CHAPITRE IV
LE LOGEMENT LOCATIF :
UNE OPTION FORTE EN FAVEUR DU
LOGEMENT SOCIAL
Le présent projet de budget témoigne d'une
option forte du nouveau gouvernement en faveur du logement locatif social.
C'est un choix qui peut être discuté. Votre rapporteur estime pour
sa part que le logementsocial doit être convenablement soutenu. Il admet
la qualité des mesures prises : la réduction du taux de TVA
sur la construction comme la réhabilitation est une voie d'avenir ; et
il est incontestable que les crédits ne manqueront pas à la
réalisation de programmes physiques relativement ambitieux.
Votre rapporteur tient également à saluer l'action
discrète et efficace menée par l'agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat (ANAH) pour lutter contre la vacance et
l'exclusion dans le parc locatif privé. Elle dispose à ce titre
de moyens accrus dans le présent projet de loi de finances.
I. LA RÉFORME DU FINANCEMENT DU LOGEMENT SOCIAL
A. UN PREMIER BILAN DE LA RÉFORME DU FINANCEMENT DE LA CONSTRUCTION
La loi de finances pour 1997 a réduit le taux de la TVA
sur la construction sociale à 5,5 %, en utilisant la procédure de
la livraison à soi-même (LASM). Votre commission avait
accepté ce dispositif. Elle s'était montrée toutefois
vigilante à ce que ce nouveau système, qui était assorti
d'une réduction à due concurrence des subventions PLA, ne se
traduise pas par un déséquilibre des opérations.
Il est encore un peu tôt pour tirer un véritable bilan de cette
mesure. La direction de la construction et de l'habitation a néanmoins
déjà fait la synthèse de quelques enseignements
tirés de l'observation d'un échantillon.
Depuis la réforme du PLA intervenue le 1er octobre 1996, l'ancienne
subvention qui était de 12 % a été remplacée en
construction neuve par une aide fiscale consistant dans l'application du taux
réduit de TVA (5,5 %) à tous les travaux et prestations qui
étaient auparavant soumis au taux normal de TVA (20,6 %).
23.701 agréments fiscaux de PLA ont été accordés au
quatrième trimestre 1996, 45.000 agréments sont prévus
pour 1997.
L'importance de la nouvelle aide à la pierre dépend de la part du
prix de revient qui bénéficie de la réduction du taux de
TVA (le foncier étant déjà soumis auparavant à une
TVA réduite de 5,5 %).
Le tableau ci-dessous retrace pour la construction neuve le montant de l'aide
fiscale directe relativement au prix de revient total en fin de travaux
(calculé au taux de TVA normal), étant précisé
qu'il s'agit des résultats d'une simulation portant sur un
échantillon de 620 opérations réalisées sous
l'ancien régime du prix de référence :
Toutefois, à l'aide fiscale directe s'ajoute le
bénéfice du remboursement de la TVA à 20,6 % au fur et
à mesure de l'avancement des travaux, d'où il résulte une
aide en trésorerie
qui se prolonge jusqu'au moment du paiement de la
TVA à taux réduit, un an après l'achèvement des
logements et leur mise en location ; cette aide en trésorerie a
été évaluée à environ 0,7 % du prix de
revient total en zone 2 et 3 (0,6 % en zone 1).
Le taux de la nouvelle aide fiscale ressort donc à environ 11,4 % au
plan national.
Le taux d'aide à la pierre obtenu sous le régime du prix de
référence était le suivant, quasiment invariable d'une
année sur l'autre compte tenu du fait que l'actualisation du prix de
référence lui permettait de suivre l'évolution du prix de
revient :
Le montant de la nouvelle aide à la pierre ne s'écarte donc pas
de ce qu'il était sous le régime du prix de
référence en vigueur jusqu'en 1996, soit 11,4 % (hors
bénéfice des subventions pour surcharge foncière).
Sur la base d'un prix de revient prévisionnel de 470.000 francs
(chiffre estimé au taux de TVA de 20,6 % pour la construction neuve PLA
sur l'ensemble des 3 zones en collectif et individuel réunis) l'aide
à la pierre consistait en effet :
- jusqu'au 30 septembre 1996, en une subvention s'élevant à
54.520 francs (non révisable, ce qui fait revenir le taux d'aide de
11,6 % à 11,4 % sous l'effet des révisions de prix) ;
- à partir du 1er octobre 1996, en une aide fiscale s'élevant
à 50.290 francs augmentée d'un avantage d'environ
4.000 francs, consistant dans la trésorerie résultant du
remboursement de la TVA, soit environ 70.000 francs (15 % du prix de
revient), disponible pendant environ un an et demi.
B. LA RÉFORME DU FINANCEMENT DE LA RÉHABILITATION
Exploitant la veine ouverte l'an dernier, le nouveau
gouvernement a étendu la réduction du taux de TVA à la
livraison à soi-même des travaux de réhabilitation des
logements sociaux.
Les travaux pouvant bénéficier du taux réduit sont de
trois sortes :
- les travaux donnant droit à la PALULOS. Ce sont des travaux de mise
aux normes d'habitation ou d'amélioration ;
- les travaux d'amélioration, d'aménagement ou de transformation
en logement financés par un PLA acquisition-amélioration. Ce sont
les travaux les plus lourds : transformation de bureaux en logements,
reconstruction, agrandissement. Pour ces travaux, la frontière entre
construction neuve et acquisition-amélioration sera quelquefois
difficile à établir ;
- les travaux d'amélioration, de transformation ou d'aménagement
financés sur fonds propres. En ce cas, les travaux de grosses
réparations (qui ont lieu tous les 3 ou 4 ans) et de gros entretien
(travaux infra-annuels) sont concernés également.
Le champ d'application concernant les travaux est donc très large. Seuls
sont exclus le petit entretien et la maintenance, en général
financés par répercussion sur les loyers. La définition
précise de ces travaux fera l'objet d'une instruction fiscale. Celle-ci
devrait prévoir une conception souple et pragmatique des travaux
éligibles. En particulier, tous les travaux d'une grosse
opération seront pris en compte : le bailleur ne sera pas tenu de
distinguer ce qui, dans une transformation de local en logement aurait dû
relever du petit entretien.
Le bénéfice de la TVA à 5,5 % est subordonné
à
l'autorisation du préfet.
Par conséquent, contrairement à la réduction du taux
de TVA pour la construction, qui simplifie globalement la procédure en
supprimant dans de nombreux cas la nécessité d'obtenir une
subvention, la TVA à taux réduit sur la réhabilitation va
la compliquer quelque peu. En effet, les travaux effectués sur fonds
propres ne donnaient jusqu'à maintenant jamais lieu à
autorisation administrative : il faudra désormais y recourir.
Une fois l'autorisation obtenue,
l'opération fiscale se
déroule en deux temps :
- dans un premier temps, le bailleur acquitte la TVA à 20,6 % sur les
travaux qu'il fait effectuer. Rien ne change pour les entreprises et artisans
qui facturent ces travaux et la TVA y afférente ;
- dans un second temps, le bailleur demande le remboursement sur un ensemble
de travaux de la différence entre la TVA acquittée en amont et la
somme résultant de l'application du taux réduit sur ces travaux.
L'assiette de la TVA
sera constituée du prix de revient total
des travaux, à savoir les éléments de coût qui
auront subi la TVA en amont. Dans les opérations
d'acquisition-amélioration, seuls les coûts d'amélioration
seront pris en compte. Ceux d'acquisition, qui concernent des immeubles
anciens, n'ont pas subi la TVA mais les droits de mutation à titre
onéreux.
Les rémanences de TVA affectant les constructeurs sociaux dans leurs
travaux de réhabilitation sont supprimées. La dépense
fiscale correspondante est évaluée à 2,2 milliards de
francs pour 1998. Elle se décompose en deux éléments :
une augmentation de la TVA perçue en 1998 de 0,3 milliard de
francs, liée à l'accélération anticipée des
travaux des bailleurs acquittant la TVA à 20,6 % ;
une augmentation des remboursements de TVA (correspondant à la
différence entre 20,6 % et la LASM à 5,5 %) de 2,5 milliards de
francs.
En régime de croisière, le service de la législation
fiscale évalue l'avantage total à 1,3 milliard de francs en
année pleine. Compte tenu notamment de la réduction du taux de la
prime PALULOS de 20 % à 10 %, et de la réduction de 7 points du
taux de subvention aux prêts locatifs aidés finançant des
opérations d'acquisition-amélioration, l'avantage fiscal se
concentre sur les travaux financés sur fonds propres. Sur une
dépense fiscale totale de 2,8 milliards de francs en régime de
croisière, 1,5 milliard de francs seraient neutralisés par la
réduction des subventions.
Le tableau suivant récapitule les modalités de financement de
l'investissement des bailleurs sociaux en tenant compte des modifications des
taux de subventions.
Le nouveau financement du logement social
Type d'opération |
Ancienne subvention |
Nouvelles modalités |
Construction (1997)
|
12 % de l'opération
|
TVA à 5,5 % sur
LASM
|
PLA-TS |
20 à 25 % de
l'opération
|
TVA à 5,5 % sur LASM
|
Réhabilitation (1998)
|
12 % de l'opération |
TVA à 5,5 % sur LASM
|
PALULOS |
20 % de l'opération |
TVA à 5,5 % sur LASM
|
PLA-TS
|
20 % à 25 % |
TVA à 5,5 % sur LASM
|
Autres travaux |
néant |
TVA à 5,5 % sur LASM |
Le gouvernement a par ailleurs annoncé un programme de
10.000 PLA-TS bénéficiant de la TVA à 5,5 % mais avec
une subvention maintenue à 20 %, afin de rendre plus attractifs ces
logements boudés par les collectivités locales. Il a
également annoncé un programme de 5.000 PLA
reconstruction-démolition qui, tout en bénéficiant du
système de TVA à taux réduit entré en vigueur
depuis octobre 1996, pourront être également subventionnés
à hauteur de 50.000 francs.
Votre rapporteur spécial approuve la réforme ainsi
réalisée
.
Il souhaite toutefois faire deux remarques :
- la réforme du financement et les crédits budgétaires
dégagés rendent possible la réalisation des programmes
physiques ; à savoir 80.000 PLA et 120.000 PALULOS. Il ne serait
pas admissible qu'ils ne soient pas réalisés compte tenu des
moyens mis à disposition ;
-
la commission européenne vient de proposer, à l'occasion du
sommet sur l'emploi des 20 et 21 novembre, une extension à titre
expérimental du taux réduit à l'ensemble des travaux
effectués sur les logements existants, à l'exclusion de la
construction neuve. Votre rapporteur considère que cette proposition
doit être examinée avec la plus grande attention. Ses effets sur
l'économie, sur l'emploi, et le rééquilibrage qu'elle
provoquerait dans notre politique du logement entre le neuf et l'ancien,
seraient hautement bénéfiques.
Les ventes de logement HLM
Depuis la mise en oeuvre de cette politique par la loi
relative à l'habitat de 1994, votre rapporteur suit de près les
résultats des ventes de logements HLM à leurs occupants.
L'année 1996 a été particulièrement faste, avec
6.443 ventes dénombrées, malgré l'absence de
données pour 4 départements. Le bon résultat, qui donne
raison à l'ancien ministre Hervé de Charette, est essentiellement
dû aux bons résultats des Alpes-Maritimes (1.245 logements
vendus).
Évolution des ventes
(nombre de logements)
1993
4.305
1994
4.527
1995
4.632
1996
6.443
Les cinq départements les plus actifs en 1996
Alpes-Maritimes
1.245
Ariège
613
Hauts de Seine
531
Nord
356
Meurthe et Moselle
344
Le chiffre des ventes inclut celles du parc conventionné des
sociétés d'économie mixte.
Sur ces 6.443 logements vendus, 2.804 sont des logements individuels, et 3.369
des logements collectifs.
La plus grosse partie des recettes dégagées par ces ventes est
affectée à la réhabilitation des ensembles immobiliers.