CHAPITRE II
DISPOSITONS RELATIVES AU RÉGIME DES DÉCISIONS
PRISES PAR LES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES
Article 16 A
Identification de l'auteur d'une
décision
Cet
article reproduit les dispositions du dernier alinéa de l'article 4
relatif à l'identification de l'auteur d'une décision.
Par coordination avec l'amendement qu'elle vous a présenté
à l'article 4, votre commission des Lois, comme en première
lecture, vous soumet
un amendement
visant à rétablir
l'article 16 A supprimé par l'Assemblée nationale.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 16 A
ainsi rétabli.
Article 17
Accusé de réception
Cet
article impose à l'ensemble des autorités administratives la
délivrance d'un accusé de réception aux auteurs des
demandes qui leur sont adressées.
En première lecture, le Sénat a réécrit le
troisième alinéa de cet article afin de prévoir une
sanction identique dans les cas où l'accusé de réception
n'a pas été transmis au demandeur et dans les cas où cette
transmission est irrégulière et de nature à empêcher
le demandeur de faire valoir ses droits. Il a donc repris les critères
déjà utilisés par le décret du
28 novembre 1983, favorable aux demandeurs.
L'Assemblée nationale, avec l'avis favorable du Gouvernement, a
préféré substituer à la rédaction du
Sénat la disposition selon laquelle les délais de recours ne sont
pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de
réception ne comporte pas les indications prévues par un
décret en Conseil d'Etat.
La rédaction du Sénat permet une appréciation
concrète de la situation du demandeur, tandis que celle de
l'Assemblée nationale privilégie un certain formalisme.
Cependant, votre commission des Lois, par souci de conciliation, vous propose
d'accepter la version de l'Assemblée nationale. Celle-ci, en renvoyant
à un décret en Conseil d'Etat le contenu des accusés de
réception, est de nature à faciliter une application uniforme de
cet article par l'ensemble des autorités administratives.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 17
sans
modification
.
Article 20
Décisions implicites
d'acceptation
Cet
article ménage des exceptions au principe posé par
l'article 19 du projet de loi, adopté conforme par
l'Assemblée nationale, selon lequel le silence gardé pendant plus
de deux mois par une autorité administrative sur une demande vaut
décision de rejet. L'article 20 donne un cadre législatif
à l'intervention des décrets en Conseil d'Etat prévoyant
des régimes de décisions implicites d'acceptation.
Alors que le Sénat en première lecture avait adopté cet
article sans modification, l'Assemblée nationale, sur proposition de
M. Patrice Carvalho, avec l'avis favorable du Gouvernement, a
ajouté que le bénéficiaire de la décision implicite
d'acceptation pouvait demander à l'autorité administrative de lui
délivrer une
attestation confirmant que le silence gardé
pendant deux mois a bien abouti à une décision implicite
d'acceptation
.
Cette rédaction paraît
nier la notion même de
décision "
implicite
"
.
Cependant, elle semble utile dans la mesure où les demandeurs
rencontrent parfois des difficultés pour prouver qu'ils sont
bénéficiaires d'une décision créatrice de droits.
Par exemple, une personne peut avoir besoin de prouver à un
établissement de crédit qu'elle est titulaire d'un permis de
construire accordé tacitement par l'administration, afin d'obtenir un
prêt immobilier.
De plus, la délivrance d'une attestation oblige l'administration
à constater l'existence de la décision implicite d'acceptation.
En effet, celle-ci peut résulter de l'inaction de l'administration, qui
n'a pas instruit la demande.
L'Assemblée nationale a modifié les exceptions figurant au
deuxième alinéa de l'article 21. En effet, certains
régimes de décisions implicites ne peuvent être
créés par voie réglementaire.
L'Assemblée nationale a supprimé la mention selon laquelle un
décret ne peut créer de régime d'acceptation implicite
lorsque la décision présente un caractère financier. Elle
a ainsi tenu à conforter l'existence des décisions implicites
d'acceptation à caractère financier de la Sécurité
sociale, c'est-à-dire les régimes d'entente préalable
permettant à l'Assurance maladie d'accepter tacitement le remboursement
des soins dentaires ou des soins de kinésithérapie.
Le Gouvernement a donné un avis
défavorable
à cette
suppression, non pas sur le fond, mais parce qu'il présentait un
amendement concurrent, tendant à ce que les décrets ne puissent
instituer de régime d'autorisation implicite d'une demande
présentant un caractère financier, sauf dans le domaine de la
Sécurité sociale.
Par cohérence avec la position du Sénat en première
lecture, votre commission des Lois vous soumet
un amendement
ayant le
même objet que celui proposé par le Gouvernement.
De façon générale, votre rapporteur souhaite que les
décrets d'application du présent article, qui créeront des
régimes d'acceptation implicite dans les domaines de compétence
des collectivités territoriales, fassent l'objet d'une information en
amont des associations d'élus locaux.
Elle vous propose d'adopter l'article 20
ainsi modifié
.
Article 21
Retrait pour illégalité
des
décisions implicites d'acceptation
Cet
article tend à modifier le régime juridique applicable en
matière de retrait des décisions implicites d'acceptation (DIA)
illégales.
Le Sénat a profondément modifié cet article en
première lecture, en envisageant
trois hypothèses
. Il a
distingué selon que les mesures d'information des tiers sur l'existence
de la décision ont ou non été prises, alors que le
critère retenu par le projet de loi consistait à vérifier
que les textes régissant la décision en cause ont prévu ou
non des mesures de publicité. L'approche du Sénat, plus
concrète, privilégie les droits des tiers.
L'Assemblée nationale a accepté l'ajout du Sénat
permettant le retrait de la DIA pour illégalité pendant la
durée de l'instance au cas où un recours contentieux a
été formé (troisième hypothèse).
Mais, avec l'avis favorable du Gouvernement, elle a refusé les deux
premières hypothèses proposées par le Sénat :
•
Première hypothèse : la mesure de
publicité a effectivement été prise.
L'Assemblée nationale prévoit que le retrait peut avoir lieu
"
pendant le délai du recours contentieux
", alors que
le Sénat avait précisé qu'il s'agissait du délai du
recours contentieux ouvert aux tiers.
Votre rapporteur soulignait en première lecture que cette
rédaction laissait planer une
incertitude sur la durée de ce
délai
.
En effet, le délai de recours contentieux ouvert au
bénéficiaire de la décision implicite est de deux mois
à compter de l'intervention de la décision, c'est-à-dire
à compter de la date d'expiration du délai au terme duquel le
silence gardé par l'administration sur la demande vaut acceptation. Le
délai de recours contentieux ouvert aux tiers est de deux mois à
compter de l'intervention de la mesure de publicité. Or, il peut
s'écouler un certain temps entre l'intervention de la décision
implicite et sa publicité.
2 mois
après
publicité
de la DIA
2 mois
après
intervention
de la DIA
Intervention
de la DIA
Publicité
de la DIA
demande
silence
Délai de recours ouvert
au bénéficiaire de la DIA
Délai de recours ouvert
aux tiers
Délai de retrait par l'administration
dans la première hypothèse de l'Assemblée nationale
Votre
commission des Lois vous propose d'accepter la rédaction de
l'Assemblée nationale, qui, par son imprécision même,
permet de couvrir la période la plus étendue.
•
Deuxième hypothèse : aucune mesure de
publicité n'a été prise.
Le Sénat avait adopté une position très favorable aux
tiers, en permettant le retrait
sans condition de délai
, à
la demande d'un tiers y ayant intérêt.
L'Assemblée nationale a mis en avant
le droit du
bénéficiaire à la sécurité juridique
.
Elle a donc supprimé la possibilité pour les tiers de demander
à l'administration de retirer une DIA illégale au-delà du
délai de recours contentieux. Cette position ne tient pas compte du
droit des tiers, alors même que les situations où aucune mesure de
publicité de la mesure n'est intervenue sont les plus
défavorables aux tiers.
En première lecture, votre rapporteur soulignait déjà la
nécessité de préserver un juste équilibre entre
trois impératifs parfois contradictoires
: retrait de
l'ordonnancement juridique des décisions illégales,
stabilité de la situation juridique du bénéficiaire de la
décision, garantie des droits des tiers.
La solution de conciliation que vous propose votre commission des Lois en
deuxième lecture consiste à limiter à
quatre mois
le " délai de repentir " dont dispose l'administration.
Elle vous soumet
un amendement
en ce sens : le retrait de la
décision implicite d'acceptation illégale pourrait ainsi
intervenir à la demande d'un tiers intéressé
(l'administration n'agit pas de sa propre initiative) pendant un délai
de quatre mois à compter de la date à laquelle est intervenue la
décision.
Cet amendement permet de tenir compte du délai nécessaire
à un tiers lésé pour prendre connaissance d'une
décision implicite en l'absence de publicité de celle-ci. Cette
disposition trouve son utilité dans les cas où le tiers ne prend
connaissance de la décision qu'après l'expiration du délai
de recours contentieux qui lui est ouvert ; il dispose alors de deux mois
supplémentaires pour demander à l'administration le retrait de la
DIA illégale. De plus, cet amendement limite la durée
d'incertitude juridique pour le bénéficiaire de la mesure.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 21
ainsi
modifié
.
Article 22
Observations de
l'intéressé
préalables à la décision
Cet
article oblige l'administration à recevoir les observations de
l'intéressé destinataire d'une décision devant être
motivée et qui ne constitue pas la réponse à une demande.
Alors que le Sénat avait adopté cet article sans modification en
première lecture, l'Assemblée nationale, avec un avis de
sagesse
du Gouvernement, a étendu l'application d'une
procédure contradictoire à l'ensemble des décisions
défavorables, qu'elles soient soumises ou non à une obligation de
motivation.
Dans cette rédaction, donnent lieu à une procédure
contradictoire préalable "
les décisions administratives
individuelles défavorables ainsi que les décisions
administratives individuelles qui dérogent aux règles
générales fixées par la loi ou le
règlement
".
En séance publique, le Gouvernement a souligné
l'intérêt de la rédaction initiale de cet article, qui
s'articule avec le cadre défini par la loi du 11 juillet 1979
sur la motivation des actes administratifs. Il a craint que la rédaction
proposée par l'Assemblée nationale ne soit "
pas claire
juridiquement
" et "
n'aboutisse à brouiller la
lisibilité du droit applicable
".
Votre commission des Lois vous soumet
un amendement
rétablissant
le texte du projet de loi, adopté par le Sénat en première
lecture.
Elle vous propose d'adopter l'article 22
ainsi modifié
.
Article 22 bis
(nouveau)
Procédure
contradictoire en cas de reversement
de prestations sociales indûment
perçues
Sur
proposition de sa commission des Lois et avec un avis de
sagesse
du
Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté cet article
additionnel visant à ce que la décision ordonnant le reversement,
par un assuré social, de prestations sociales qu'il aurait
indûment perçues, soit prise à l'issue d'une
procédure contradictoire. Elle a ajouté que ces décisions
devaient être motivées et indiquer les voies de recours ouvertes
à l'assuré.
L'objectif de cet amendement ne peut qu'être approuvé, les
personnes ayant trop perçu en raison d'une erreur de l'administration
méritant des explications de sa part.
En l'état actuel du droit, les organismes de sécurité
sociale ne sont tenus de motiver que les décisions individuelles par
lesquelles elles refusent un avantage
dont l'attribution constitue un
droit
pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour
l'obtenir, ainsi que les décisions par lesquelles ces organismes
refusent l'attribution d'aides ou de subventions dans le cadre de leur action
sanitaire et sociale
8(
*
)
.
Il ne paraît pas souhaitable de contraindre les organismes de
sécurité sociale à recueillir les observations de
l'assuré social
avant
de lui notifier l'ordre de reversement des
sommes indûment perçues, comme l'implique le renvoi à
l'article 22 du projet de loi.
En effet,
cette procédure laisserait croire que les sommes
indûment perçues constituent un droit pour l'assuré
social
, au mépris des principes de la comptabilité publique
qui privilégient le recouvrement des deniers publics. De plus, elle
soulèverait de considérables difficultés pratiques :
il semblerait que la Caisse nationale des allocations familiales notifie chaque
année près de six millions d'ordres de reversement de prestations
indûment versées.
Votre commission des Lois vous soumet
un amendement
réécrivant l'article 22 bis
afin que l'assuré
social puisse faire valoir ses observations
après
avoir
reçu l'ordre de reversement
.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 22 bis
ainsi modifié
.