EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi du projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale en première lecture le 31 mai 2000, relatif
à la sécurité du dépôt et de la collecte de
fonds par les entreprises privées.
L'examen de ce projet prend place quelques jours après la mort d'un
convoyeur de fonds à la suite d'une attaque perpétrée dans
le Var sur un véhicule blindé en stationnement devant une banque.
Ce projet de loi avait été examiné par le Conseil des
ministres du 17 mai 2000 dans un contexte de grève
générale des convoyeurs de fonds, intervenue du 9 au 24 mai 2000.
Cette grève générale faisait directement suite à
deux agressions de fourgons blindés s'étant produites
successivement à une semaine d'écart à Grenoble et
à Nanterre et à l'issue de chacune d'elle un convoyeur avait
été tué et deux convoyeurs blessés.
Des tables rondes sur la sécurité de cette profession
s'étaient pourtant tenues dès le mois de janvier 1999 au
ministère de l'intérieur. Associant les entreprises de convoyage
de fonds, leur personnel et les représentants des donneurs d'ordre,
elles avaient abouti le 4 mai 1999 à un relevé de
conclusions détaillant les mesures à prendre en la matière.
En conséquence, le décret du 28 avril 2000 et ses deux
arrêtés d'application du même jour ont refondu l'ensemble de
la réglementation relative à la protection du transport de fonds.
Le volet législatif de ces mesures devait être
intégré dans un projet de loi en préparation
réglementant l'exercice de l'ensemble des activités de
sécurité privées.
Ce projet de loi d'ensemble a été délibéré
en Conseil des ministres le 17 mai 2000 et déposé sur le
Bureau du Sénat. Compte tenu de l'urgence accordée à
l'adoption des mesures sur la sécurité du transport de fonds, le
gouvernement a préféré en extraire deux articles pour
constituer un projet de loi spécifique susceptible d'être
examiné à bref délai par les deux assemblées.
Le présent projet de loi comporte ainsi deux articles ayant pour objet
de
limiter la phase piétonne du transport de fonds et à
permettre son exercice à l'écart du public.
Il autorise en premier lieu les maires à délimiter sur la voie
publique des emplacements réservés pour le stationnement et la
circulation des véhicules de transport de fonds et, en second lieu, il
impose aux clients des entreprises de convoyage de fonds l'obligation de
réaliser des aménagements de leurs locaux afin de limiter les
trajets piétonniers des convoyeurs.
I. LA PROFESSION DE CONVOYEUR DE FONDS : UNE ACTIVITÉ À RISQUES DONT L'EXERCICE EST RÉGLEMENTÉ
A. UNE ACTIVITÉ RÉGLEMENTÉE CONCOURANT À LA SÉCURITÉ GÉNÉRALE
Le
secteur du transport de fonds emploie un effectif de plus de
7000 personnes pour un chiffre d'affaires de 1,7 milliards de francs en
1998. Très concentré, il ne compte qu'une quinzaine
d'entreprises, deux d'entre elles, la Brink's et Ardial-Serse, se partageant
à elles seules 80% du marché. La Brink's, filiale du groupe
américain du même nom, emploie 4000 salariés et
Ardial-Serse, dépendant du groupe bancaire suisse UBS, en compte 2000.
Les clients des entreprises de convoyage, " les donneurs d'ordre ",
relèvent principalement du secteur bancaire (70%) et de celui de la
distribution.
La loi n° 95-72 du 20 janvier 1995 d'orientation et de programmation
relative à la sécurité avait placé les entreprises
de transport de fonds, avec les entreprises de surveillance et de gardiennage
et les agences privées de recherche, parmi les activités de
sécurité privées concourant à la
sécurité générale et devant, de ce fait, faire
l'objet d'une réglementation de leurs conditions d'exercice. Elle
prévoyait le dépôt d'un projet de loi général
destiné à compléter les textes existants, à savoir,
en la matière, la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983. Un
premier projet de loi, déposé sur le Bureau du Sénat le
21 juin 1995
1(
*
)
, n'avait pu
faire l'objet d'un examen par le Parlement.
Lors du colloque de Villepinte, en octobre 1997, le Premier ministre avait
annoncé le dépôt d'un nouveau projet de loi
réglementant les activités de sécurité
privées en complément d'un texte sur les polices municipales et
d'un projet de loi créant une autorité indépendante
chargée de contrôler la déontologie des acteurs, tant
publics que privés, de la sécurité.
Il fallut attendre le 15 avril 1999 pour que la loi relative aux polices
municipales voie le jour (loi n° 99-291) et le 6 juin 2000 pour que
soit promulguée la loi portant création de la Commission
nationale de déontologie de la sécurité (loi
n° 2000-494).
Le projet de loi réglementant l'exercice des activités de
sécurité privées n'a été
délibéré en Conseil des ministres que le 17 mai 2000 et
fera vraisemblablement l'objet d'une discussion au Sénat à
l'automne 2000. Il prévoit, en plus de l'autorisation administrative des
entreprises, l'agrément de leurs personnels et de leurs dirigeants, un
renforcement des contrôles exercés par la puissance publique, une
plus grande transparence et une professionnalisation plus importante des
personnels.
B. UN DISPOSITIF RÉGLEMENTAIRE SUR LA SÉCURITÉ DU TRANSPORT DE FONDS RÉCEMMENT REFONDU
Les
prescriptions de sécurité à respecter pour le transport de
fonds résultent désormais du décret n° 2000-376
du 28 avril 2000, complété par deux arrêtés du
même jour publiés au Journal Officiel du 4 mai 2000 et par
l'arrêté du 7 juin 2000 publié au Journal Officiel du 10
juin 2000. Le décret du 28 avril s'est substitué au décret
n°79-618 du 13 juillet 1979 modifié en 1982 et en 1991.
Sont ainsi réglementés, comme auparavant, tous les transports de
fonds, bijoux ou de métaux précieux représentant une
valeur d'au moins 200 000 F
, à l'exception des valeurs
transportées par une personne physique pour son propre compte et de
celles convoyées par l'autorité militaire ou sous escorte de la
police ou de la gendarmerie nationale.
Le décret prévoit deux modes de convoyage :
- le
convoyage par voiture blindée
ayant un
équipage de trois personnes armées
d'armes de la
1
ère
ou de la 4
ème
catégorie, les
normes de blindage étant précisées dans un des
arrêtés du 28 avril ;
- le
convoyage par voiture banalisée
comprenant
une seule
personne non armée
et non soumise au port d'un uniforme, avec
utilisation de dispositifs garantissant que
les fonds seront détruits
ou maculés
en cas d'attaque. Ces dispositifs doivent être
agréés par le ministre de l'intérieur en fonction des
caractéristiques techniques fixées dans un des
arrêtés du 28 avril, après avis d'une commission technique.
Ce mode de convoyage ne peut toutefois être utilisé ni pour le
transport de la monnaie divisionnaire, ni pour celui des bijoux et
métaux précieux. Auparavant, il avait été
autorisé à titre expérimental par le décret
n° 91-867 du 4 septembre 1991, sur la base duquel avait
été autorisé, par arrêté du 19 novembre
1971, le système HDS (hold down system) exploité par la
société Axytrans. Fortement contesté par les convoyeurs de
fonds, ce système est actuellement utilisé dans 5% des cas.
Les deux types de véhicules doivent être dotés d'un
système de communication et d'un système d'alarme relié au
centre d'alerte de l'entreprise de transport de fonds ainsi que d'un
système de repérage à distance. Les véhicules
blindés doivent en outre comporter des gilets pare-balles et des masques
à gaz, le modèle de gilet pare-balles étant défini
par l'arrêté du 7 juin 2000.
Les personnels doivent être agréés par le préfet.
Les autorisations de port d'armes sont délivrées pour cinq ans et
peuvent faire l'objet de la même décision que l'agrément.
Une
commission départementale de la sécurité des
transports de fonds
est constituée dans chaque département.
Présidée par le préfet, elles comprend des
représentants de l'administration, des donneurs d'ordre, des entreprises
de convoyage de fonds et de leurs salariés ainsi que deux maires
désignés par l'association départementale des maires. Elle
est consultée sur toute question relative à la
sécurité des collectes et transports de fonds.
C. UNE ACTIVITÉ RISQUÉE SOUVENT MAL RECONNUE
1. Une recrudescence des attaques de fourgons blindés
L'activité de convoyage de fonds présente des
risques
importants.
Depuis le début 1999 et jusqu'au 27 mai 2000, ont
été comptabilisées par l'Office central pour la
répression du banditisme
105 attaques
effectuées
à l'occasion de convoyage de fonds, toutes formes confondues, ou lors
d'opérations de maintenance de guichets ou distributeurs automatiques de
banques. Plus de
40% de ces agressions
se sont produites pendant la
phase piétonne du transport de fonds.
Une
nette recrudescence des attaques
a été
enregistrée
au cours de l'année 2000
, les cinq premiers
mois de cette année ayant connu autant d'agressions de fourgons
blindés et de véhicules non blindés
sécurisés que l'ensemble de l'année 1999.
Agressions commises et tentées à l'occasion de
transports de fonds
en 1999 et 2000 (jusqu'au 27 mai
2000)
Données communiquées par le ministère
de
l'intérieur
Les convoyeurs de fonds ont déploré
4 tués
et
12 blessés
entre le 1
er
janvier 1999 et le
27 mai 2000 s'agissant des seuls transports de fonds par camions
blindés, avec, là encore,
une nette recrudescence sur les cinq
premiers mois de l'année 2000
, au cours desquels ont
été enregistrés le même nombre de tués et le
double de blessés que pendant l'ensemble de l'année 1999. Une
attaque commise sur un fourgon blindé dans le Var le 16 juin
dernier a de nouveau endeuillé la profession. Aucune mort n'est à
déplorer à l'occasion de convoyage en voiture banalisée.
Par ailleurs, aucun tiers n'a jamais été tué ou
blessé lors de ces agressions, ce qui aurait pu être le cas,
particulièrement pendant la phase piétonne.
Convoyeurs de fonds tués ou blessés lors
d'agressions
du 1
er
janvier 1999 au 27 mai 2000
|
|
véhicules
|
|
|
Phase piétonne |
|
|
|
|
tués |
1 |
- |
- |
1 |
blessés |
3 |
3 |
3 |
9 |
véhicule en circulation et autres |
|
|
|
|
tués |
3 |
- |
- |
3 |
blessés |
9 |
- |
2 |
11 |
Total tués |
4 |
- |
- |
4 |
blessés |
12 |
3 |
5 |
20 |
Réalisé à partir des données
communiquées par le ministère de l'intérieur
S'agissant des dangers comparés de la phase piétonne et des
autres phases du convoyage, il ressort des tableaux reproduits plus haut que
depuis, le 1
er
janvier 1999, plus de
40% des attaques se sont
produites pendant la phase piétonne
.
Une étude réalisée par l'Office central pour la
répression du banditisme avait fait par ailleurs ressortir que les
attaques commises lors du parcours piétonnier
sur la
période
1988-1995
avaient représenté
69,7% des
agressions
contre les convoyeurs de fonds utilisant des fourgons
blindés.
Agressions commises entre 1988 et 1995
A l'occasion de
transports de fonds par fourgon blindé
|
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
Total |
Fourgon en circulation |
3 |
2 |
1 |
2 |
2 |
2 |
3 |
5 |
20 |
Phase piétonne |
8 |
11 |
9 |
6 |
5 |
1 |
3 |
3 |
46 |
Total |
11 |
13 |
10 |
8 |
7 |
3 |
6 |
8 |
66 |
% en phase piétonne |
73,7 |
84,6 |
90 |
75 |
71,4 |
33,33 |
50 |
37,5 |
69,7 |
Source : ministère de l'intérieur
Il apparaît donc justifié de prendre des mesures pour limiter au
maximum les risques du convoyage de fonds pendant la phase piétonne,
sachant que ces risques pèsent avant tout sur les convoyeurs mais
concernent aussi le public susceptible d'être particulièrement
exposé en certains lieux.
2. Un besoin de reconnaissance sociale
Malgré les risques encourus, les convoyeurs de fonds
bénéficient de rémunérations proches du salaire
minimum ce qui génère des difficultés de recrutement et de
nombreuses rotations d'effectifs au détriment de la qualification de
personnels pourtant dotés d'une arme.
Le mouvement de grève générale du mois de mai 2000,
déclenché à partir de revendications relatives à la
sécurité, s'est rapidement transformé en un conflit social
révélateur d'un malaise profond. Il a débouché sur
un protocole d'accord prévoyant l'attribution d'une prime de risque
mensuelle de 1000 F nets, des augmentations de salaires variant de 3%
à 6,5% sur un ou deux ans selon les différentes catégories
de personnels, la possibilité de départ à la retraite
à 55 ans au bout de 20 ans d'activité et une
augmentation des indemnités en cas de décès ou
d'invalidité.
Par ailleurs, le texte a entériné un accord sur l'interdiction du
travail de nuit, sur le renforcement des gilets pare-balles
5(
*
)
, ainsi que sur la mise en
conformité, avant le 31 décembre 2002, des véhicules
blindés existants avec la norme de blindage de niveau
3 bis
6(
*
)
, à
savoir une norme supérieure à celle exigée pour le 30 juin
2001 par l'arrêté du 28 avril 2000.
La participation des donneurs d'ordre au financement de ces différentes
mesures reste à déterminer, les entreprises de transport de fonds
estimant ne pas pouvoir en assumer seules la charge financière.
II. LE PROJET DE LOI : LIMITER LA PHASE PIÉTONNE DU TRANSPORT DE FONDS
Le
présent projet de loi complète les mesures réglementaires
sur la protection du transport de fonds par des dispositions
législatives tendant à limiter la phase piétonne de cette
activité.
Composé initialement de deux articles, il a été
complété par l'Assemblée nationale.
L'article premier
modifie le code général des
collectivités territoriales pour autoriser le maire à
réserver sur la voie publique des emplacements pour le stationnement ou
la circulation des véhicules de transport de fonds.
L'article 2
prévoit l'obligation pour les donneurs d'ordre
de réaliser dans leurs locaux des aménagements réduisant
la phase piétonne des transports de fonds.
Ces aménagements seront déterminés par décret.
L'Assemblée nationale a précisé qu'il serait tenu compte
de la caractéristique des immeubles, de la nature des activités
qui y sont exercées et des conditions de leur desserte.
L'Assemblée nationale a également précisé que le
décret devrait être publié au plus tard dans les
six
mois
à compter de la publication de la loi. Elle a de plus
fixé au
31 décembre 2002
la date limite de mise en
conformité des locaux existants à la date de publication de la
loi. Elle a en outre prévu de n'exiger des aménagements
spéciaux que des personnes faisant appel de manière habituelle
à des convoyeurs de fonds.
Elle a enfin introduit un
article 3
prévoyant des
sanctions pénales
pour les donneurs d'ordre ne réalisant
pas les aménagements voulus. Les personnes physiques encourraient ainsi
100 000 F d'amende. Les personnes morales pourraient se voir infliger
une amende d'un montant cinq fois plus élevé ainsi des peines
complémentaires pouvant aller jusqu'à l'interdiction d'exercer
leur activité.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : DES MESURES NÉCESSAIRES ET URGENTES DEVANT S'INTÉGRER DANS UNE POLITIQUE D'ENSEMBLE
Votre
commission est en accord avec les mesures proposées.
Elle regrette cependant qu'il ait fallu attendre une grève des
convoyeurs de fonds
pour que ce projet de loi, comme celui d'ensemble sur
la sécurité privée, soit déposé devant le
Parlement alors que la réflexion sur la sécurité
privée est, on l'a vu plus haut, en cours depuis 1995.
Sur le fond, votre commission estime en premier lieu qu'il est justifié
de donner aux maires la faculté de faciliter le stationnement et la
circulation des véhicules de convoyage de fonds.
Cette faculté pourra être utilisée
au gré des
circonstances locales
, notamment en fonction des aménagements
effectués par les donneurs d'ordre, sachant qu'il ne sera pas toujours
judicieux de signaler un emplacement aux yeux des malfaiteurs, et qu'une place
de stationnement d'où il serait difficile de s'extraire peut être
un obstacle à un démarrage rapide en cas d'attaque.
En deuxième lieu, votre commission approuve le fait que les donneurs
d'ordre soient contraints de réaliser des aménagements de
sécurité. L'externalisation du service rendu ne doit en effet pas
aller de pair avec une
externalisation de
risques qui touchent autant
les convoyeurs de fonds que le public
.
Il a été indiqué à votre rapporteur que les
aménagements imposés pourraient être, selon les cas, des
sas, dans lesquels peuvent entrer les véhicules, des trappons permettant
d'effectuer un transfert de fonds en accolant le véhicule à une
façade d'immeuble, des locaux techniques sécurisés donnant
la possibilité d'opérer à l'abri du regard du public ou
des voies d'approche évitant le contact avec le public.
Dans nombre de cas, il sera cependant très difficile, voire impossible,
de réaliser des aménagements, notamment dans les zones
piétonnes des centres ville ou dans les galeries commerçantes.
Votre commission constate que la
date butoir du 31 décembre
2002
fixée par l'Assemblée nationale pour la mise en
conformité des locaux existants laisse peu de marge aux personnes
concernées.
Il semble que les réseaux de la grande distribution aient
déjà pris en compte les exigences de sécurité du
dépôt et de la collecte de fonds. De nombreux
établissements ont déjà mis en oeuvre des
procédures entièrement automatisées avec acheminement des
fonds par voie pneumatique, de la caisse vers des coffres-forts relevés
par les convoyeurs. Ils ne seront donc pas particulièrement
affectés par les nouvelles contraintes imposées. Il n'en est pas
de même des commerçants travaillant sous des enseignes
indépendantes ou des agences bancaires. Un important effort devra ainsi
être effectué concernant les 28 000 agences bancaires
auxquelles s'ajoutent les agences postales.
Votre commission estime cependant que cette contrainte de délai
imposée aux donneurs d'ordre est justifiée par une exigence de
sécurité particulière. Elle considère en outre que
la date proposée présente un bon compromis entre le souhait des
convoyeurs de fonds d'accélérer le processus et celui des
donneurs d'ordre de disposer d'un maximum de temps pour effectuer les travaux
voulus. Elle vous propose donc de souscrire au délai fixé par
l'Assemblée nationale.
Votre commission approuve enfin l'adjonction de sanctions pénales
opérée par l'Assemblée nationale, dans la mesure où
une obligation non sanctionnée est de peu de portée. Votre
rapporteur estime qu'il s'agit d'un cas où la mise en cause de la
personne morale apparaît particulièrement justifiée et il
souscrit au fait que l'Assemblée nationale n'ait pas assorti d'une peine
de prison la peine d'amende de 100 000 F proposée pour les
personnes physiques.
Votre commission
approuve donc l'ensemble du texte issu des travaux de
l'Assemblée nationale.
Elle tient cependant à insister pour que les dispositions
réglementaires prévoyant les aménagements de
sécurité à réaliser
gardent toute la souplesse
nécessaire
pour tenir compte de la réalité du terrain.
Il semble que les
commissions départementales de la
sécurité des transports de fonds
mises en place
officiellement par le décret du 28 avril 2000 soient des
instances de dialogue appréciées de l'ensemble des partenaires.
Il leur revient de recenser les situations dangereuses au niveau local et de
dégager des solutions. Les dispositions réglementaires devront
être rédigées à partir des observations
effectuées par ces commissions et il importe qu'elles soient
susceptibles d'adaptation en fonction des conditions locales.
Votre commission tient également à insister sur la
nécessité de mettre en oeuvre entre les convoyeurs de fonds et
les donneurs d'ordre
de nouveaux
protocoles de
sécurité
intégrant les contraintes des
différentes parties.
A cet égard, la suppression des tournées à heures fixes
souhaitée par les convoyeurs de fonds semble être un important
facteur de sécurité. Elle se heurte cependant, semble-t-il, outre
à des difficultés d'organisation par les entreprises de convoyage
elles-mêmes, à une certaine rigidité de la pratique de la
Banque de France en matière de prise en compte le jour même des
sommes déposées à ses guichets.
Une réflexion sur les risques du convoyage de fonds ne peut pas, en tout
état de cause, être dissociée d'une réflexion sur
la réorganisation des flux de monnaie fiduciaire
. Les banques
souhaiteraient quant à elles limiter les risques du convoyage de fonds
en obtenant l'autorisation de recycler elles-mêmes les billets de banque,
comme cela est autorisé par exemple en Allemagne.
Enfin, votre commission tient à souligner avec force que
l'intervention des acteurs privés ne doit pas exonérer
l'État de ses obligations en matière de
sécurité
.
Le renforcement des normes de blindage des véhicules et la
multiplication des aménagements de sécurité se heurtent
à un grand banditisme lui-même de mieux en mieux
équipé et prêt à l'escalade.
En tout état de cause, la mise en oeuvre prochaine de l'Euro rendra les
attaques de transports de fonds encore plus attractives pour le grand
banditisme, dans la mesure où un même volume convoyé
correspondra à des montants six fois plus élevés. La
période transitoire pendant laquelle le franc restera en circulation en
même temps que l'Euro sera par ailleurs une source de multiplication des
convoyages de fonds.
Il revient à l'État de lutter plus efficacement contre le grand
banditisme. Or, les attaques opérées récemment par des
malfaiteurs puissamment armés n'ont toujours pas été
élucidées, si l'on excepte l'arrestation partielle du gang qui
avait attaqué un véhicule blindé le
1
er
janvier 1999 à Bordeaux, causant la mort d'un
convoyeur et blessant un de ses collègues.
Par ailleurs, il importe que certains transferts de fonds d'un montant
élevé soient
escortés par la police nationale ou la
gendarmerie
.
L'accroissement des normes de sécurité du convoyage de fonds
doit donc s'accompagner d'une politique efficace de prévention et de
répression menée par l'État.
*
* *
Sous le bénéfice de ces observations, et compte tenu de l'urgence qui s'attache à l'amélioration de la sécurité du transport de fonds, votre commission vous propose d'adopter le projet de loi sans modification