3. Inutilité d'une ouverture « tronquée » ?
Face aux inconvénients de l'interdiction, la grande distribution dans l'ensemble, ne se satisfait pas du compromis du 7 octobre. Les acteurs soulignent que cette ouverture doublement limitée restera symbolique et ne correspond absolument pas à leurs attentes.
En effet, la communication à caractère institutionnel sera permise, mais les enseignes avaient déjà la possibilité de communiquer sur leurs marques via le cinéma ou le parrainage TV. Ainsi, Darty est présent sur les écrans français depuis 1989, avec le personnage de la camionnette jaune parrainant la météo. Auchan a fait de nombreuses campagnes en cinéma et parraine également des programmes courts. Un distributeur nous a déclaré : « Il sera impossible de communiquer sur un prix limité dans le temps, alors que 95% de notre communication est fondée sur ce principe ! ». La Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, (FCD) précise de son côté : « Nous sommes contre ce texte. Il donne une définition des promotions extrêmement vaste et imprécise, qui donnera lieu à beaucoup de contentieux. »
L'ouverture aux cabsat pendant trois ans, qui peut avoir un sens pour les secteurs culturels en raison de leur surface économique et de l'affinité de ciblage possible sur les chaînes, vide de toute signification la mesure dans le cas d'une industrie de masse souhaitant viser avec le maximum de puissance instantanée le grand public. Un représentant d'une grande enseigne résume ainsi le point de vue du secteur : « L'ouverture cabsat n'a aucun intérêt pour la grande distribution : l'ensemble des chaînes cabsat ne représente que 10% de part d'audience cumulée et les chaînes les plus puissantes ne dépassent pas 2% ; ça ou rien, c'est pareil ! ».
Le bilan du premier trimestre 2004 montre en effet que les distributeurs et leurs agences média n'ont accordé à peu près aucune attention à ce média : 2 annonceurs seulement l'ont utilisé (Champion et La Redoute), pour un montant total de 1,1 M€.
L'ouverture aux chaînes locales aurait pu être plus intéressante, si ces chaînes étaient réellement développées sur tout le territoire - ce qui ne sera pas le cas avant plusieurs années - et si il n'y avait l'interdiction promotionnelle : la publicité locale des enseignes, quel que soit le média, est exclusivement promotionnelle !
a) Principe général de liberté de communication
Les tenants de l'ouverture arguent que sur une activité économique et un service ne présentant aucun caractère de dangerosité comme le tabac ou l'alcool « il n'y a pas de raison de limiter notre discours ou nos moyens de communication ».
Si certains annonceurs comme ceux de la grande consommation avaient des raisons de craindre une ouverture totale, ils sont néanmoins solidaires sur la réaffirmation du principe de liberté de communication publicitaire. Les annonceurs alimentaires, par exemple, sont eux-aussi menacés à terme par une limitation de leur discours, afin de protéger les jeunes de l'obésité.
Au delà de la défense de leurs propres intérêts, deux arguments d'intérêt général sont avancés par les tenants de la libéralisation de la publicité pour la distribution.