".
Les articles 21, 24 et 25 traitent des obligations de La Poste en ce qui
concerne la présence postale ainsi que ses relations avec les
échelons déconcentrés de l'État et les
collectivités locales. Ainsi, l'article 21 dispose que "
La
Poste constitue, développe et exploite sur l'ensemble du territoire un
réseau d'installations et de dessertes destiné à fournir
l'ensemble de ses services
". L'article 24 indique que
"
dans la définition de ses programmes d'équipement, La
Poste prend en considération les orientations générales de
la politique d'aménagement du territoire définies par le
Gouvernement, ainsi que les données et objectifs de développement
économique et social des régions, des départements et des
communes
" et que "
La Poste définit sa politique de
présence locale après concertation avec le préfet
concerné
". L'article 35, quant à lui, fixe la
composition des instances de concertation locale.
Le premier contrat de plan (1995-1997)
consacre l'ensemble de son
article 4 à détailler les types d'actions prioritaires qui
doivent être assurées par l'exploitant public dans le cadre de sa
participation à l'aménagement du territoire.
Ce dispositif fait d'abord
obligation à La Poste de fournir sur
l'ensemble du territoire de la métropole et dans les DOM
" un service public de qualité
qui réponde aux
besoins de toutes les catégories d'usagers, ménages ou
entreprises, en particulier en zone rurale et dans les
banlieues
".
Pour ce qui concerne
l'offre de services
, il est stipulé que
"
La Poste veille à décliner à ses
différents clients des gammes de services adaptées sur tout le
territoire, en matière de communication, de messagerie et de prestations
financières.
Au-delà de cette offre, pour tenir compte des conditions
particulières des zones les plus défavorisées, rurales
comme suburbaines, La Poste participe à l'expression de la
solidarité nationale à leur profit et contribue au
développement local :
- la contribution à l'expression de la solidarité nationale
peut se traduire par la participation aux dispositifs mis en place à
l'initiative de l'État ou des collectivités
décentralisées pour assurer un niveau satisfaisant d'offre de
services publics dans les zones en difficulté ;
cette
participation, décidée au cas par cas, devra respecter
l'équilibre financier de l'opérateur
et le conduire à
bénéficier des mêmes conditions et concours que les autres
prestataires ;
- La Poste développe et adapte ses prestations en s'appuyant, d'une
part, sur ses réseaux d'infrastructure, participant ainsi au soutien de
l'économie locale et, d'autre part, sur la capacité des
personnels à apporter une assistance diversifiée aux citoyens les
plus isolés des zones concernées.
"
S'agissant
des conditions de mise en oeuvre
, il est mentionné
que "
pour remplir ses missions, La Poste s'appuie sur la
péréquation tarifaire géographique des prestations
relevant du service réservé, pour lesquelles elle assure
l'égalité d'accès de tous les usagers en tout point du
territoire.
Elle s'appuie également sur des formes
diversifiées de présence prenant en compte les
réalités locales et lui permettant de s'adapter à leur
évolution dans le temps, de manière à assurer
l'indispensable respiration de son réseau
.
Pour cela, il lui appartient, dans le cadre des procédures
d'aménagement du territoire (notamment les schémas
départementaux d'organisation et d'amélioration des services en
milieu rural), de déterminer les modalités de cette
présence : présence immobilière, mobile, permanente,
périodique, à domicile, en gestion propre ou partenariale, avec
fourniture d'autres prestations ou non. Elle le fera en veillant à
gérer le plus en amont possible les adaptations nécessaires
à l'évolution des situations locales, en concertation
étroite et régulière avec les élus et les
représentants des usagers et le préfet étant tenu
informé de ses intentions.
".
En d'autres termes, si le cadre juridique dans lequel s'inscrivent les missions
d'aménagement du territoire de La Poste fixe à l'exploitant
public
une obligation absolue
de desserte de tous les points du
territoire national -ce qui pourrait être qualifié de service
universel postal
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-, il ne lui
impose qu'une
obligation de principe
de participer à
l'aménagement du territoire sans contrainte particulière de
moyen, autre que celle d'inscrire son action en la matière dans une
démarche de concertation et de recherche de partenariat au niveau local.
Il est notamment significatif qu'
aucun texte n'impose à La Poste une
obligation d'implantation dans les zones défavorisées
. Le
contrat de plan précise explicitement que la participation de La Poste
à l'expression de la solidarité nationale par le maintien d'une
offre satisfaisante de services publics dans les zones en difficulté
doit se faire "
au cas par cas, et... respecter l'équilibre
financier de l'opérateur
". En outre, le contrat de plan fixe
comme principe à respecter, la "
nécessaire respiration
du réseau
", ce qui s'interprète a minima comme ouvrant
la possibilité de transformer ou de créer certaines implantations
pour s'adapter aux besoins.
Cette dernière interprétation doit toutefois être
conciliée avec les impératifs généraux fixés
aux services publics par la loi " Pasqua " pour
l'aménagement
et le développement du territoire.