C. LE RETRAIT À RECULONS DE TOTALENERGIES DU MARCHÉ DU GAZ RUSSE
Le maintien du groupe TotalEnergies sur le marché de gaz russe dans le contexte de guerre en Ukraine a suscité des interrogations de la part de la commission d'enquête qui ont amené à examiner le régime des sanctions européennes applicables et les marges de manoeuvre des États-membres.
1. L'historique des activités du groupe TotalEnergies en relation avec la Russie
Le groupe TotalEnergies conduit des activités en Russie depuis plusieurs années.
Dans sa réponse écrite transmise à la commission d'enquête, il a précisé les participations prises dans ce pays dans les secteurs de la production de gaz et de pétrole mais aussi de batteries et de lubrifiants.
D'une part, le groupe a développé une activité de production de gaz et de pétrole.
En 1999, TotalEnergies a acquis 50 % d'une co-entreprise (avec 40 % pour Norsk Hydro et 10 % pour NOC) exploitant le champ de pétrole de Kharyaga et en est devenu opérateur. Le groupe a cédé, en 2009, 10 % de ses participations à la société d'État russe Zarubehneft et, en 2016, 20 % de ses participations ainsi que son statut d'opérateur.
En 2009, TotalEnergies a acquis 49 % de la société Terneftegaz (avec 51 % pour Novatek) exploitant le champ de gaz de Termokarstovoye. Novatek a assuré l'intégrité de la commercialisation du gaz et des condensats produits. Le groupe TotalEnergies a précisé n'avoir effectué aucun versement à cette société depuis 2015.
Entre 2011 et 2018, TotalEnergies a acquis 19,4 % de Novatek, société russe commercialisant du gaz domestique et du gaz GNL. Le groupe TotalEnergies a précisé que cette société n'est pas l'objet de sanctions.
En 2011, TotalEnergies a acquis 20 % dans Yamal LNG (avec 50,1 % pour Novatek, 20 % pour CNPC et 9,9 % pour Silk Road Fund), société russe construisant et exploitant un champ de gaz et une usine de liquéfaction. Un premier train de liquéfaction est entré en fonction en 2017, un deuxième et un troisième en 2018 et un quatrième au printemps 2021. En 2023, la production s'est élevée à 20,9 Mt de GNL, dont 70 % ont été livrés vers l'Europe. S'agissant du groupe TotalEnergies, il est lié par un contrat de long terme pour l'achat de 5 Mt de GNL par an, dont 60 % ont été livrés vers l'Europe en 2023. Le groupe TotalEnergies a précisé que la société n'est pas l'objet de sanctions européennes.
En 2019, TotalEnergies a acquis 10 % dans la société Artic LNG2 (avec 60 % pour Novatek, 10 % pour CNPC, 10 % pour CNOOC et 10 % pour Mitsui Jogmec), pour produire 20 Mt de GNL avec 3 trains de liquéfaction. Un premier train de liquéfaction a été achevé en 2023 mais aucune livraison n'a eu lieu. Le groupe TotalEnergies a précisé que la société est l'objet de sanctions américaines.
En 2021, TotalEnergies a acquis 10 % dans la société Artic Transshipment (avec 90 % pour Novatek), pour exploiter des actifs logistiques, notamment des unités de stockage et de transbordement de GNL. TotalEnergies est un actionnaire minoritaire passif, sans rôle dans la gouvernance ou les opérations. Le groupe ToalEnergies a précisé que la société est l'objet de sanctions américaines.
D'autre part, le groupe a développé une activité de développement de lubrifiants et de batteries.
En octobre 2018, TotalEnergies a lancé, via sa filiale TotalEnergies Marketing Russie (TEMRU), une unité de production de lubrifiants destinée à être commercialisée en Russie.
De plus, sa filiale de batteries Saft a eu des
activités commerciales
- mais pas d'activités industrielles -
en Russie.
2. Les principes d'action du groupe TotalEnergies pour gérer les activités en relation avec la Russie
Le groupe TotalEnergies a formalisé des principes d'action pour gérer ses activités en relation avec la Russie.
Dans sa réponse écrite transmise à la commission d'enquête, il a rappelé les principales lignes et étapes de ces principes d'action.
En outre, le groupe TotalEnergie a indiqué avoir agi en conformité avec les sanctions économiques issues du droit de l'Union : « TotalEnergies a agi avec le souci de la conformité de ses activités avec les sanctions édictées par l'Union européenne. Pour ce faire, TotalEnergies s'est organisée afin de suivre en temps réel les différents trains de sanctions adoptés par l'Union européenne, et celles adoptées par les autorités américaines, et a revu l'ensemble de ses activités et transactions en lien avec la Russie afin de s'assurer de leur conformité auxdites sanctions. Les équipes de TotalEnergies ont également suivi les lignes directrices et positions émises par les autorités européennes et nationales afin de veiller à la correcte interprétation des sanctions dans ce cadre. Des ressources externes et internes ont été mises en place. »
Le 1er mars 2022, le groupe TotalEnergies a condamné l'invasion de l'Ukraine par la Russie et a communiqué sur plusieurs mesures :
- mobilisation pour fournir du carburant aux autorités ukrainiennes et de l'aide aux réfugiés ukrainiens en Europe ;
- affirmation publique de l'approbation des sanctions mises en place par l'Union Européenne ;
- décision de ne plus apporter de capital à de nouveaux projets en Russie.
Le 22 mars 2022, le groupe TotalEnergies a explicité ses principes d'action pour gérer ses relations en lien avec la Russie :
- assurer le strict respect des sanctions européennes, quelles que soient les conséquences sur la gestion de ses actifs, et engager la suspension progressive de ses activités en Russie, en veillant à la sécurité de son personnel ;
- compte tenu des sanctions techniques et financières visant la Russie et de leur probable montée en puissance, ne plus enregistrer de réserves prouvées au titre d'Arctic LNG2 dans les comptes du groupe ;
- ne pas inverser l'objectif des sanctions à l'encontre de la Russie en ne transférant pas indûment de la valeur à des intérêts russes en se retirant des actifs ;
- contribuer à assurer la sécurité de l'approvisionnement énergétique, dans le cadre défini par les autorités européennes, dont l'approvisionnement de l'Europe en GNL à partir de Yamal LNG dans le cadre des contrats longs termes du groupe ;
- compte tenu de l'existence de sources alternatives disponibles pour l'Europe, ne plus conclure ou renouveler des contrats d'achat de pétrole ou de produits pétroliers russes et mettre fin aux achats à terme en cours d'ici la fin de l'année 2022.
Le groupe TotalEnergies a précisé que « ces principes d'action ont guidé - et continuent encore de guider - la conduite de TotalEnergies depuis lors. »
Ainsi, le 27 avril 2022, il a annoncé provisionner 4,1 Mds$ dans ses comptes au premier trimestre 2022, concernant notamment Artic LNG2.
Le 6 juillet 2022, il a annoncé céder sa participation de 20 % dans le champ de pétrole de Kharyaga, qui est devenue effective le 3 août 2022.
Le 28 juillet 2022, il a annoncé provisionner 3,5 Mds$ au deuxième trimestre 2022, concernant notamment Novatek.
Le 26 août 2022, il a annoncé céder sa participation de 49 % dans la société Terneftegaz, qui est devenue effective le 15 septembre 2022.
Le 27 octobre 2022, il a annoncé provisionner 3,1 Mds$ au troisième trimestre 2022.
Le 9 décembre 2022, il a annoncé retirer ses deux administrateurs au conseil d'administration de Novatek, provisionner 3,7 Mds$ au quatrième trimestre 2022 et ne plus enregistrer les réserves prouvées au titre de sa participation dans Novatek.
Au total, le groupe TotalEnergies a indiqué avoir enregistré 14,8 Mds$ de dépréciation et de pertes comptables.
Plus largement, le groupe TotalEnergies a affirmé qu'« il a contribué et contribue » aux objectifs du plan REPowerEU, avec :
- l'arrêt de l'achat de pétrole brut et de produits pétroliers fin 2022 (avec les réorganisations des raffineries de Leuna, en Allemagne, et de Gdansk, en Pologne) ;
- la maximisation des importations de GNL (pour 26,5 Mt en 2022 et 22,8 Mt en 2023) ;
- la mise en place de 2 terminaux méthaniers flottants (Le Havre, en France, et Lublin, en Allemagne) ;
- la participation aux mécanismes d'achats groupés (pour 0,4 BCM à l'achat et 0,45 BCM à la vente en gaz pipe en 2023).
À l'occasion de son audition devant la commission d'enquête, Patrick Pouyanné, P-DG du groupe, a rappelé que les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) russes peuvent difficilement être remplacées avant 2027 : « En 2022 et 2023, 14 millions de tonnes de GNL russe ont été importées en Europe, soit 12 % à 13 % de nos importations de gaz. Si nous, Européens, décidons de bannir le GNL russe, il faudra chercher ces 14 millions de tonnes ailleurs, en les payant plus cher. Il n'y a pas 14 millions de tonnes de GNL disponibles sur le marché mondial : il faudra les prendre aux Asiatiques, comme on l'a fait en 2022, en payant plus cher qu'eux. Pour moi, ce n'est pas un problème ; il n'y a pas de stratégie d'influence. Au contraire, les prix du GNL augmentant, je gagnerai plus sur mon portefeuille mondial que je ne perdrai sur les 3 millions de tonnes que j'amène de Russie en Europe. Nous sommes en train de construire des capacités supplémentaires aux États-Unis et au Qatar. Mais, d'ici à 2027, si nous bannissons le GNL russe, les prix du gaz repartiront à la hausse. Si les autorités politiques prennent cette décision, nous exercerons sans état d'âme la clause de force majeure prévue au contrat et cesserons les importations de GNL. Dans l'intervalle, je ne peux pas le faire, car nous sommes liés à la Russie par un contrat Take or pay : tant qu'à les payer, je préfère avoir en échange le gaz dont l'Europe a besoin... »
Dans sa contribution écrite transmise à la commission d'enquête, le groupe a précisé que le terminal méthanier flottant du Havre n'a pas servi à transporter du GNL russe et ne constitue pas une exception en Europe : « Le terminal du Havre a reçu depuis sa mise en opération, 8 cargaisons de GNL soit l'équivalent d'environ 8 TWh dont 7 ont été regazéifiés et émis vers le réseau. Sur ces 8 cargaisons de GNL, 2 proviennent de Norvège et 6 des États-Unis. 11 terminaux de GNL en Europe bénéficient à ce jour d'un régime d'exemption (soit près d'un tiers des terminaux existants) dont 2 en France : celui de Dunkerque opéré par Dunkerque LNG et celui du Havre (arrêté d'exemption du 21 avril 2023) opéré par TELSF. Le législateur a permis à l'opérateur du FSRU de demander une exemption au régime régulé. C'est en accord avec le régulateur français que TotalEnergies a demandé l'exemption afin de 1) permettre son installation et investissement dans des délais extrêmement courts pour être opérationnel à l'hiver 2023, 2) permettre à l'opérateur de réserver 50 % de la capacité du terminal à sa filiale de négoce de gaz afin d'assurer un ancrage robuste au projet et 3) ne pas peser sur les tarifs régulés compte tenu de la structure de coûts du terminal méthanier flottant du Havre (moins d'investissement et plus de frais d'exploitation qu'un terminal conventionnel terrestre). Les 50 % de capacités restantes sont commercialisées selon des règles approuvées par le régulateur et permettent de garantir un accès équitable et non discriminatoire des tiers au terminal. »
En revanche, le groupe a précisé que l'UE a recouru à du GNL russe en 2023, à hauteur de 20 BCM, dont 4,9 BCM livrés par lui : « En 2021, la dépendance au gaz russe était de 150 bcm, représentant le tiers de la demande européenne. Même si cette dépendance s'est beaucoup réduite, en application du plan RePower EU, le bouclage de la balance offre/demande en 2023 a encore nécessité 40 bcm de gaz russe, dont environ 20 bcm de gaz pipe et 20 bcm de GNL. Sur ces 20 bcm de GNL russe livré en Europe (issu de Yamal LNG), TotalEnergies en a livré 4,9 bcm, soit un peu moins que 25 %, se limitant strictement aux engagements contractuels desquels la Compagnie ne peut sortir sans s'exposer aux pénalités prévues aux contrats, sauf sanctions adoptées par l'Union européenne qui permettraient d'activer les clauses de force majeure du contrat take or pay . »
3. Une présence de TotalEnergies en Russie licite au regard des sanctions de l'Union européenne
Si ces treize paquets de sanctions adoptés à l'encontre de la Russie n'ont pas fait cesser les importations de gaz de l'Union européenne en provenance de la Russie, ils les ont drastiquement diminuées. En 2021, 40 % des importations de gaz de l'UE provenaient de Russie. Fin 2023, à la suite de la diversification des approvisionnements mise en oeuvre par le plan RepowerEU, la Russie ne représente plus que 8,7 % des importations de gaz et 6,1 % des importations de GNL de l'Union européenne264(*).
Cependant, l'effectivité de ce cadre de sanctions a été interrogée par certains acteurs. Devant la commission d'enquête, Mai Rosner de l'ONG Global Witness265(*) a affirmé : « En 2023, le Kremlin a gagné environ 88 milliards d'euros grâce au pétrole et au gaz et on estime que ce chiffre devrait croître en 2024. » Selon elle, « la résilience des revenus pétroliers et gaziers de la Russie est liée en partie à quelques faiblesses clés dans l'application des sanctions européennes, que les énergéticiens occidentaux continuent d'exploiter - le plus grand d'entre eux étant Total. »
D'une part, les sanctions adoptées à l'encontre de la Russie dans le domaine énergétique ne visent pas le gaz naturel liquéfié (GNL).
Selon les estimations du Centre pour la recherche sur l'énergie et l'air propres (Centre for research on energy and clean air)266(*), en 2023 :
- 13 % du volume de GNL importé par l'Union européenne en 2023 provenait de la Russie, soit environ 17,25 bcm hors transbordements vers des pays tiers ;
- l'Union européenne reste le débouché de la moitié des exportations de GNL de la Russie en 2023, des exportations en hausse significative depuis le début de la guerre ;
- toujours en 2023, 72 % des exportations de GNL de Yamal étaient destinées à l'Union européenne.
Selon Mai Rosner, les estimations du CREA montrent également que « la France a importé 3,5 millions de tonnes de GNL russe en 2023, pour une valeur de 1,9 milliard d'euros » dont l'intégralité provenait de Yamal.
Mai Rosner estime par ailleurs que : « La résilience des revenus pétroliers et gaziers de la Russie est liée en partie à quelques faiblesses clés dans l'application des sanctions européennes, que les énergéticiens occidentaux continuent d'exploiter, le plus grand d'entre eux étant Total. Contrairement à ses alliés américains et britanniques, l'Union européenne n'a pas interdit l'importation du gaz naturel liquéfié, ce qui a permis à Total de rester un acteur important dans sa production et son négoce. Total est ainsi la seule major occidentale qui est encore impliquée dans la production de combustibles fossiles russes. »
En l'absence d'un paquet de sanctions ciblant le GNL, en tant que producteur de GNL impliqué à hauteur de 20 % dans le projet Yamal, TotalEnergies contribue donc à l'approvisionnement européen en GNL russe. Corroborant les chiffres du CREA, TotalEnergies a indiqué à la commission d'enquête que le « le bouclage de la balance offre/demande en 2023 a encore nécessité 40 bcm de gaz russe, dont environ 20 bcm de gaz pipe et 20 bcm de GNL. Sur ces 20 bcm de GNL russe livré en Europe (issu de Yamal LNG), TotalEnergies en a livré 4,9 bcm, soit un peu moins que 25 %, se limitant strictement aux engagements contractuels desquels la Compagnie ne peut sortir sans s'exposer aux pénalités prévues aux contrats, sauf sanctions adoptées par l'Union européenne qui permettraient d'activer les clauses de force majeure du contrat take or pay ».
Or, le 11 avril 2024, le Parlement européen a adopté la proposition de règlement sur les marchés intérieurs du gaz renouvelable, du gaz naturel et de l'hydrogène, qui ouvrira la voie à des restrictions nationales aux importations de gaz en provenance de la Russie267(*).
Le groupe TotalEnergies a indiqué clairement qu'il se conformerait à un élargissement du régime des sanctions. L'Union européenne prévoyant d'autoriser ses pays membres à arrêter les importations de gaz russes, il apparaît essentiel que la France se saisisse de cette possibilité afin de délier les signataires de leurs obligations contractuelles.
Article 8, point 7 de la proposition de
règlement du Parlement européen
et du Conseil sur les
marchés intérieurs du gaz renouvelable,
du gaz naturel et de
l'hydrogène
Les paragraphes 1 à 6 s'entendent sans préjudice de la possibilité pour les États membres de prendre des mesures proportionnées pour restreindre temporairement les approvisionnements en GNL provenant de la Fédération de Russie et de la Biélorussie, pour une durée déterminée, qui peut être renouvelée si cela est justifié, en limitant au préalable les offres émanant d'un utilisateur individuel quelconque du réseau ou la fourniture de capacités d'installation de GNL à un utilisateur individuel quelconque du réseau pour des livraisons provenant de la Fédération de Russie ou de la Biélorussie, lorsque cela est nécessaire pour protéger leurs intérêts essentiels en matière de sécurité et ceux de l'Union, et à condition que ces mesures :
a) ne perturbent pas indûment le bon fonctionnement du marché intérieur du gaz naturel et les flux transfrontières de gaz naturel entre les États-membres, et ne compromettent pas la sécurité de l'approvisionnement de l'Union ou d'un État-membre ;
b) respectent le principe de la solidarité énergétique ;
c) soient prises dans le respect des droits et obligations de l'Union et des États membres à l'égard des pays tiers.
Compte tenu de la nécessité d'assurer la sécurité de l'approvisionnement de l'Union, les mesures prises par les États-membres en vertu du premier alinéa peuvent viser à diversifier les approvisionnements en GNL en vue de supprimer progressivement la dépendance à l'égard du gaz naturel russe, lorsqu'il peut être démontré que ces mesures sont nécessaires pour protéger leurs intérêts essentiels en matière de sécurité et ceux de l'Union.
Avant de décider d'une mesure visée au premier alinéa, l'État-membre concerné consulte la Commission et, dans la mesure où ils sont susceptibles d'être affectés par la mesure concernée, les autres États-membres, les parties contractantes de la Communauté de l'énergie, les pays tiers qui sont parties contractantes à l'accord sur l'Espace économique européen et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord. L'État-membre concerné tient le plus grand compte de la situation dans ces États-membres et pays tiers et de toute préoccupation exprimée à cet égard par ces États-membres, ces pays tiers ou la Commission.
D'autre part, les paquets de sanctions européennes visant le pétrole brut n'empêchent pas l'importation de produits pétroliers de pays tiers dont les raffineries sont alimentées par du pétrole russe. Les sanctions européennes n'interdisent en effet pas l'importation de produits faits à partir de pétrole russe, notamment les raffinats comme le diesel ou les carburants aériens, en provenance de pays comme la Turquie et l'Inde : devant la commission d'enquête, Mai Rosner de Global Witness a affirmé que « les raffineries privées de ces pays ont d'ailleurs augmenté massivement leurs importations de pétrole russe et celui-ci constitue entre 30 à 40 % de leurs intrants même si officiellement, les produits qui sortent de ces raffineries ne sont plus de nationalité russe. » De ce fait, l'ONG Global Witness a dénoncé « un véritable blanchissement du pétrole russe par l'intermédiaire de raffineries basées en Inde et en Turquie »268(*). L'ONG précise néanmoins qu'il ne s'agit pas d'une violation des sanctions puisque « cette faille du raffinage fait partie intégrante du cadre des sanctions ».
* 264 Chiffres issus du site du Conseil de l'Union européenne, consultables ici.
* 265 Audition du lundi 8 avril 2024 - propos traduits.
* 266 Note du CREA d'avril 2024, « Tirer parti de l'indépendance : un plafonnement des prix du GNL aurait réduit les recettes d'exportation d'énergie de la Russie de 60 % en 2023 »
* 267 Résolution législative du Parlement européen du 11 avril 2024 en vue de l'adoption du règlement (UE) 2024/... du Parlement européen et du Conseil sur les marchés intérieurs du gaz renouvelable, du gaz naturel et de l'hydrogène, modifiant les règlements (UE) no 1227/2011, (UE) 2017/1938, (UE) 2019/942 et (UE) 2022/869 et la décision (UE) 2017/684 et abrogeant le règlement (CE) no 715/2009 (refonte).
* 268 Audition du 8 avril 2024.