C. AUDITION DE M. BERNARD CARON, PRÉSIDENT DE L'AGENCE CENTRALE DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE (ACOSS)
Réunie le
mercredi 14 octobre 1998
, sous la
présidence de M. Louis Souvet, vice-président,
la
commission a procédé à
l'audition de M. Bernard Caron,
président de l'Agence centrale des organismes de sécurité
sociale (ACOSS)
et
M. Jean-Louis Buhl, directeur,
sur le
projet
de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999
.
M. Bernard Caron
, après avoir précisé qu'il
s'exprimait sur cette question à titre personnel, a souligné la
complexité des lois de financement de la sécurité sociale.
Il a rappelé que le champ des recettes par catégorie
n'était pas identique au champ des dépenses par branche. Il a
indiqué que la comparaison forcément ambiguë des objectifs
de recettes et de dépenses montrait un " excédent "
prévu en 1999 de 10,3 milliards de francs, après un
" déficit " de 8,3 milliards de francs en 1998.
Tout en reconnaissant que les prévisions macro-économiques pour
1998 s'étaient vérifiées, il a souligné la
fragilité des hypothèses retenues pour 1999, dépendant de
la conjoncture internationale.
M. Bernard Caron
a souhaité attirer l'attention sur
l'évolution des cotisations fictives, qui à la différence
des cotisations effectives, continuaient à progresser. Il a
considéré qu'elles représentaient en fait une subvention
importante de l'Etat aux régimes spéciaux.
M. Charles Descours, rapporteur
, s'est interrogé sur l'absence,
dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
1999, de dispositions relatives à la non-compensation intégrale
des exonérations de cotisations sociales accordées dans le cadre
de la loi d'orientation et d'incitation à la réduction du temps
de travail, sur la fixation par le projet de loi d'un plafond d'avances pour le
régime général de 24 milliards de francs, sur les
relations financières entre l'Etat et l'ACOSS et sur les
développements du rapport 1998 de la Cour des Comptes concernant
l'agence centrale.
M. Bernard Caron
a rappelé le principe de la compensation
intégrale des mesures d'exonération posé par la loi du 25
juillet 1994. Il a souligné combien le dispositif complexe
envisagé par l'exposé des motifs du projet de loi sur les
trente-cinq heures ne reposait sur aucune démonstration
mathématique.
M. Jean-Louis Buhl
a précisé qu'en l'absence de
disposition expresse dans le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999, le principe de la compensation
intégrale lui semblait maintenu.
S'agissant du plafond d'avances pour le régime général,
MM. Bernard Caron et Jean-Louis Buhl
ont indiqué que le
plafond de 24 milliards de francs prévu par le projet de loi
n'intégrait pas l'hypothèse d'une majoration de l'allocation de
rentrée scolaire
. M. Bernard Caron
a estimé que ce
plafond lui semblait insuffisant.
M. Jean-Louis Buhl
a expliqué
que le plafond prévu par le projet de loi était supérieur
au plafond prévu par la loi de financement pour 1998, malgré une
amélioration des comptes du régime général, en
raison d'une variation de trésorerie en 1999 fondamentalement
différente de celle de 1998, ce qui s'explique par la reprise de dette
intervenue le 1er janvier 1998.
Concernant les relations financières entre l'Etat et l'ACOSS,
M. Bernard Caron
a estimé que si l'assiette de la masse
salariale du secteur privé était soumise à un strict
contrôle, l'Etat employeur ne s'acquittait pas convenablement de ses
obligations, alors même que les unions régionales pour le
recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations
familiales (URSSAF) n'avaient pas les moyens d'agir. Il a rappelé le
problème posé par les primes des fonctionnaires et par les
différents avantages en nature des employeurs du secteur public, qui
échappent aux cotisations sociales.
M. Jean-Louis Buhl
a précisé que les URSSAF souhaitaient
une amélioration de la qualité des documents transmis par les
employeurs publics.
S'agissant des compensations d'exonération et des versements
effectués par les régimes de sécurité sociale pour
le compte de l'Etat, il a rappelé que la convention annuelle conclue
entre l'Etat et l'ACOSS en 1994 tendant à la neutralité en
trésorerie de ces opérations avait représenté un
grand progrès. Il a précisé que si certaines
opérations échappaient encore à la convention, l'un des
engagements de l'Etat dans la convention d'objectifs et de gestion de 1998-2001
concernait précisément une extension du champ d'action de la
convention de trésorerie. Il a estimé qu'en raison d'erreurs de
prévision, certaines mesures d'exonération étaient
sous-estimées en loi de finances.
Concernant le rapport 1998 de la Cour des Comptes,
M. Jean-Louis Buhl
a
observé que les critiques adressées à l'ACOSS
étaient relatives à l'année 1997, avant la mise en place
au 1er janvier 1998 du projet RACINE, qui permet de ventiler à la source
et par branche les encaissements comptables.
M. Charles Descours, rapporteur,
a demandé à M. Bernard
Caron de préciser les orientations du Conseil national du patronat
français (CNPF) concernant sa participation à la gestion des
organismes de Sécurité sociale.
M. Bernard Caron
, après avoir rappelé qu'il s'exprimait
à titre personnel, a estimé que la position des employeurs en
tant que co-gestionnaires était délicate, alors même que
les pouvoirs publics fixaient les différents paramètres. Il a
observé que la question d'une participation des employeurs ne se posait
pas dans les mêmes termes selon les branches. Il a indiqué ainsi
que la branche famille ne lui paraissait plus relever de la compétence
du CNPF.
A
M. Guy Fischer
, l'interrogeant sur les raisons de l'avis
négatif de l'ACOSS sur le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999,
M. Bernard Caron
a
répondu que la délégation patronale avait tout d'abord
souhaité attirer l'attention sur les difficultés de
compréhension des lois de financement, sur l'affectation contestable des
excédents de la contribution sociale de solidarité sur les
sociétés au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et sur
les conditions de mise en place d'un fonds de réserve ne
répondant pas aux enjeux de financement de la branche vieillesse dans
les années à venir.
M. Jean-Louis Buhl
a souligné
deux autres aspects : l'un relatif à la fragilité des
prévisions macro-économiques, l'autre à l'absence de
compensation des mesures d'exonération concernant l'embauche du premier
salarié, dont les conditions sont modifiées par le projet de loi.
A
M. André Jourdain
, l'interrogeant sur la réforme des
cotisations patronales,
M. Bernard Caron
a répondu qu'il ne lui
paraissait pas envisageable d'entamer une réforme de l'assiette des
cotisations patronales, de même qu'une surcotisation des salaires les
plus élevés, tant qu'une réflexion n'était pas
menée sur la manière d'optimiser l'utilisation des
prélèvements très lourds affectant l'économie
française. Citant le taux de prélèvements obligatoires, en
France, en 1998,
M. Bernard Caron
a estimé que l'objectif
essentiel était de maintenir la compétitivité de
l'économie.
M. Jean-Louis Buhl
a précisé qu'il lui apparaissait
nécessaire de ne pas augmenter la complexité des mesures
législatives et réglementaires en vigueur, qui affectait à
la fois les cotisants et les organismes gestionnaires.