B. AUDITION DE M. JEAN-MARIE SPAETH, PRÉSIDENT DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)
Réunie le
mardi 13 octobre 1998
, sous la
présidence de M. Jean Delaneau, président,
la commission a
procédé à
l'audition de M. Jean-Marie Spaeth,
président de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs
salariés (CNAMTS),
accompagné par
M. Jean-Paul
Phélippeau, directeur délégué,
sur le
projet
de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999
.
M. Jean-Marie Spaeth
a présenté l'avis du conseil
d'administration de la CNAMTS sur le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999. Après avoir rappelé
qu'il n'appartenait pas à ce conseil d'administration de se prononcer
pour ou contre un projet de loi, mais de formuler un avis, il a indiqué
que la progression de l'objectif national de dépenses d'assurance
maladie (ONDAM) de 2,6 % n'était justifiée que si les marges
qui en découlaient étaient utilisées pour favoriser la
restructuration du système de soins.
Evoquant le plan d'orientations stratégiques adopté le matin
même,
M. Jean-Marie Spaeth
a aussi affirmé que le
conseil d'administration de la CNAMTS avait confirmé l'existence d'une
responsabilité économique des professionnels de santé
à côté de celles des assurés sociaux et des
financeurs et qu'il ne souhaitait pas que les dispositions de la loi du
25 juillet 1994, prévoyant la compensation intégrale par
l'Etat des exonérations de charges qu'il institue, soient remises en
cause à l'occasion de la mise en oeuvre de la loi d'orientation et
d'incitation relative à la réduction du temps de travail.
M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers
généraux et l'assurance maladie,
a demandé à M.
Jean-Marie Spaeth des précisions sur la répartition de l'ONDAM.
Il s'est également interrogé sur l'ampleur des mesures de
restructuration au projet de loi de financement de la sécurité
sociale et il a observé qu'aucune de ses dispositions ne concernait
l'hôpital. Il a fait siens les propos de M. Jean-Marie Spaeth sur la
nécessité d'une compensation, par l'Etat, des exonérations
de charges liées à la mise en oeuvre de l'abaissement de la
durée légale du travail. Il a enfin interrogé le
président du conseil d'administration de la CNAMTS sur la prise en
compte des observations formulées l'an dernier par la Cour des Comptes
au sujet de l'activité du contrôle médical, sur la vente
des immeubles appartenant à la CNAMTS, ainsi que sur l'éventuelle
expérimentation de projets tels que ceux qui avaient été
présentés par la société AXA assurances ou des
groupements mutualistes.
En réponse,
M. Jean-Marie Spaeth
a indiqué qu'en
l'état, le projet de loi de financement de la sécurité
sociale ne remettait pas en cause l'application de la loi de 1994 sur la
compensation des exonérations de charges, mais qu'il conviendrait
d'être vigilant lors des débats en séance publique, un
amendement pouvant toujours être déposé. Il a
affirmé que, conformément aux dispositions de la convention
d'objectifs et de gestion, la CNAMTS serait consultée sur la
répartition de l'ONDAM et que cette dernière comptait jouer un
rôle actif, au sein du comité économique du
médicament, dont elle est désormais membre.
M. Jean-Marie Spaeth
a énuméré quelques
dispositions du projet de loi de financement de la sécurité
sociale qui allaient dans le sens d'une restructuration du système de
soins : l'institution d'un fonds pour la qualité des soins en
médecine de ville, les mesures concernant les réseaux de soins ou
les nouvelles perspectives ouvertes en matière de mode de
rémunération des professionnels de santé. A l'inverse, il
a souligné les insuffisances de la loi dans le domaine sanitaire et il a
souhaité que soient périodiquement votées des lois
d'orientation sanitaire définissant une véritable politique de
santé publique. Il a estimé que le niveau régional
était pertinent pour mettre en oeuvre une politique d'adaptation aux
besoins du tissu hospitalier, mais il a fait part de son impatience afin que
les procédures d'accréditation et de contractualisation
hospitalières prévues par les ordonnances soient rapidement mises
en place. Après avoir indiqué que la vente d'immeubles de la
CNAMTS était en cours, il a enfin évoqué les propositions
formulées par un assureur privé, la société AXA
assurances. Observant qu'aucun projet n'avait été
déposé devant la commission présidée par M. Raymond
Soubie et estimant qu'une intervention du législateur serait
nécessaire pour mettre en oeuvre un plan qui apparaissait contraire aux
dispositions du code de la sécurité sociale en vigueur, il a
affirmé que les assureurs avaient évolué : rejetant la
sélection des malades, ils ont compris que la maîtrise des
dépenses de santé reposait sur une maîtrise de l'offre et
ils proposent désormais la sélection des offreurs de soins. A cet
égard, il a fermement déclaré que, si la CNAMTS disposait
de la faculté de sélectionner les offreurs de soins, l'assurance
maladie coûterait moins cher à la collectivité. Ainsi, il a
estimé que la formation médicale ne devait pas être
organisée en fonction de besoins hospitaliers à court terme et
qu'elle devait répondre aux besoins de santé de la population ;
il a également regretté que les pouvoirs publics aient mis en
place des systèmes de préretraite pour les médecins qui
n'étaient sélectifs, ni en fonction de critères
géographiques, ni en fonction des spécialités
médicales, et que le numerus clausus soit relevé. Il a aussi fait
part du souhait de la CNAMTS de disposer d'une carte des besoins
médicaux en médecine de ville.
M. Jean-Paul Phélippeau
a indiqué qu'à la suite du
constat fait par la Cour des Comptes sur l'activité du contrôle
médical, de nouvelles orientations avaient été
officialisées au mois de juin 1998. Il a affirmé que cette
activité, largement centrée sur la délivrance d'avis
individuels, souvent prévus par la réglementation, et qui, dans
certains cas, étaient obsolètes ou peu efficaces, allait
diminuer. En contrepartie, les activités de santé publique et
d'évaluation, notamment en matière de pratiques collectives,
progresseront.
M. Dominique Leclerc
s'est prononcé en faveur d'une
réforme rapide de l'internat.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a demandé à M. Jean-Marie
Spaeth si le ministère de l'emploi et de la solidarité soutenait
sa proposition d'adoption périodique de lois d'orientation sanitaire, et
si le travail des observatoires régionaux de la santé ne pouvait
pas en constituer la base.
M. Gilbert Chabroux
a rappelé que la situation financière
de l'assurance maladie était en voie d'amélioration. Il a
interrogé le président du conseil d'administration de la CNAMTS
sur les méthodes de mise en oeuvre de la responsabilité
économique des professionnels de santé.
Mme Nicole Borvo
a affirmé que la définition d'une
politique de prévention, comme la mise en oeuvre d'une couverture
maladie universelle, appelaient l'attribution de moyens supplémentaires
et elle a souhaité que le fonctionnement de la CNAMTS comporte une
composante démocratique accrue, notamment grâce au rôle des
usagers.
Répondant aux intervenants,
M. Jean-Marie Spaeth
a affirmé
qu'à ce stade, la mise en oeuvre d'une véritable politique de
prévention n'était pas une question de moyens et qu'il convenait
avant tout de savoir comment utiliser l'argent disponible. Il a estimé
qu'il en était de même pour la politique d'accès aux soins,
dont le succès reposait sur une meilleure organisation du système
de soins, plutôt que sur l'attribution de moyens supplémentaires.
Evoquant d'éventuelles lois d'orientation sanitaire, il a rappelé
que la définition d'une politique de santé publique relevait du
législateur et non de l'assurance maladie. Il a fait siens les propos de
M. Dominique Leclerc sur la réforme de l'internat et il a
déclaré avoir du mal à accepter que le ministère de
l'éducation nationale, en fixant le numerus clausus, définisse
l'offre de soins de demain.