4. Faut-il revoir les modes de notation au sein des CPGE ?
Si les méthodes pédagogiques utilisées au sein des classes préparatoires font l'objet de bien des louanges, tel n'est pas le cas en revanche du mode de notation souvent appliqué.
Celui-ci consiste à évaluer les étudiants en fonction des résultats attendus à l'entrée dans les grandes écoles afin qu'ils mesurent le chemin à parcourir... Ceux qui obtiennent une note de 10/20 s'estiment heureux ; d'autres se lamentent s'ils ont du mal à décoller d'un 3, 5 ou 7/20. Pour certains, maintenir la motivation pour travailler à un rythme très dense - leur temps de travail ne dépasse-t-il pas, le plus souvent, très largement celui de leurs parents ? - peut relever de l'exploit « herculéen ».
Et encore faut-il se féliciter de la disparition des notes négatives que l'on a connu dans un passé encore récent...
Si l'on comprend l'ambition affichée, assortie du souhait de tester la personnalité et la résistance des jeunes concernés - toutes qualités qui seront exigées des futurs cadres supérieurs de notre pays - force est néanmoins de constater les effets négatifs, voire pervers, de cette pratique.
En amont, ce système entretient l'autocensure des élèves et leur crainte de ne pas résister psychologiquement à un système qui tendra à les déprécier.
Une fois en classe prépa, soit les étudiants et leurs parents sont informés de ce mode de notation, et ils peuvent le cas échéant s'y adapter, plus ou moins bien ; soit ce n'est pas le cas et, alors, ils ne comprennent pas qu'après des notes brillantes au lycée et au bac - obtenu bien souvent avec une mention -, les notes attribuées dans ce cursus soient aussi sévères. Cela suscite bien des interrogations : le bac est-il un examen au rabais ? Quel est le niveau réel de mon enfant ? Est-il capable de suivre une telle filière ou ne fait-il pas fausse route ?
Enfin, certains jeunes sont parfois dégoûtés du travail scolaire, comme le dénoncent certains directeurs des écoles qui les accueillent ensuite.
Sans doute convient-il de relativiser ce problème, car toutes les CPGE n'adoptent pas les mêmes pratiques. Néanmoins, alors qu'il s'avère de plus en plus difficile, dans notre société, d'encourager les jeunes à l'effort, votre mission estime qu'une réflexion d'ensemble devrait être conduite dans ce domaine. Ne serait-il pas, en effet, plus efficace d'évaluer le niveau relatif de l'étudiant et de l'aider à mesurer les résultats des efforts réalisés dans le but de l'encourager à les poursuivre ? Ceci d'autant plus que l'ensemble des élèves de CPGE n'intègrent pas une « très grande école », mais de nombreuses autres - dont le niveau d'exigence est moindre - ou poursuivent ensuite d'excellentes études à l'université. Or, les pratiques de sous-notation peuvent rendre plus difficiles l'établissement des équivalences pour entrer à l'université.
A cet égard, il faut se féliciter des évolutions en cours . C'est ainsi que Mme Isabel Jubin, proviseure du lycée Sainte-Geneviève à Versailles, se réjouit que certains lycées aient revu leur mode de notation pour que les élèves soient moins découragés. Pour elle 70 ( * ) , « il ne sert à rien de noter les élèves dès le premier trimestre dans les conditions des concours. Mais il faut veiller à ne pas faire de démagogie. Nous, nous utilisons une « notation de progression » par rapport aux acquis de départ. Un élève qui arrive en prépa est un bon élève qui en côtoie d'autres. Et, dans une classe, il y a forcément un premier et un dernier. Cela suppose d'accepter de revoir des méthodes de travail qui ont fonctionné jusque là. La flexibilité est la première qualité d'un préparationnaire. »
Votre mission suggère qu'un équilibre soit donc trouvé dans ce domaine.
* 70 Voir article dans Challenges n° 64 du 25 janvier 2007.