CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE
La première partie du rapport a montré qu'en dépit des diverses spéculations et fantasmes, l'exploitation des richesses de l'Arctique, si elle voit le jour, va rester difficile. Cette partie a montré également que c'est à 95 % dans la zone économique exclusive des différents pays de la zone arctique que ces richesses se trouvent. C'est dire l'importance que revêt pour eux une région qui présente un si grand potentiel.
Aussi, il est légitime de les voir développer des stratégies poussées et conséquentes pour assurer le développement de régions qui jusque-là ne disposaient que de peu de moyens et étaient isolées. Mais l'Arctique n'étant pas une région du monde comme les autres en raison de la fragilité de son environnement, elle doit conduire à composer entre les trois lignes rappelées par Igor Ivanov : le développement économique avec la protection de l'environnement ; la modernisation des standards de qualité de vie avec la sauvegarde de traditions culturelles anciennes ; la coopération transfrontalière avec la défense des intérêts légitimes des États.
L'enjeu économique est trop important pour ne pas s'imposer : la Russie cherche à redevenir un des tous premiers acteurs mondiaux ; le Groenland est en quête de son indépendance ; l'Islande et la Norvège cherchent à conserver la leur ; la Suède et la Finlande veulent moderniser leur Grand Nord ; le Canada veut développer et renforcer ses territoires au nord. Or, ces ambitions diverses ne mènent pas à la même conclusion.
Certains de ces États reconnaissent que l'ampleur des défis et des investissements nécessitera l'assistance de pays tiers. C'est le cas, notamment des plus petits d'entre eux : la Norvège, la Suède, la Finlande, l'Islande et le Danemark qui doit composer avec la volonté émancipatrice du Groenland. La Russie et le Canada, en revanche, voient d'un moins bon oeil la venue dans l'espace arctique de nouveaux acteurs. Enfin, les États-Unis assument moins un rôle de leadership dans cette région que dans d'autres. Cette position pourrait prendre fin lorsqu'ils présideront le Conseil de l'Arctique à partir de 2015.
Et ces lignes se retrouvent au sein du Conseil Arctique en ce qui concerne la place laissée aux Observateurs. Le Canada et la Russie constituent pour l'instant un front commun contre l'ouverture plus grande de cet organe à des pays nombreux dans le monde à s'intéresser aux développements de l'Arctique. Des deux, la Russie est la plus conservatrice, car elle s'oppose également à ce que se développent plus d'accords contraignants au sein du Conseil arctique (même si celui-ci ne constitue que le lieu où les parties se réunissent pour adopter un accord multilatéral), notamment pour la préservation de l'environnement contre le carbone-suie. C'est regrettable, car le Conseil avait été créé justement pour préserver l'environnement de l'Arctique.
Toutefois, les récents signaux envoyés des États-Unis avec le « plan Obama pour le climat » et les déclarations de Vladimir Poutine peuvent laisser augurer une plus grande prise en compte des impératifs environnementaux en Arctique. C'est un impératif, car c'est un sujet majeur une des questions qui fédèrent pratiquement tous les acteurs mondiaux avec le renforcement de l'effort de recherche en Arctique pour une meilleure compréhension du climat. Même si on peut regretter que, sur ces questions, deux voix manquent encore, celle de la France et celle de l'Union européenne