B. UNE SPÉCIALISATION À DEUX VITESSES : UNE INÉGALE RÉPARTITION DE LA SPÉCIALISATION SUR LE TERRITOIRE
Les avocats ont fait part devant la mission de leurs inquiétudes à l'égard de l'inégale répartition des spécialisations sur le territoire .
1. Une concentration des mentions de spécialisation dans certains barreaux, en particulier celui de Paris
A
l'exception du droit des personnes et du droit commercial pour lesquels le
barreau de Marseille occupe la première position, et du droit rural
où les barreaux de Toulouse et de Rennes arrivent en tête, on
observe, à nouveau, une
hypertrophie de la région
parisienne
(Paris et Nanterre), qui concentre un grand nombre d'avocats
spécialisés.
Onze barreaux
rassemblent
la moitié
des mentions de
spécialisation comme le montre le graphique ci-dessous :
Nombre de mentions de spécialisation
2. L'absence de spécialisation des avocats de province et le décalage observé par rapport aux besoins des justiciables
Ainsi
que l'a souligné Me Paul-Albert Iweins, bâtonnier de Paris,
devant la mission, les compétences des avocats de province demeurent
trop
limitées
au droit classique (droit de la famille, accidents
de la route...) et ne sont plus vraiment adaptées aux
véritables besoins des justiciables
.
Certains domaines comme le droit fiscal, le droit administratif, le droit des
nouvelles technologies sont un «
désert
juridique
»
inexploité
et restent
ignorés
de la plupart des avocats de province qui
éprouvent des difficultés à s'adapter à la demande
et à renoncer aux matières classiques.
En premier lieu, cette situation s'expliquerait par le
poids des
mentalités
, les avocats conservant une conception de leur profession
très
datée
remontant aux années cinquante
(limitée au droit civil et au droit pénal purs).
La situation du barreau de Bordeaux en constitue une illustration, comme l'a
confirmé Me Jean-François Dacharry, président du
CRFPA. Actuellement sur 100 avocats titulaires d'une mention de
spécialisation, on ne recense que 5 cabinets
spécialisés en droit administratif. Le droit de l'urbanisme ne
compte aucun spécialiste.
En second lieu, comme il l'a déjà été
souligné précédemment
213(
*
)
, l'accès à la
profession par
l'examen d'entrée au CRFPA
est
insuffisamment diversifié
. Selon l'expression du président
du CRFPA, il «
stérilise le
recrutement
», les matières sanctionnées
à l'examen, principalement centrées sur le droit
général civil (droit de la famille et droit de la
responsabilité) dissuadant les professionnels les plus compétents
en droit public et en droit des affaires.
Enfin, l'enseignement dispensé à l'Université,
dominé par le droit civil contribue également à renforcer
cette tendance.
La mission s'est déjà prononcée en faveur d'une
diversification du mode de recrutement des avocats et tient une nouvelle fois
à souligner l'acuité d'une telle question, qui peut
apparaître au premier abord mineure, mais qui pèse lourdement sur
l'avenir de la profession d'avocat en ce qu'elle conditionne son devenir.