B. TOUT EN AFFIRMANT L'UNICITÉ DE LA MAGISTRATURE À TRAVERS L'INSTITUTION D'UNE FORMATION PLÉNIÈRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE, LA COMMISSION JUGE NÉCESSAIRE DE MAINTENIR EN SON SEIN DEUX FORMATIONS SPÉCIALISÉES RESPECTIVEMENT COMPÉTENTES À L'ÉGARD DES MAGISTRATS DU SIÈGE ET DU PARQUET
Si le
principe de l'unité de la magistrature doit être
réaffirmé pour bien marquer l'égale dignité des
fonctions de magistrat du siège et du parquet, il ne doit pas pour
autant entraîner de confusion entre ces fonctions.
Les métiers exercés par ces deux catégories de magistrats
sont profondément différents : les uns jugent tandis que les
autres poursuivent et requièrent au nom de la société.
Même si la réforme engagée tend à rapprocher le
rôle du Conseil supérieur de la magistrature à leur
égard, leurs statuts resteront en tout état de cause
marqués par des différences substantielles, puisque le
ministère public continuera de se distinguer par l'absence
d'inamovibilité rendant possibles les mutations dans
l'intérêt du service et par l'organisation hiérarchique
sous l'autorité du garde des Sceaux, des disparités subsistant
également dans les modes de nominations.
Or, faute d'être marquée symboliquement au plus haut niveau de la
hiérarchie des normes, cette profonde différence de nature des
fonctions exercées qui distingue le siège du parquet tendrait
à s'estomper pour faire place à une regrettable confusion, au
risque de mettre en cause le principe fondamental qui est celui de
l'indépendance du juge par rapport au ministère public.
C'est pourquoi votre commission estime nécessaire de maintenir au sein
du Conseil supérieur de la magistrature deux formations distinctes
exerçant séparément les compétences relatives
à la carrière et à la discipline, d'une part, des
magistrats du siège et, d'autre part, des magistrats du parquet.
De plus, seules deux formations distinctes permettent d'assurer une
représentation des magistrats adaptée à la nature des
fonctions concernées comme actuellement, et en même temps
d'éviter que la représentation du parquet se trouve excessivement
réduite.
Aussi, s'inscrivant dans la continuité des positions prises par le
Sénat en 1993, votre commission des Lois vous propose-t-elle, tout en
consacrant l'unité du corps des magistrats et du Conseil
supérieur de la magistrature par l'institution d'une formation
plénière à laquelle serait conférée la
compétence d'émettre des avis à la demande du
Président de la République, de maintenir en son sein deux
formations distinctes respectivement compétentes à l'égard
des magistrats du siège et des magistrats du parquet, dont la
composition serait adaptée à la spécificité des
questions traitées.
Selon l'amendement adopté par votre commission des Lois, le Conseil
supérieur de la magistrature comprendrait en formation
plénière, outre le Président de la République et le
Garde des Sceaux, dix magistrats élus (dont cinq magistrats du
siège et cinq magistrats du parquet), un conseiller d'Etat et dix
personnalités extérieures à la magistrature, comme dans le
projet de loi constitutionnelle (soit 23 membres au total).
Afin de respecter le même équilibre entre magistrats et non
magistrats à l'intérieur des formations
spécialisées, celles-ci seraient composées, outre le
Président de la République et le Garde des Sceaux, de six
magistrats (dont cinq représentants de la fonction concernée et
un de l'autre, comme actuellement), du conseiller d'Etat et de six des dix
personnalités extérieures (soit 15 membres au total).
Cette composition permettrait d'avoir dans chaque formation une majorité
de non-magistrats, tout en évitant d'accroître excessivement le
nombre des membres de manière à conserver des structures de
travail opérationnelles.