N° 567
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015
Enregistré à la Présidence du Sénat le 26 juin 2015 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation sénatoriale à l'outre-mer (1) sur les entreprises et les dynamiques sectorielles du Pacifique - Actes de la conférence économique du 25 juin 2015 ,
Par M. Michel MAGRAS,
Sénateur.
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(1) Cette délégation est composée de : M. Michel Magras, président ; Mme Aline Archimbaud, M. Guillaume Arnell, Mmes Éliane Assassi, Karine Claireaux, MM. Éric Doligé, Michel Fontaine, Pierre Frogier, Joël Guerriau, Antoine Karam, Thani Mohamed Soilihi, vice-présidents ; M. Jérôme Bignon, Mme Odette Herviaux, MM. Robert Laufoaulu, Gilbert Roger, secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jean Bizet, Mme Agnès Canayer, MM. Joseph Castelli, Jacques Cornano, Félix Desplan, Alain Fouché, Jean-Paul Fournier, Jean-Marc Gabouty, Jacques Gillot, Daniel Gremillet, Jean-Jacques Hyest, Mme Gisèle Jourda, MM. Serge Larcher, Nuihau Laurey, Jean-François Longeot, Vivette Lopez, Jeanny Lorgeoux, Georges Patient, Stéphane Ravier, Charles Revet, Didier Robert, Abdourahamane Soilihi, Mme Lana Tetuani, MM. Hilarion Vendegou, Paul Vergès et Michel Vergoz.
OUVERTURE
Gérard Larcher, Président du Sénat
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de vous accueillir pour cette première conférence économique de bassin organisée par notre Délégation à l'outre-mer et consacrée à la zone Pacifique. La France est présente dans cet espace à travers la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, la Polynésie française, ainsi que l'atoll de Clipperton. Cette conférence répond à l'une des priorités que je me suis fixées : renforcer la proximité de notre assemblée avec le monde économique, dont je salue les représentants, car ce sont nos entreprises, qui créent des emplois et font vivre nos territoires.
Je remercie le président Michel Magras et les membres de notre délégation pour cette initiative, qui doit permettre de mieux appréhender les attentes des acteurs économiques de nos trois collectivités du Pacifique et ainsi de mieux les aider à relever les défis auxquels elles sont confrontées. Cette rencontre nous permettra également de poursuivre la réflexion entamée par notre Délégation à l'outre-mer, présidée à l'époque par Serge Larcher, que je tiens à remercier pour son action, ainsi que celle menée par le groupe d'amitié France-Vanuatu-Îles du Pacifique et celle de notre groupe de travail, commun à la Commission du développement durable et à notre délégation, sur les incidences du réchauffement climatique sur les outre-mer.
Je suis souvent frappé par la méconnaissance des réalités des outre-chez nos concitoyens métropolitains, mais aussi chez un certain nombre de responsables politiques. En effet, des clichés perdurent, comme celui d'un outre-mer encore passif ou dépendant de la métropole. Il s'agit pour moi de clichés d'un autre temps, que nous devons continuer à combattre.
De fait, nos collectivités du Pacifique nous offrent une tout autre approche de l'outre-mer et nous projettent dans un avenir qui doit être prometteur, grâce à leur réel potentiel de développement économique. Leurs institutions peuvent également y contribuer car ces territoires sont dotés de statuts différents et innovants : large autonomie en Polynésie ; autonomie avancée en Nouvelle-Calédonie ; intégration des autorités coutumières au sein des institutions mises en place à Wallis-et-Futuna. Ces organisations originales et adaptées ont facilité leur plus grande intégration dans leur environnement régional. Celles-ci ont également favorisé le rapprochement de la France avec les États de la région.
Ainsi, à travers nos trois collectivités d'Océanie, qui comptent un total de 500 000 habitants et une zone économique exclusive (ZEE) de plus de 7 millions de kilomètres carrés, qui représente les deux tiers de la ZEE française, la France est à la fois un acteur économique qui doit devenir de premier plan et un acteur de développement de l'ensemble de la région. Notre pays représente également, grâce à sa présence militaire, un gage de stabilité reconnu par les États voisins.
Alors que nombre de nos citoyens expriment des doutes quant à leur avenir, les trois collectivités du Pacifique présentent de grandes opportunités de développement, grâce à leurs ressources halieutiques et minérales ou encore en matière d'énergies marines renouvelables. L'exploration et l'évaluation de ce potentiel constituent l'un des grands défis à relever. Je rappelle que la Commission Innovation 2030 a identifié la valorisation des richesses minérales comme l'un des axes majeurs de croissance de notre économie.
Tout le monde connaît le nickel calédonien qui n'est pas seulement un enjeu économique, mais également politique et sociétal, pour sa contribution déterminante au rééquilibrage entre les provinces Nord et Sud. Ce rééquilibrage doit toutefois se concilier avec la défense d'une stratégie cohérente sur l'ensemble du territoire. Nombreux sont ceux qui, en métropole, ignorent encore qu'une grande quantité de minerais stratégiques sont présents dans les grands fonds marins, via différents types de minéralisation. L'Ifremer en a dressé un premier inventaire qui paraît prometteur. Toutefois, les grands enjeux liés à l'exploration et à l'exploitation de ces ressources nécessitent la définition d'une stratégie dédiée au niveau national, dans le respect de l'environnement.
Compte tenu de l'importance des moyens à mobiliser, toutes les recherches ne peuvent être menées par notre pays seul. Il est donc essentiel que l'Europe se positionne également face à cet enjeu majeur, si elle souhaite conserver un rôle de premier plan en matière de recherche scientifique et technologique. Ainsi, par les nouvelles orientations de la décision d'association entrée en vigueur en 2014, l'Europe doit répondre à un certain nombre de nos interrogations. L'objectif de la décision d'association est de favoriser l'accroissement de la compétitivité des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) et le renforcement de leurs qualités d'adaptation. Je rappelle que le onzième fonds européen de développement (FED) pour la période 2014-2020 prévoit une enveloppe de 400 millions d'euros pour les PTOM.
Le grand projet de faire des collectivités d'outre-mer du Pacifique un axe de développement et de rayonnement économique que nous appelons tous de nos voeux doit nous inciter à trouver des solutions aux contraintes géographiques. Je considère que ces solutions résident dans le renforcement des liens entre nos territoires et les États de la région. Elles résident également dans l'aide à l'innovation et au développement du numérique. Toutefois, ces évolutions nécessitent que les entreprises bénéficient d'un meilleur accès au crédit, ainsi que d'un soutien de l'État à l'investissement productif. En effet, l'État doit aider ces acteurs à investir et à tirer profit des avantages résultant des contraintes liées à l'insularité de ces territoires, comme l'authenticité du patrimoine culturel dans toute sa diversité, la beauté de paysages préservés, la richesse de la biodiversité des fonds marins, qui représentent autant d'atouts pour le développement économique, notamment pour le tourisme.
Pour conclure, je souhaite évoquer la question de l'adaptation de nos territoires ultramarins au changement climatique, car ceux-ci se trouvent aux avant-postes de cette problématique. Cette question climatique figure au premier rang des priorités du Sénat pour 2015. Ainsi, la conférence de Paris -Le Bourget (COP21) aura une portée politique considérable et débouchera, je l'espère, sur un accord de portée mondiale. Certes, le processus revêt une dimension essentiellement intergouvernementale, mais l'ensemble des parlements doivent jouer leur rôle dans la préparation de cette conférence, car ils auront la tâche de décliner au niveau national les accords négociés au niveau international. Le Sénat mène donc une politique active pour éclairer nos concitoyens sur les enjeux de cette conférence et ce colloque en constitue une excellente occasion. Vos territoires sont également mobilisés sur ce sujet, comme le prouve le sommet des ministres des PTOM des 16 et 17 juin derniers à Bruxelles, qui s'est conclu par la signature d'un document stratégique sur l'énergie. Ce document sera présenté lors de la Conférence de Paris.
Je vous souhaite donc de fructueux débats, avec la certitude que cette journée fera progresser la prise de conscience de nos concitoyens sur la situation économique de vos territoires au moment où le centre de gravité de l'économie mondiale bascule vers le Pacifique. Quoi qu'il en soit, nous nous félicitons de cette réunion au Sénat, représentant de l'ensemble des territoires. Cette institution a en particulier à coeur de représenter les outre-mer, dans le respect de la diversité de ce que l'Histoire nous a apporté. L'avenir est porteur d'espoirs.
Michel Magras, Président de la Délégation sénatoriale à l'outre-mer
Monsieur le Président du Sénat,
Mesdames et Messieurs les parlementaires et les élus qui présidez aux destinées des collectivités françaises du Pacifique,
Madame et Messieurs les présidents de chambres de commerce de ces collectivités et Monsieur le président de la Fédération des entreprises d'outre-mer qui avez fait vôtre l'idée de nouer un partenariat avec notre délégation sénatoriale pour mettre sur pied la conférence d'aujourd'hui,
Madame et Messieurs les dirigeants d'organisations patronales qui avez infusé une dynamique de mobilisation des acteurs locaux et recherché la coordination des interventions dans la complémentarité - nous aurons ainsi plusieurs duos dans le déroulement des tables rondes -,
Messieurs les modérateurs qui avez accepté de mettre vos talents au service de la réussite de notre journée - il s'agit là d'un véritable défi tant les témoignages foisonnent ! Mais je ne doute pas qu'ils seront aidés par l'ensemble des intervenants qui ont été invités à respecter scrupuleusement leur temps de parole -,
Mesdames et Messieurs qui avez si nombreux répondu à notre sollicitation pour intervenir aujourd'hui, souvent au prix d'un long voyage, en vos qualités de capitaines d'entreprise, de hauts responsables de l'armée, de l'administration, d'organismes de la sphère publique ou du monde associatif, en charge des questions ultramarines ou en lien avec les économies ultramarines, ou encore en qualité d'universitaire et de chercheur,
Mesdames et Messieurs qui manifestez votre intérêt pour nos collectivités du Pacifique par votre présence aujourd'hui - certains d'entre vous sont d'ailleurs des fidèles des manifestations organisées par notre délégation !
À vous tous, je souhaite la bienvenue au Sénat, en mon nom propre et celui de mes collègues de la délégation.
Permettez-moi tout d'abord de me tourner vers notre Président du Sénat, Gérard Larcher, sans qui la délégation, dont la genèse remonte à une mission d'information initiée par lui en 2009, n'existerait peut-être pas encore ! Je veux lui dire notre gratitude de toujours être attentif à la situation de nos outre-mer et à l'écoute de leurs représentants.
Conscient des potentiels de ces territoires et de leur diversité qui leur confère souvent un statut d'éclaireur, de pionnier, dans des domaines aussi divers que l'exploration des fonds marins, les énergies renouvelables mais aussi l'organisation institutionnelle, notre Président du Sénat cite volontiers les outre-mer en exemple et, encore récemment, comme source d'inspiration dans la recherche d'un modèle contribuant à trouver une issue à la crise ukrainienne.
Cher Président, nous vous remercions d'avoir placé la conférence d'aujourd'hui sous votre haut patronage, d'en avoir ouvert les travaux, et de nous rejoindre sans doute en cours de journée, journée qui sera d'une exceptionnelle densité, en résonance avec des initiatives antérieures de la délégation !
Notre conférence se situe en effet dans le prolongement de travaux importants accomplis sous l'impulsion de mon prédécesseur, Serge Larcher, sénateur de la Martinique, dont je veux saluer l'engagement au service de nos outre-mer dans leur diversité. J'attire ainsi votre attention sur les actes du colloque de janvier 2013 qui avait pour thème « La France dans le Pacifique : Quelle vision pour le 21 ème siècle ? », mais aussi sur deux rapports d'information en lien avec nos thématiques d'aujourd'hui : une étude d'ensemble sur les enjeux des ZEE ultramarines, où bien évidemment le Pacifique a la part belle, et un rapport élaboré conjointement avec la commission des affaires économiques démontrant l'importance primordiale des dispositifs fiscaux de soutien à l'investissement productif pour les économies ultramarines, a fortiori pour celles qui ne peuvent compter sur d'autres mécanismes de solidarité de compensation des surcoûts.
Notre journée s'articulera autour de quatre tables rondes selon le programme dont vous disposez : il s'agit de combler un déficit de connaissance, de donner une meilleure visibilité aux économies des territoires du Pacifique, de mettre en lumière leurs spécificités, les contraintes qui s'imposent aux entreprises et, bien sûr, les dynamiques sectorielles et des potentiels exceptionnels.
Les messages délivrés par les intervenants porteront d'autant mieux qu'ils seront incisifs et concis : au risque de la répétition - mais c'est pour la bonne cause ! - j'invite chacun à respecter scrupuleusement son temps de parole. Il y va du succès d'une réalisation collective en forme de feu d'artifices !
Pour la mise à feu, je cède la parole à mon collègue Pierre Frogier, sénateur de la Nouvelle-Calédonie, chargé d'une mise en perspective de la première table ronde qui sera animée par Christian Lechervy, ambassadeur, secrétaire permanent pour le Pacifique.
Je vous remercie.