2. Place et pouvoir des nouveaux médias : une génération numérique ?
Chiffre étonnant pour un adulte qui n'est pas né avec les nouvelles technologies, 67,5 % des 11-20 ans déclarent utiliser régulièrement plusieurs médias en même temps . Selon M. Marc Prensky, ce serait au demeurant l'une des caractéristiques de ces « natifs numériques » 5 ( * ) que de pouvoir manipuler simultanément les outils tels que les jeux vidéo, la télévision, Internet, et les téléphones portables. Ils sont toujours placés à portée de mains, sont partie intégrante de leur vie et personnalité et font l'objet d'usages croisés (téléchargement de jeux sur Internet, gestion des photographies sur l'ordinateur par Bluetooth...). A ce titre, la génération numérique est en fait une génération multimédia, qui jongle avec les affichages multi-fenêtres, les différents outils, et les juxtapose sans difficulté 6 ( * ) .
Le téléphone mobile est le meilleur exemple d'usage multiple dont les nouveaux moyens de communication sont l'objet. La population des jeunes utilisateurs de mobiles se distingue ainsi par :
- un taux d'équipement très élevé (voir graphiques ci-après) ;
- un sentiment de maîtrise très fort : plus de la moitié des jeunes utilisateurs estime maitriser son appareil, contre à peine un quart chez les plus de quarante ans ;
- une grande variété d'usages , à l'image d'un couteau suisse : plus de 80 % des jeunes utilisent leur téléphone mobile comme réveil ou calculatrice, mais il existe aussi des usages très répandus des fonctions multimédias du téléphone : envoi de photos, enregistrement de films, envoi de SMS et MMS, lecture de MP3, jeux ;
- et enfin une relation très personnalisée avec leur appareil , objet d'identité prenant souvent une dimension affective : 75 % des jeunes de 15 à 24 ans reviennent par exemple chez eux, le matin, lorsqu'ils s'aperçoivent qu'ils ont oublié leur téléphone, le téléphone mobile étant cité en deuxième rang derrière les clés, mais devant la carte d'identité.
On peut donc réellement parler de génération numérique , qui est née et a grandi avec les nouvelles technologies et dont les usages sont tout à fait originaux. TNS Media Intelligence les a surnommés « les ados techno sapiens », qui disposent en permanence de récepteurs personnalisés et miniaturisés avec lesquels ils se relient au monde.
Cette présence massive des écrans 7 ( * ) n'est pas encore forcément mesurée par les parents, qui n'ont pas conscience de la portée de cette nouvelle dépendance aux nouveaux médias, qui paraissent parfaitement adaptés aux besoins de la jeunesse, tout en les protégeant du monde extérieur.
* 5 Marc Prensky, Digital Natives, Digital Immigrants, NCB University Presse, 2001.
* 6 Cette capacité est bien mise en valeur par Audrey Messin dans son article « de l'usage d'Internet à la « culture de l'écran », 15 avril 2005, accessible sur le lien suivant : http://gdrtics.u-paris10.fr/pdf/doctorants/papiers_2005/Aurdey_Messin.pdf (sic).
* 7 Le sociologue Gilles Lipovetsky parle à juste titre « d'écran global » pour souligner cette omniprésence des écrans de télévision, d'ordinateur et de téléphone portable dans la société contemporaine, qui tendent de plus à plus à être confondus et à interagir. Voir également sur cette présence de l'écran. Josiane Jouët et Dominique Pasquier, « Les jeunes et la culture de l'écran. Enquête nationale auprès des 6-17 ans », Réseaux, n° 92-93, vol 17, 1999, pp. 25-102.