V. LE BILAN GLOBALEMENT DÉCEVANT DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES EN AFRIQUE

A. DES MISSIONS SOUVENT CRITIQUÉES POUR LEURS RÉSULTATS INSUFFISANTS

Actuellement, plus de 15 000 casques bleus sont déployés en Afrique dans des opérations de maintien de la paix des Nations unies.

Depuis de nombreuses années, ces opérations de paix de l'ONU font l'objet de vives critiques. La dénonciation de la « crise » ou du « déclin » de ces OMP est ainsi devenu un lieu commun des discours politiques.

Plusieurs missions de maintien de la paix ont été, il est vrai, assez largement considérées comme des échecs : il en va ainsi, dans les années 1990, de l'ONUSOM I et II en Somalie, de la Mission des Nations unies pour l'Assistance au Rwanda (MINUAR I), créée après la Mission d'Observation des Nations unies en Ouganda-Rwanda (MONUOR), ou de l'UNAVEM I et l'UNAVEM II en Angola. De même, après 2000, la Mission des Nations unies en RCA-Tchad (MINURCAT) n'a jamais atteint ses objectifs, tandis que la MONUSCO n'a pas réussi à stabiliser la situation dans l'est de la RDC depuis sa création en 2010.

Les réussites apparaissent moins nombreuses. Ainsi, en Sierra Leone, la Mission des Nations unies en Sierra Leone (MINUSIL), créée en 1999 après l'échec de la MONUSIL, s'achève en décembre 2005 dans un pays globalement pacifié. De même, l'Opération des Nations unies au Mozambique (ONUMOZ) est parvenue à surveiller le cessez-le-feu pour faciliter la mise en oeuvre de l'accord de paix général de Rome signé le 4 octobre 1992 entre le gouvernement et la Résistance nationale du Mozambique (RENAMO).

La plupart des autres opérations de maintien de la paix en Afrique ont un bilan qui peut être qualifié de mitigé, voire très mitigé. À leur crédit peut être porté le fait que les violences et le nombre de morts, notamment parmi les civils, aurait très probablement été beaucoup plus important sans leur présence68(*). Pour autant, elles n'ont généralement pas permis de mettre fin durablement à la crise qui a motivé leur création.

Ces dernières années, le bilan des grandes interventions à même tendance à se dégrader, que ce soit pour la MINUSMA au Mali, la MINUSCA en RCA ou la MONUSCO en RDC. Les mandats pas assez robustes, les exactions et les violences sexuelles commises par certains contingents, le manque de coopération des autorités des pays ont réduit l'efficacité de ce mode de maintien de la paix, malgré plusieurs réformes.

Ainsi, en RDC, la MONUSCO a fait l'objet d'attaques et n'a pas montré de grande efficacité contre les groupes armés qui mettent le nord-est du pays à feu et à sang. Trois casques bleus ont été tués. Au Mali, la MINUSMA n'est pas parvenu à mettre en oeuvre l'accord de paix de 2013 et a fini par être congédiée par les putschistes arrivés au pouvoir en 2021, appuyés par la Russie et par les mercenaires de Wagner. Enfin, en RCA, l'exécution du mandat a été gravement entaché par de nombreuses allégations de viols et d'abus sexuels et la MINUSCA a rencontré de nombreuses difficultés dans ses relations avec le gouvernement, qui a fait appel à Wagner. Le groupe mercenaire exerçait toujours sa domination, à la fin de 2024, sur une partie importante du pays et était plus que jamais accusé d'exactions que la mission des Nations unies n'était pas en mesure d'empêcher.


* 68 . Une étude de Lise Howard de l'université de Georgetown a constaté une corrélation entre la présence de casques bleus et une diminution du nombre de victimes civiles, et entre un plus grand nombre de casques bleus et une diminution du nombre de morts civiles et de morts militaires. Par ailleurs, les coûts évités sont souvent sous-estimés. Le « Government Accountability Office » des Etats-Unis a estimé qu'il serait huit fois plus rentable pour les États-Unis de soutenir financièrement les opérations de maintien de la paix de l'ONU que d'envoyer directement des troupes américaines dans une zone de conflit.

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