CONCLUSION :

POURQUOI LA POSTE PEUT-ELLE MOURIR ?

1/ Parce que les charges nettes 130( * ) qui résultent de ses missions d'intérêt général 131( * ) sont énormes :

- Participation à l'aménagement du territoire

(poids des charges découlant du coût d'entretien

d'un réseau immobilier pour partie peu fréquenté) : 3,2 mds F/an

- Contribution au transport et à la distribution de la presse : 3,6 mds F/an

- Guichet bancaire des plus démunis

(livret A utilisé comme un compte courant) : 1,3 md F/an

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8,1 mds F/an

NB : Estimations les plus couramment admises pour 1996.

Première incohérence : La Poste assume donc, sur ses seules ressources, un solde considérable des charges liées aux missions d'intérêt général que l'Etat lui confie et qu'il devrait en conséquence soutenir. Ce " prélèvement " représente près de 10 % de son chiffre d'affaires.

2/ Parce qu'elle est ponctionnée par l'Etat au bénéfice du budget général :


- Sa rémunération par le Trésor

pour la collecte des fonds CCP

se traduit par un manque à gagner de : 1,3 md F en 1996

- L'Etat n'a pas tenu ses engagements

de fiscalité dérogatoire pour la taxe

sur les salaires, soit un surcoût de : 1,8 md F en 1996

- En outre, le désengagement de

l'Etat s'est traduit par la suppression

de la franchise postale des

administrations et des collectivités

locales, soit un manque à gagner de : 1,1 md F en 1996

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4,2 mds F en 1996

-
La banalisation rampante

de l'épargne administrée (Codevi,

livret jeune...) a contribué à éroder les

positions relatives du livret A

- Elle paye les pensions de retraites des

anciens postiers fonctionnaires d'Etat : 600 millions F/an, en progression arithmétique, à compter de 1998

(montant cumulé entre 1997 et 2015 : 360 milliards de F)

- Elle contribue à la compensation

et à la surcompensation démographiques

entre régimes de retraites : 2,4 mds F/an

Deuxième incohérence : Non seulement La Poste est insuffisamment soutenue, mais en plus, l'Etat lui enlève une partie des moyens qui pourraient lui permettre d'assumer des charges qui ne devraient pas lui incomber .

3/ Parce qu'elle est confrontée à la perspective d'une contraction programmée de ses positions commerciales :

- Repostage : au minimum 600 millions de F

de manque à gagner en 1996

- Contraction du monopole sous

l'effet de la directive postale : - 1997 : 57 % du CA total sous monopole

- 1998 : 37,5 %

- 2003 : 25 % (en cas d'ouverture à la concurrence du publipostage et du courrier transfrontières)

- Effet de substitution des nouvelles

technologies : le taux de substitution pourrait atteindre 18 % du trafic courrier

en l'an 2000

Troisième incohérence : A continuer dans cette voie, La Poste ne pourra pas faire face aux défis auxquels elle se trouve confrontée et l'Etat, s'il ne sait pas assumer ses responsabilités, risque fort de se retrouver, à terme, devant l'équivalent d'un " Crédit lyonnais social " (à peine moins de milliards, beaucoup plus de milliers d'emplois).

*

* *

En d'autres termes, notre Poste est aujourd'hui étranglée.

D'un côté, l'Etat la prive de " l'oxygène financière " nécessaire à l'accomplissement des tâches d'intérêt général qu'il lui confie, l'utilise de manière quelque peu excessive comme force supplétive de ses recettes budgétaires, et tend à lui retirer une partie des moyens qu'il lui accordait antérieurement pour faire face à ses missions. D'un autre côté, les contraintes concurrentielles qu'elle supporte s'accroissent et ne vont plus cesser de s'accroître, alors même qu'elle ne dispose pas de véritables marges d'adaptation propres et qu'en son sein tous n'ont pas perçu la nécessité des efforts à entreprendre.

Comment peut-elle courir avec, aux pieds, des brodequins dont les semelles de plomb ne cessent de s'alourdir ? Surtout, comment pourrait-elle, dans ces conditions, espérer gagner la course dans laquelle elle est engagée quand ses compétiteurs, parfois mieux musclés, chaussent des tennis avec des semelles à bulles d'air ?

Jusqu'à maintenant, cet étouffement s'effectuait en silence dans l'obscurité des couloirs des administrations financières, comme les exécutions au lacet dans le sérail du Grand Turc. Désormais, la strangulation se déroulera au grand jour, sur le mode du supplice hispanique connu sous le nom de garrot.

Face à cette situation, le présent rapport n'a qu'une ambition : en appeler à tous pour qu'ensemble, il soit possible de desserrer cette étreinte.

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