II. UNE LOI AMBITIEUSE, ÉLABORÉE EN PARTANT DES BESOINS EXPRIMÉS PAR LES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP
A. LA LOI DE 2005 : UN TEXTE NÉ D'UN CONSENSUS POLITIQUE ET COCONSTRUIT AVEC LE SECTEUR ASSOCIATIF
1. Une priorité partagée par l'ensemble des acteurs politiques
Le lancement des travaux relatifs à la loi du 11 février 2005 est intervenu dans un contexte politique très favorable. Le handicap, que le Président Jacques Chirac avait érigé en grande cause de son second mandat (2002-2007), a mobilisé l'ensemble des acteurs politiques et associatifs autour d'objectifs largement partagés.
Le Parlement s'était déjà emparé de cette thématique : en 2002, le Sénat a mené une réflexion sur le droit à compensation et la prise en charge du handicap. Dans un rapport très étayé consacré à ce sujet, Paul Blanc proposait la création d'une « allocation compensatrice individualisée » visant à garantir la compensation effective du handicap9(*). La même année, le Parlement votait une loi reconnaissant que la compensation des charges particulières découlant du handicap relève de la solidarité nationale10(*).
La loi de 2005 s'inscrit plus généralement dans le contexte d'une meilleure prise en compte des besoins liés à l'autonomie. Après la canicule de 2003, le gouvernement Raffarin a créé la journée de solidarité dont les ressources, destinées aux personnes âgées et aux personnes handicapées, ont été confiées à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)11(*), également créée à cette occasion.
Il s'agissait à l'époque d'un investissement important en faveur de l'autonomie. Les lois de financement de la sécurité sociale pour les années 2005, 2006 et 2007 ont connu des objectifs de dépenses historiquement élevés dans le secteur médico-social, qui ont notamment permis le lancement d'un plan d'investissement pour la création de places en établissements pour personnes handicapées et pour personnes âgées dépendantes.
La loi du 11 février 2005 s'inscrit dans ce cadre, avec l'ambition forte d'assurer une mise en oeuvre effective du droit à compensation et de garantir une intégration pleine et entière des personnes en situation de handicap dans tous les aspects de la vie sociale et politique.
D'importants moyens ont été déployés au sein des administrations pour garantir l'application rapide de ses dispositions, le Gouvernement s'étant engagé auprès du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) à publier les décrets d'application en moins de deux ans. En 2006, le rapport sénatorial sur l'application de la loi12(*) a salué le travail d'ampleur fourni par les services de l'État afin de permettre la publication de 120 mesures réglementaires en moins d'un an. Le rapport de 201213(*) confirme un bilan très positif sur le plan réglementaire, avec 99 % des textes d'application publiés, soit 220 décrets et arrêtés.
2. Une loi coconstruite avec le secteur associatif
La loi de 2005 constitue l'aboutissement d'un travail long de dix-huit mois, en concertation approfondie avec les associations représentant les personnes handicapées, les élus, les organismes de protection sociale et les partenaires sociaux.
La participation des associations a permis au Gouvernement et au Parlement de mieux cerner les attentes des personnes handicapées et de leurs proches, et d'y apporter des réponses adaptées. Le président du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) de l'époque, Jean-Marie Schléret, avait salué l'association des personnes handicapées elles-mêmes à l'élaboration du projet de loi, la jugeant exemplaire et inédite.
Cette co-construction ne s'est pas arrêtée au moment de la promulgation de la loi, les mesures réglementaires d'application ayant également été prises en concertation avec le milieu associatif. Le rapport sénatorial sur l'application de la loi de 2006 relevait ainsi que, sur les 120 mesures réglementaires qui avaient alors été prises, 90 % l'avaient été avec l'avis favorable du CNCPH.
Surtout, la loi elle-même, en son titre Ier, renforce le principe de la participation du milieu associatif à l'élaboration des politiques publiques dans le champ du handicap. Elle prévoit notamment, à l'article 3, que tous les trois ans, le Gouvernement organise une conférence nationale du handicap (CNH). Il y convie toutes les associations représentatives des personnes handicapées et les représentants des organismes gestionnaires des établissements ou services sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes handicapées, afin de débattre des orientations et des moyens de la politique du handicap.
Les CNH doivent permettre de garantir un suivi des politiques publiques liées au handicap avec la participation de tous les acteurs concernés. Afin de nourrir les travaux parlementaires, la loi prévoit également qu'à l'issue des travaux de la conférence, le Gouvernement remet aux assemblées parlementaires, après avoir recueilli l'avis du CNCPH, un rapport sur la mise en oeuvre de la politique nationale en faveur des personnes handicapées. Ce rapport peut donner lieu à un débat.
* 9 Rapport d'information n° 369 (2001-2002) de M. Paul Blanc, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 24 juillet 2002.
* 10 Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (article 1er).
* 11 Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
* 12 Rapport d'information n° 359 (2006-2007) fait au nom de la commission des affaires sociales sur l'application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
* 13 Rapport d'information n° 635 (2011-2012) fait au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois sur l'application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.