CHAPITRE II
UNE SPÉCIALISATION RENDUE NÉCESSAIRE
PAR UN
CONTENTIEUX DE PLUS EN PLUS COMPLEXE
La
complexité croissante du droit et des procédures, l'augmentation
des contentieux imposent une spécialisation des juridictions, des
magistrats mais également des auxiliaires de justice, en particulier des
avocats.
Comme on l'a vu, cette exigence n'est qu'en apparence contradictoire avec la
demande de justice de proximité ; au contraire, elle en constitue
le complément indispensable : la proximité n'implique pas de
multiplier les juridictions mais de faciliter leur accès,
d'accélérer les procédures et de garantir la
qualité des décisions rendues. En fonction de leur nature et de
leur degré de complexité, certains contentieux peuvent être
jugés rapidement et simplement, d'autres requièrent des
connaissances juridiques particulières et des expertises. En tout
état de cause, la spécialisation est un facteur de
rapidité de la prise de décision.
La spécialisation des magistrats, déjà ancienne, se
poursuit, celle des avocats reste inégale, tandis que celle des
juridictions se développe progressivement.
I. UNE SPÉCIALISATION DES MAGISTRATS DÉJÀ ANCIENNE
Ancienne
et courante dans les juridictions les plus importantes, la
spécialisation des magistrats
s'avère plus factice dans les
petites juridictions
car, en l'absence d'effectifs suffisants, les
juges
sont appelés à exercer indifféremment toutes les
fonctions
.
Comme le relevait la Conférence nationale des premiers présidents
de cour d'appel, «
la spécialisation des magistrats
constitue un gage d'efficacité et de sécurité juridique
mais, pour ne pas conduire à la sclérose, elle doit rester
temporaire
».
Considérant que la mobilité géographique et la
mobilité fonctionnelle s'avéraient indispensables, le
Sénat a fait inscrire dans la loi organique n° 2001-539 du 25
juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de
la magistrature la limitation à sept ans de la durée d'exercice
des fonctions de chef de juridiction dans une même juridiction, et
à dix ans de celle de certaines fonctions
spécialisées
200(
*
)
, tout en l'entourant de garanties
afin de respecter le principe de l'inamovibilité des magistrats.
Les magistrats pourront ainsi acquérir une spécialisation dans
certaines matières et y faire carrière, tout en satisfaisant
à une saine obligation de mobilité géographique.
Cette évolution du métier de magistrat vers une plus grande
spécialisation commence à être prise en compte par
l'institution judiciaire : désormais, avant son affectation dans
une juridiction, l'auditeur de justice suit une préparation à
l'exercice de son premier emploi, répartie en un complément de
formation théorique d'un mois à Bordeaux, et un stage de cinq
mois.
La mission a tenu à faire le point sur chacune des fonctions
spécialisées occupées par les magistrats en organisant
l'audition de leurs représentants.