C. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : CONCILIER EFFICACITÉ ET DROITS DES JUSTICIABLES
1. Faire disparaître la notion de classement du code de procédure pénale
Comme il
a été exposé ci-dessus, la notion de classement sans suite
recouvre des réalités très différentes et n'a
guère de signification. La Chancellerie et les parquets ont entrepris
des efforts qui permettent aujourd'hui d'avoir une vision plus claire et plus
complète des suites données aux plaintes et dénonciations.
Dans ces conditions, votre commission propose de faire disparaître toute
référence à la notion de classement dans le code de
procédure pénale. Cette notion ne rend pas compte en effet du
cheminement qui conduit un procureur à décider de ne pas mettre
en mouvement l'action publique. Il convient donc
d'évoquer la
décision de ne pas poursuivre plutôt que le classement d'une
affaire
. Une médiation ou une composition pénale ne sont pas
des classements, encore moins des classements sans suite, même si elles
n'aboutissent pas à une mise en mouvement de l'action publique. Une
telle évolution peut paraître de pure forme, mais elle permettra
une meilleure compréhension du traitement réservé par les
parquets aux plaintes et dénonciations.
2. Approuver la motivation des décisions
Le code de procédure pénale prévoit déjà explicitement que le procureur de la République avise le plaignant du classement de l'affaire. La motivation de ces décisions n'est aujourd'hui explicitement prévue que pour certaines infractions sexuelles commises contre des mineurs. Nombre de parquets ont toutefois d'ores et déjà entrepris de motiver les décisions de classement, grâce à la table des motifs élaborée par la Chancellerie. Dans ces conditions, la mesure prévue par l'article 4 du projet de loi est davantage une consécration qu'une innovation . Elle mérite d'être approuvée, les justiciables étant en droit de connaître les raisons pour lesquelles leurs plaintes n'aboutissent pas à une mise en mouvement de l'action publique.
3. Simplifier le système de recours
Le
système de recours contre les décisions de classement
prévu par
l'article 5
du projet de loi est apparu trop complexe
à votre commission. En ce qui concerne le
recours auprès du
procureur général
, il existe d'ores et déjà en
l'absence de tout texte - il s'agit d'un recours hiérarchique - et est
ouvert à tous les justiciables. Il est utile de consacrer ce recours en
l'inscrivant dans la loi, afin qu'il soit mieux connu.
Toutefois, il paraît contestable de n'offrir ce recours qu'aux personnes
n'ayant pas la possibilité de se constituer partie civile. La
consécration d'un recours devant le procureur général
ouvert aux seules requérants n'ayant pas qualité pour se
constituer partie civile peut logiquement être interprétée
comme ayant pour conséquence de faire disparaître le recours
hiérarchique qui correspond à un principe général
du droit public ouvert à tous les plaignants. Or, la constitution de
partie civile est beaucoup plus contraignante pour le plaignant que la mise en
mouvement de l'action publique par le procureur et l'on voit mal pourquoi les
victimes d'une infraction seraient privées du droit de contester devant
le procureur général une décision de classement. En outre,
la notion d' " intérêt suffisant "
nécessaire pour exercer un recours permet toutes les
interprétations.
Votre commission propose donc d'accepter la consécration du recours
hiérarchique devant le procureur général tout en ouvrant
ce recours - comme actuellement - à toutes les personnes ayant
dénoncé des faits à propos desquels le procureur a
décidé de ne pas mettre en mouvement l'action publique.
En revanche, la mise en place de
commissions régionales de magistrats
du parquet
devant lesquelles les décisions du procureur
général pourraient être contestées a suscité
la perplexité de votre commission. Le système proposé est
en effet fort complexe et le bénéfice qui peut en être
attendu paraît faible. Il est difficile en effet d'imaginer que des
affaires importantes puissent échapper successivement à la
vigilance d'un procureur de la République et d'un procureur
général. En outre, il paraît contestable, dans un projet de
loi qui tend par ailleurs à réaffirmer le principe de
hiérarchisation du parquet, de permettre à une commission qui
pourra être composée de substituts de remettre en cause la
décision d'un procureur général. Le présent projet
de loi est marqué par une volonté de renforcer les attributions
des procureurs généraux et il paraît normal de leur faire
confiance en ce qui concerne leur pouvoir de remettre en cause les
décisions de classement prises par les procureurs de la
République.
Votre commission propose donc la suppression de ce recours devant une
commission régionale, dont les modalités sont
particulièrement lourdes et complexes et dont l'utilité n'est pas
démontrée
. Votre rapporteur se permettra d'ajouter qu'il a
procédé à de très nombreuses auditions sur ce
projet de loi et que cette disposition n'a été soutenue par aucun
de ses interlocuteurs.