CHAPITRE QUATRE
L'ESPACE
I. LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE SPATIALE FRANÇAISE
La
politique spatiale française repose d'une part sur des programmes
nationaux comportant de nombreuses coopérations bilatérales,
d'autre part sur une contribution aux programmes et activités de
l'Agence spatiale européenne (ESA).
Le Centre national
d'études spatiales participe à sa préparation et à
sa mise en oeuvre.
Les décisions prises lors des conseils ministériels de l'Agence
spatiale européenne à Toulouse en 1995 et à Paris en 1997
et 1998 ont permis de fixer les perspectives de l'effort spatial
français couplé avec la relance de la politique spatiale
européenne.
Comme pour sa contribution à l'ESA, la politique spatiale nationale
s'appuie dans ses programmes nationaux sur un ensemble de priorités
thématiques. Une réflexion est en cours avec le CNES, sur les
orientations programmatiques à l'horizon 2005.
Le programme spatial civil français est constitué de
trois
grands
domaines
que sont les "moyens d'accès à
l'espace", les "applications", les "programmes scientifiques"
complétés par des activités de soutien (préparation
de l'avenir, moyens techniques opérationnels).
Une forte priorité est donnée à ARIANE 5, et
à l'accès à l'espace
, dont il faut permettre le
maintien de la performance commerciale. Cela passe par son adaptation au
lancement des constellations (étage réallumable) et à la
diminution des coûts ainsi que, de manière plus prospective,
l'étude de lanceurs réutilisables.
Les télécommunications par satellites font également
partie des choix prioritaires :
elles contribuent à la
société de l'information et placent les acteurs nationaux au
premier rang mondial. Cette activité relève du marché, en
particulier à l'exportation, est une source de revenu, et doit, en
raison de son potentiel, recevoir un soutien pour faciliter les innovations.
L'éducation doit en particulier pouvoir bénéficier des
moyens de l'activité spatiale (télécommunication, Internet
à l'école) et des contenus à fort pouvoir de motivation
que ce secteur est capable de fournir.
La France doit en outre contribuer à doter l'Europe d'un système
autonome de navigation par satellite, complémentaire au GPS, et placer
nos industriels dans les meilleures conditions pour que le marché des
activités aval leur soit accessible.
Concernant l'observation de la Terre, les choix restent à faire car,
dans la perspective de la prochaine génération de satellites -
l'après SPOT - ce secteur est dès aujourd'hui à la
croisée des chemins, devant une forte diversité de missions
à conduire, mais sans un marché aussi mature que celui des
télécommunications.
Dans ce domaine, en plus de missions d'observation et de compréhension
de la Terre et de son environnement, des coopérations sont à
l'étude pour l'exploration de la planète Mars avec l'ESA (Mars
Express) et avec la NASA (Mars Sample Return).
Les activités liées à la station spatiale
internationale ont été jugées moins prioritaires, et trop
contraignantes financièrement, au regard des retours scientifiques
attendus. Cependant les engagements internationaux que la France avait pris par
le passé ont été respectés.
Pour l'ensemble des objectifs socio-économiques auxquels participe
l'espace à titre principal, la contribution du BCRD 1998
s'élève à 9.065 millions de francs dont
4.697 millions de francs sont affectés à la contribution
française au budget de l'Agence spatiale européenne (ESA). Pour
1999, la dotation est de 9.135 millions de francs.
Le contexte dans lequel se déploient les activités spatiales
connaît, depuis le tournant de la décennie quatre-vingt-dix, une
profonde évolution caractérisée par l'apparition d'une
nouvelle donne géopolitique et par la forte croissance du marché
des services offerts par les moyens spatiaux.
Le CNES a donc été conduit à engager une action en
profondeur pour s'adapter à ce nouveau contexte et ajuster son
positionnement vis-à-vis des autres acteurs du spatial (Agence spatiale
européenne, industries, organismes de recherche, partenaires
internationaux, etc.). Le plan stratégique du CNES, fruit d'une intense
réflexion menée en 1996, a permis de définir l'horizon
vers lequel le Centre devait tendre et de préciser les axes prioritaires
de son action.
Il en ressort que le CNES, qui est l'un des tout premiers centres d'excellence
dans le monde en technologie et systèmes spatiaux, doit consolider et
enrichir son savoir-faire dans des secteurs de pointe mais également
valoriser ses compétences techniques auprès de ses partenaires,
notamment industriels, afin d'être reconnu comme un acteur
irremplaçable pour l'élaboration de tout nouveau système
spatial en Europe.
Mis en oeuvre en 1997, le plan stratégique se poursuit en 1998 selon ces
nouveaux axes directeurs que constituent la recherche de l'excellence
technologique et celle de partenariats conduisant à valoriser cette
compétence.
II. LE FINANCEMENT DU SECTEUR SPATIAL
A. L'AUGMENTATION DES DOTATIONS BUDGÉTAIRES DU CNES EN 1999
En 1999,
le projet de dotation du CNES devrait s'élever en CP + DO
à 9.135 millions de francs soit une progression de 0,8 % (+ 70
millions de francs) par rapport aux chiffres de 1998 (9.065 millions).
Votre rapporteur spécial regrette vivement que la dotation de
fonctionnement du CNES (915 millions de francs) soit insuffisante pour couvrir
les charges de personnel (1.250 millions de francs).
Cette situation est
à l'origine, en début de chaque exercice, d'un basculement de
crédits entre la section des opérations en capital et la section
de fonctionnement. Cette mauvaise évaluation budgétaire se
traduit par un manque de sincérité des comptes -
régulièrement dénoncé par la Cour des comptes - et
transforme la subvention d'investissement en variable d'ajustement du budget du
CNES.
Comparée aux années précédentes, la dotation se
décompose comme indiquée ci-après :
Les
orientations budgétaires pour 1999 sont avant tout dictées par la
volonté de promouvoir les programmes innovants et tournés vers
les applications, et celle de répondre aux engagements pris dans le
cadre de l'ESA, notamment à la suite du conseil des 23 et
24 juin 1998, à Bruxelles.
Dans le cadre des programmes, le ministère chargé de l'espace
donne ainsi une priorité particulière à
l'amélioration de la performance Ariane 5, au soutien des
développements et des innovations dans le domaine des
télécommunications et de la navigation par satellites, aux
nouvelles générations de satellites d'observation de la Terre,
aux micro-satellites, aux missions scientifiques et, notamment, à
l'étude d'une mission de retour d'échantillon martien. Il veille
de plus à conserver un bon niveau de recherche et technologie afin de
garder à ce domaine un niveau d'excellence.
B. L'AMÉLIORATION DE SA SITUATION FINANCIÈRE
A la
fin de l'exercice 1995, le CNES constatait que les engagements qu'il avait
contractés vis-à-vis de ses fournisseurs ne pouvaient être
honorés en raison de l'insuffisance des crédits de paiement dont
l'établissement disposait. C'est ainsi que le montant total des ordres
de dépenses présentés pour paiement à l'agence
comptable, et refoulés faute de crédits, s'élevait
à 577 millions de francs.
Dans le même temps, le compte de résultat de l'exercice se soldait
par un déficit de la section de fonctionnement pour un montant de
208 millions de francs, ainsi que par un déficit de la section des
opérations en capital à hauteur de 141 millions de francs.
S'ajoutant aux arriérés de contribution à l'ESA, une dette
de 926 millions de francs était ainsi
révélée.
Le conseil d'administration du 9 mai 1996 a approuvé un dispositif
d'apurement de ce nouveau déficit sur trois exercices de 1996 à
1998. Celui-ci était fondé sur une autorisation de report
déficitaire limité à 500 millions de francs
à la fin de 1996, puis de 250 millions de francs à la
fin de 1997. Le solde devait être apuré en 1998.
L'établissement a appliqué rigoureusement ce plan qui s'est
déroulé de la manière suivante :
- les ordres de dépenses impayés constatés à
la fin de 1995 ont été honorés dès le début
de 1996 au moyen des crédits mis en place pour cet exercice,
- un effort important d'économies de fonctionnement, une plus
grande vigilance dans la gestion des activités conduites pour le compte
de tiers, ont permis de dégager un excédent de 172 millions
de francs en 1996. Autorisé à prélever 36 millions de
francs sur son fonds de réserve, le CNES a ainsi pu annuler dès
1996 le déficit de fonctionnement de 208 millions de francs
constaté à la fin de 1995,
- une limitation des engagements nouveaux a permis de ramener le
déficit cumulé de la section des opérations en capital de
500 millions de francs, objectif assigné à
l'établissement, à 390 millions de francs,
- en 1997, la régulation des engagements nouveaux a de nouveau
conduit à apurer le
déficit cumulé de la section
des opérations en capital. Au cours de cet exercice, un excédent
de 384 millions de francs a été réalisé,
ramenant le déficit à 6 millions de francs.
En conclusion, la dette constatée à la fin de 1995
au-delà des arriérés de contribution à l'ESA a
été quasi annulée en deux années budgétaires
au lieu des trois années prévues au plan d'apurement.
L'établissement a été en mesure d'atteindre cet objectif,
d'une part, grâce à l'adoption dès 1996 de principes de
gestion privilégiant le suivi des crédits de paiement, et,
d'autre part, par une politique de réduction des engagements juridiques
et leur régulation selon la disponibilité des moyens de paiement.
Dans le même temps, le CNES a obtenu l'accord de son conseil
d'administration (20 décembre 1996) pour régulariser la prise en
compte impropre de certaines recettes, notamment liées à des
fonds appartenant à plusieurs gouvernements étrangers dont la
trésorerie était affectée, ainsi qu'à une
autorisation d'emprunt de 230 millions de francs qui n'avait pas
donné lieu à émission. Cette opération s'est
fondée sur une recomposition de la dette de contribution à l'ESA
visant à donner de celle-ci une traduction budgétaire plus
rigoureuse.
En résumé, la situation de l'endettement du CNES est à ce
jour la suivante pour ce qui concerne les activités conduites hors du
cadre de l'ESA :
- depuis la fin de l'exercice 1996, les recettes ouvertes par le CNES sans
la couverture correspondante en trésorerie ont été
régularisées et les dispositions ont été prises
pour éviter que ces pratiques ne se renouvellent,
- les ordres de dépenses rejetés par l'agence comptable par
insuffisance de trésorerie à la fin de l'exercice 1995 ont
été honorés au début de 1996. Les insuffisances de
crédits qui étaient à l'origine de cette comptabilisation
incomplète des charges du CNES ont fait l'objet d'un plan d'apurement
sur trois exercices qui, dans la pratique, a été
réalisé au cours des deux années 1996 et 1997.
Les arriérés de contribution du CNES à l'égard
de l'ESA étaient constatés au 31 décembre 1995 à
hauteur de 1.734 millions de francs.
Par ailleurs, des lignes de
crédit contractées par l'ESA pour le compte de la France afin de
permettre le financement du programme Ariane restaient ouvertes à cette
date pour un montant de 1.023 millions de francs.
Les lignes de crédits ont été remboursées au
début de 1997 (542 millions de francs) et au début de 1998
(481 millions de francs).
Les arriérés de contribution à l'ESA, identifiés en
dette hors bilan sur un poste spécifique du compte financier, ont fait
l'objet de remboursements partiels en 1996 et en 1997 pour un montant global de
622 millions de francs.
Ce poste s'élève donc à
1.112 millions de francs en fin d'exercice 1997, soit un montant
inférieur à l'objectif assigné au CNES pour 1997
(1.200 millions de francs) dans le cadre du plan pluriannuel d'apurement
de la dette à l'ESA.
Ces arriérés constituent à ce jour le seul poste de dette
résiduel du CNES.
Le tableau ci-dessous dresse le bilan des
remboursements effectués au cours de la période 1995 à
1998, complété du profil d'apurement du solde à hauteur de
250 millions de francs par an.
C. LES CRÉDITS D'INTERVENTION
D'autre
part, le ministère en charge de l'espace contribue au
développement de l'industrie spatiale française par
l'intermédiaire des crédits d'intervention inscrits à son
budget.
Ces crédits sont des aides remboursables, attribuées
aux industriels du secteur pour leur permettre d'apporter un complément
de développement ou d'industrialisation à un produit pour lequel
un débouché commercial est prévisible.
En 1998, le
montant des autorisations de programme s'est élevé à
60,7 millions de francs (hors gel budgétaire). Pour 1999, il est
prévu un montant de
40 millions de
francs
couvrant
seulement les engagements de "fertilisation STENTOR" pris par le Premier
ministre en 1994.
Les programmes aidés peuvent se ranger en trois catégories :
- les produits spatiaux,
-les produits ayant une application au sol, qui concernent essentiellement la réception et l'exploitation des données des satellites d'observation (SPOT, ERS),
- les produits connexes au secteur spatial : cette catégorie regroupe principalement les moyens d'essais nécessaires à la qualification des systèmes spatiaux.
III. LES ENJEUX DU SECTEUR SPATIAL
A. L'ÉVOLUTION DU MARCHÉ DES LANCEURS
L'exploitation d'Ariane 4 par la société
Arianespace se poursuit dans de bonnes conditions, avec une cadence
élevée de lancement, de l'ordre d'un lancement par mois, et
jusqu'en 2002/2003, selon les besoins du marché.
Jusqu'à un passé récent, les lancements Ariane
étaient réalisés environ aux 3/4 pour des besoins de
télécommunications en service fixe géostationnaire au
profit d'opérateurs institutionnels.
Depuis quelques années,
le champ des applications des télécommunications spatiales s'est
considérablement développé avec réapparition de la
télévision directe, des constellations, du multimédia.
A la diversité de la demande devra répondre la flexibilité
d'une offre compétitive, les opérateurs faisant leur choix,
généralement sans préférence affichée autre
que celle des lois de la concurrence.
En chiffre d'affaires, au moins 60 % du marché des lancements sera
consacré aux télécommunications commerciales et, pour
conserver ses positions sur ce marché face à une concurrence de
plus en plus vive (Russie, Chine et bientôt l'Inde et le Japon),
animée par de puissants efforts américains de rationalisation de
leur panoplie de lanceurs consommables, il est urgent qu'Ariane 5 évolue
de façon continue pour maintenir sa compétitivité
au-delà des programmes Ariane 5 Evolution, ARTA-5 et Ariane
Infrastructure décidés en 1995.
Les
caractéristiques majeures de l'évolution prévisible
du marché
au, cours des prochaines années sont les suivantes
- 30 à 35 satellites géostationnaires seront lancés
annuellement dans le monde.
Les gros satellites seront les plus nombreux
puisque le coût des répéteurs en orbite
décroît avec la taille du satellite et que, par ailleurs, les
nouveaux services de télécommunications requièrent des
plates-formes plus puissantes.
La classe de satellites de masse
supérieure à 4 tonnes deviendra prépondérante avec
une catégorie nouvelle d'une masse de 5 à 6 tonnes, qui
représentera environ 20 % des missions après l'an
2000 ;
-
l'importance du marché des constellations est confirmée
par l'émergence de nouveaux opérateurs et l'avènement de
nouvelles applications:
messagerie, localisation, téléphonie
mobile mondiale, liaisons entre ordinateurs portables ou les applications
à large bande. Plusieurs centaines de satellites seront lancés
dans le monde dès les premières années du vingt et
unième siècle ;
- la demande de service de lancement peut évoluer avec la
généralisation de la propulsion électrique des satellites
procurant d'appréciables gains de longévité et de masse du
satellite; certains constructeurs souhaitent limiter la fonction propulsion du
satellites pour optimiser encore plus sa fonction communication.
Les
trois composantes essentielles de l'adaptation de l'offre Ariane 5
sont les suivantes :
- l'augmentation de la performance, pour conserver l'avantage du
lancement simultané de deux satellites ;
- l'amélioration de la flexibilité, pour adapter le
système de lancement à la demande des clients ;
- la réduction des coûts de lancement avec un objectif de 50
%, pour rester compétitif.
L'apparition d'une nouvelle génération de lanceurs,
partiellement ou totalement réutilisables et économiquement
viables, est attendue au début du prochain millénaire. Il est
souhaitable de lancer dès maintenant les travaux technologiques
permettant de valider la faisabilité de cette nouvelle
génération de lanceurs.
B. ARIANE 5
Le
développement du lanceur Ariane 5 a été
décidé lors de la session du Conseil de l'ESA réuni au
niveau ministériel à La Haye en novembre 1987.
Une
enveloppe financière
du programme, souscrite à 99,9 %
par les Etats participants, s'élève à
3.492,5 millions d'euros aux conditions économiques 1986, soit
4.831 millions d'euros
aux conditions économiques 1998. Les
principaux contributeurs à ce programme sont la France (46,2 %),
l'Allemagne (22 %) l'Italie (15 %) et la Belgique (6 %).
L'Autriche (0,4 %), le Danemark (0,4 %), l'Espagne (3 %),
l'Irlande (0,2 %), la Norvège (0,6 %), les Pays-Bas
(2,1 %), la Suède (2 %) et la Suisse (2 %) participent
également à ce programme.
Les objectifs principaux du programme étaient
de doter l'Europe
d'un lanceur capable, d'une part, de lancer deux charges utiles en orbite de
transfert géostationnaire en tenant compte de l'évolution de la
masse des satellites, et, d'autre part, de pouvoir lancer en orbite basse
l'avion spatial européen Hermès.
L'abandon par l'Europe du
programme Hermès a conduit à recentrer ces objectifs vers le
lancement de satellites en orbite de transfert géostationnaire, mais ne
remet pas en cause la conception d'ensemble du lanceur.
Le coût
à l'achèvement
du programme à la charge des Etats
Participants est estimé à 6.000 millions d'euros aux
conditions économiques 1998, soit 124 % de l'enveloppe initiale.
Le dépassement de l'enveloppe initiale à la charge des Etats
participants au-delà de la marge de 120 % prévue dans la
Convention de l'Agence pour la gestion des programmes facultatifs s'explique
dans sa majeure partie par les
conséquences de l'échec du
premier vol de qualification du lanceur
ainsi que par les activités
supplémentaires à mener en regard des résultats du
deuxième vol de qualification, Ariane 502.
Le montant nécessaire pour financer les activités liées
aux conséquences du vol 501 s'est élevé à
313 millions d'euros
. Cette charge supplémentaire correspond,
d'une part, aux coûts des travaux complémentaires liés
à l'échec du vol 501 et aux charges induites par
l'allongement des délais nécessaires pour réaliser le
deuxième vol de qualification Ariane 502, soit 179 millions
d'euros, et d'autre part, au troisième vol de qualification,
Ariane 503, pour 134 millions d'euros.
La couverture financière de ces surcoûts liés à
l'échec du premier tir de qualification a été
assurée, d'une part, par une réaffectation des crédits des
programmes Ariane, et, d'autre part, par des contributions des Etats
participants et de l'industrie européenne :
- 64 millions d'euros prévus initialement pour atteindre la
cadence 8 dans le cadre du programme de développement Ariane 5 ont
été affectés aux travaux post 501, les industriels
prenant à leur charge l'ensemble de ces travaux associés à
l'intensification de la production des lanceurs,
- 60 millions d'euros ont été prélevés
sur les programmes complémentaires Ariane 5,
- 105 millions d'euros ont été apportés par les
Etats participant au programme de développement, la France
finançant majoritairement cette contribution (74,9 %),
- 84 millions d'euros ont été apportés par un
effort exceptionnel de l'industrie.
L'effort exceptionnel initial de l'industrie était programmé
à 50 millions d'euros, les 34 millions d'euros restants devant
être couverts par une recette attendue d'un passager commercial sur
Ariane 503. L'incendie intervenu sur le satellite Eutelsat a privé
l'ESA de cette recette, et l'industrie a pris à sa charge le
déficit en découlant.
Le deuxième vol de qualification Ariane 502 s'est
déroulé avec succès le 28 octobre 1997. Seule une anomalie
notable a été relevée : les exploitations des
données de vol ont détecté l'apparition d'un couple en
roulis de l'Etage Principal Cryotechnique qui a provoqué une anomalie de
comportement de ce dernier. Les causes de cette mise en roulis ont
été identifiées et les mesures correctrices ont
été prises au cours de l'année 1998.
Dès le lendemain de ce deuxième
vol de qualification,
Arianespace a pris à sa charge l'exploitation de l'ensemble de lancement
n° 3 dédié à Ariane 5.
Les activités relatives à la fin de la qualification du lanceur
Ariane 5 ainsi que les activités à entreprendre pour traiter
et corriger les anomalies détectées lors du vol de qualification
A 502 ont fait l'objet d'une nouvelle tranche du programme de
développement Ariane 5.
Les coûts correspondants aux conditions économiques 1997
représentent 65 millions d'euros ventilés comme suit :
Activités liées à la fin de qualification d'Ariane 5
36 millions d'euros
Activités découlant des anomalies constatées lors de A502
29 millions d'euros
Total
65 millions d'euros
La France contribue à cette tranche de programme à hauteur de
75,4 %, ce qui représente 49 millions d'euros aux conditions
économiques 1997.
Le troisième vol de qualification, réalisé par Arianespace
pour le compte de l'Agence Spatiale Européenne, a eu lieu, avec
succès, en octobre 1998. A l'issue de l'exploitation des données
de ce vol, Arianespace devrait prendre en charge la totalité du
système de lancement afin d'en assurer sa commercialisation. Arianespace
envisage de trois à quatre lancements commerciaux Ariane 5
dès 1999.
En plus du programme de développement du lanceur n° 5, le
programme Ariane 5 est doté de programmes complémentaires
d'accompagnement.
Le Conseil de l'ESA réuni au niveau ministériel à Toulouse
en 1995 a décidé le lancement de
trois programmes
complémentaires
qui permettent la mise en oeuvre d'Ariane 5
dans les meilleures conditions techniques et économiques :
Ariane 5 Infrastructure
permettra aux Etats européens, par
leur participation solidaire aux frais fixes d'exploitation, de
bénéficier d'une politique de prix de lancement
avantageuse ; le programme
Ariane 5 ARTA
permet d'assurer un
suivi technique et technologique du lanceur en service ;
Ariane 5
Evolution
permet de développer une première série
d'améliorations des performances du lanceur, notamment par
l'augmentation de poussée de l'Etage Principal Cryotechnique. Les
enveloppes financières de ces programmes ainsi que les taux de
souscription des principaux Etats participants sont rappelés dans le
tableau ci après :
Enfin, le Conseil de l'ESA des 23 et 24 juin 1998 a
décidé le démarrage d'une première étape
d'une nouvelle tranche au programme de développement Ariane 5
visant à augmenter la performance du lanceur en masse satellisable en
orbite de transfert géostationnaire à 9 tonnes en 2003 et
11 tonnes en 2006.
Cette première étape, d'un montant de
135 millions d'euros aux conditions économiques 1997, permet
notamment de démarrer les études système d'un nouvel
étage supérieur cryotechnique pour le lanceur Ariane 5. La
seconde phase de ce programme doit être décidée lors de la
prochaine réunion du Conseil de l'ESA au niveau ministériel en
1999.
Le coût à l'achèvement de ce programme est
actuellement estimé à 1.164 millions d'euros, Arianespace
s'engageant à y contribuer à hauteur de 100 millions
d'euros.
L'engagement financier d'Arianespace et de l'industrie européenne aux
programmes Ariane confirme la confiance portée sur le potentiel
d'exploitation commerciale du nouveau lanceur européen Ariane 5. De
nombreuses études de marché conduisent à réviser
à la hausse les cadences de production dans les années à
venir et justifient les programmes d'évolution de performances
d'Ariane 5 proposés.
A ce jour, la société Arianespace a commandé une
première tranche de 14 lanceurs Ariane 5 à l'industrie
européenne et négocie actuellement la commande d'une
deuxième tranche plus importante, avec des objectifs de réduction
de coûts de production ambitieux.
C. LA STATION SPATIALE INTERNATIONALE
La
station spatiale internationale (ISS) sera constituée
d'éléments pressurisés et non pressurisés,
assemblés en orbite basse (altitude comprise entre 335 et 460 km,
orbite inclinée à 51,6 degrés) et formant une base
permanente. Selon la définition actuelle, elle comportera, outre les
modules de ressources, de service et d'habitation fournis essentiellement par
les Etats-Unis et la Russie, un laboratoire américain, un laboratoire
japonais, un laboratoire européen et trois modules de recherche russes.
Des charges utiles externes, pourront être également
installées. Un véhicule de secours, attaché en permanence
à la station spatiale est également requis à partir de
2003.
La participation européenne au développement de la station
spatiale fait l'objet d'un programme décidé lors de la session du
Conseil de l'Agence spatiale européenne (ESA) réuni au niveau
ministériel à Toulouse en octobre 1995.
La déclaration
de programme prévoit principalement :
- le développement d'un laboratoire européen
pressurisé baptisé Colombus Orbital Facility (COF),
- le développement d'un véhicule automatique de transfert
(ATV),
- des études sur un véhicule de secours.
L'enveloppe financière du programme de développement
s'élève à 2.651 millions d'euros aux conditions
économiques 1995.
Les principaux participants à ce programme
sont l'Allemagne (41 %), la France (27,6 %) et l'Italie
(18,9 %). La Belgique (3 %), le Danemark (1,17 %), les Pays-Bas
(0,94 %), la Norvège (0,46 %), l'Espagne (2 %), la
Suède (0,4 %) et la Suisse (2,5 %) contribuent
également à ce programme.
Le COF
est un laboratoire pressurisé à usages multiples
dont la configuration peut être modifiée par l'échange de
bâtis normalisés contenant des équipements scientifiques et
fonctionnels. Il se présente sous la forme d'un cylindre de
6,7 mètres de long et de diamètre extérieur de
4,5 mètres. Sa masse au lancement est estimée à
9.500 kg, à laquelle il faut ajouter la charge utile. Il est
conçu pour recevoir 10 bâtis à l'intérieur du
laboratoire pour les expériences en milieu pressurisé et permet
la fixation de quatre palettes externes pour les expériences
exposées au milieu spatial. La nouvelle séquence d'assemblage de
la station spatiale prévoit un
lancement du COF
par la navette
américaine
en avril 2003
. Pour son lancement, le COF emportera en
même temps à son bord des installations permettant la
réalisation d'expériences développées dans le cadre
du programme Microgravité pour Colombus (MFC)
géré
par l'ESA. Selon le concept de partage de l'utilisation de la station spatiale
et les accords bilatéraux entre l'ESA et la NASA,
cinq sur dix des
bâtis du laboratoire européen seront réservés aux
expériences européennes.
Le développement de ce laboratoire est estimé à
1.234 millions
d'euros
aux conditions économiques
1995, ce montant comprenant les coûts de lancement du COF ainsi que le
développement du secteur sol. Le développement du COF a
été confié à la société DASA.
L'ATV constitue la participation de l'Europe au scénario de flotte
mixte de la station spatiale.
Il contribue également aux
éléments d'infrastructure de la station spatiale puisqu'il a les
moyens d'effectuer les rehaussements d'orbite. C'est un étage de
transfert polyvalent lancé par Ariane 5, capable
d'opérations de rendez-vous et d'accostage ou d'amarrage pouvant
transporter jusqu'à 6,7 tonnes de charge utile pressurisée
et 5 tonnes de charge utile non pressurisée (avec un maximum de
9 tonnes par vol). Il est conçu pour passer six mois attaché
à la station spatiale ; à la fin de sa mission, il fera un vol de
rentrée contrôlé dans l'atmosphère de la Terre
pendant lequel il se consumera, ainsi que les déchets avec lesquels il
aura été chargé. La maîtrise d'oeuvre du segment
spatial est assurée par AEROSPATIALE. Les équipes du CNES sont
impliquées dans l'étude du segment sol de l'ATV.
Le programme de développement de l'ATV prévoit un vol de
qualification en
mars 2003
. Ensuite, l'ATV sera lancé environ
tous les 17 mois afin d'assurer la livraison de son fret ainsi que sa
fonction de rehaussement de la station.
Le coût de développement de l'ATV est estimé à
661 millions d'euros
aux conditions économiques 1995, ce
montant comprenant la réalisation du secteur sol et le lancement par
Ariane 5 du premier modèle de vol. Le développement de l'ATV
a été confié à la société
AEROSPATIALE, la production revenant à la société DASA.
La Déclaration de programme adoptée lors du Conseil de l'ESA
réuni au niveau ministériel à Toulouse en octobre 1995
prévoyait l'étude de d'un
véhicule de transport
d'équipage (CTV)
basé sur le concept de capsule. En plus de
ces études, le programme de développement prévoyait la
réalisation d'un démonstrateur de rentrée
atmosphérique (ARD). Ce démonstrateur est aujourd'hui
développé et sera lancé lors du vol de qualification
Ariane 503.
En décembre 1996, une partie des fonds destinés aux études
de faisabilité d'un CTV a été réaffectée
à l'étude d'un véhicule de secours et de transport
d'Equipage (CTV/CRV) basé sur le concept de "structure portante".
Pour des raisons politiques et budgétaires, la France n'a pas pris
part à cette nouvelle tranche du programme de développement de la
station spatiale.
Les plans d'utilisation pluridisciplinaire de la station
spatiale par l'Europe ont été établis dans les grandes
lignes par l'exécutif de l'ESA pour la phase initiale (1996-2002) et la
phase d'exploitation (à partir de 2003). L'utilisation de la station
spatiale commencera par l'installation du laboratoire américain en 1999
et s'intensifiera avec celle des laboratoires des autres partenaires (japonais,
russes et européens) prévue jusqu'en 2003. Des charges utiles
pourront être placées à l'extérieur sur la grande
structure en treillis de la station spatiale. Un accord bilatéral entre
l'ESA et la NASA permettra à l'Europe, moyennant la fourniture
d'équipements pour l'aménagement de la station spatiale,
d'utiliser dès 2000 pour ses expériences une partie des
capacités de la station (3/4 d'un bâti standard et 3 mètres
carrés de surface pour les charges utiles externes), sans attendre le
lancement du COF en 2003. L'ESA sollicitera des propositions
d'expériences par différents appels d'offres qui s'adresseront
à la communauté des utilisateurs européens (programmes
utilisateurs de l'ESA, programmes nationaux, utilisateurs commerciaux).
S'agissant du contexte international de la station spatiale, deux faits
notables se sont produits en 1998 :
- le 29 janvier 1998, les pays partenaires de la station spatiale
internationale ont signé les principaux documents régissant la
station spatiale, à savoir un accord intergouvernemental, signé
par les représentants des pays partenaires, et les Memorandum Of
Understanding (MOU), signés entre les agences spatiales (NASA, RKA, ESA,
NASDA, CSC),
- lors de la réunion internationale des chefs d'agence du 31 mai
1998 au centre spatial Kennedy, les partenaires ont accepté une
révision de la séquence d'assemblage de la station spatiale. En
ce qui concerne le laboratoire européen, la date de lancement a connu un
glissement de cinq mois et est actuellement prévue en avril 2003. Lors
de cette réunion, le partenaire russe a présenté une
nouvelle configuration de son segment vol plus adapté à ses
ressources budgétaires. La révision prévoit
également le lancement du premier élément russe ZARYA, qui
a eu lieu, avec succès, récemment.
Le lancement du troisième élément, le module de service
russe, qui constitue l'espace habitable du premier équipage
international (toujours prévu en janvier 2000) et fournit la force
motrice nécessaire pour maintenir l'ensemble de la station sur son
orbite, a été repoussé d'avril à juillet 1999. S'y
ajoutera en août un module-laboratoire américain ; les Russes
lanceront également un cargo de ravitaillement Progress.
L'incapacité de Moscou d'assumer sa part de financement dans la
construction de la station spatiale internationale
a conduit la NASA
à conclure un accord, pour achat de services, avec l'agence spatiale
russe (RKA) d'un montant de 60 millions de dollars supplémentaires.
Accord soumis à l'approbation d'un Congrès réticent. La
NASA a également demandé au Congrès une attribution de
2,4 milliards de dollars supplémentaires sur une durée de
quatre ans pour consolider la séquence d'assemblage de la station. Une
partie du financement pourrait être utilisée pour réaliser
des modules de propulsion de secours afin de pallier une éventuelle
défection de la part des Russes. D'autres solutions pour aider
financièrement la Russie sont à l'étude afin de ne pas
alourdir, par des retards, le coût d'un projet supporté par
15 autres partenaires, dont la France, et qui devrait s'achever en 2004.