IV. DES ÉVOLUTIONS BUDGÉTAIRES DE NATURE SENSIBLEMENT DIFFÉRENTES EN 2025 ENTRE LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES

Si tant les crédits de la police nationale que ceux de la gendarmerie sont orientés à la hausse, l'analyse plus fine de leurs budgets fait apparaître des différences sensibles dans la nature de ces augmentations.

Ainsi, à l'inverse de l'année dernière, la gendarmerie nationale voit ses crédits hors dépenses de personnel progresser de manière dynamique (+ 235 millions d'euros en AE, soit + 11,1 %, et + 438 millions d'euros en CP, soit + 29,5 %), tandis que ceux de la police nationale évoluent peu (- 20 millions d'euros en AE, soit - 0,9 %, et + 34 millions d'euros en CP, soit + 2,0 %). La hausse des crédits de la police nationale est en effet largement concentrée sur les dépenses de personnel (+ 403 millions d'euros en AE/CP, soit + 3,6 %), contrairement à la gendarmerie nationale (+ 100 millions d'euros en AE/CP, soit + 1,1 %), et ce en dépit de l'absence d'augmentation des effectifs en 2025.

Pour la police nationale, le budget pour 2025 apparaît ainsi globalement comme une année de consolidation des conséquences des hausses de rémunération des personnels actées ces dernières années (outre les conséquences des hausses d'effectifs passées et de la nette hausse des versements au CAS « Pensions »33(*)), tandis que le niveau des crédits d'investissement constitue un point de vigilance. Pour la gendarmerie nationale, le budget pour 2025 vise à permettre une relance des dépenses hors personnel, en faveur tant de l'investissement que du fonctionnement, alors que les besoins sont très importants.

Ainsi que le précisent les documents budgétaires, la police nationale contribuera en 2025 « au rétablissement des équilibres budgétaires, par un effort de priorisation de ses dépenses et notamment de ses investissements », tandis que la gendarmerie nationale connaîtrait un « début de remise à niveau », s'agissant de son fonctionnement courant et de l'immobilier34(*).

A. ALORS QUE LES DÉPENSES DE PERSONNEL NE REPRÉSENTENT QU'UNE PART MINORITAIRE DANS LA PROGRESSION DES CRÉDITS DE LA GENDARMERIE, ELLES CONCENTRENT LA QUASI-TOTALITÉ DE CELLE DES CRÉDITS DE LA POLICE

1. En dépit d'une absence de hausse des effectifs en 2025, les dépenses de personnel augmentent au sein des deux forces, surtout pour la police nationale

En dépit d'une pause dans les créations de postes, le présent projet de loi de finances prévoit la poursuite de la progression des dépenses de personnel constatée sur les précédents budgets, de 3,6 % pour la police nationale et de 1,1 % pour la gendarmerie nationale, en AE et en CP, et de 2,5 % en cumulant les deux programmes. Si elle est inférieure à l'inflation pour la gendarmerie, elle y est près de deux fois supérieure pour ce qui concerne la police nationale.

En 2025, les dépenses de personnel (dites « de titre 2 ») de la gendarmerie nationale sont en hausse de 100 millions d'euros, tandis que celles de la police nationale augmentent de 403 millions d'euros, soit un niveau quatre fois supérieur. La hausse des crédits de titre 2 représente plus de 90 % de la progression des crédits de la police en 2025, contre moins de 20 % pour la gendarmerie.

Il convient néanmoins de noter qu'une part significative de la hausse des crédits de personnel de la police nationale relève de la contribution au CAS « Pensions ». Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial35(*), cela résulte du relèvement du taux de contribution du programme « Police nationale » au CAS « Pensions » à compter du 1er janvier 2025 ; cette évolution a été communiquée par la direction du budget au moment de la tenue des conférences de répartition.

Hors CAS « Pensions, la hausse des dépenses de titre 2 s'établit à + 132 millions d'euros, soit + 1,7 %, à savoir un niveau comparable à l'inflation et identique à la gendarmerie nationale (+ 83 millions d'euros en valeur pour cette dernière).

2. Hors CAS « Pensions », la hausse des dépenses de « titre 2 » s'explique à la fois par des mesures générales et catégorielles

Hors CAS « Pensions », la hausse des dépenses de « titre 2 » s'expliquait en 2024, d'une part, par des mesures générales (hausses d'effectifs et revalorisation du point d'indice) et, d'autre part, par des mesures catégorielles.

Les mesures générales, qui présentent un effet « cliquet », continuent de jouer un rôle structurel dans le niveau élevé des dépenses de personnel en 2025 pour la police nationale, à hauteur de 169,3 millions d'euros (revalorisations du point d'indice et du SMIC). En revanche, l'effet est nul pour la gendarmerie en 2025.

S'y ajoutent les mesures catégorielles. Pour la police nationale, leur coût atteindrait 73,4 millions d'euros, dont 62 millions d'euros au titre du protocole pour la modernisation des ressources humaines signé le 2 mars 2022, avec notamment la poursuite de la mise en oeuvre de la « prime voie publique » (surcoût de 27 millions d'euros), de l'indemnité de sujétion spécifique liée à l'exercice des fonctions dans un service de la police nationale (14,5 millions d'euros), et de la réforme statutaire du corps d'encadrement et d'application (surcoût de 8 millions d'euros). Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial36(*), le coût global de la mise en oeuvre du protocole de mars 2022 devrait atteindre 1 milliard d'euros sur la période de 2023 à 2027.

S'agissant de la gendarmerie nationale, le coût de ces mesures - qui consistent en l'extension en année pleine de dispositifs déjà déployés - représente 62 millions d'euros en 2025, dont 55 millions d'euros au titre du protocole pour la modernisation des ressources humaines signé le 2 mars 2022, dont 31 millions d'euros pour la seule « prime voie publique ».

3. Des crédits de personnel qui continuent de représenter l'essentiel du budget pour les deux forces en 2025

En 2025, le rythme plus rapide de la hausse des dépenses « hors titre 2 » par rapport à celle des dépenses de personnel conduit à un léger recul de la part des crédits de titre 2 au sein des deux programmes.

À l'échelle des deux forces, le taux s'établit de 84,8 % en CP, un niveau élevé bien qu'inférieur de 4,1 points à celui de 2020.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses
de la police et de la gendarmerie nationales

(hors crédits de la mission « Plan de relance »)

(en CP, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En 2025, l'évolution de la part des dépenses de personnel est inverse entre les deux forces, de façon cohérente avec la composition des hausses de crédits respectives37(*). À l'inverse de l'année dernière, pour la gendarmerie nationale, leur part dans l'ensemble des dépenses est en nette baisse (82,4 % en 2025 contre 85,7 % en 2024). Pour la police nationale, elle est en légère hausse (86,8 %, contre 86,6 % en 2024).

Il apparaît important de poursuivre le rééquilibrage entre les types de dépenses des forces de sécurité : outre d'effectifs, elles ont en effet besoin de crédits importants de fonctionnement et d'investissement, qui conditionne leur efficacité.


* 33 Voir infra.

* 34 Projet annuel de performances « Sécurités », annexé au projet de loi de finances pour 2025.

* 35 Réponses de la DGPN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 36 Réponses de la DGGN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 37 Voir supra.

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