EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Prolongation de
l'expérimentation de l'encadrement des loyers
et réouverture
du délai de candidature dans les collectivités d'outre-mer
Cet article vise à prolonger l'expérimentation de l'encadrement des loyers jusqu'au 25 novembre 2027 et à donner la possibilité aux collectivités d'outre-mer de demander sa mise en place jusqu'au 25 novembre 2026.
La commission a adopté un amendement de réécriture de l'article visant à rendre plus opérationnel le dispositif tout en le limitant expressément aux collectivités ultramarines.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Expérimentation arrivant à échéance en 2026, l'encadrement des loyers a exclu, de facto, les territoires ultramarins
A. L'encadrement des loyers a été introduit dès la loi Alur de 2014 puis transformé en expérimentation par la loi Élan de 2018
La loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « Alur »1(*) a instauré un dispositif d'encadrement des loyers des logements du parc privé applicable dans les zones tendues2(*).
Cet encadrement fonctionnait de la manière suivante : dans ces zones, le préfet fixait chaque année un loyer de référence ainsi qu'un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, par catégorie de logement et par zone géographique, en référence à des données produites par les observatoires locaux des loyers agréés. Bien que la fixation du loyer fût libre dans la limite du loyer de référence majoré, les bailleurs avaient la possibilité de fixer un complément de loyer lorsque cela est justifié par les caractéristiques du logement.
Le Gouvernement a rapidement décidé de limiter l'encadrement des loyers aux communes éligibles qui le souhaitaient. Seules deux communes, Paris et Lille, se sont portées volontaires pour appliquer le dispositif. Néanmoins, les arrêtés d'application dans ces deux communes ont été annulés par les tribunaux administratifs3(*) au motif que l'encadrement ne pouvait s'appliquer dans la seule commune demandeuse mais devait s'appliquer dans l'ensemble de l'agglomération.
Lors de l'examen de la loi dite « Élan » de 20184(*), il a donc été estimé que le recul sur le dispositif était insuffisant pour mesurer son impact et son efficacité. Le dispositif a donc été transformé en une expérimentation ouverte aux collectivités demandeuses éligibles. Cette expérimentation a initialement été prévue pour une durée de 5 ans, arrivant à échéance le 23 novembre 2023. Cette durée a été portée à 8 ans par la loi dite « 3DS » du 21 février 20225(*). Par conséquent, le délai de candidature des collectivités au dispositif, fixé au 24 novembre 2020, a été rouvert jusqu'au 24 novembre 2022.
La demande peut être formulée, dans les zones dites tendues6(*), par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière d'habitat. La réunion des quatre conditions suivantes est nécessaire afin de pouvoir mettre en oeuvre un encadrement des loyers :
1° un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social ;
2° un niveau de loyer médian élevé ;
3° un taux de logements commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années, faible ;
4° des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l'habitat et de faibles perspectives d'évolution de celles-ci.
B. Depuis sa transformation en expérimentation en 2018, l'encadrement des loyers n'a bénéficié qu'aux communes de l'Hexagone
Fin 2024, l'encadrement des loyers s'applique dans 48 communes situées dans 9 collectivités. Ces collectivités sont situées en zone tendue7(*), conformément à la liste prévue par le décret du 10 mai 2013.
Elles ont toutes formulé leur demande avant la date de clôture des candidatures, fixée au 24 novembre 2022 par la loi dite « 3DS ».
L'expérimentation ne s'appliquant pas nécessairement sur tout le territoire de l'EPCI, les territoires concernés par le dispositif sont les suivants :
- les communes de Lyon et de Villeurbanne8(*) ;
- les communes du territoire de l'établissement public territorial (EPT) Plaine Commune9(*) ;
- la ville de Paris10(*) ;
- la commune de Lille11(*) ;
- les communes du territoire de l'EPT Est Ensemble 12(*) ;
- la commune de Montpellier13(*) ;
- la commune de Bordeaux14(*) ;
- les communes de Ahetze, Anglet, Arbonne, Arcangues, Ascain, Bassussarry, Bayonne, Biarritz, Bidart, Biriatou, Boucau, Ciboure, Guéthary, Hendaye, Jatxou, Lahonce, Larressore, Mouguerre, Saint-Jean-de-Luz, Saint-Pierre-d'Irube, Urcuit, Urrugne, Ustaritz, Villefranque15(*) ;
- une partie du territoire de la commune de Grenoble et des communes de Saint-Egrève, Sassenage, Fontaine, Grenoble, Saint-Martin-D'Hères, Seyssinet-Pariset, Echirolles, Le Pont-de-Claix, ainsi que la totalité des communes du Fontanil-Cornillon, La Tronche, Meylan, Domène, Murianette, Venon, Gières, Seyssins, Eybens, Poisat, Bresson, Claix et Varces-Allières-et-Riset16(*).
La métropole d'Aix-Marseille a, par délibération du 24 novembre 2022, acté la candidature de la ville de Marseille17(*) à l'expérimentation de l'encadrement des loyers mais le dispositif n'y est pas encore applicable. Le décret fixant le périmètre où s'applique l'expérimentation n'ayant pas encore été pris, l'arrêté préfectoral fixant les loyers de référence n'a pas non été pris.
C. L'actualisation du zonage de tension locative défavorable aux ultramarins est intervenue après l'expiration du délai de candidature à l'expérimentation
La liste des communes situées en zones tendues fixée par le décret du 10 mai 2013 n'incluait aucune commune ultramarine.
Selon la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), leur exclusion de la liste des zones tendues s'explique par l'impossibilité d'alors de mesurer la tension des marchés immobiliers en outre-mer en utilisant une méthodologie harmonisée par rapport à celle de l'Hexagone.
La liste des communes tendues n'a été actualisée qu'en août 2023, à l'occasion d'une réflexion par ailleurs menée sur l'élargissement de la taxe sur les logements vacants et de la majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires aux communes touristiques confrontées à des déséquilibres sur le marché locatif.
Or à cette date, les candidatures au dispositif d'encadrement des loyers n'étaient plus possibles, et ce depuis fin novembre 2022.
Le décret du 25 août 202318(*) a donc d'une part, établi la liste des communs touristiques éligibles et d'autre part, actualisé la liste des communes tendues. La liste annexée au décret intègre 38 communes d'outre-mer aux zones tendues, dont 9 à La Réunion19(*).
Dès lors, depuis 2023, ces 38 communes remplissent ce critère d'éligibilité à la candidature à l'expérimentation de l'encadrement des loyers, alors même que la période de candidature a été clôturée fin 2022.
Malgré leur exclusion du dispositif, plusieurs collectivités ultramarines, à l'instar de La Réunion en 2013 et de la Guadeloupe en 2019 ont mis en place des observatoires locaux des loyers (OLL). Ces OLL sont le nécessaire préalable à la mise en oeuvre d'un dispositif d'encadrement des loyers : ils permettent d'objectiver la structuration du marché locatif et par conséquent, de déterminer les loyers de référence s'appliquant par catégories de logements et par secteurs géographiques.
À la Guadeloupe, l'OLL couvre aujourd'hui trois communes de Cap-Excellence. L'OLL de La Réunion est quant à lui copiloté par l'Adil et l'Agorah, agence d'urbanisme locale et couvre l'ensemble des 24 communes du département depuis 2017.
II. Le dispositif envisagé - Pour les collectivités d'outre-mer, une prolongation de l'expérimentation et de la possibilité d'y candidater
L'article 1er de la proposition de loi vise à rouvrir le délai de candidature des collectivités d'outre-mer au dispositif d'encadrement des loyers prévu par l'article 140 de la loi dite « Élan ». Les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution auraient donc jusqu'au 23 novembre 2026 pour formuler leur demande.
Il prolonge également d'un an l'expérimentation en cours - jusqu'au 23 novembre 2027.
III. La position de la commission - Un dispositif qui peut légitimement être expérimenté dans les collectivités d'outre-mer sous réserve de respecter certaines conditions
A. Un dispositif qui doit demeurer distinct de l'expérimentation en cours d'encadrement des loyers
Conformément à l'article 140 de la loi dite « Élan », le Gouvernement est supposé remettre au Parlement, d'ici mai 2026, un rapport d'évaluation de l'expérimentation actuelle d'encadrement des loyers qui prendra fin six mois plus tard. Dans cette optique, la ministre chargée du logement a d'ailleurs annoncé une mission d'inspection portant sur une telle évaluation.
Pour la commission, ce bilan est un préalable essentiel et nécessaire à toute évolution législative portant sur le dispositif. Elle est donc en défaveur de toute prolongation de l'expérimentation actuelle.
Néanmoins, le rapporteur souligne que compte tenu de leurs spécificités, les enseignements de ce rapport d'évaluation ne seront probablement pas transposables aux territoires ultramarins. Il n'est donc pas pertinent d'attendre la remise du rapport d'évaluation avant de permettre aux collectivités ultramarines de candidater à ce dispositif dont elles ont été privées en raison de la définition du zonage de tension locative.
La commission est donc favorable à la création d'une expérimentation ad hoc d'un dispositif d'encadrement des loyers pouvant être mis en oeuvre par les seules collectivités régies par l'article 73 de la Constitution.
B. La mise en oeuvre d'un encadrement des loyers doit se faire dans le cadre d'une démarche objectivée qui nécessite du temps et des moyens
La situation d'une commune en zone tendue, lui permettant de candidater à l'expérimentation, ne préjuge pas de la satisfaction des quatre critères de tension locative mentionnés à l'article 140 de la loi dite « Élan ». Ces critères doivent faire l'objet d'un examen approfondi par la collectivité candidate, notamment sur la base des données collectées par l'observatoire local des loyers qui sont également indispensables à la fois légalement et matériellement, pour fixer les loyers de références applicables dans le cadre de l'expérimentation.
Si La Réunion et l'intercommunalité de Cap-Excellence à la Guadeloupe disposent d'un OLL, ce n'est pas encore le cas de Mayotte, de la Guyane et de la Martinique. Sans les moyens favorisant la création et le fonctionnement de ces structures, la proposition de loi aura de fait une portée limitée.
Pour être opérationnelle, une expérimentation destinée aux collectivités ultramarines doit leur donner des délais suffisants pour constituer un dossier de candidature, l'examiner et préparer sa mise en oeuvre. Cette dernière étape nécessite notamment d'identifier le zonage pertinent mais aussi de communiquer sur le dispositif auprès des locataires afin qu'il soit effectif, ce qui nécessite plusieurs mois de travaux.
Dès lors, le délai offert aux collectivités ultramarines pour candidater à l'expérimentation - jusqu'en novembre 2026 - ne semble pas suffisant pour le rendre opérationnel. La commission est plutôt favorable à ce que les délais choisis soient les mêmes que ceux dont ont bénéficié les collectivités éligibles à la suite de l'adoption de la loi dite « Élan » de 2018, soit deux ans pour candidater et cinq ans pour la durée initiale de l'expérimentation.
C. L'encadrement des loyers n'est pas le seul outil pour lutter contre la crise du logement ni pour lutter contre la vie chère
Si l'encadrement des loyers peut favoriser l'accès des classes moyennes au marché locatif dans certaines zones marquées par de forts déséquilibres, la commission des affaires économiques est attentive à ce que le dispositif demeure expérimental et surtout facultatif. Elle estime qu'il ne doit pas être exclusif d'autres outils pour lutter contre la crise du logement, notamment de ceux encourageant à l'investissement et à la construction.
À titre liminaire, la commission souhaite rappeler que l'encadrement des loyers ne doit pas être considéré comme la solution à toutes les difficultés que rencontrent nos compatriotes ultramarins, au premier rang desquelles figure la vie chère. Elle rappelle à ce titre que les loyers ne sont pas le facteur principal de la vie chère dans les outre-mer : les données statistiques de l'Insee dans les outre-mer montrent que les écarts de prix les plus importants entre les collectivités de l'article 73 de la Constitution et l'Hexagone ne concernent pas les loyers, mais plutôt l'alimentation. En 2022, pour les produits alimentaires, l'écart de prix avec l'Hexagone atteignait 41,8 % à la Guadeloupe (écart le plus élevé) et 30,2 % à Mayotte (écart le plus faible). En ce qui concerne les loyers, l'écart avec l'Hexagone était moindre : il s'élevait à 9,7 % en Guyane (écart le plus élevé) et à 2,5 % à la Martinique (écart le plus faible)20(*).
Il n'en reste pas moins que les loyers représentent, encore davantage que dans l'Hexagone, compte tenu du niveau moins élevé des revenus, une part très significative du budget des ménages. Hors dépenses d'eau-énergie et taxes, les ménages locataires à loyer libre dépensaient ainsi en 2014, 619 euros mensuellement pour leur logement à la Martinique et 656 euros à la Guadeloupe contre 579 en France métropolitaine21(*).
La commission insiste sur la nécessité de soutenir la production de logements dans les outre-mer, notamment grâce à une adaptation normative de certains dispositifs permettant de prendre en compte leurs spécificités liées à l'insularité.
Dès lors, le rapporteur a proposé à la commission un amendement COM-1 de réécriture de l'article afin de :
- créer une expérimentation distincte d'encadrement des loyers applicable dans les territoires ultramarins et déconnectée de celle actuellement en vigueur et arrivant à échéance fin 2026 ;
- calquer la durée de l'expérimentation et les délais de candidature des collectivités sur ceux prévus lors de l'examen de la loi dite « Élan » de 2018, afin de donner une base objective à ces paramètres.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 2
Extension de la géographie prioritaire de la politique
de la ville
dans les collectivités d'outre-mer
Cet article vise à préciser que les critères utilisés pour la délimitation des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) dans les collectivités d'outre-mer ne sont pas restrictifs en termes d'accès.
La commission a supprimé l'article.
I. La situation actuelle - Depuis 2014, la politique de la ville s'appuie sur une géographie prioritaire spécifique dans les outre-mer, actualisée fin 2024
A. La délimitation des quartiers prioritaires de la politique de la ville fait l'objet d'une méthodologie spécifique dans les outre-mer
Jusqu'en 2014, la géographie prioritaire de la politique de la ville incluait différentes strates, définies par une pluralité d'indicateurs peu lisibles : coexistaient un zonage règlementaire, composé des zones urbaines sensibles (ZUS), elles-mêmes incluant des zones de redynamisation urbaines (ZRU) et des zones franches urbaines (ZFU) mais aussi un zonage contractuel composé de zones urbaines non-ZUS mais régies par un contrat urbain de cohésion sociale (CUCS). Dès 2012, la Cour des comptes22(*) déplorait cette géographie « trop dispersée et trop complexe » et appelait à une harmonisation du zonage.
La loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, dite loi « Lamy », a donc réformé la géographie prioritaire de la ville afin de simplifier le cadre d'intervention de la politique de la ville et de mieux cibler les financements.
À partir de 2014, les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) se sont substitués aux zones précédemment citées comme cadre unique d'intervention de la politique de la ville. Le contrat de ville est quant à lui devenu l'outil de référence des actions menées en faveur de ces QPV.
Ces QPV sont délimitées en fonction de critères fixés par décret, devant répondre aux caractéristiques prévues par l'article 5 de la loi de 2014 dite « loi Lamy ».
Dans l'Hexagone, ces critères de définition sont relatifs à un nombre minimal d'habitants (1 000 habitants au sein d'une unité urbaine d'au moins 10 000 habitants) et à un indicateur de développement économique et social apprécié par un critère de revenu des habitants (en l'occurrence, le revenu médian par unité de consommation)23(*).
Dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution ainsi qu'à Saint-Martin et à la Polynésie française, où s'applique la loi dite Lamy, les QPV peuvent être caractérisés par des « critères sociaux, démographiques, économiques ou relatifs à l'habitat, tenant compte des spécificités de chacun de ces territoires »24(*). Les mêmes données statistiques n'étant pas disponibles pour tous les territoires, une approche différenciée selon chaque collectivité a été retenue, reposant sur les données disponibles de l'Insee et de l'Institut de la statistique de la Polynésie française.
Pour La Réunion et la Martinique, le décret d'application de 2014 a prévu une adaptation de la méthode du « carroyage »25(*) utilisée dans l'Hexagone, fondée sur les revenus et la démographie : cette approche a conduit à une sensible réduction de la population concernée par la politique de la ville.
Pour les autres territoires, en l'absence de données carroyées suffisamment robustes, des méthodes ad hoc ont été privilégiées. À titre d'exemple, le seuil minimal de 1 000 habitants n'a pas été retenu et l'appréciation de la présence du quartier en zone urbaine y a été plus souple. En outre, le critère de revenu utilisé dans l'Hexagone a été remplacé par une mesure de l'écart de développement apprécié au moyen de paramètres qui concernent, par exemple, à Saint-Martin, le taux de chômage des jeunes, la proportion de non-diplômés et le nombre de logements insalubres ou surpeuplés. Ces méthodes ad hoc ont abouti à une extension de la population couverte par les QPV dans ces territoires, hormis à la Guadeloupe.
Sur le fondement de ces critères, 218 QPV ont été délimités en outre-mer26(*). Ils représentaient 14 % du total des QPV et 25 % de la population des départements et régions d'outre-mer concernés. À la suite de cette délimitation, 45 contrats de ville ont été signés en 2015 dans les départements et régions d'outre-mer, à Saint-Martin et en Polynésie française, représentant un peu plus de 10 % du total des contrats de ville en France.
B. La géographie prioritaire de la ville dans les outre-mer a été mise à jour récemment
À la suite d'une mission inter-inspections relative au zonage et à la gouvernance de la politique de la ville menée en 202327(*), les modalités de délimitation des QPV dans les outre-mer ont été récemment modifiées, afin d'harmoniser les critères utilisés dans les territoires ultramarins.
Ces critères ont été actualisés par un décret du 27 décembre 202428(*). Ils dessinent une nouvelle géographie prioritaire dans les outre-mer, entrée en vigueur le 1er janvier 2025.
Elle est désormais basée sur des critères moins restrictifs. Notamment, la méthode du carroyage pour localiser les noyaux durs de pauvreté n'a pas été retenue. Une maille plus large - celle des IRIS29(*), où les données sont les plus disponibles, et des villages pour Mayotte - a été privilégiée.
L'actualisation des critères a également harmonisé les méthodologies entre les différents territoires d'outre-mer. Les critères utilisés sont désormais identiques pour la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion. Les territoires de Mayotte, de Saint-Martin et de la Polynésie français font toujours l'objet de méthodes adaptées à leurs caractéristiques. À titre d'exemple, les variables définies à Mayotte mettent l'accent sur la thématique du logement.
Cette nouvelle géographie inclut désormais 247 QPV ultramarins, contre 218 précédemment. Y résident 709 063 habitants, soit une population en augmentation de près de 16 % par rapport à la précédente géographie prioritaire. Cette population représente 28,8 % de la population ultramarine, contre 25 % dans le précédent zonage de 2014.
II. Le dispositif envisagé - Une réforme des critères de délimitation des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les outre-mer
Selon l'exposé des motifs de la proposition de loi, le présent article vise à éviter que les critères définis par voie règlementaire pour délimiter les QPV dans les territoires ultramarins ne leur soient défavorables.
En effet, dans certains territoires comme La Réunion, la Guadeloupe et la Martinique, les critères choisis à la suite de la loi dite « Lamy » de 2014 ont restreint le nombre de QPV et la part de population ultramarine y résidant par rapport à la situation antérieure à la réforme de 2014.
Dès lors, l'article vise à préciser que les critères sociaux, démographiques, économiques ou relatifs à l'habitat utilisés pour caractériser les QPV dans les collectivités d'outre-mer ne sont pas « restrictifs en termes d'accès ».
Autrement dit, les auteurs de la proposition souhaitent préciser que l'application de ces critères spécifiques ne doit pas conduire à limiter l'accès d'un territoire ultramarin au zonage QPV, par rapport à l'application des critères prévus pour l'Hexagone.
II. La position de la commission - Une géographie prioritaire déjà révisée en 2025, qu'il convient d'aborder avec prudence
A. L'article est satisfait par la réforme de la géographie prioritaire de la politique de la ville de fin 2024
Au regard de la dernière actualisation de la géographie prioritaire survenue fin décembre 2024, la commission des affaires économiques estime que l'objectif poursuivi - accroître le nombre de QPV dans les territoires ultramarins et la population concernée - est satisfait.
Depuis le 1er janvier 2025, le nombre de QPV a progressé dans tous les territoires ultramarins concernés : la liste prévue par le décret du 27 décembre 2024 inclut 57 QPV à La Réunion, 42 à Mayotte, 29 en Guyane, 19 à la Guadeloupe, 9 à la Martinique, 3 à Saint-Martin et 88 en Polynésie française.
B. Toute modification de la géographie prioritaire de la ville nécessite un calibrage fin
La commission souligne que les critères de délimitation de QPV dans les outre-mer sont bien spécifiques à ces territoires et ne se superposent pas aux critères utilisés dans l'Hexagone : l'article 5 de la loi dite « Lamy » de 2014 n'induit pas, en lui-même, un accès plus restrictif des collectivités ultramarines à la politique de la ville.
La commission rappelle en outre que des amendements prévoyant un dispositif similaire à celui du présent article ont été proposés dans le cadre de l'examen des projets de loi de finances pour 2024 et 2025. Ils ont alors fait l'objet d'un avis défavorable du Gouvernement. Pour la dernière réforme de la géographie prioritaire, ce dernier n'a d'ailleurs pas eu besoin de modifier la loi dite « Lamy ».
Afin de cibler certains quartiers qui présentent des signes de fragilité sans pour autant avoir été reconnus QPV, le Gouvernement a en outre prévu une enveloppe dédiée, qui représente 2,5 % du montant des contrats de ville.
Enfin, les moyens affectés au titre du nouveau programme national de rénovation urbaine (NPNRU), visé dans l'exposé des motifs de la proposition de loi, ne découlent pas directement de la géographie prioritaire de la politique de la ville. L'évolution du zonage QPV est donc sans effet sur les éventuelles aides de l'Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru). En effet, la liste des 34 QPV bénéficiaires du NPNRU a été définie par le conseil d'administration de l'Anru puis approuvée par arrêtés ministériels en 2015 et 2018. L'enveloppe dédiée au NPNRU est en outre entièrement allouée.
Par conséquent, le rapporteur a proposé à la commission un amendement COM-2 de suppression de l'article.
La commission a supprimé l'article.
Article 3
Création de centres scientifiques et techniques du
bâtiment
dans les collectivités relevant de
l'article 73 de la Constitution
Cet article vise à créer des centres scientifiques et techniques du bâtiment dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution dont l'objet serait l'homologation et l'agrément des matériaux de construction développés ou utilisés dans les départements et régions d'outre-mer (Drom).
Il s'agit de mettre en oeuvre la possibilité de déroger, dans le domaine de la construction et pour les régions ultrapériphériques (RUP), au marquage CE en vigueur dans l'Union européenne (UE). En effet, le nouveau règlement sur les produits de construction, publié au journal officiel (JO) de l'UE en décembre 2024, ouvre cette possibilité, demandée de longue date par de nombreux acteurs, et notamment par le Sénat.
Si la commission soutient pleinement la nécessité de tirer le plein parti des normes européennes pour mieux les adapter aux réalités territoriales, et singulièrement ultramarines, elle considère également qu'il n'est pas opportun d'adopter précocement des mesures de portée législative sur un sujet faisant encore l'objet de nombreuses réflexions aussi bien au niveau des services de l'État que des acteurs de l'écosystème.
En effet, en matière de construction, il convient de maintenir un haut niveau de confiance de l'ensemble des acteurs, gage de l'assurabilité des édifices. Aussi, si la possibilité de mettre en oeuvre des dérogations au marquage CE constitue une possibilité nouvelle permettant de lever un verrou à l'adaptation normative et, in fine, à la baisse des coûts de construction, elle doit s'accompagner d'une réflexion plus globale sur l'adaptation des normes professionnelles. Elle doit également s'inscrire dans une dynamique générale d'adaptation des normes en outre-mer, dépassant le cadre de la construction.
Pour ces raisons, et à l'initiative commune du rapporteur et de l'auteure, la commission a adopté un amendement de suppression de l'article.
Aussi, la commission a supprimé l'article.
I. La situation actuelle - Un fort besoin d'adaptation normative en matière de construction outre-mer
A. Une crise du logement persistante dans les outre-mer
La crise du logement en outre-mer est un constat établi, partagé et documenté de longue date.
Déjà en 2017, Eric Doligé, Karine Claireaux et Vivette Lopez notaient, dans leur rapport sur les normes en matière de construction et d'équipements publics dans les outre-mer, fait au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, que « la population éligible au logement social représente près de 80 % des ménages en outre-mer contre 66 % dans l'Hexagone, alors même que la suroccupation des logements y est deux fois plus forte qu'en métropole. Elle [l'USHf] estime à 90 000 logements environ le déficit pour l'ensemble des outre-mer. En outre, sur les quelque 135 000 logements du parc locatif social en outre-mer, près de la moitié a plus de 20 ans et un tiers plus de 30 ans, ce qui imposera un effort majeur d'investissement pour leur réhabilitation et leur remise aux normes ».
Ce constat est toujours valable en 2025. Ainsi, l'USH n'estime plus le nombre déficit de logements pour l'ensemble des outre-mer à 90 000, mais à 110 000, le parc total de logements s'élevant en 2021, dans les Drom, à 1 022 435, incluant, au 1er janvier 2023, 180 620 logements sociaux30(*). Au 31 décembre 2023, la DGOM indique que le parc de logements sociaux s'élève à 181 79831(*), soit une augmentation modeste par rapport au début de cette même année, soulignant la problématique du rythme des constructions32(*).
La question du logement est particulièrement prégnante dans les territoires ultramarins, où les habitants doivent faire face à une pluralité de problématiques, économiques, sociales, climatiques, impactant fortement leur capacité à vivre dignement dans la République. Le taux de pauvreté demeure ainsi structurellement plus élevé qu'en Hexagone (15 %), allant de 16 % à La Réunion à 42 % à Mayotte, en passant par 21 % à la Martinique.
Dans son avis budgétaire relatif à la mission outre-mer du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, le rapporteur rappelle que la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dite loi Érom, prévoit, en son article 3, la construction de 150 000 logements sociaux en 10 ans, en tenant compte des besoins de réhabilitation. Or, entre 2017 et 2023, 3 793 logements ont été livrés en moyenne, et 1 932 réhabilités, attestant de l'échec du premier plan logement outre-mer (Plom 1) mais aussi de l'impact limité du Plom 2, qui s'est étalé de 2019 à 2023.
Le comité interministériel des outre-mer (Ciom) du 18 juillet 202333(*) a entendu apporter des réponses à la problématique du logement en outre-mer, notamment en appelant à une plus grande territorialisation des politiques, au plus proche des besoins exprimés par les territoires. Plus particulièrement, la mesure 10 du Ciom vise à mettre en place, pour les matériaux de construction, un marquage « RUP » en lieu et place du traditionnel et obligatoire marquage CE.
De même, le livre blanc de la construction durable outre-mer de septembre 202434(*), évoque, en son axe 2 « Soutenir l'innovation, en assurer l'évaluation dans une approche régionale », le lancement d'une « étude sur l'opérationnalité de la mesure d'exemptions du marquage CE ».
La question du logement est d'autant plus prégnante que les coûts de construction sont structurellement plus élevés dans les outre-mer et que ces derniers ont connu une forte augmentation récente. Dans un avis de 2018, l'Autorité de la concurrence indiquait que les prix des matériaux de construction sont plus élevés de 39 % à La Réunion et de 35 % à Mayotte par rapport à l'Hexagone35(*).
La situation s'est récemment amplifiée puisque selon les services du ministère chargé des outre-mer, les coûts de construction dans les Drom ont augmenté fortement récemment :
· + 19 % à Mayotte en 2020 ;
· + 12 % à la Guadeloupe et à La Réunion et + 15 % à la Martinique en 2022 ;
· + 17 % en Guyane et + 19 % à la Guadeloupe pour 202336(*).
C'est pourquoi des travaux d'objectivation et de quantification des surcoûts de construction dans les outre-mer sont actuellement menés par le ministère chargé des outre-mer et les directions de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Deal).
Il en va de même pour les coûts de réhabilitation des logements, enjeu pourtant central dans de nombreux territoires à la démographie déclinante. Dans sa réponse au questionnaire budgétaire pour 2025, le groupe Action Logement faisait état d'un coût de réhabilitation allant de 50 à 70 000 euros pour un logement outre-mer, contre 25 000 euros pour un logement hexagonal, hors réhabilitation thermique.
B. La forte contrainte des normes règlementaires et professionnelles en matière de construction
En matière de construction, il faut distinguer les normes découlant d'une obligation européenne, législative ou règlementaire, qui constituent des obligations juridiques, et les normes professionnelles, qui ne sont, en théorie, pas obligatoires, mais qui, en pratique, sont quasiment incontournables. Comme l'indique le rapport sur les normes en matière de construction précédemment mentionnée, « de fait, lorsque nous envisageons le système normatif applicable au secteur du BTP, il faut à la fois considérer les normes obligatoires d'ordre législatif et réglementaire émises par les pouvoirs publics et les normes conventionnelles qui ressortent soit de stipulations contractuelles, soit des règles de l'art et plus généralement de tous les référentiels professionnels ».
Premièrement, les constructeurs sont contraints par des normes dans les matériaux qu'ils sont en mesure d'utiliser. Jusque fin 2024, le règlement CE n° 305/2011 du 9 mars 2011 établissant des conditions harmonisées de commercialisation pour les produits de construction était en vigueur, remplacé par un nouveau règlement du 27 novembre 2024, publié au Journal officiel (JO) de l'UE le 18 décembre37(*), et d'application partielle depuis le 7 janvier 2025.
Contrairement à la précédente règlementation, la nouvelle prévoit, en son article 2.3, que « Les États membres peuvent exempter de l'application du présent règlement les produits couverts par le présent règlement qui sont mis sur le marché dans les régions ultrapériphériques de l'Union européenne au sens de l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Les États membres notifient à la Commission européenne et aux autres États membres les lois nationales, règlements et dispositions administratives prévoyant de telles dérogations. Ils veillent à ce que les produits exemptés ne portent pas le marquage CE conformément à l'article 17. Les produits mis sur le marché sur la base d'une telle exemption ne sont pas réputés être mis sur le marché dans l'UE au sens du présent règlement ».
Ainsi, le règlement ouvre la possibilité, sous quelques conditions, de ne pas appliquer le marquage CE pour les produits de construction mis sur le marché des « RUP » de l'UE. Il s'agit là d'un facteur de souplesse devant permettre à ces territoires de mieux s'approvisionner dans leur environnement régional, aboutissement de plusieurs années d'appel à adapter le droit aux situations diverses des « RUP ».
Deuxièmement, en complément des normes découlant de textes, essentiellement européens, des normes professionnelles sont édictées au niveau national. Le décret n° 2009-697 du 16 juin 2009 relatif à la normalisation38(*) définit, en son article 1er, la normalisation : « La normalisation est une activité d'intérêt général qui a pour objet de fournir des documents de référence élaborés de manière consensuelle par toutes les parties intéressées, portant sur des règles, des caractéristiques, des recommandations ou des exemples de bonnes pratiques, relatives à des produits, à des services, à des méthodes, à des processus ou à des organisations. Elle vise à encourager le développement économique, l'innovation et le développement durable. » L'article 17 du même décret précise que « les normes sont d'application volontaire », sauf exception.
En matière de construction, le référentiel le plus commun sont les documents techniques unifiés (DTU).
Si ces normes ne sont pas, sauf exception, obligatoires, le rapport précité de la délégation sénatoriale aux outre-mer sur les normes en matière de construction démontre qu'en réalité, elles s'imposent très largement aux constructeurs.
Le rapport résume ainsi la problématique : « Par l'intermédiaire de dispositions encadrant les marchés publics et privés de travaux d'une part, les contrats d'assurance construction, d'autre part, il est largement fait obligation aux entreprises de respecter les normes professionnelles ».
Finalement, normes obligatoires et normes professionnelles aboutissent souvent à contraindre fortement le constructeur : « l'imbrication très étroite des normes de mise en oeuvre et des normes de matériaux contribue à restreindre les marges de liberté du constructeur et à figer ses options : d'une part, le choix d'un produit impose le respect de ces bonnes conditions de mise en oeuvre, d'autre part, la référence à des marquages ou à des certifications obligatoires dans les normes de mise en oeuvre contraint inévitablement le choix des produits, en l'absence de système généralisé d'équivalence entre normes européennes et étrangères. »
Aussi, si la nouvelle législation européenne en matière de normes de matériaux permet de véritables assouplissements en matière d'importations de matériaux, elle ne résout pas la problématique de la nécessaire adaptation des normes professionnelles de mise en oeuvre, de manière à mieux prendre en compte la réalité des contextes ultramarins tout en assurant l'assurabilité des constructions.
En effet, la contrainte assurantielle pesant sur les constructeurs « rigidifie et uniformise le système normatif en neutralisant pour une bonne partie les libertés d'adaptation en fonction du contexte local qui pouvaient être laissées à l'appréciation des acteurs du BTP en dehors de la pure réglementation. Tous les professionnels dont vos rapporteurs ont recueilli l'avis, aussi bien en Martinique et en Guyane qu'à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon et en Nouvelle-Calédonie, ont confirmé spécifiquement pour l'outre-mer ce constat valable généralement. »
En France deux acteurs, sont, en matière d'édiction des normes, incontournables :
- l'association française de normalisation (Afnor), mentionnée à l'article 2 du décret du 16 juin 2009, ainsi que les bureaux de normalisation sectoriels qui en dépendent, qui sont agréés par le délégué interministériel aux normes, et qui élaborent les projets de normes (article 11). Pour la construction, il s'agit du bureau de normalisation des techniques et équipements de la construction du bâtiment (BNTEC) ;
- le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), qui apporte une expertise technique dans l'élaboration des normes, rend des avis techniques et exerce l'activité de certification.
Conséquence de la publication du rapport précité, il est à noter la création d'une commission locale de normalisation à La Réunion, antenne du BNTEC, avec pour but d'adapter les DTU aux réalités ultramarines. En audition, il a été indiqué au rapporteur que certains DTU ont d'ores déjà été adaptés aux réalités ultramarines. De telles modifications sont longues, de l'ordre de deux à trois ans, voire même davantage en fonction de la complexité de la problématique et du caractère innovant ou non des techniques proposées.
II. Le dispositif envisagé - La création de centres scientifiques et techniques du bâtiment dans les Drom
L'article 3 vise à insérer, au sein du CCH, un article L. 121-4-1, disposant que des « centres scientifiques et techniques du bâtiment sont créés dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution dans les deux ans suivant la promulgation » de la proposition de loi.
Selon les termes de l'article L. 121-4-1 ainsi proposé, la mission de ces établissements serait de « procéder à l'homologation et à l'agrément des matériaux de construction développés ou utilisés dans les territoires ultramarins en vue :
1° d'évaluer et certifier les performances techniques des matériaux au regard des contraintes climatiques et géographiques locales ;
2° d'établir des référentiels normatifs adaptés aux spécificités constructives ultramarines ;
3° de garantir la sécurité et la résilience des constructions dans ces territoires. »
L'article prévoit que le décret en CE mentionné à l'article L. 121-5 du même code fixe les modalités d'application de l'article. Cet article indique notamment que les règles entourant le centre scientifique et technique du bâtiment sont fixées par décret en CE.
III. La position de la commission - Poursuivre la réflexion autour de l'adaptation des normes aux outre-mer et particulièrement en matière de construction
Les auditions menées par le rapporteur ont permis de mettre en lumière la nécessité de poursuivre la réflexion pour déterminer le meilleur dispositif permettant de tirer le plein parti des possibilités permises par le nouveau règlement européen sur les produits de construction, dont la mise en oeuvre partielle date de janvier 2025. En outre, les administrations entendues ont indiqué que de diverses études étaient en cours. Dans sa réponse au questionnaire budgétaire 2024, la DGOM indique par exemple que « afin de faciliter l'apposition de marquages « RUP », la DHUP a fait réaliser des tableaux d'équivalence à la norme CE pour une liste de familles de matériaux de construction importés de pays de l'environnement régional des « RUP ». Toutefois cette étude a mis en avant l'absence d'équivalence de normes. Une deuxième étude, actuellement en cours, a été lancée par la DHUP et la DGOM afin d'affiner les critères qui permettront les choix de produits de construction à flécher vers une dérogation du marquage CE et sur les moyens que cela nécessite. »
De même, une étude, mentionnée supra, visant à analyser les surcoûts en matière de matériaux de construction est en cours.
Enfin, dans sa contribution écrite, la DHUP indique que plusieurs scénarios sont toujours à l'étude pour déterminer les meilleures modalités de mise en oeuvre du marquage « RUP ».
Il conviendrait donc de ne pas légiférer dans la précipitation, d'autant plus qu'en la matière, des dispositions d'adaptation peuvent être, le cas échéant, adoptées par voie règlementaire.
Aussi, suivant la recommandation du rapporteur, la commission a fait le choix de laisser ouverte la question du meilleur dispositif qui permettra de tirer parti des possibilités de dérogation au marquage CE, avec trois soucis majeurs.
Premièrement, le souci d'inclure les parties prenantes pertinentes pour mener à bien des travaux d'adaptation des normes, permettant d'établir des standards partagés et donc de maintenir dans la durée l'assurabilité des constructions. Si la question du marquage CE est importante, celle des normes professionnelles, l'est tout autant.
Deuxièmement, le souci d'intégrer la réflexion propre au secteur du bâtiment dans un champ plus large relatif à l'adaptation normative. En ce sens, il convient de souligner la proposition de résolution européenne du 20 janvier 2025 de Micheline Jacques, Christian Cambon, Stéphane Demilly et Georges Patient recommandant un paquet « RUP » au niveau européen pour lever les obstacles normatifs à l'insertion régionale de ces territoires, dans les secteurs de l'agroalimentaire, du traitement des déchets et de l'énergie.
Troisièmement, le souci d'efficacité des dispositifs mis en place et de maîtrise des dépenses. À ce titre, il est permis de s'interroger sur la viabilité de la mise en place de structures lourdes à l'échelle de chaque territoire ultramarin, alors même que des structures bien identifiées existent déjà ou que la mise en place de structures plus légères pourrait être imaginée, notamment en capitalisant sur l'existant. Si la commission ne se prononce pas, à ce stade, sur les modalités de mise en oeuvre des dérogations au marquage CE et plus généralement d'adaptation des normes, elle souligne la nécessité de tenir pleinement compte des contraintes économiques et financières fortes du moment.
La commission a ainsi adopté un amendement COM-3 de suppression du rapporteur et de l'auteure de la proposition de loi, permettant ainsi de poursuivre la réflexion autour de cet enjeu important pour les territoires ultramarins.
La commission a supprimé l'article.
Article
4
Gage
Cet article consiste en un « gage » destiné à compenser les éventuelles conséquences financières de la proposition de loi.
La commission a adopté l'article sans modification.
I. Le dispositif envisagé - Un gage destiné à compenser les éventuelles conséquences financières de la proposition de loi
L'article 4 consiste en un « gage » destiné à compenser les éventuelles conséquences financières résultant pour l'État de la proposition de loi.
II. La position de la commission - Un gage n'appelant pas d'observation ou de modification
La commission a adopté l'article sans modification.
* 1 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.
* 2 définies comme des « zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social ».
* 3 Décisions du tribunal administratif de Lille du 17 octobre 2017 et du tribunal administratif de Paris du 28 novembre 2017.
* 4 Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 5 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.
* 6 Soit les zones mentionnées à l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, à savoir les zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, dont la liste est actuellement fixée par le décret n° 2023-822 du 25 août 2023 modifiant le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.
* 7 Décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.
* 8 Décret n° 2021-1143 du 2 septembre 2021 fixant le périmètre du territoire de la métropole de Lyon sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 9 Décret n° 2020-1619 du 17 décembre 2020 fixant le périmètre du territoire de l'établissement public territorial Plaine Commune sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 10 Décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 fixant le périmètre du territoire de la ville de Paris sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 11 Décret n° 2020-41 du 22 janvier 2020 fixant le périmètre du territoire de la métropole européenne de Lille sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 12 Décret n° 2021-688 du 28 mai 2021 fixant le périmètre du territoire de l'établissement public territorial Est Ensemble sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 13 Décret n° 2021-1144 du 2 septembre 2021 fixant le périmètre du territoire de la métropole Montpellier Méditerranée Métropole sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 14 Décret n° 2021-1145 du 2 septembre 2021 fixant le périmètre du territoire de la métropole Bordeaux Métropole sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 15 Décret n° 2023-981 du 23 octobre 2023 fixant le périmètre du territoire de la communauté d'agglomération du Pays basque sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 16 Décret n° 2023-1046 du 16 novembre 2023 fixant le périmètre du territoire de l'établissement public de coopération intercommunale Grenoble-Alpes Métropole sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers prévu à l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 17 Communiqué de presse de la métropole Aix-Marseille du 24 novembre 2022.
* 18 Décret n° 2023-822 du 25 août 2023 modifiant le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.
* 19 Saint-Denis, Sainte-Marie, Saint-Louis, Saint-Paul, La Possession, Le Port, Saint-Pierre, Entre-Deux et Le Tampon.
* 20 Insee Première n° 1958 - Mai 2023
* 21 Insee Dossier Guadeloupe n° 12 - Mai 2017
* 22 La politique de la ville, une décennie de réformes, rapport public thématique, Cour des comptes, juillet 2012.
* 23 Décret n° 2014-767 du 3 juillet 2014 relatif à la liste nationale des quartiers prioritaires de la politique de la ville et à ses modalités particulières de détermination dans les départements métropolitains.
* 24 Décret n° 2014-1575 du 22 décembre 2014 relatif aux modalités de détermination des quartiers prioritaires de la politique de la ville particulières aux départements d'outre-mer, à Saint-Martin et à la Polynésie française.
* 25 La méthode proposée par l'INSEE a été de diviser la France en carrés de 200 mètres sur 200 mètres, selon la technique du carroyage.
* 26 Décret n° 2014-1751 du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les départements d'outre-mer, à Saint-Martin et en Polynésie française.
* 27 Mission relative au zonage et à la gouvernance de la politique de la ville dans les outre-mer, confiée à l'inspection générale du développement durable, l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale des affaires sociales en février 2023.
* 28 Décret n° 2024-1211 du 27 décembre 2024 relatif aux modalités de détermination des quartiers prioritaires de la politique de la ville particulières aux collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Martin et à la Polynésie française.
* 29 Ilots Regroupés pour l'Information Statistique.
* 30 USH, Les chiffres clés du logement social 2024.
* 31 Questionnaire budgétaire du projet de loi de finances pour 2025.
* 32 À noter cependant que les chiffres de l'USH et de la DGOM semblent diverger sur ce point. En effet, dans ses réponses au questionnaire budgétaire du projet de loi de finances pour 2024, la DGOM faisait état d'un parc de logements sociaux dans les Drom, au 31 décembre 2022, s'élevant à 178 000 logements, soit plus de 2 500 de moins que le chiffre de l'USH, au 1er janvier 2023.
* 33 https ://www.outre-mer.gouv.fr/ciom-comite-interministeriel-des-outre-mer-18-juillet-2023
* 34 https ://batiments-outremer.fr/assises-batiment-outre-mer/
* 35 Avis 18-A-09 du 3 octobre 2018 relatif à la situation concurrentielle sur les marchés des matériaux de construction à Mayotte et à La Réunion.
* 36 Source : réponses au questionnaire budgétaire 2024.
* 37 https ://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/ ?uri=CELEX %3A32024R3110
* 38 https ://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000 020 749 979/