2. Les qualités thérapeutiques de l'image
Depuis Freud on considère que les mots peuvent guérir. Mais les images, qui procurent également des émotions, ont-elles des vertus thérapeutiques ?
Une enquête a montré que les grands consommateurs de films d'horreur sont souvent d'anciens enfants terrorisés par ces mêmes films à un âge où ils n'avaient pas les moyens de se protéger contre eux. Ces spectateurs cherchent donc les images qui leur rappellent leurs terreurs passées, mais en ayant cette fois-ci le pouvoir de les contrôler et ainsi de s'en guérir 37 ( * ) . Si l'étude démontre le pouvoir thaumaturgique des images sur les adultes, elle n'apporte rien sur un éventuel impact positif des films d'horreur sur les enfants, bien au contraire.
M. Serge Tisseron, dans son ouvrage sur « le bienfait des images » considère, quant à lui, qu'il est essentiel en effet que les enfants parviennent à se donner des représentations de leurs états psychiques afin de pouvoir prendre du recul par rapport à eux, les maîtriser et les dépasser. Ce besoin explique qu'ils sont particulièrement réceptifs aux mises en scène qui montrent des personnages affrontant et se sauvant de situations tragiques : elles font écho pour eux aux angoisses qu'ils éprouvent d'être abandonnés par leurs parents. Alors que traditionnellement, c'étaient les contes de fée racontés par les parents qui remplissaient ces fonctions, aujourd'hui, ce sont les dessins animés ou des séries télévisées auxquels, souvent, les parents ne s'intéressent pas. Les images sont donc, dans cette perspective, non seulement bienfaitrices, mais également nécessaires.
Toutefois, les images, précise-t-il, ne jouent ce rôle que dans certaines conditions : « Les images de fiction fonctionnent [...] en établissant entre le monde et nous la distance d'une sorte d'écran qui nous fournit un regard latéral sur nos problèmes. Certaines images remplissent cette fonction pour un individu isolé, et d'autres pour une collectivité entière. Dans tous les cas, elles permettent aux personnes concernées de se représenter différemment leurs préoccupations et de mieux en maîtriser les charges émotionnelles . Mais c'est bien entendu à condition de savoir les utiliser dans ce sens , et cela n'est possible que si nous commençons par reconnaître qu'elles ont ce rôle et que nous les cherchons pour ça. »
Les usages thérapeutiques des jeux sur ordinateur commencent par ailleurs à être développés. Les psychologues s'aperçoivent qu'ils peuvent aussi être une source de libération de la parole et de pulsions agressives pour les enfants souffrant de troubles du comportement 38 ( * ) .
Votre rapporteur conclut de ces différentes analyses, en premier lieu, que les nouveaux médias ont de réelles vertus, et deuxième lieu, que ces dernières sont d'autant mieux mises en valeur qu'elles sont reconnues par la société, et en troisième lieu que leurs apports positifs sont liés à leur mode d'utilisation et qu'ils sont susceptibles d'être remis en cause.
L'analyse de l'impact des nouveaux médias passe donc aussi par la définition de diagnostics appropriés aux risques qu'ils véhiculent, et le cas échéant de solutions adaptées.
La réflexion sur l'usage intéressant des nouvelles technologies ne peut pas faire l'impasse sur une analyse de leurs effets négatifs sur l'épanouissement des enfants : existe-t-il des risques de dépendance ? La violence des images entraîne-t-elle la violence des jeunes ? Les adolescents se dévoilent-ils trop sur Internet ? Au final, les nouveaux médias ne comportent-ils pas plus de risques que d'opportunités ?
Autant de questions qui poussent à analyser la nature des dangers auxquels les jeunes sont exposés lorsqu'ils font usage des nouveaux médias.
« Internet : communication absolue, isolement absolu »
Paul Carvel
* 37 Christian Bontinckx, Le cinéma rend-il méchant ? Influences du cinéma sur les valeurs et les comportements, étude réalisée dans le cadre du Festival international du film fantastique de science-fiction et de thriller, Bruxelles, mars 2001.
* 38 Voir, à cet égard, les travaux de M. Michaël Stora et le compte-rendu de son audition du 26 juin 2008.