II. L'AMENDEMENT À LA CONSTITUTION DE L'OIT

Comme il est indiqué en introduction, l'amendement adopté le 19 juin 1997 par la Conférence internationale du travail, vise à modifier l'article 19 de la Constitution de l'OIT pour y intégrer une procédure d'abrogation des conventions devenues sans objet.

A. LE MÉCANISME D'ÉLABORATION DES CONVENTIONS DE L'OIT

Le mécanisme d'adoption des conventions résulte de l'article 19 de la Constitution de l'OIT.

Cet article dispose en premier lieu que la Conférence détermine si le texte envisagé doit prendre la forme d'une convention internationale ou d'une recommandation, lorsque l'objet traité ou un de ses aspects ne se prête pas à l'adoption immédiate d'une convention. Dans les deux cas, l'adoption d'une convention ou d'une recommandation requiert, lors du vote final par la Conférence, une majorité des deux tiers des voix des délégués présents.

Une fois adoptées, les conventions sont communiquées à chaque Etat membre qui s'engage à les soumettre, dans l'année qui suit la clôture de la session, à son autorité nationale compétente en vue de les transformer en loi ou de prendre des mesures d'un autre ordre.

Chaque Etat membre est par la suite tenu de rendre compte au conseil d'administration de la ratification de la Convention, de sa non-ratification ou de la pratique de son pays sur le domaine concerné.

Toute convention ne lie que les membres qui l'ont ratifiée (article 20 de la Constitution de l'OIT).

B. LA PROCÉDURE D'ABROGATION PROPOSÉE PAR L'AMENDEMENT

Dans sa rédaction actuelle, la Constitution de l'OIT ne prévoit aucune procédure habilitant la Conférence à abroger des conventions existantes tombées en désuétude, de telles conventions restant en l'état bien que devenues inutiles.

L'amendement proposé consiste à insérer dans l'article 19 de la Constitution de l'OIT un paragraphe 9 ainsi rédigé : " 9. Sur la proposition du Conseil d'administration, la Conférence peut, à la majorité des deux tiers des voix des délégués présents, abroger toute convention adoptée conformément aux dispositions du présent article s'il apparaît qu'elle a perdu son objet ou qu'elle n'apporte plus de contribution utile à l'accomplissement des objectifs de l'Organisation. "

Il apparaît ainsi que la procédure retenue sera entourée de garanties strictes.

Le conseil d'administration devra être saisi de la question
et en débattre sur la base d'un rapport du bureau de l'organisation contenant toutes les informations utiles sur le sujet. A l'issue de ce débat, il appartiendra au conseil d'administration de décider par consensus d'inscrire la question à l'ordre du jour de la conférence . Toutefois, si un consensus ne peut être atteint lors des deux sessions successives, la décision pourra alors être valablement adoptée à la majorité des quatre cinquièmes.

Lorsque la question sera inscrite à l'ordre du jour de la conférence, dix-huit mois avant la session considérée de la conférence, le bureau enverra un questionnaire à tous les gouvernements des Etats membres afin qu'ils fassent connaître leur position après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives. Sur la base de leurs réponses, le bureau rédigera un rapport contenant une proposition définitive qui sera communiquée aux gouvernements quatre mois avant l'ouverture de la session.

Enfin, la conférence pourra examiner la question directement en séance plénière ou la renvoyer à la commission de proposition. Au terme de l'examen du rapport du bureau en séance plénière ou en commission, la conférence sera invitée à décider, par consensus ou, à défaut, par un vote à la majorité des deux tiers, de soumettre la proposition d'abrogation à un vote final. Lors de ce vote final par appel nominal, la proposition d'abrogation devra obtenir une majorité des deux tiers des suffrages des délégués présents.

Sur un total général de 181 conventions adoptées depuis l'origine par la Conférence de l'OIT, le groupe de travail du conseil d'administration sur la révision des normes a déjà dressé une liste de trois conventions entrées en vigueur mais devenues obsolètes et qui pourraient faire l'objet d'une telle procédure d'abrogation . Ces trois conventions, auxquelles la France n'est pas partie, sont les suivantes :

- la convention n° 28, portant protection des dockers contre les accidents, datant de 1929. Ratifiée par quatre Etats, trois l'ont à ce jour dénoncée. Seul demeure lié par cette convention le Nicaragua ;

- la convention (révisée) n° 60 portant âge minimal dans le cadre de travaux non-industriels, datant de 1937. Son objet a été repris par une convention n° 138, plus récente. Dix des onze Etats-membres qui avaient ratifié la convention n° 60, l'ont dénoncée. Seul demeure lié par cette dernière le Paraguay ;

- la convention n° 67 portant durée du travail et repos dans le cadre des transports par route, datant de 1939. Ratifiée par quatre Etats-membres, seuls demeurent liés par elle la République Centrafricaine, Cuba et le Pérou. Son objet a été repris par une convention n° 153, plus récente.

C. LA RECHERCHE D'UNE PLUS GRANDE EFFICACITÉ DU SYSTÈME NORMATIF DE L'OIT

La volonté d'assurer un " toilettage " de l'ensemble normatif produit par l'OIT, illustrée par cet amendement adopté lors de la conférence internationale du travail de juin 1997, paraît désormais constituer une priorité importante de l'Organisation.

Dans son rapport de l'an passé, le nouveau directeur général du BIT, M. Somavia, déplorait la tendance de l'Organisation " à lancer des programmes de plus en plus divers sans définir clairement des priorités opérationnelles " et constatait que cela avait " nui à l'impact de l'OIT, rendu floue son image, réduit son efficacité et désorienté le personnel ". Il appelait donc l'Organisation à concentrer ses efforts sur les buts fondamentaux qui avaient présidé à sa création.

M. Somavia signalait que sur 23 conventions et 2 protocoles adoptés de 1983 à 1998, trois seulement avaient fait l'objet d'au moins 20 ratifications. L'Organisation devait donc, selon lui, accélérer la révision des instruments périmés pour mieux promouvoir les normes prioritaires, notamment celles relatives aux principes et droits fondamentaux du travail.

C'est d'ailleurs dans cet esprit que la Conférence internationale du travail a adopté l'an passé une nouvelle convention relative aux pires formes du travail des enfants.

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