B. RÉALISATIONS ET PROJETS
1. Valorisation de l'énergie fatale issue des fumées d'échappement des moteurs de production thermiques par un cycle ORC (Organic Rankine Cycle) à Mayotte
Dans le cadre de la transition écologique, la recherche industrielle pour mettre au point des procédés innovants permettant de valoriser l'énergie fatale est au coeur de la question de l'efficacité énergétique. On appelle énergie fatale l'énergie produite au cours d'un processus industriel ou de traitement des déchets qui ne visait pas spécifiquement à la produire et que l'on cherche aujourd'hui à valoriser, comme les collectivités territoriales commencent à le faire via la mise en oeuvre de réseaux de chaleur. L'Ademe a publié en novembre 2012 une contribution à l'élaboration de la vision énergétique pour la France 2030-2050, qui démontre que l'industrie française, consommatrice d'environ 24 % de l'énergie finale du pays, pourrait réduire sa consommation de 9,2 % à l'horizon 2030. En outre, l'Ademe évalue à 17 % la consommation de combustible dans l'industrie perdue en chaleur fatale à plus de 100° C. À Mayotte, Électricité de Mayotte (EDM) a lancé un projet, dans sa centrale de production de Longoni, de valorisation de l'énergie fatale issue des fumées d'échappement des moteurs de production thermiques grâce au procédé du cycle organique de Rankine ». Les machines à cycle organique de Rankine permettent de transformer des sources de chaleur basse et moyenne température en électricité. Elles fonctionnent sur les mêmes principes thermodynamiques que les cycles vapeur. Elles emploient un fluide organique qui récupère la chaleur perdue en circulant en cycle fermé, puis passe dans une turbine qui la transforme en électricité. Pour les sources de chaleur inférieures à 250° C, ce type de procédé présente de nombreux avantages, notamment de rendement et de coût. En effet, à la centrale de Longoni, le projet d'EDM devrait coûter 4 millions d'euros au total, pour la fourniture du procédé, son installation et son raccordement. Les bénéfices attendus sont nombreux : amélioration du rendement global de la centrale de production d'énergie, diminution des consommations de gazole, économies de CSPE (contribution au service public de l'électricité), amélioration du mix énergétique de Mayotte et promotion des énergies renouvelables. Le projet est actuellement en phase d'étude. Les études de faisabilité fournisseur ont été réalisées. La consultation du public a été lancée. EDM espère une mise en service en septembre 2016. Ce projet innovant est conçu comme un projet pilote dans la perspective d'être répliqué sur d'autres systèmes électriques, insulaires notamment. |
Source : DEAL de Mayotte
2. SWAC (Sea water air conditioning) du Centre hospitalier de Polynésie française
Si l'insularité induit des contraintes lourdes, au premier rang desquelles la difficulté d'approvisionnement énergétique, la dimension maritime constitue cependant un atout et une chance car les océans recèlent de forts potentiels d'innovation, dont le projet SWAC est une parfaite illustration en permettant une climatisation faisant l'économie d'énergies fossiles. Ce système de climatisation par l'eau froide, puisée en profondeur sous l'océan grâce à un tuyau de 900 mètres, déjà éprouvé dans le secteur hôtelier, doit alimenter en ventilation le centre hospitalier de Polynésie française. Ce projet ambitieux coûtera 3 milliards de XPF (soit plus de 25 millions d'euros), cofinancés par l'Agence française de développement (AFD), la Banque européenne d'investissement (BEI), le Fonds chaleur de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et le Pays.
Source : Creocéan Cette technique de climatisation via le SWAC est une particularité de la Polynésie française. La première centrale de climatisation SWAC est en activité à Bora Bora, à l'hôtel Intercontinental depuis 2006. Ce projet est d'autant plus pertinent que la consommation en énergie du centre hospitalier est importante, du fait de ses missions de service public de santé, des contraintes sanitaires et de l'obligation de continuité du service. En 2013, le centre a consommé plus de 26 000 MWH, soit 5 % de la demande totale d'électricité de l'île, dont près de la moitié était dédiée exclusivement à la production de froid. La mise en place du SWAC a été accompagnée préalablement d'un diagnostic énergétique qui a permis de réduire les besoins en énergie. La fin des travaux est programmée pour 2017. Ce dispositif innovant pourrait facilement être dupliqué dans le secteur touristique ainsi que dans les collectivités insulaires présentant les mêmes caractéristiques géomorphologiques. |
Source : Gouvernement de Polynésie française
3. Valorisation de la biomasse et de la bagasse en Guadeloupe
La canne à sucre constitue la principale culture de la Guadeloupe tant en surface agricole qu'en production. La bagasse, résidu fibreux, issu de cette canne à sucre, est utilisée comme combustible. La majeure partie du gisement est valorisée en Guadeloupe par la centrale thermique du Moule (CTM) pour la production de vapeur et d'électricité. En effet, en 1992, la société Albioma a mis en service sa première centrale de cogénération à combustion hybride bagasse/charbon sur le site de Bois-Rouge à La Réunion (62 MW). Cette centrale a permis d'apporter à la sucrerie voisine une solution d'approvisionnement énergétique durable, tout en valorisant son sous-produit d'exploitation, la bagasse. Depuis, plusieurs centrales utilisant cette techniques ont vu le jour. À la centrale du Moule, à Marie-Galante, le projet est très ambitieux puisqu'il vise à abandonner progressivement le charbon au profit d'un approvisionnement à 100 % en biomasse d'ici à 2020. Par ailleurs, la mise en place d'une centrale 100 % biomasse est envisagée pour 2018, combinant une installation de combustion bagasse/granule de bois en fonction de la période (sucrière ou non) avec une turbine vapeur à Marie-Galante. La vapeur produite alimentera la sucrerie adjacente ainsi que le réseau EDF de l'île de Marie-Galante. Le 18 octobre 2015, un arrêté interministériel redéfinissant les conditions du soutien applicable aux installations produisant de l'électricité à partir de biomasse issue de canne à sucre (ou bagasse) en outre-mer a été publié. Il revalorise le montant de la « prime bagasse », versée pour toutes les centrales existantes produisant de l'électricité à partir du résidu de canne à sucre. Cet arrêté fixe le montant de cette prime à 14,5 euros la tonne de canne à sucre, contre 13 euros auparavant. Le montant de la prime bagasse était jusqu'alors indexé sur le cours du charbon et le cours du CO 2 , ainsi que sur le taux de fibre présent dans la canne, avec de plus un coefficient de dégressivité de la prime nécessitant une augmentation du taux de fibre de 3 % par an pour maintenir la rémunération. Le nouvel arrêté supprime l'indexation de la prime sur le cours du charbon et du CO 2 qui, dans son principe, ne faisait que maintenir la dépendance des systèmes électriques insulaires à la fluctuation du cours des énergies fossiles. Le coefficient de dégressivité est neutralisé jusqu'à 2017 inclus. Par ailleurs il est divisé par 5, ramenant l'augmentation du taux de fibre nécessaire pour maintenir la rémunération à un niveau plus réaliste de 0,6 % par an. La revalorisation permettra de développer les énergies renouvelables et de conforter la filière canne-sucre-rhum-bagasse dans les outre-mer, et particulièrement en Guadeloupe. |
Source : DEAL de Guadeloupe
4. Le projet d'énergie thermique de la mer en Martinique
L'énergie thermique des mers (ETM) consiste en l'exploitation de la différence de température entre les eaux de surface et les eaux profondes des océans. Dans les outre-mer situés en zone intertropicale où le gradient de température est important, cette technique est particulièrement pertinente. Contrairement aux autres énergies renouvelables, l'ETM fournit une énergie de base, stable, garantie, et permet une production d'électricité non intermittente, renouvelable et décarbonée, sans aucune incertitude sur la ressource. En Martinique, le projet NEMO ( New Energy for Martinique and Overseas ), est une centrale flottante de production d'énergie thermique des mers. Elle produit un courant électrique d'une puissance de 16 MW à partir de la différence de température d'eau de mer pompée à 1 km de profondeur à 4°C et en surface à 28°C. Ce projet pilote s'appuie sur le prototype à terre mis en oeuvre par DCNS depuis 2010 à La Réunion. Le projet NEMO est une plateforme flottante qui constitue une modalité offshore du développement de la technologie ETM. Cette modalité permettra de viser les sites isolés densément peuplés, nécessitant une production d'électricité dans des zones où le coût de l'énergie fossile est élevé et apportera donc une alternative intéressante aux centrales thermiques pour la production d'électricité de base dans les zones insulaires tropicales. Ce projet est en outre soutenu par un partenariat 100 % français associant le développeur de projet Akuo Energy, l'industriel DCNS et le fournisseur de technologie ETM. Le début des travaux est prévu en 2016 pour une mise en service à l'horizon 2018-2019. La réussite d'un tel projet pourrait déboucher sur le développement de plusieurs centrales industrielles de puissance supérieure (20 MW), pouvant être déployées dans la zone intertropicale, notamment dans l'arc antillais. Le projet NEMO pose le premier jalon d'une filière industrielle française dont les perspectives commerciales internationales à l'export sont extrêmement prometteuses. Il s'agit d'une première mondiale à cette échelle sur la base d'un concept déjà éprouvé pour de petites productions. L'innovation technologique porte notamment sur l'adaptation des dispositifs nécessités par le pompage de grandes quantités d'eau à grande profondeur. |
Source : DEAL de la Martinique