B. AUDITION DE M. DENIS GAUTIER-SAUVAGNAC, PRÉSIDENT DE L'UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE (UNEDIC), ACCOMPAGNÉ DE M. DOMINIQUE CHERTIER, DIRECTEUR GÉNÉRAL
Puis
la commission a entendu
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de
l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC),
accompagné de
M. Dominique Chertier, directeur
général.
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l'UNEDIC,
a souhaité
préciser, de prime abord, que l'UNEDIC étant un organisme
paritaire, il veillerait à ce que ses propos reflètent l'opinion
commune des gestionnaires de l'assurance chômage. Puis il a
souhaité répondre aux questions du rapporteur et des membres de
la commission.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité savoir si l'UNEDIC avait
été amenée à prendre officiellement position sur le
projet de loi relatif à la réduction négociée du
temps de travail.
Il
a observé que l'article 11 du projet de loi prévoyait
que les organismes gérant des régimes de protection sociale
contribuent au financement d'un fonds assurant la compensation intégrale
des allégements de cotisations sociales. Il a souhaité savoir, en
conséquence, si la lettre de l'article L. 131-7 du code de la
sécurité sociale, qui prévoit que les exonérations
de cotisations sociales sont remboursées intégralement " aux
régimes concernés par le budget de l'Etat ", était
respectée.
Il s'est interrogé sur la technique du calcul de la contribution de
l'UNEDIC au regard du texte de l'article 11-XVI du projet de loi, souhaitant
savoir s'il s'agissait de procéder à une analyse fine du statut
des embauchés ou, au contraire, de considérer que tout
embauché était un chômeur en puissance.
Il s'est demandé si la fixation, par décret en Conseil d'Etat,
des règles de calcul de l'évolution de la contribution des
organismes sociaux aux allégements de charges constituait l'amorce d'une
indexation, voire d'une forfaitisation de cette contribution.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité connaître le
rôle de la commission des comptes de la sécurité sociale,
qui, selon l'article 11 du projet de loi, doit être consultée sur
les règles de calcul de cette contribution.
Il a souhaité savoir quelle serait techniquement la situation de
l'assurance chômage au 1
er
janvier 2000 si la convention
UNEDIC n'était pas renouvelée par les partenaires sociaux.
Enfin,
M. Louis Souvet, rapporteur,
s'est interrogé, de
façon générale, sur l'état des relations
financières entre l'Etat et l'UNEDIC.
En réponse aux questions du rapporteur,
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a déclaré que l'organisme gestionnaire de l'assurance
chômage n'avait pas été amené à prendre une
position officielle dès lors qu'à la différence des
caisses de sécurité sociale, la consultation de l'UNEDIC sur le
projet de loi n'était pas prévue par les textes. Il a
indiqué toutefois que l'UNEDIC avait eu l'occasion d'exprimer
indirectement son sentiment, le 29 septembre dernier, lors de la
réunion de son bureau. L'ensemble des gestionnaires s'étaient
alors unanimement refusé à une remise en cause de l'accord de
1995 relatif au remboursement d'un prêt souscrit par l'UNEDIC, qui
prévoyait une prise en charge par l'Etat d'une partie de ce
remboursement à hauteur de 10 milliards de francs. En tant que
gestionnaires, comme en tant que partenaires sociaux, ils avaient
considéré, à cette occasion, qu'il n'appartenait pas
à l'UNEDIC d'utiliser le produit des cotisations pour financer le budget
de l'Etat.
S'agissant de la compensation intégrale par le budget de l'Etat des
exonérations de charges sociales,
M. Denis Gautier-Sauvagnac,
président de l'UNEDIC,
a estimé que la lettre de l'article
L. 131-7 du code de la sécurité sociale n'était
à l'évidence pas respectée.
Pour ce qui est du mode de calcul d'une contribution de l'UNEDIC au financement
des exonérations de charges sociales, il a considéré qu'il
était absolument impossible de " décortiquer " les
cotisations perçues pour mesurer ce qui relevait des emplois
créés du fait des 35 heures. Il a affirmé que
l'argent du chômage devait aller aux chômeurs, soit à
travers une amélioration de l'indemnisation, soit à travers des
allégements de cotisations sociales créateurs d'emplois.
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a estimé que la définition, par
décret en Conseil d'Etat, des règles de calcul de la
contribution, signifiait que l'Etat se substituait aux partenaires sociaux pour
fixer les cotisations d'assurance chômage et que, ce faisant, on
assistait à un tournant dans notre vie sociale, après cinquante
ans de paritarisme. Il a observé qu'il s'agissait là moins d'une
question relative à l'indexation ou à la forfaitisation de la
contribution qu'un problème de respect des partenaires sociaux. Il a
estimé que le projet de loi portait ainsi un coup fatal à la
politique contractuelle et au paritarisme.
Il a confirmé que la commission des comptes de la sécurité
sociale, dont le projet de loi prévoit l'avis sur le mode de calcul de
la contribution, n'était pas compétente dans le domaine de
l'assurance chômage.
Evoquant la situation de l'assurance chômage dans l'hypothèse
où la convention relative à l'UNEDIC ne serait pas
renouvelée par les partenaires sociaux,
M. Denis Gautier-Sauvagnac,
président de l'UNEDIC,
a rappelé qu'il existait des
dispositions législatives prévoyant ce cas de figure. Il a
évoqué l'article L. 351-22 du code du travail qui
prévoyait qu'en cas d'absence de convention, la continuité du
service de l'assurance chômage était assurée par un
établissement public national à caractère administratif
qui assurait le recouvrement des contributions et le paiement des prestations.
Il a souligné que le pouvoir réglementaire se voyait confier la
charge de l'organisation de ce système de substitution, y compris pour
ce qui concernait les conditions d'équilibre du régime. Il a
conclu que, dans cette hypothèse, l'UNEDIC n'existerait plus sous sa
forme actuelle.
S'agissant des relations financières entre l'Etat et l'UNEDIC,
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a rappelé que trois dossiers
étaient en débat : le premier portait sur la question des
10 milliards déjà évoquée sur lequel la
position de l'UNEDIC était claire : elle ne paierait pas ; le
deuxième dossier était relatif à la prise en charge de la
couverture chômage d'un certain nombre de dispositifs en faveur de
l'emploi (emplois-jeunes, emplois-ville, fonds national de l'emploi (FNE),
allocation formation reclassement (AFR)) qui constituait une question
récurrente pouvant être résolue dans la transparence ;
le troisième dossier, enfin, concernait l'affaire du
" recyclage ", selon la terminologie gouvernementale, des
exonérations de cotisations sociales dans le cadre des 35 heures
sur laquelle la quasi-totalité des partenaires sociaux s'était
prononcée négativement.
M. Louis Souvet, rapporteur,
ayant souhaité savoir si le risque
d'implosion des régimes de sécurité sociale et d'assurance
chômage était réel dans l'hypothèse de l'adoption du
projet de loi,
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l'UNEDIC,
a affirmé qu'il était sûr de la détermination d'au
moins un des partenaires sociaux à quitter les organismes paritaires.
M. Charles Descours
s'est interrogé sur les conditions dans
lesquelles la commission des comptes de la sécurité sociale
serait à même d'émettre un avis sur le mode de calcul de la
contribution demandée aux organismes sociaux, y compris l'UNEDIC, et sur
les réserves financières constituées par l'UNEDIC pour
couvrir ses engagements à venir.
Il a déclaré qu'il proposerait, en tant que rapporteur de la loi
de financement de la sécurité sociale, de supprimer les
dispositions du projet de loi de financement, qui prévoyaient une
participation des organismes sociaux au financement des allégements de
charges, et a souhaité que le Gouvernement ne doute pas de la
détermination des partenaires sociaux à assurer le respect de
leurs prérogatives.
En réponse à M. Charles Descours,
M. Denis Gautier-Sauvagnac
s'est déclaré incompétent, au titre de ses fonctions
de responsable de l'assurance chômage, pour se prononcer sur les
règles de fonctionnement de la commission des comptes de la
sécurité sociale. Il a indiqué que les comptes de
l'assurance chômage atteignaient à peine à
l'équilibre, après pourtant deux années de croissance de
l'économie.
Evoquant la situation comptable de l'UNEDIC, il a estimé que les
27 milliards de francs disponibles en trésorerie correspondaient
à des dettes exigibles soit immédiatement, soit au plus tard en
2002 et qu'une partie de ces fonds permettait d'assurer le besoin en fonds de
roulement, c'est-à-dire le paiement des engagements infra-mensuels. Il a
estimé la marge de manoeuvre à 15 milliards de francs, soit
un mois de prestations, et a considéré qu'il s'agissait là
de l'indispensable filet de sécurité dont avait besoin le
régime d'assurance chômage.
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l'UNEDIC
, a
déclaré que, face à cette trésorerie, le
régime d'assurance chômage affichait 30 milliards de francs
de dettes dont 24 milliards de francs d'engagements provisionnés,
notamment 12,6 milliards de francs pour l'allocation de remplacement pour
l'emploi (ARPE) et 1,8 milliard de francs pour l'allocation
spéciale du fonds national pour l'emploi (ASFNE). Il a
considéré que la situation nette de l'UNEDIC était ainsi
à la limite du négatif.
En réponse à la remarque de M. Charles Descours,
M. Denis
Gautier-Sauvagnac
a constaté, qu'au jour d'aujourd'hui, les
négociations n'étaient toujours pas engagées pour le
renouvellement de la convention UNEDIC, qui expirait pourtant au
31 décembre de cette année.
M. Guy Fischer
a souhaité savoir si l'UNEDIC pourrait prendre en
charge les cotisations retraites des chômeurs.
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a estimé que la question du respect
des partenaires ne pouvait être divisée, les accords signés
devaient être respectés, ainsi que leur autonomie à fixer
les recettes et les dépenses du régime d'assurance chômage.