3. Une augmentation massive de l'imposition des sociétés
Les tableaux ci-après démontrent que, dans un contexte de stabilisation de la part prise par les prélèvements fiscaux dans le PIB, d'importantes modifications de la structure des prélèvements sont intervenues en 1997.
Les recettes en 1997
(en points de PIB)
|
Loi de finances initiale |
Projet de loi de finances rectificative |
Ecart |
Impôt sur le revenu |
3,6 |
3,58 |
- 0,02 |
Autres impôts directs sur rôle |
0,5 |
0,6 |
+ 0,1 |
Impôt sur les sociétés net |
1,79 |
2,14 |
+ 0,44 |
Autres impôts directs |
1,05 |
1 |
- 0,05 |
TIPP |
1,87 |
1,86 |
- 0,01 |
TVA nette |
7,84 |
7,65 |
- 0,19 |
Recettes fiscales brutes |
16,65 |
16,83 |
+ 0,18 |
Remboursements et dégrèvements |
3,08 |
3,3 |
+ 0,22 |
dont : |
|
|
|
. TVA |
1,5 |
1,64 |
+ 0,14 |
. IS |
0,33 |
0,37 |
+ 0,04 |
. Autres |
1,25 |
1,29 |
+ 0,04 |
Recettes fiscales nettes |
13,57 |
13,53 |
- 0,04 |
Recettes non fiscales |
1,9 |
1,93 |
+ 0,03 |
Prélèvements sur recettes de l'Etat |
3,13 |
3,12 |
- 0,01 |
Ressources nettes du budget général |
12,34 |
12,34 |
0 |
La déformation de la structure des recettes fiscales nettes en 1997
(en % du total des recettes fiscales nettes)
|
Loi de finances initiale |
Projet de loi de finances rectificative |
Ecart |
Impôt sur le revenu |
20,9 |
20,6 |
- 0,3 |
Autres impôts directs sur rôle |
3,1 |
3,3 |
+ 0,2 |
Impôt sur les sociétés net |
10,4 |
12,3 |
+ 1,9 |
Autres impôts directs |
6,1 |
5,8 |
- 0,3 |
TIPP |
10,9 |
10,7 |
- 0,2 |
TVA nette |
45,5 |
44,2 |
- 1,3 |
Divers |
3,1 |
3,1 |
0 |
TOTAL |
100 |
100 |
0 |
En 1997, tous les produits fiscaux nets augmenteraient moins
vite que le PIB à l'exception de l'impôt sur les
sociétés, si bien que le prélèvement sur les
sociétés s'accroîtrait de 0,44 point de PIB.
En conséquence, le produit de l'impôt sur les
sociétés qui devait représenter 10,4 % des recettes
fiscales en loi de finances initiale s'élèverait de près
de 2 points et représenterait 12,3 % de recettes fiscales
nettes.
Ce phénomène est évidemment le produit de la loi
portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier qui a
alourdi pour 1997 de 24 milliards de francs l'imposition directe sur les
bénéfices des entreprises.
Il existe certainement des incertitudes sur le rendement de ces
prélèvements qui sont renforcées du fait du niveau
très important du taux d'impôt sur les sociétés qui
en résulte. Il est clair qu'au niveau qui est désormais celui du
taux de l'impôt sur les sociétés dans notre pays, les
phénomènes d'optimisation fiscale vont aller s'accentuant. C'est
le prix que nous paierons pour nous être engagés dans la voie de
la divergence fiscale, alors que les entreprises se mondialisent.
Une observation complémentaire s'impose à ce stade. Le
gouvernement a souhaité exclure du rehaussement de l'impôt sur les
sociétés des petites et moyennes entreprises. Le critère
posé en la circonstance, un chiffre d'affaires au moins égal
à 50 millions de francs, était d'ailleurs contestable.
En réalité, à côté de ce critère
légal risque fort d'intervenir un critère de fait, les grands
groupes internationalisés pouvant arbitrer leurs implantations, ce qui
ne sera pas le cas des entreprises moyennes sans assise internationale.
Il sera, de ce point de vue, intéressant d'observer l'évolution
des investissements transnationaux au cours des prochains mois en les
corrigeant des éléments exceptionnels. Les résultats du
mois d'août 1997 enregistrent seulement 465 millions de francs
d'investissements directs étrangers en France contre 7 milliards
d'entrées en août 1996.
Mais, au-delà du risque d'un certain tarissement de l'assiette taxable,
il faut répéter combien l'augmentation du
prélèvement sur les sociétés était
inopportune.
Il faut d'abord souligner qu'elle n'était pas
nécessaire : l'inflexion des dépenses publiques aurait
constitué un choix nettement plus recommandable et crédible
compte tenu des montants en cause.
Mais, au-delà, le relèvement de l'impôt sur les
sociétés a toutes chances de nuire aux ménages et de
retarder la reprise de l'investissement.
Nuire aux ménages
, si les entreprises devaient
privilégier un objectif de profit net inchangé, car elles
auraient alors tendance à entreprendre des gains de productivité
en économisant sur la main-d'oeuvre, ce qui aurait des effets
défavorables sur l'emploi et les salaires. En outre, on doit rappeler
qu'alors que les revenus de la propriété occupent une place
toujours plus grande dans la formation du revenu des agents, l'effet de
dissuasion envers la distribution de dividendes pourrait se traduire par une
baisse relative de la richesse des agents et, en particulier, des
ménages.
Retarder l'investissement des entreprises
, qui est pourtant au coeur de
la prévision de croissance pour 1998, car l'impôt sur les
sociétés est bien un impôt sur le capital qui
dégrade la profitabilité de l'investissement. Il n'est indolore,
relativement, qu'à la condition que les entreprises soient en mesure de
s'endetter pour investir. Les charges d'endettement se déduisent en
effet du bénéfice des entreprises et diminuent donc leur
bénéfice fiscal, réduisant la charge de l'impôt pour
les entreprises. Mais, il se trouve précisément que les
entreprises jugent leur endettement trop élevé, et ce
malgré la baisse du coût du crédit qui, favorable à
la croissance, n'est cependant pas encore suffisante pour que les entreprises
soient garanties contre un effet de boule de neige de leur dette. Dans ces
conditions, la hausse de l'impôt sur les sociétés
apparaît inappropriée d'autant qu'elle réduit
l'attractivité des entreprises françaises pour l'épargne
susceptible de venir abonder leurs fonds propres
7(
*
)
.
Les développements qui précèdent ne sont pas seulement
théoriques
. L'ampleur du prélèvement
supplémentaire sur les entreprises a d'ailleurs conduit les responsables
de la Direction de la prévision à réviser à la
baisse leurs estimations d'investissement en 1998 à hauteur de
0,5 point.