LISTE DES PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
Axe 1 : pérenniser le modèle financier des maisons France services pour garantir sa soutenabilité
Recommandation n° 1 : Porter la contribution cumulée de l'État et des opérateurs à 50 % du coût minimal d'une maison, soit 50 000 euros par an et par maison, tout en maintenant la parité entre État et opérateurs nationaux. (État et opérateurs)
Recommandation n° 2 : Pérenniser le dispositif des conseillers numériques France services en les adossant aux maisons et garantir une véritable visibilité budgétaire au programme en maintenant le niveau actuel de participation de l'État sur la durée. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - DGCL - ANCT)
Recommandation n° 3 : Maintenir le modèle de financement forfaitaire, en évitant tout recours à des systèmes de modulation selon la fréquentation qui ouvrirait la voie à des maisons France services à deux vitesses. (DGCL - ANCT )
Recommandation n° 4 : Mobiliser les fonds européens, (notamment le fonds social européen) pour accompagner les actions d'inclusion sociale et numérique portées par les maisons France services. (Direction du budget - DGCL)
Recommandation n° 5 : Rebaser les contributions des différents ministères sur le programme 112 en mettant fin au système de transit par le fonds national France services. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - DGCL)
Recommandation n° 6 : Encourager la mutualisation des services avec les structures locales, en particulier en secteur rural. (Porteurs de projets)
Axe 2 : élargir l'offre de services, diversifier les partenaires nationaux et revoir les modalités de leur participation financière
Recommandation n° 7 : Veiller à ce que tous les opérateurs nationaux respectent le cahier des charges dans chaque département. ( Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT - préfectures de département)
Recommandation n° 8 : Étendre le nombre d'opérateurs nationaux (comme par exemple le réseau France Renov') dès la prochaine convention en 2023. À moyen terme, inciter l'ensemble des guichets des ministères à intégrer France services. (Ministère de la transition écologique et la cohésion des territoires - Ministère de la transformation et de la fonction publiques)
Recommandation n° 9 : Dans les communes où il n'existe pas de système de recueil des données, favoriser la délivrance de titres d'identité dans les maisons France services. (Ministère de l'intérieur - ANTS)
Recommandation n° 10 : Repenser les modalités de calcul de la contribution des opérateurs au fonds national France services lors de la négociation de la prochaine convention, sans basculer sur une tarification entièrement fondée sur le nombre d'actes. (Direction du budget - DGCL)
Recommandation n° 11 : Supprimer la prise en compte des contributions en nature des différents opérateurs figurant dans l'actuelle convention. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - DGCL - ANCT)
Recommandation n° 12 : Porter de trois à cinq ans la durée des conventions cadres avec les opérateurs pour davantage de visibilité donnée aux acteurs locaux. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - DGCL-ANCT)
Recommandation n° 13 : Formaliser la participation des départements au déploiement de France services. (ANCT - Départements)
Axe 3 : valoriser et encadrer le métier d'agent France services
Recommandation n° 14 : Renforcer la formation initiale des agents France services et la porter à 9 jours au minimum en trois sessions, en développant le contenu sur les spécificités des métiers des opérateurs, afin qu'au moins une demi-journée soit consacrée à chaque opérateur du socle national. (ANCT - Banque des territoires - opérateurs)
Recommandation n° 15 : Adapter le cadre de formation continue pour développer les ateliers au niveau départemental et privilégier des formations resserrées et centrées sur les besoins des agents. (ANCT - Banque des territoires - opérateurs)
Recommandation n° 16 : Élaborer une fiche de poste type au niveau national afin de formaliser les missions du métier d'agent France service et de valoriser ce métier. (ANCT)
Recommandation n° 17 : Limiter le recours à des contrats de courte durée ou des services civiques en tant qu'agents France services. (Porteurs de projets)
Axe 4 : poursuivre le déploiement du réseau France services sur le territoire et améliorer son pilotage
Recommandation n° 18 : Aller plus loin dans le déploiement territorial du programme France services, pour cibler l'implantation d'une maison par bourg centre jouant le rôle de pôle de services, en milieu rural à faible densité de population. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT)
Recommandation n° 19 : Accentuer le développement de France services vers les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT)
Recommandation n° 20 : Formaliser lors de la prochaine convention les différentes instances de gouvernance du réseau France services et la mise en place d'un agent dédié dans chaque préfecture. (ANCT)
Recommandation n° 21 : Développer les bus France services en complément du maillage des structures France fixes. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT)
Recommandation n° 22 : Établir un cadre commun d'animation du réseau à l'échelle départementale pour uniformiser l'action des préfectures de département. (ANCT - Banque des territoires - préfectures de département)
Axe 5 : consolider le cahier des charges France services et améliorer la connaissance du réseau
Recommandation n° 23 : Maintenir un cahier des charges commun à toutes les maisons France services en conservant dans le cahier des charges le principe de deux agents minimum par maison. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT)
Recommandation n° 24 : Formaliser davantage la distinction entre premier et second niveau de service dans le cadre du « bouquet de services » intégré à la convention France services . (ANCT)
Recommandation n° 25 : Poursuivre l'amélioration des outils de reporting du réseau France services et de la fiabilité des données. (ANCT - Banque des territoires)
Recommandation n° 26 : Clarifier la communication nationale autour de France services et développer la communication à l'échelle locale. (ANCT)
Recommandation n° 27 : Encourager au travers du cahier des charges l'aménagement d'espaces de vie, d'information et d'échanges au sein des maisons France services. (ANCT)
I. LES MAISONS FRANCE SERVICES, UN OUTIL DE COHÉSION SOCIALE ET TERRITORIALE QUI RÉPOND À UN RÉEL BESOIN D'ACCÈS AUX SERVICES PUBLICS DANS LES TERRITOIRES
A. DES MSAP AUX FRANCE SERVICES : L'AMBITION D'UN ACCÈS FACILITÉ AUX SERVICES PUBLICS DE PROXIMITÉ
Si le réseau des maisons France services, créé en 2019, semble trop récent pour en livrer une évaluation approfondie, il convient de garder à l'esprit que celui des maisons de services au public (MSAP) préexistait . Le programme France services s'est appuyé sur un maillage territorial déjà dense et sur l'expérience des collectivités et associations dans la gestion de ces maisons.
1. Une mise en place récente mais s'appuyant sur le réseau des MSAP
a) France services, un programme héritier du réseau des MSAP et de ses limites
Loin d'être créé ex-nihilo en 2019, le réseau France services résulte en partie du dispositif des maisons de services au public (MSAP), lui-même né de la structuration au niveau national d'initiatives locales ayant parfois plus de vingt ans, dénommées maisons de services publics et mises en place dès 2000 1 ( * ) .
Le réseau des MSAP, créé par la loi NOTRe du 7 août 2015, comptait 1 340 maisons en 2018. Le principe des MSAP, qui est devenu celui des France services, consiste à rassembler en un même lieu une offre large de services publics en apportant une aide de premier niveau aux usagers pour leurs démarches , en s'adressant notamment aux populations éloignées du numérique.
Un rapport de la Cour des comptes de 2019 2 ( * ) indiquait que les MSAP constituaient un outil intéressant mais avec des résultats encore très inégaux. La Cour livrait également une évaluation très critique sur leur modèle de financement.
Le premier constat soulevé par la Cour des comptes était celui de la grande hétérogénéité de l'offre et du niveau de services , dès lors que « le périmètre des partenaires n'apparai[ssait] pas cohérent » . La Cour indiquait que « la qualité de l'offre de services au sein des MSAP est tout aussi hétérogène que l'offre elle-même ». Ainsi, pour la CAF, les remontées d'information de son réseau indiquaient que nombre de MSAP n'étaient en 2019 toujours pas en mesure d'accomplir les missions définies dans le cahier des charges national.
Plusieurs limites mises en évidence par la Cour des comptes trouvent encore à s'appliquer aux maisons France services, comme cela sera développé plus loin. La Cour souligne par exemple que la coordination territoriale du réseau des MSAP était insuffisante , étant donné que, « sur le terrain, l'animation du réseau des MSAP par les préfectures de département va d'une absence totale à une animation très suivie ». Le maillage territorial des MSAP dépendait surtout de la capacité de portage d'acteurs locaux.
La Cour conclut sur la nécessaire professionnalisation des agents des MSAP, et appelle à ce que leur formation continue, « cruciale », soit obligatoire . Elle indique enfin que « d'une manière générale, les MSAP doivent gagner en notoriété », le réseau n'étant pas encore assez connu des usagers.
Dans un rapport du Défenseur des droits de 2019 3 ( * ) , celui-ci indiquait que les MSAP constituaient des « symboles de la mutualisation des moyens permettant de maintenir des services publics de proximité afin de répondre à leur diminution progressive dans les zones rurales et périphériques, elles constituent un outil de proximité de la politique publique d'accessibilité aux services ». Le rapport, assez sévère, considérait toutefois que les MSAP constituaient « une réponse généraliste très insuffisante par rapport aux besoins d'accompagnement ».
Une comparaison étrangère : Service Canada
Service Canada est un guichet permettant l'accès à un grand nombre de services et de prestations du gouvernement, accompagné d'outils dématérialisés tels que « Mon dossier Service Canada ». L'objectif de Service Canada est de fournir aux canadiens un seul point d'accès aux services gouvernementaux en présentiel ou par téléphone, internet ou courrier. Le programme permet notamment aux citoyens de consulter et de mettre à jour en ligne leurs renseignements sur l'assurance-emploi, le Régime de pensions du Canada (RPC) et la Sécurité de la vieillesse (SV).
À la différence des maisons France services, Service Canada est multi-canal : le terme recoupe des centres physiques mais aussi des centres d'appel et des procédures en ligne . La gestion de Service Canada dépend du ministère de la famille et plus particulièrement du sous-ministère de l'emploi et du développement social (EDSC).
Service Canada a été créé en septembre 2005. Il existe actuellement 500 bureaux Service Canada et 200 unités mobiles qui se rendent dans les territoires les plus isolés. Service Canada collabore avec 14 autres départements et agences afin de fournir plus de 50 programmes et services gouvernementaux. La principale différence avec les maisons France services est qu'il s'agit d'un programme gouvernemental entièrement financé par l'État, dans lequel les collectivités ne sont pas directement impliquées .
b) Une réponse à une demande accrue de proximité des services publics
L'un des résultats des consultations menées à l'occasion du grand débat national en 2019 était le sentiment des citoyens que l'État et l'administration s'étaient éloignés des citoyens. Seuls 52 % des participants déclaraient avoir accès au service public dont ils avaient besoin . En outre, 49 % des répondants indiquaient avoir déjà renoncé à des droits ou allocations en raison de démarches administratives jugées trop complexes 4 ( * ) . Comme l'a indiqué au rapporteur spécial le représentant de la Défenseure des droits, ces résultats « traduisent une prise de conscience de la limite du 100 % dématérialisé » s'agissant des démarches administratives.
Les principales attentes des Français en termes
d'accessibilité
des services publics
Baromètre de l'Institut Delouvrier et la direction interministérielle de la transformation publique - Janvier 2022
Le baromètre publié annuellement par l'institut Delouvrier avec la DITP met l'accent sur les attentes fortes des usagers en termes de proximité et d'accessibilité des services publics. Les résultats semblent indiquer le ressenti d'une dégradation de l'accessibilité des services publics à la suite de la crise sanitaire.
39 % des Français estiment ainsi que depuis la crise sanitaire, les services publics sont moins accessibles (contre 17 % qui pensent qu'ils le sont plus et 42 % autant) et 33 % qu'ils sont moins proches de leurs usagers (contre 16 % qui pensent qu'ils le sont plus et 49 % autant).
Les auteurs du baromètre soulignent que la dimension de proximité est plus que jamais fondamentale pour les usagers. Les deux principales attentes formulées à l'égard des services publics sont en effet de 1) répondre à leurs demandes dans les délais annoncés et les informer sur l'avancement de leur dossier (cité par 46% des Français) et 2) le fait d'être joignables par téléphone ou en face-à-face et de leur faciliter les démarches en ligne (41 %). À cet égard, France services constitue une réponse directe à ces préoccupations.
Les auteurs précisent que « alors que notre baromètre montre qu'en 15 ans, Internet s'est imposé comme le premier mode de contact des usagers avec les différents services publics (à l'exception notable de la police et de la gendarmerie), ces résultats rappellent le besoin exprimé par les Français d'avoir des services publics qui offrent aussi la possibilité d'un contact direct et « humain » avec les agents ». Le rapporteur spécial ne saurait également trop souligner l'importance de cet aspect.
Le Président de la République a donc annoncé en avril 2019 le déploiement de France Services , un réseau de services publics mutualisés, devant permettre aux usagers de procéder aux principales démarches administratives du quotidien dans un lieu unique, à moins de 30 minutes de leur domicile .
La circulaire 5 ( * ) du 1 er juillet 2019 qui crée formellement France Services ne fait cependant pas mystère du rôle des structures préexistantes. Elle indique notamment que « cette nouvelle ambition s'appuie sur une refonte complète du réseau existant des maisons de services au public (MSAP) ».
L'homologation des structures France services est toutefois conditionnée au respect de 30 critères obligatoires de qualité de service . Depuis le 1 er janvier 2022, les MSAP qui ne répondent pas aux critères France Services ne sont d'ailleurs plus labellisées et ne bénéficient plus de financements de l'État et de ses partenaires.
D'après la circulaire de 2019, le réseau France Services poursuit trois objectifs :
- une plus grande accessibilité des services publics au travers d'accueils physiques polyvalents (maisons France services proprement dites mais aussi la création de bus France Services) ;
- une plus grande simplicité des démarches administratives avec le regroupement en un même lieu des services de l'État, des opérateurs et des collectivités territoriales « afin de lutter contre l'errance administrative et d'apporter aux citoyens une réponse sur place, sans avoir à les diriger vers un autre guichet » ;
- pour répondre aux critiques émises à l'encontre des MSAP, « une qualité de service substantiellement renforcée » par la définition d'un panier de services commun à l'ensemble du réseau France Services.
Les maisons France services dans la loi
Le cadre juridique des maisons France services n'a été élevé au niveau législatif qu'en 2021 par l'article 160 de la loi dite « 3DS » 6 ( * ) .
Celle-ci dispose que « afin d'améliorer, pour tous les usagers, la qualité des services au public et leur accessibilité, en milieu rural et en milieu urbain, des conventions, dénommées conventions France Services, peuvent être conclues aux niveaux départemental et infra-départemental entre l'État, des collectivités territoriales ainsi que leurs groupements et des organismes nationaux ou locaux chargés d'une mission de service public ou concourant à la satisfaction des besoins de la population ».
Le texte précise que « la convention, qui doit respecter un référentiel approuvé par arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales ainsi que le schéma d'amélioration de l'accessibilité des services au public, définit l'offre de services proposée, qui peut être organisée de manière itinérante ou selon des modes d'accès dématérialisés, ainsi que la nature des prestations fournies. L'ensemble des services ainsi offerts porte le label « France Services » ».
2. Un objectif de maillage territorial ambitieux mais qui doit être encore approfondi
a) L'objectif gouvernemental d'une maison par canton bientôt atteint
Dès 2019, l'objectif annoncé est que l'ensemble du territoire se situe à moins de 30 minutes d'une maison France services, ce qui correspond à une cible d'environ 2 500 maisons, soit environ une par canton . Le réseau France services a donc un maillage plus dense que celui des MSAP (de 1 340 MSAP à 2 500 France services).
Le nombre de maisons France services labellisées a cru très rapidement depuis 2019. Il a presque doublé en deux ans, passant de 1 123 maisons labellisées à leur création (c'est-à-dire l'essentiel des anciennes MSAP) à 2 055 en janvier 2022 et 2 197 en avril 2022 . Le nombre de maisons France services labellisées croît par « vagues » successives d'environ 15 points tous les trimestres.
L'objectif des 2 500 maisons labellisées devrait être atteint à la fin de l'année 2022. Déjà, depuis le 1 er janvier 2022, le territoire national est couvert à 95 % par une France services à moins de 30 minutes.
Évolution du nombre de MSAP puis de France services labellisées
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire transmis par le rapporteur spécial
La circulaire de 2019 précédemment mentionnée définit plusieurs types de territoires prioritaires pour les nouveaux projets d'implantation France Services : les zones éloignées d'une offre existante de services publics ; les petites centralités et les quartiers prioritaires de la politique de la ville ; les lieux de passage habituels des habitants des territoires concernés (tiers lieux, médiathèques, cité scolaire, etc.) et les territoires d'outre-mer.
Le rapporteur spécial se félicite de la croissance rapide du nombre de maisons France services , qui traduit une véritable densification du maillage territorial par rapport au réseau des MSAP.
Cette densification a également permis de s'assurer que des France services étaient présentes y compris dans des petites ou des très petites collectivités. Sur les 522 élus locaux ayant répondu au questionnaire publié en mars 2022 par le rapporteur spécial sur la plateforme de consultation dédiée du Sénat , 40 % répondent pour des très petites collectivités (moins de 1 000 habitants) ; 31 % pour des petites collectivités (entre 1 000 et 5 000 habitants), 10 % pour des collectivités moyennes (entre 5 000 et 10 000 habitants) et enfin 19 % pour des collectivités comportant plus de 10 000 habitants (dont deux départements).
b) Mais une cible à rehausser pour atteindre une maison par bourg centre
Cependant, le rapporteur spécial souligne que la cible d'une maison France services par canton n'est pas satisfaisante, dans la mesure où l'élargissement des cantons consécutif à la loi du 17 mai 2013 7 ( * ) a entraîné une déconnexion entre la maille du canton et la présence d'un pôle de services structurant. En conséquence, dans des territoires très ruraux, un même canton peut comporter plusieurs bourgs-centre.
S'agissant de l'objectif d'une maison France services à moins de 30 minutes, qui est l'indicateur de performance qui figure dans les documents budgétaires, le rapporteur spécial souligne qu' en l'absence de transports publics, ce qui est fréquemment le cas en zone très rurale, l'accès à la maison France services demeure complexe.
Le rapport de Terra Nova cité plus haut, publié en janvier 2022, indique que, par rapport à l'objectif affiché d'une maison France services par canton, les départements qui sont les plus proches de l'atteinte de cet objectif ne sont pas ceux où le besoin s'en fait le plus sentir. Le rapport indique ainsi qu'il « est difficile de voir se dessiner une dynamique cohérente de développement des structures de France Services , même dans les territoires les plus prioritaires. La faible densité semble être le seul critère réellement aligné avec les efforts de réalisation ».
Pourcentage de réalisation de l'objectif France
services en fonction de la part
de population rurale dans le
département
(en %)
En violet : atteinte de l'objectif du nombre de maisons France services dans le département.
En vert : départements inclus dans les 20 % des départements ayant atteint le plus rapidement les objectifs de déploiement territorial France services.
En rouge, ceux inclus parmi les départements les plus en retard.
En bleu, départements compris dans les catégories intermédiaires.
Source : Terra Nova
Le rapporteur spécial souligne que le réseau France services doit coller davantage à la proximité du quotidien . Il considère que la maille la plus indiquée est celle d'une maison France services dans chaque petite centralité, autrement dit dans chaque bourg centre ayant une fonction de pôle de services pour le bassin de vie environnant . Cela implique de ne pas considérer que le déploiement du programme est achevé une fois l'objectif des 2 500 France services atteint. Il doit s'agir d'une première étape, même si le rapporteur spécial est bien conscient que le rythme des labellisations futures ne peut être le même que celui ayant eu cours lors des deux dernières années. Le processus doit cependant se poursuivre.
Recommandation n° 18 : Aller plus loin dans le déploiement territorial du programme France services, pour cibler l'implantation d'une maison par bourg centre jouant le rôle de pôle de services, en milieu rural à faible densité de population. (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT)
c) Une ouverture à d'autres usagers éloignés des services publics dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville
Le rapport de Terra Nova conclut également que, contrairement à ce qui pourrait être espéré, les départements les plus pauvres ou ayant le plus fort taux de chômage ne sont pas les plus performants en termes de labellisation de structures France Services . Un accent particulier doit donc être mis sur ces départements dans le cadre du programme France services.
Lien entre le déploiement des maisons France
services
et le taux de chômage et de pauvreté
(en %)
En orange : atteinte de l'objectif du nombre de maisons France services dans le département.
Source : Terra Nova
Le rapporteur spécial considère que l'orientation donnée en 2019 vers une implantation croissante des maisons dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) a des résultats très positifs . Rien n'interdisait théoriquement de créer une MSAP en QPV, mais la quasi-totalité d'entre elles étaient cependant localisées en zone rurale. Aujourd'hui, environ 15 % des maisons France services sont situées dans un quartier prioritaire de la politique de la ville . Cette proportion est parfois plus élevée : le rapporteur spécial a par exemple constaté lors d'un déplacement dans le département du Nord que plus d'un tiers (34 %) des France services du département étaient situées en QPV pour 14 % de la population du département située en QPV.
Les résultats de la consultation menée par le rapporteur spécial montrent la diversité d'implantation des structures France services .
Répartition des réponses des élus locaux par type de territoire sur la localisation de la France services :
Source : plateforme de consultation des élus locaux du Sénat
Le représentant de la Défenseure des droits a alerté le rapporteur spécial sur les difficultés d'accès aux services publics propres aux quartiers de la politique de la ville, où la question ne se pose pas nécessairement en termes de distance mais où « l'aller vers » et l'accompagnement individualisé, en particulier s'agissant du numérique, sont tout autant nécessaires. Il est par exemple regrettable qu'une métropole comme Marseille ne dispose que de 9 France services pour 800 000 habitants.
Le rapporteur spécial insiste sur le fait que le maillage territorial des France services doit refléter à la fois la diversité et les besoins des publics.
Recommandation n° 19 : Accentuer le développement de France services vers les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). (Ministère de la transformation et de la fonction publiques - ANCT)
* 1 Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
* 2 L'accès aux services publics dans les territoires ruraux, Cour des comptes, enquête demandée par le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale, mars 2019.
* 3 Dématérialisation et inégalités d'accès aux services publics, Défenseur des droits, 2019.
* 4 Baromètre des résultats de l'action publique France Services : des lieux au service du public dans les territoires, Clara Pisani-Ferry pour Terra Nova, avril 2021.
* 5 Circulaire n° 6094-SG du 1 er juillet 2019 relative à la création de France Services.
* 6 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.
* 7 Loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral.