N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 29a

SÉCURITÉS
(Programmes 152 « Gendarmerie nationale », 176 « Police nationale »
et 207 « Sécurité et éducation routières »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : CONTRÔLE DE LA CIRCULATION
ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS

Rapporteur spécial : M. Bruno BELIN

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, MM. Vincent Capo-Canellas, Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean-Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

I. UN BUDGET DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE NATIONALES EN HAUSSE EN 2025, APRÈS UNE ANNÉE 2024 MARQUÉE PAR UNE EXÉCUTION BUDGÉTAIRE TRÈS CONTRAINTE

A. LES DEUX FORCES ONT DÛ FINANCER EN 2024 DES SURCOÛTS EXCEPTIONNELS, GÉNÉRANT DES EFFETS D'ÉVICTION SUR CERTAINES DÉPENSES ET UN RISQUE DE REPORT DE CHARGES SUR 2025

En 2024, les crédits initiaux cumulés de la police et de la gendarmerie nationales avaient augmenté de 5 % en AE et de 4,7 % en CP par rapport à 2023. L'exécution des crédits a néanmoins conduit à une dégradation significative de leurs budgets réels, pour deux raisons principales.

D'une part, le Gouvernement a annulé, en février 2024, 20 millions d'euros de crédits en AE/CP pour la gendarmerie et 134 millions d'euros pour la police nationale.

D'autre part et surtout, il a été décidé du financement sous le plafond de crédits initial des surcoûts exceptionnels qui sont apparus en 2024. Il en est allé ainsi notamment des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), qui auraient coûté 814 millions d'euros à la police nationale entre 2020 et 2024 (dont l'essentiel en 2024) et 327 millions d'euros à la gendarmerie sur 2022-2025. C'est sans doute davantage que ce qui était initialement prévu dans les budgets, notamment celui pour 2024.

L'impact pluriannuel des JOP sur les budgets de la police
et de la gendarmerie nationales

Coût total des JOP pour les deux forces (en milliard)

Part des dépenses additionnelles de personnel (en %)

Part du coût pris en charge par la police nationale (en %)

 
 
 

Se sont ajoutés les surcoûts liés à divers troubles, dont 125 millions d'euros pour la gendarmerie et 30 millions pour la police nationale au titre de la crise en Nouvelle-Calédonie.

Il en a résulté une très forte réduction des marges de manoeuvre budgétaires des deux forces, qui ont été contraintes de réduire certains postes de dépenses. Pour la police, celles en matière d'immobilier et de véhicules ont été les plus affectées. Pour la gendarmerie, diverses économies ont été réalisées, tandis que deux tiers des loyers dus aux bailleurs ne sont plus réglés à compter de septembre 2024, et ce jusqu'à l'ouverture de nouveaux crédits.

Force est ainsi de constater que les forces de sécurité intérieure n'ont pu satisfaire l'ensemble de leurs besoins essentiels en 2024, dans un contexte exceptionnel, et qu'il appartient donc au budget de 2025 d'y répondre. Des ouvertures de crédits sont nécessaires dès la loi de finances de fin de gestion pour 2024. À défaut, un report de charges important pourrait apparaitre de 2024 sur 2025, grevant ce dernier budget.

B. UN BUDGET EN PROGRESSION EN 2025 POUR LES FORCES DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE

En 2025, les crédits cumulés de la police et de la gendarmerie sont en hausse par rapport à 2024, tant en AE (+ 2,9 %, + 718 millions d'euros), qu'en CP (+ 4,2 %, + 975 millions d'euros), ce qu'il convient de saluer dans un contexte de forte contrainte budgétaire pour l'État. Ils s'établissent à 25,1 milliards d'euros en AE et à 24,3 milliards d'euros en CP.

À l'inverse de l'année dernière, cette progression bénéficie davantage à la gendarmerie (+ 335 millions d'euros en AE et + 538 millions d'euros en CP, soit respectivement + 3,0 % et + 5,2 %) qu'à la police nationale (+ 383 millions d'euros en AE et + 437 millions d'euros en CP, soit respectivement + 2,9 % et + 3,4 %). Le budget du programme « Police nationale » s'établit à 13,7 milliards d'euros en AE et à 13,4 milliards d'euros en CP, et celui du programme « Gendarmerie nationale » à 11,4 milliards d'euros en AE et à 10,9 milliards d'euros en CP.

La trajectoire prévue par la LOPMI1(*), hors CAS « Pensions », est dépassée pour la gendarmerie nationale. Pour la police nationale, les crédits s'établissent à un niveau inférieur mais très proche de l'objectif, l'écart étant de 25 millions d'euros.

Comparaison des crédits ouverts en 2024 et demandés en 2025
pour la police (gauche) et la gendarmerie nationales (droite)

en millions d'euros

 
 

II. UNE PAUSE DANS LES AUGMENTATIONS D'EFFECTIFS, QUI DEVRONT RAPIDEMENT REPRENDRE POUR ÉVITER DES EFFETS NÉFASTES

La mise en oeuvre de la LOPMI est associée à une trajectoire de hausse des effectifs des forces de sécurité intérieure de 2023 à 2027. Un schéma d'emplois cumulé de + 3 540 ETP pour la gendarmerie et de + 3 872 pour la police nationale est attendu entre 2023 et 2027. D'un point de vue annuel, en 2023, le schéma d'emplois a été exécuté pour les deux forces conformément aux objectifs (respectivement + 950 et + 1 907 ETP), de même qu'en 2024 (+ 1 045 et + 1 139 ETP).

En 2025, alors que le schéma d'emplois attendu était de + 500 ETP pour la gendarmerie et de + 356 ETP pour la police nationale, celui retenu par le budget 2025 est neutre, dans un contexte de contrainte budgétaire pour l'État et d'un effort pour le redressement des comptes publics. Cette évolution n'est pas sans poser de difficultés, notamment s'agissant de la création de nouvelles brigades de gendarmerie et concernant la police aux frontières (DNPAF).

Parmi les 239 nouvelles brigades dont la création a été annoncée, au 31 décembre 2024, les 80 premières devraient effectivement être en place. Toutefois, pour 2025, la mise en place de 57 brigades additionnelles était adossée à une hausse d'effectifs de + 500 ETP pour la gendarmerie. Il n'apparaît, dès lors, pas possible d'ouvrir autant de nouvelles brigades à effectifs constants.

La DNPAF va, quant à elle, rapidement présenter un important besoin de renforts d'effectifs notamment pour accompagner la hausse du nombre de places en centres de rétention administrative (CRA) et pour mettre en oeuvre le nouveau système d'enregistrement et de contrôle des données personnelles des ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures de l'espace Schengen (système EES).

Si les effectifs n'étaient pas augmentés par le Gouvernement par amendement dès cette année, comme cela a pu être évoqué, il faudra assurer un rattrapage dès 2026 et 2027.

III. UNE COMPOSITION DE LA HAUSSE DES CRÉDITS SENSIBLEMENT DIFFÉRENTE ENTRE LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES

Si tant les crédits de la police nationale que ceux de la gendarmerie sont orientés à la hausse, il existe des différences sensibles dans la nature de ces augmentations. À l'inverse de l'année dernière, la gendarmerie voit ses crédits hors dépenses de personnel progresser de manière dynamique (+ 235 millions d'euros en AE, soit + 11,1 %, et + 438 millions d'euros en CP, soit + 29,5 %), tandis que ceux de la police nationale évoluent peu (- 20 millions d'euros en AE, soit - 0,9 %, et + 34 millions d'euros en CP, soit + 2,0 %).

Ø Le budget de la police nationale pour 2025

La hausse des crédits de la police est en effet largement concentrée sur les dépenses de personnel (+ 403 millions d'euros en AE/CP, soit + 3,6 %), contrairement à la gendarmerie nationale (+ 100 millions d'euros en AE/CP, soit + 1,1 %). La progression importante des crédits de « titre 2 » de la police nationale résulte toutefois principalement du CAS « Pensions », notamment en raison d'une hausse du taux de contribution applicable à compter de 2025.

Pour la police, le budget pour 2025 apparaît ainsi globalement comme une année permettant la consolidation des conséquences des hausses d'effectifs et de rémunération des personnels actées ces dernières années, associée à une contribution « au rétablissement des équilibres budgétaires, par un effort de priorisation de ses dépenses et notamment de ses investissements »2(*).

Le niveau des crédits d'investissement en AE constitue ainsi pour la police un point de vigilance important pour 2025. La baisse des AE en investissement (- 30 %) se traduit principalement sur les véhicules (- 55 %) et l'immobilier (- 34 %), même si ce dernier poste connait une hausse en CP pour poursuivre les projets déjà amorcés. À l'inverse, les dépenses liées au numérique, à l'informatique et aux technologies sont en nette hausse en investissement, en cohérence avec leur caractère essentiel et prioritaire.

Ø Le budget de la gendarmerie nationale pour 2025

Pour la gendarmerie, le budget vise à permettre une relance des dépenses hors personnel, en faveur de l'investissement et du fonctionnement, face à des besoins très importants.

Est notamment concerné l'investissement immobilier, dont les crédits quintuplent quasiment en AE et augmentent de 61 % en CP, après une réduction en 2024. Cette évolution permettra de répondre à certains enjeux de construction et de réhabilitation. Avec un budget de 295 millions d'euros en AE et de 176 millions d'euros en CP, l'investissement reste néanmoins à un niveau inférieur aux besoins estimés par la gendarmerie, à savoir 400 millions d'euros par an.

Concernant les crédits de fonctionnement en matière d'immobilier, la progression est moins franche (+ 2,5 % en AE, soit + 29 millions d'euros et + 7,0 % en CP, soit + 56 millions d'euros). Ces crédits couvrent notamment le coût des loyers payés par la gendarmerie à ses bailleurs, notamment les collectivités territoriales. Or, les besoins en loyers vont être de plus en plus significatifs à l'avenir, non seulement pour éviter les ruptures de paiement comme celle observée cet automne, mais également pour augmenter leurs montants afin de permettre aux collectivités de financer des projets de construction. Il apparaît, de ce point de vue, indispensable de rehausser le montant des coûts-plafonds pour la fixation des loyers versés par la gendarmerie3(*).

Les moyens mobiles bénéficient aussi d'une augmentation des crédits de fonctionnement et d'investissement, de même que les dépenses de fonctionnement en faveur des systèmes d'information et de communication.

IV. LES CRÉDITS DE LA MISSION DÉDIÉS À LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE CONNAISSENT UNE BAISSE, TOUT EN RESTANT SUPÉRIEURS À 2023

La politique de sécurité routière, de nature profondément interministérielle, représente un coût de 4,87 milliards d'euros en CP en 2025 pour l'État, réparti sur plusieurs missions. Les crédits du programme 207 « Sécurité et éducation routières » n'en représentent qu'environ 1,7 %.

La politique mise en oeuvre produit des résultats : le nombre de morts sur les routes est en diminution. En 2023, 3 398 ont perdu la vie sur les routes en France (soit - 4,3 % par rapport à 2022), tandis que les JOP semblent avoir accompagné une baisse du nombre de décès durant l'été.

Les crédits du programme 207 sont principalement consacrés aux actions de communication, d'éducation, de prévention et à l'organisation du permis de conduire (fonctionnement courant et examens). Ils sont en baisse de 25,8 millions d'euros en AE (- 23,3 %) et en CP (- 23,7 %) par rapport à 2024. La réduction des crédits en 2025 concerne les trois actions du programme. Elle est concentrée en particulier sur la baisse des crédits dédiés aux systèmes d'information de la délégation à la sécurité routière et aux actions locales de sécurité routière.

Les crédits du programme s'inscrivent à un niveau inférieur à ce qui était prévu dans le rapport annexé à la LOPMI pour 2025 mais restent toutefois nettement supérieurs à ceux de 2023 (74,4 millions d'euros en CP) et de 2022 (50,1 millions d'euros en CP).

Le CAS « Radars » connaîtrait en 2025 une hausse des recettes des amendes qui lui sont affectées de 12,3 %, soit + 204 millions d'euros. Cette progression des recettes se reflète en dépenses, selon la clé de répartition applicable : les crédits en faveur des équipements routiers des collectivités territoriales augmentent de 110 millions d'euros et ceux dédiés au désendettement de l'État4(*) de 97,5 millions d'euros. Les crédits fléchés vers les dispositifs de contrôle, dont le nombre se stabilise à environ 4 700 radars opérationnels5(*), et le procès-verbal électronique sont globalement stables.

Réunie le mercredi 6 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale.

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 66,4 % des réponses étaient parvenues au rapporteur spécial.

PREMIÈRE PARTIE
LES PROGRAMMES « POLICE NATIONALE » ET « GENDARMERIE NATIONALE »

En 2025, le budget proposé pour la mission « Sécurités » s'établit à 26,06 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE, + 2,6 %, soit + 652 millions d'euros) et à 25,2 milliards d'euros en crédits de paiement (CP, + 3,7 %, soit + 900 millions d'euros), soit une progression supérieure à l'inflation6(*). Hors compte d'affectation spéciale « Pensions » (CAS « Pensions »), les CP sont en hausse de 3,6 %, soit 606 millions d'euros. Cette dynamique doit être saluée dans un contexte de contrainte budgétaire forte pour l'État et d'un effort pour le redressement des comptes publics.

Cette augmentation des crédits de la mission pourrait faire l'objet d'une accentuation à l'initiative du Gouvernement en cours d'examen parlementaire du projet de loi de finances, selon ce qu'indique l'exposé général des motifs du texte7(*).

La mission « Sécurités » est composée de quatre programmes, à savoir les programme 176 « Police nationale » (53 % des crédits de la mission en 2025), 152 « Gendarmerie nationale » (43,4 %), 207 « Sécurité et éducation routières » (0,3 %) et, enfin, 161 « Sécurité civile » (3,3 %). Les trois premiers programmes relèvent de la compétence du rapporteur spécial Bruno Belin8(*).

La présente première partie du rapport porte sur les programmes 176 et 152, tandis que la deuxième partie traite du programme 207 et du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

I. UN BUDGET QUI DOIT ÊTRE ANALYSÉ À LA LUMIÈRE DE L'EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2024, MARQUÉE PAR LES EFFETS DES ANNULATIONS DE CRÉDITS ET DU FINANCEMENT DE DÉPENSES EXCEPTIONNELLES

En 2024, les crédits initiaux de la police et de la gendarmerie nationale avaient augmenté par rapport à la loi de finances initiale pour 2023, de 5,02 % en AE (+ 1,159 milliard d'euros) et de 4,7 % en CP (+ 1,043 milliard d'euros).

Si cette hausse bénéficiait tant aux dépenses de personnel (dites de « titre 2 ») qu'aux autres types de crédits (dits « hors titre 2 ») pour la police nationale, ce n'était pas le cas pour la gendarmerie, qui voyait ses crédits « hors titre 2 » se contracter. Néanmoins, cette hausse globale des crédits des forces de sécurité intérieure, qui s'accompagnait d'un renforcement significatif des effectifs, était globalement satisfaisante.

L'exécution des crédits pour 2024 a néanmoins conduit à une dégradation significative des budgets réels de la police et de la gendarmerie nationales, pour deux raisons principales. D'une part, la détérioration de l'estimation du solde budgétaire attendu pour l'État en 2024 a conduit le Gouvernement à annuler des crédits au sein des deux programmes en début d'année. D'autre part, il a été décidé du financement sous le plafond de dépenses initial pour 2024 de dépenses exceptionnelles qui sont apparues ou se sont aggravées en cours d'année. Ces évolutions ne sont pas sans impact pour 2025.

A. LES BUDGETS RÉELS DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE NATIONALES ONT SUBI LES CONSÉQUENCES DES ANNULATIONS DE CRÉDITS DE DÉBUT D'ANNÉE...

La détérioration de l'estimation du solde budgétaire attendu pour l'État en 2024 a conduit le Gouvernement à annuler environ 10 milliards d'euros de crédits sur le périmètre des dépenses de l'État par le biais du décret du 21 février 20249(*).

À ce titre, 20 millions d'euros ont été annulés en AE/CP sur le programme 152 « Gendarmerie nationale », tandis que, surtout, 134,4 millions d'euros l'ont été en AE/CP sur le programme 176 « Police nationale ». Ces annulations ont porté sur des crédits « hors titre 2 », les dépenses de personnel n'ayant pas été affectées pour ces deux programmes ; elles ont abouti à réduire très fortement la hausse réelle des crédits, hors dépenses de personnel, pour 2024 par rapport à 2023 pour la police (la ramenant à environ 54 millions d'euros en CP), et à dégrader davantage l'évolution pour la gendarmerie nationale (renforçant la baisse à 89 millions d'euros en CP par rapport à 2023). S'y est ajouté l'effet de la mise en réserve de crédits pour les deux programmes.

B. ...TANDIS QUE DES DÉPENSES EXCEPTIONNELLES ET DES SURCOÛTS ONT DU ÊTRE FINANCÉS DANS LE CADRE DE L'ENVELOPPE INITIALE...

Ces contraintes importantes en gestion liées aux annulations de crédits ont été fortement accentuées par la décision de financer sous le plafond de dépenses initial pour 2024 des dépenses exceptionnelles et des surcoûts qui sont apparus ou qui se sont alourdis en cours d'année. Il en va notamment ainsi des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) et de la crise en Nouvelle-Calédonie.

1. Un coût de la sécurisation des JOP pour la police et la gendarmerie nationales à hauteur de plus d'un milliard d'euros et plus important qu'anticipé

La sécurisation du relai de la flamme Olympique et des JOP de 2024 a conduit à des dépenses d'un montant significatif pour la police et la gendarmerie nationales (les « forces de sécurité intérieure », FSI). L'estimation du niveau de dépenses, encore provisoire, est sans doute plus élevée qu'initialement prévue (notamment pour ce qui concerne l'année 2024) dans les budgets successifs, y compris celui de 202410(*). Le coût de cette sécurisation ne concerne en effet pas seulement l'année en cours mais inclut également les dépenses rendues nécessaires les années antérieures pour préparer spécifiquement l'évènement. Il couvre des dépenses de personnel et des crédits « hors titre 2 ».

Le coût est à ce jour estimé à 813,9 millions d'euros pour la police nationale, selon les informations recueillies par le rapporteur spécial11(*). Il se décompose en 328,6 millions d'euros de dépenses de masse salariale, soit 40,4 %, et de 485,3 millions d'euros de dépenses de fonctionnement et d'investissement, soit 59,6 %. Il couvre les années 2020 à 2024, étant entendu que l'essentiel des crédits de paiement ont en réalité été payés en 2024 (la totalité pour la masse salariale et plus de 80 % pour le fonctionnement et l'investissement12(*)).

Ventilation de l'estimation du coût de la sécurisation des JOP en 2024
pour la police nationale
13(*)

(en CP, en %)

Note : les dépenses additionnelles de personnel regroupent des indemnités, des primes, le paiement d'heures supplémentaires et le surcoût lié à la mobilisation de la réserve opérationnelle, voir infra.

Source : commission des finances, d'après les réponses aux questionnaires du rapporteur spécial

« Hors titre 2 », ce sont les dépenses d'hébergement qui ont été les plus coûteuses (environ 230 millions d'euros), 1,2 millions de nuitées ayant notamment été réservées, loin devant les frais de fonctionnement des services (frais de mission, téléphonie, alimentation, etc.) et les systèmes d'information et de communication (modernisation des salles de commandement, lutte anti-drones, vidéoprotection, etc.).

S'agissant des dépenses de personnel, le coût de 328,6 millions d'euros se décompose en 203,2 millions d'euros au titre de la prime JOP versée aux agents, 81 millions d'euros pour l'indemnisation de près de 5 millions d'heures supplémentaires générées au cours de la période et 20,7 millions d'euros au titre de l'indemnité d'absence missionnelle. Le reste des dépenses s'explique par les sorties d'école anticipées de policiers, le surcroît de dépenses sur certaines indemnités (notamment l'indemnité journalière d'absence temporaire, pour les CRS), ou encore la mobilisation de la réserve opérationnelle (enveloppe spécifique de 7 millions d'euros pour les JOP 2024).

Pour la gendarmerie nationale, le coût est estimé à 327 millions d'euros sur la période de 2022 à 2025, selon les informations recueillies par le rapporteur spécial14(*), soit un niveau inférieur à la police nationale mais qui reste très significatif. Ce coût se décompose en 125,6 millions d'euros de dépenses de masse salariale, soit 38,4 %, et de 201,4 millions d'euros de dépenses « hors titre 2 », soit 61,6 %.

Ventilation de l'estimation du coût de la sécurisation des JOP en 2024
pour la gendarmerie nationale
15(*)

(en CP, en %)

Note : les dépenses additionnelles de personnel regroupent des indemnités, des primes et le surcoût lié à la mobilisation de la réserve opérationnelle, voir infra.

Source : commission des finances, d'après les réponses aux questionnaires du rapporteur spécial

« Hors titre 2 », ce sont les dépenses d'hébergement et de déplacement qui ont été les plus coûteuses (67,2 millions d'euros), devant les dépenses d'alimentation (28 millions d'euros), d'action sociale (13 millions d'euros), les travaux lourds de rénovation des cantonnements (8,0 millions d'euros) ou encore les besoins en matière numérique (3,9 millions d'euros).

S'agissant des dépenses de personnel, le coût de 201,4 millions d'euros se décompose en 130,0 millions d'euros au titre de la prime JOP, 28 millions d'euros pour l'indemnité d'absence missionnelle, 25,7 millions d'euros pour le financement de la réserve opérationnelle pour les JOP, et 18 millions d'euros au titre d'autres primes et indemnités.

Au total, il est possible d'estimer provisoirement que pour la police et la gendarmerie nationales, le coût pluriannuel de la sécurisation des JOP a représenté un coût d'environ 1,141 milliard d'euros, dont 39,8 % au titre de la masse salariale (454,2 millions d'euros) et 60,2 % au titre des autres types de dépenses (« hors titre 2 », 686,7 millions d'euros), en particulier en matière de crédits de fonctionnement et d'investissement. La police nationale a assumé 71,3 % du coût pour les FSI, et la gendarmerie nationale 28,7 %.

Ventilation du coût de la sécurisation des JOP en 2024
entre la police et la gendarmerie nationales

(en CP, en %)

Source : commission des finances, d'après les réponses aux questionnaires du rapporteur spécial

La dépense semble être supérieure à celle qui avait été anticipée, générant un surcoût en cours de gestion 2024. À titre d'illustration, il avait été indiqué l'année dernière au rapporteur spécial que le coût de la sécurité des JOP pour la gendarmerie nationale aurait pu être d'environ 61 millions d'euros pour 2024. Les montants présentés supra laissent penser que le coût réellement imputé sur 2024 sera finalement significativement supérieur. Il est très probable que les estimations actuelles du coût réel pour ce qui concerne la police nationale soient également supérieures à ce qui avait été initialement intégré dans le budget.

2. Des dépenses exceptionnelles liées à de multiples crises ont dû être financées dans le cadre de l'enveloppe initiale de crédits

Outre les JOP, l'année 2024 a également été marquée par une forme d'« empilement des crises »16(*) présentant des implications sécuritaires et un coût budgétaire associé pour les FSI. Il en a été ainsi notamment des manifestations du monde agricole, des contestations relatives à l'autoroute A69, de l'opération « place nette » à Mayotte, de protestations contre la vie chère dans les Antilles et, surtout, de la crise en Nouvelle-Calédonie.

Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial17(*), le coût additionnel des mesures de rétablissement de l'ordre en Nouvelle-Calédonie pourrait être en 2024 de 125 millions d'euros pour la gendarmerie nationale et de 30 millions d'euros pour la police nationale.

Il a en outre été décidé que les dépenses afférentes à ces différentes crises seraient financées sous enveloppe initiale.

C. ...CONDUISANT À UN NET EFFET D'ÉVICTION SUR LES DÉPENSES PILOTABLES, QUI POURRAIT AVOIR DES CONSÉQUENCES EN 2025

Le cumul des annulations de crédits décidées en février 2024 et du financement sous enveloppe initiale des surcoûts et dépenses exceptionnelles apparus en cours d'année a conduit à un rétrécissement très net des marges de manoeuvre budgétaires des responsables de programme en cours d'année.

Face à l'impossibilité de remettre en question les activités opérationnelles, elle s'est traduite par un effet d'éviction sur les dépenses pilotables.

Cet effet d'éviction a été particulièrement fort pour la police nationale, dont le budget a notamment été marqué par un coût très élevé des JOP à assumer sous enveloppe initiale et par des annulations de crédits significatives. Selon les informations transmises au rapporteur spécial18(*), il a porté sur les dépenses d'investissement ou de fonctionnement reportables, et en particulier sur deux postes principaux :

la diminution de l'ordre de 80 % du plan de renouvellement automobile en 2024, impliquant un renoncement au renouvellement de 2 036 véhicules sur 2 628 prévus ;

la forte réduction des dépenses d'investissement immobilier, qui a entraîné la décision de ne plus engager aucun nouveau projet d'investissement immobilier. Les investissements ainsi se sont concentrés sur la poursuite des chantiers immobiliers déjà engagés, afin d'éviter des interruptions qui auraient engendré des problèmes techniques et budgétaires. En outre, le montant des crédits de maintenance lourde exécutés devrait diminuer de l'ordre de 75 % en 2024 par rapport à 2023.

Mais l'effet d'éviction sur les dépenses pilotables a également été réel pour la gendarmerie. En effet, si le montant des annulations de crédits a été moins élevé que pour la police nationale, le cumul d'une loi de finances initiale comportant très peu de marges en « hors titre 2 », du financement de dépenses exceptionnelles très coûteuses sans ouverture nouvelle de crédits et du très haut niveau d'activité des forces a conduit la DGGN à devoir faire des choix difficiles en cours d'année.

Ainsi, elle a réduit ses dépenses en matière de loyers, en même temps qu'elle a procédé à diverses mesures d'économies concernant les véhicules, les équipements technologiques et les frais de déplacement.

L'incapacité de la gendarmerie nationale de payer certains de ses loyers
à l'automne 2024, au détriment des collectivités territoriales

Sur l'ensemble du territoire français, la gendarmerie nationale occupe plus de 3 700 casernes, couvrant sa zone géographique de compétence, à savoir 95 % du territoire et 50 % de la population. Ce parc représente environ 11 millions de mètres carrés.

Au sein de cet ensemble, le parc dit « domanial » appartient à l'État. Il regroupe un peu moins de 700 casernes, mais près de la moitié de la surface. Le parc dit « locatif », appartient pour l'essentiel aux organismes « HLM » et aux collectivités territoriales. Il représente environ 3 000 casernes et plus de la moitié de la surface. Il est en extension, contrairement au parc domanial.

Le fonctionnement du parc locatif repose sur le principe que les collectivités territoriales ou les organismes « HLM » investissent pour construire des locaux pour la gendarmerie nationale en échange du versement d'un loyer permettant d'amortir l'investissement.

Si la gendarmerie est généralement considérée comme un bon payeur, l'automne 2024 est marqué par une suspension du paiement par elle de certains de ses loyers, dans le cadre de l'effet d'éviction mentionné supra.

En effet, selon les informations recueillies par le rapporteur spécial19(*), la gendarmerie a suspendu le versement des loyers pour les mois de septembre à novembre 2024 aux bailleurs (collectivités territoriales et organismes « HLM »), à l'exception du tiers d'entre eux jugés financièrement les plus fragiles. L'ensemble des baux faisant l'objet d'un report de paiement représenteraient un montant de 90,1 millions d'euros sur la période, dont 82,5 millions d'euros pour l'échéance de septembre20(*), pour 5 079 emprises. Les collectivités territoriales représentent 49 % des bailleurs concernés et 52 % du montant total (2 500 baux pour 47 millions d'euros). Une procédure est prévue pour permettre à certaines collectivités qui n'auraient pas été identifiées comme particulièrement fragiles de solliciter le paiement des loyers, en passant par le préfet de département ; 4,6 millions d'euros auraient été débloqués à ce jour à cet effet21(*).

Si le rapporteur spécial comprend qu'il ne soit pas possible de payer les loyers au détriment d'activités opérationnelles indispensables aux territoires, il constate que la situation actuelle est inacceptable et met en difficultés les collectivités territoriales. Une solution doit être trouvée pour régler le problème au plus vite, notamment dans le cadre de la loi de finances de fin de gestion pour 2024, afin de permettre à la gendarmerie nationale de faire face à ses obligations.

Source : commission des finances du Sénat

Le contenu final de de la loi de finances de fin de gestion pour 2024 aura d'importantes conséquences. En effet, l'éventuel dégel de crédits ou l'ouverture de crédits nouveaux pour les FSI permettrait de financer des dépenses exceptionnelles qui n'ont pas pu être réglées jusqu'ici et de réduire l'intensité de l'effet d'éviction sur les autres postes de dépenses.

Le rapporteur spécial considère, à la lumière de ces éléments sur l'exécution des crédits en 2024 que les forces de sécurité intérieure n'ont pu satisfaire l'ensemble de leurs besoins essentiels cette année et qu'il appartient donc au budget de 2025 d'y répondre.

En outre, il remarque qu'au regard de ces mêmes éléments, la pertinence d'une comparaison des crédits initiaux de 2025 par rapport à ceux de 2024 doit être relativisée, les seconds ayant été en partie amputés par des annulations et par le financement de dépenses exceptionnelles dont toutes ne se reproduiront pas en 2025.

Enfin, il souligne le risque réel - voire probable - qu'une partie des dépenses exceptionnelles générées en 2024, que le montant de CP ne permettrait pas de couvrir avant la fin de l'année, conduise à une nette hausse des reports de charges, dont l'amortissement viendrait grever les crédits ouverts pour 2025. Il invite le Gouvernement à régler ce qui peut l'être dès la loi de finances de fin de gestion pour 2024, en particulier s'agissant des loyers impayés, afin de ne pas entrer à crédit dans l'année 2025.

II. UN BUDGET POUR 2025 QUI RESPECTE LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE FIXÉE PAR LA LOPMI, MALGRÉ UN CONTEXTE DE FORTE CONTRAINTE BUDGÉTAIRE POUR L'ÉTAT

A. LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE PRÉVUE PAR LA LOPMI EST GLOBALEMENT RESPECTÉE

1. La LOPMI a prévu une hausse continue des crédits des deux programmes de 2023 à 2027

La LOPMI22(*), entrée en vigueur en janvier 2023, présente les orientations financières et stratégiques pour le ministère de l'Intérieur pour les années 2023 à 2027, notamment pour la police et la gendarmerie nationales.

Le budget du ministère de l'Intérieur, qui porte sur trois missions budgétaires23(*), doit ainsi passer, hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions », de 20,78 milliards d'euros en CP en 2022 à 25,35 milliards d'euros en 2027 (+ 4,57 milliards d'euros des crédits annuels, soit + 22,0 %). Ces montants intègrent l'augmentation de 60 millions d'euros, en crédits de paiement, de la trajectoire prévue pour chacune des années concernées par la programmation (de 2023 à 2027) et permise par l'adoption d'un amendement de nos collègues députés Éric Ciotti et Philippe Gosselin24(*).

Au total, la hausse cumulée de crédits sur les cinq années 2023-2027 doit atteindre 15,3 milliards d'euros.

Trajectoire budgétaire proposée par le projet de loi LOPMI
pour le ministère de l'Intérieur pour les années 2023 à 202725(*)

(en millions d'euros, en crédits de paiement)

CRÉDITS DE PAIEMENT ET PLAFONDS DES TAXES AFFECTÉES

hors compte d'affectation spéciale « Pensions »

2022 (pour mémoire)

2023

2024

2025

2026

2027

Budget du ministère de l'Intérieur, en millions d'euros (hors programme 232 « Vie politique », hors programmes outre-mer et hors programmes du « CAS Radars » n° 754 et 755)

20 784

22 094

22 974

24 074

24 724

25 354

Évolution (N / N - 1), en millions d'euros

-

1 310

880

1 100

650

630

Taux d'évolution (N / N - 1)

-

6,3 %

4,0 %

4,8 %

2,7 %

2,5 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après la LOPMI : article 2). Les montants pour le budget du ministère de l'Intérieur (deuxième ligne) résultent de l'article 2 ; les calculs (troisième et dernière lignes) sont ceux de la commission des finances

À titre indicatif, et sans que ne soit prise en compte la hausse annuelle de 60 millions d'euros prévue par l'amendement précité26(*), le rapport annexé à la LOPMI décline par programmes budgétaires concernés la trajectoire pluriannuelle.

Il prévoit notamment la trajectoire suivante pour les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale » :

Trajectoire budgétaire indicative prévue pour les années 2023 à 2027 par la LOPMI pour le programme 176 « Police nationale », « hors CAS pensions »

(en millions d'euros, en crédits de paiement)

CRÉDITS DE PAIEMENT

hors compte d'affectation spéciale « Pensions »

2022 (pour mémoire)

2023

2024

2025

2026

2027

Programme 176 « Police nationale »

8 449

8 925

9 208

9 538

9 563

9 824

Dont dépenses « hors titre 2 »

1 435

1 539

1 629

1 826

1 826

2 029

Évolution du programme (N / N - 1), en millions d'euros

-

476

283

330

25

261

Taux d'évolution du programme (N / N - 1)

-

5,6 %

3,2 %

3,6 %

0,3 %

2,7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après la LOPMI : rapport annexé). Les montants pour le programme (deuxième ligne) résultent du rapport annexé ; les calculs (troisième et dernière lignes) sont ceux de la commission des finances

Trajectoire budgétaire indicative prévue pour les années 2023 à 2027
par la LOPMI pour le programme 152 « Gendarmerie nationale »,
hors « CAS pensions »

(en millions d'euros, en crédits de paiement)

CRÉDITS DE PAIEMENT

hors compte d'affectation spéciale « Pensions »

2022 (pour mémoire)

2023

2024

2025

2026

2027

Programme 152 « Gendarmerie »

5 894

6 188

6 361

6 503

6 811

6 931

Dont dépenses « hors titre 2 »

1 555

1 555

1 528

1 596

1 838

1 904

Évolution du programme (N / N - 1), en millions d'euros

-

294

173

142

308

120

Taux d'évolution du programme (N / N - 1)

-

5,0 %

2,8 %

2,2 %

4,7 %

1,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après la LOPMI : rapport annexé). Les montants pour le programme (deuxième ligne) résultent du rapport annexé ; les calculs (troisième et dernière lignes) sont ceux de la commission des finances

2. Le budget pour 2025 des deux programmes respecte globalement la trajectoire prévue

La LOPMI prévoit que les CP « hors CAS «Pensions » devaient être en 2025 de 9,538 milliards d'euros pour la police nationale et de 6,503 milliards d'euros pour la gendarmerie nationale. Cet objectif est dépassé pour la gendarmerie (6,931 milliards d'euros) ; pour la police nationale, il n'est pas tout à fait atteint, mais les crédits s'établissent à un niveau très proche de l'objectif (9,514 milliards d'euros).

B. UN BUDGET EN HAUSSE CUMULÉE DE 4,2 % EN 2025 SUR LES DEUX PROGRAMMES...

Les crédits demandés pour les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale » sont en hausse en cumulé par rapport à 2024, tant en AE (+ 2,9 %, + 718 millions d'euros), qu'en CP (+ 4,2 %, + 975 millions d'euros). Cette hausse doit être saluée dans le contexte d'efforts généraux en matière de redressement des finances publiques.

Elle s'opère en présence de transferts de périmètre de faible ampleur. Sur le programme 176, le solde total entrant des transferts de crédits est d'environ 18 millions d'euros, auxquels s'ajoute une mesure de périmètre consistant dans une rétrocession de crédits numériques, à hauteur de 17 millions d'euros, vers le programme. Sur le programme 152, les transferts de crédits présentent un solde total entrant d'environ 1,5 million d'euros.

Comparaison des crédits ouverts en 2024 et demandés en 2025

(en millions d'euros, en %)

 

 

Loi de finances initiale pour 2024

Crédits demandés en 2025

Évolution

Police nationale

AE

13 362,0

13 745,3

2,9 %

CP

12 932,7

13 370,1

3,4 %

Gendarmerie nationale

AE

11 031,5

11 366,3

3,0 %

CP

10 393,0

10 930,8

5,2 %

Total

AE

24 393,6

25 111,6

2,9 %

CP

23 325,7

24 300,9

4,2 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

À l'inverse de l'année dernière, la hausse bénéficie davantage au programme 152 « Gendarmerie nationale » (+ 335 millions d'euros en AE et + 538 millions d'euros en CP, soit respectivement + 3,0 % et + 5,2 %) qu'au programme 176 « Police nationale » (+ 383 millions d'euros en AE et + 437 millions d'euros en CP, soit respectivement + 2,9 % et + 3,4 %).

Comparaison des crédits ouverts en 2024 et demandés en 2025
pour la police nationale

(en millions d'euros, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Comparaison des crédits ouverts en 2024 et demandés en 2025
pour la gendarmerie nationale

(en millions d'euros, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Il convient toutefois de noter que le Gouvernement pourrait déposer un amendement visant à tirer les conséquences pour la mission « Sécurités » de mesures transversales d'économies prises, après la présentation du présent budget, en matière de masse salariale pour l'ensemble de la fonction publique27(*). Il pourrait en résulter une réduction des crédits de 31,6 millions d'euros pour la police nationale et de 20,4 millions d'euros pour la gendarmerie, pour la quasi-totalité en dépenses de personnel.

III. LE BUDGET POUR 2025 MARQUE UNE PAUSE DANS LA HAUSSE DES EFFECTIFS, QUI DOIT RAPIDEMENT REPRENDRE

Dans le contexte de l'examen du projet de LOPMI, la Première ministre Élisabeth Borne avait annoncé, le 6 septembre 2022, la création d'environ 8 500 postes de policiers et gendarmes entre 2023 et 2027, poursuivant sur la lancée du quinquennat précédent.

Sur la période de 2023 à 2027, il est attendu (selon les données recueillies par le rapporteur spécial28(*) mais qui ne sont pas inscrites dans le dispositif ou le rapport annexé de la LOPMI) un schéma d'emplois de + 3 540 ETP pour la gendarmerie nationale et + 3 872 pour la police nationale, soit un total légèrement inférieur à 7 500. En 2023, le schéma d'emplois prévu a été exécuté pour les deux forces conformément aux objectifs (respectivement + 950 et + 1 907 ETP), de même qu'en 2024 (+ 1 045 et + 1 139 ETP).

En 2025, alors que le schéma d'emplois attendu était de + 500 ETP pour la gendarmerie et de + 356 ETP pour la police nationale, celui retenu par présent budget est neutre29(*).

Si ce schéma d'emplois nul peut s'expliquer par la situation très dégradée des finances publiques, il risque de poser des difficultés s'agissant notamment de la création prévue de nouvelles brigades de gendarmerie et de la police aux frontières. Le renforcement progressif des réserves opérationnelles, bien que primordial, ne peut suffire à répondre aux enjeux d'effectifs.

A. LA POURSUITE DU DÉPLOIEMENT DES NOUVELLES BRIGADES DE GENDARMERIE SUPPOSE UNE HAUSSE CONCOMITTANTE DU NOMBRE DE GENDARMES

Le 2 octobre 2023, le Président de la République a présenté la carte des 239 nouvelles brigades de gendarmerie, dont le principe avait été annoncé dans le cadre de la LOPMI30(*). Elles s'ajoutent à la mise en place de 7 nouveaux escadrons de gendarmerie mobile (EGM), opérationnels en 2024. Ces brigades ont vocation à être créées dans tous les départements, en métropole comme dans les outre-mer. Elles consisteront en 145 brigades mobiles et 94 brigades fixes sur l'ensemble du territoire national.

Selon les informations transmises au rapporteur spécial31(*), le calendrier prévisionnel prévoit l'ouverture de 80 nouvelles brigades en 2024 et 57 en 2025. Au 31 décembre 2024, les 80 premières brigades (28 fixes et 52 mobiles) devraient effectivement être en place, dans 64 départements de métropole et 8 départements ou collectivités d'outre-mer (voir la carte en annexe).

Toutefois, les prévisions d'ouverture de nouvelles brigades sont étroitement corrélées avec celles de hausses d'effectifs. Ainsi pour 2025, il était initialement attendu non seulement la création de 57 brigades additionnelles mais également de 500 ETP. Il n'apparaîtrait en effet pas possible d'ouvrir autant de nouvelles brigades à effectifs constants sans générer de multiples conséquences néfastes. Comme l'ont indiqué les représentants de la direction générale de la gendarmerie nationale lors de leur audition, si le schéma d'emploi est effectivement nul en 2025, le nombre d'ouverture de nouvelles brigades sera nécessairement réduit. La question serait également posée pour celles devant être mis en place en 2026 et 2027.

Dans ces conditions, le rapporteur spécial estime qu'à défaut d'un éventuel renforcement des effectifs prévus pour la gendarmerie pour 2025 à l'initiative du Gouvernement dans le cadre de l'examen du présent projet de loi de finances, un rattrapage sera nécessaire en 2026 et 2027 pour assurer le déploiement effectif des 239 nouvelles brigades à l'horizon 2027.

B. LA PROTECTION DES FRONTIÈRES PAR LES SERVICES DE POLICE NÉCESSITERA DES PERSONNELS PLUS NOMBREUX

Dans un contexte de très haut niveau de la pression migratoire et notamment de l'immigration illégale, le travail des FSI est une condition d'autant plus essentielle à la sécurisation effective de nos frontières.

Au sein de la police nationale, la direction nationale de la police aux frontières (DNPAF) est chargée du contrôle aux frontières et de la lutte contre l'immigration clandestine.

La direction nationale de la police aux frontières (DNPAF)

La DNPAF, rattachée à la direction générale de la police nationale (DGPN), assure des missions de contrôle aux frontières, de lutte contre l'immigration irrégulière ainsi que de gestion opérationnelle des centres de rétention administrative (CRA).

Son champ d'intervention comprend la sûreté des moyens et infrastructures de transports internationaux, la centralisation des informations relatives aux flux et risques migratoires et leur analyse à des fins opérationnelles. Elle coordonne également l'éloignement des étrangers en situation irrégulière.

En outre, l'Office de lutte contre le trafic illicite de migrants (OLTIM) a en charge la répression des filières d'immigration irrégulière d'entrée, de séjour et de circulation sur le territoire national, du démantèlement des structures organisées employant des étrangers sans titres, des officines de faux documents liés à ces activités, ainsi que de l'identification des flux illicites générés par ces trafics et la saisie des avoirs criminels.

Par ailleurs, le nouvel état-major opérationnel des frontières (EMOF), créé le 1er janvier 2024, est adossé à la DNPAF. Cette nouvelle structurelle rassemble des policiers, gendarmes et douaniers.

Source : police nationale

Outre la DNPAF, d'autres directions de la DGPN contribuent de manière moins centrale aux fonctions de contrôle des flux migratoires, de sûreté des transports et de lutte contre l'immigration clandestine, notamment la direction nationale de la sécurité publique, les compagnies républicaines de sécurité (CRS) et la préfecture de police de Paris. Au total, les effectifs concernés représenteraient 15 977 ETPT en 2025.

La sécurisation des frontières n'incombe toutefois pas qu'à la police nationale. En effet, la gendarmerie, compétente sur 94 % du linéaire frontalier national, contribue également largement à cette mission. Si elle n'est pas dotée d'une direction spécialisée en la matière, contrairement à la police, c'est en raison de son organisation généraliste et pyramidale. Néanmoins, la lutte contre l'immigration clandestine fait partie de son quotidien. Elle assure notamment :

- un contrôle aux frontières : particulièrement sur la façade italienne, les côtes de la Manche et dans les Outre-Mer (Mayotte, Guyane) ;

- le traitement administratif et judiciaire des étrangers en situation irrégulière (y compris la lutte contre les filières d'immigration) ;

- un appui aux autres forces, notamment via la reprise de missions de surveillance de la DNPAF et la gestion ponctuelle de CRA en remplacement de la police nationale.

Environ 1 000 gendarmes mobiles et départementaux sont engagés à temps plein sur les missions de lutte contre l'immigration irrégulière ; s'y ajoutent environ 2 000 réservistes mobilisés quotidiennement.

Face au besoin impérieux de protéger nos frontières et de lutter contre l'immigration clandestine, les moyens des deux forces doivent encore être renforcés.

La DNPAF fait ainsi aujourd'hui face à de nombreux enjeux généraux : hausse de la pression migratoire et du nombre de personnes devant faire l'objet d'un retour forcémaintien de la fluidité des contrôles dans les aéroports dans le contexte d'une hausse du trafic et de la nécessaire exigence du contrôle, gestion des risques sanitaires et terroristes, poids des changements géopolitiques (Brexit, conflit en Ukraine) et des évènements internationaux, etc.

En 2024, son activité a été marquée par les succès obtenus en matière de fluidité du passage de la frontière à Roissy pendant les JOP, par une meilleure sécurisation de la frontière franco-italienne liée notamment à l'action des forces italiennes, et par la hausse du taux d'occupation des CRA.

Néanmoins, de nouveaux défis sérieux apparaissent, à l'image de la hausse des flux constatés de personnes à la frontière franco-espagnole, de la vigueur des filières de passeurs ou encore des conséquences matérielles de la décision du 2 février 2024 du Conseil d'État, dite jurisprudence « ADDE ». Celle-ci a pour conséquence d'alourdir significativement les protocoles de prise en charge des étrangers en situation irrégulière ; selon les informations recueillies par le rapporteur spécial, la DNPAF estime que le temps nécessaire au traitement de chaque cas serait désormais 8 fois supérieur. S'y ajoute la future mise en oeuvre, à tous les points de passage de la frontière, du système informatique EES (système d'entrée sortie de l'espace Schengen) d'enregistrement et de contrôle des données personnelles des ressortissants de pays non-membres de l'UE qui franchissent les frontières extérieures de l'espace Schengen ; cela nécessitera selon la DNPAF la création de 462 ETP supplémentaires. En outre, la mise en oeuvre du plan « CRA 3000 », qui vise à faire passer le nombre de places en CRA de 1 959 aujourd'hui à 3 000 en 2027, nécessitera une progression concomitante des effectifs, estimés à 1 600 ETP par la DNPAF32(*).

Dans ces conditions, comme pour ce qui concerne la création de nouvelles brigades de gendarmerie, le rapporteur spécial estime que des créations de postes sont nécessaires en faveur de la DNPAF. À défaut d'un éventuel renforcement des effectifs prévus pour 2025 à l'initiative du Gouvernement dans le cadre de l'examen du présent projet de loi de finances, l'effort devra être produit en 2026 et 2027. Il en va de l'efficacité de notre politique de sécurisation des frontières.

C. LES EFFECTIFS DES RÉSERVES OPÉRATIONNELLES PROGRESSENT, MAIS PAS ENCORE AUTANT QUE NÉCESSAIRE AU REGARD DE SON CARACTÈRE STRATÉGIQUE

Les réserves opérationnelles de la gendarmerie nationale et de la police nationales constituent pour elles des outils particulièrement précieux, notamment pour apporter un renfort d'effectifs permanent et une rapidité de déploiement. Leur caractère stratégique est particulièrement fort pour la sécurisation des frontières et la sécurité d'évènements inattendus ou d'ampleur exceptionnelle.

L'objectif de renforcement des réserves opérationnelles de la gendarmerie et de la police nationale a été fixé à un niveau ambitieux par la LOPM, à savoir, à l'horizon 2027, 50 000 réservistes pour la gendarmerie nationale et 30 000 réservistes pour la police nationale.

La réserve opérationnelle de la police nationale (ROPN), créée en 2022, compte 9 600 réservistes à fin 2024, dont environ la moitié issue de la société civile et l'autre moitié d'anciens policiers. En 2024, l'objectif de recrutement de 2 800 nouveaux réservistes devrait être atteint. La réserve de la gendarmerie, plus ancienne, comptera quant à elle 36 000 réservistes à fin 2024.

L'atteinte des objectifs ambitieux fixés par la LOPMI nécessitera un accompagnement financier adéquat. En 2025, après neutralisation des primes liées aux JOP en 2024, les crédits de la réserve de la gendarmerie seront en baisse de 15 millions d'euros par rapport à 2024, pour s'établir à 75,6 millions d'euros, et ceux de la police nationale restent stables, à 43 millions d'euros.

IV. DES ÉVOLUTIONS BUDGÉTAIRES DE NATURE SENSIBLEMENT DIFFÉRENTES EN 2025 ENTRE LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES

Si tant les crédits de la police nationale que ceux de la gendarmerie sont orientés à la hausse, l'analyse plus fine de leurs budgets fait apparaître des différences sensibles dans la nature de ces augmentations.

Ainsi, à l'inverse de l'année dernière, la gendarmerie nationale voit ses crédits hors dépenses de personnel progresser de manière dynamique (+ 235 millions d'euros en AE, soit + 11,1 %, et + 438 millions d'euros en CP, soit + 29,5 %), tandis que ceux de la police nationale évoluent peu (- 20 millions d'euros en AE, soit - 0,9 %, et + 34 millions d'euros en CP, soit + 2,0 %). La hausse des crédits de la police nationale est en effet largement concentrée sur les dépenses de personnel (+ 403 millions d'euros en AE/CP, soit + 3,6 %), contrairement à la gendarmerie nationale (+ 100 millions d'euros en AE/CP, soit + 1,1 %), et ce en dépit de l'absence d'augmentation des effectifs en 2025.

Pour la police nationale, le budget pour 2025 apparaît ainsi globalement comme une année de consolidation des conséquences des hausses de rémunération des personnels actées ces dernières années (outre les conséquences des hausses d'effectifs passées et de la nette hausse des versements au CAS « Pensions »33(*)), tandis que le niveau des crédits d'investissement constitue un point de vigilance. Pour la gendarmerie nationale, le budget pour 2025 vise à permettre une relance des dépenses hors personnel, en faveur tant de l'investissement que du fonctionnement, alors que les besoins sont très importants.

Ainsi que le précisent les documents budgétaires, la police nationale contribuera en 2025 « au rétablissement des équilibres budgétaires, par un effort de priorisation de ses dépenses et notamment de ses investissements », tandis que la gendarmerie nationale connaîtrait un « début de remise à niveau », s'agissant de son fonctionnement courant et de l'immobilier34(*).

A. ALORS QUE LES DÉPENSES DE PERSONNEL NE REPRÉSENTENT QU'UNE PART MINORITAIRE DANS LA PROGRESSION DES CRÉDITS DE LA GENDARMERIE, ELLES CONCENTRENT LA QUASI-TOTALITÉ DE CELLE DES CRÉDITS DE LA POLICE

1. En dépit d'une absence de hausse des effectifs en 2025, les dépenses de personnel augmentent au sein des deux forces, surtout pour la police nationale

En dépit d'une pause dans les créations de postes, le présent projet de loi de finances prévoit la poursuite de la progression des dépenses de personnel constatée sur les précédents budgets, de 3,6 % pour la police nationale et de 1,1 % pour la gendarmerie nationale, en AE et en CP, et de 2,5 % en cumulant les deux programmes. Si elle est inférieure à l'inflation pour la gendarmerie, elle y est près de deux fois supérieure pour ce qui concerne la police nationale.

En 2025, les dépenses de personnel (dites « de titre 2 ») de la gendarmerie nationale sont en hausse de 100 millions d'euros, tandis que celles de la police nationale augmentent de 403 millions d'euros, soit un niveau quatre fois supérieur. La hausse des crédits de titre 2 représente plus de 90 % de la progression des crédits de la police en 2025, contre moins de 20 % pour la gendarmerie.

Il convient néanmoins de noter qu'une part significative de la hausse des crédits de personnel de la police nationale relève de la contribution au CAS « Pensions ». Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial35(*), cela résulte du relèvement du taux de contribution du programme « Police nationale » au CAS « Pensions » à compter du 1er janvier 2025 ; cette évolution a été communiquée par la direction du budget au moment de la tenue des conférences de répartition.

Hors CAS « Pensions, la hausse des dépenses de titre 2 s'établit à + 132 millions d'euros, soit + 1,7 %, à savoir un niveau comparable à l'inflation et identique à la gendarmerie nationale (+ 83 millions d'euros en valeur pour cette dernière).

2. Hors CAS « Pensions », la hausse des dépenses de « titre 2 » s'explique à la fois par des mesures générales et catégorielles

Hors CAS « Pensions », la hausse des dépenses de « titre 2 » s'expliquait en 2024, d'une part, par des mesures générales (hausses d'effectifs et revalorisation du point d'indice) et, d'autre part, par des mesures catégorielles.

Les mesures générales, qui présentent un effet « cliquet », continuent de jouer un rôle structurel dans le niveau élevé des dépenses de personnel en 2025 pour la police nationale, à hauteur de 169,3 millions d'euros (revalorisations du point d'indice et du SMIC). En revanche, l'effet est nul pour la gendarmerie en 2025.

S'y ajoutent les mesures catégorielles. Pour la police nationale, leur coût atteindrait 73,4 millions d'euros, dont 62 millions d'euros au titre du protocole pour la modernisation des ressources humaines signé le 2 mars 2022, avec notamment la poursuite de la mise en oeuvre de la « prime voie publique » (surcoût de 27 millions d'euros), de l'indemnité de sujétion spécifique liée à l'exercice des fonctions dans un service de la police nationale (14,5 millions d'euros), et de la réforme statutaire du corps d'encadrement et d'application (surcoût de 8 millions d'euros). Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial36(*), le coût global de la mise en oeuvre du protocole de mars 2022 devrait atteindre 1 milliard d'euros sur la période de 2023 à 2027.

S'agissant de la gendarmerie nationale, le coût de ces mesures - qui consistent en l'extension en année pleine de dispositifs déjà déployés - représente 62 millions d'euros en 2025, dont 55 millions d'euros au titre du protocole pour la modernisation des ressources humaines signé le 2 mars 2022, dont 31 millions d'euros pour la seule « prime voie publique ».

3. Des crédits de personnel qui continuent de représenter l'essentiel du budget pour les deux forces en 2025

En 2025, le rythme plus rapide de la hausse des dépenses « hors titre 2 » par rapport à celle des dépenses de personnel conduit à un léger recul de la part des crédits de titre 2 au sein des deux programmes.

À l'échelle des deux forces, le taux s'établit de 84,8 % en CP, un niveau élevé bien qu'inférieur de 4,1 points à celui de 2020.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses
de la police et de la gendarmerie nationales

(hors crédits de la mission « Plan de relance »)

(en CP, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En 2025, l'évolution de la part des dépenses de personnel est inverse entre les deux forces, de façon cohérente avec la composition des hausses de crédits respectives37(*). À l'inverse de l'année dernière, pour la gendarmerie nationale, leur part dans l'ensemble des dépenses est en nette baisse (82,4 % en 2025 contre 85,7 % en 2024). Pour la police nationale, elle est en légère hausse (86,8 %, contre 86,6 % en 2024).

Il apparaît important de poursuivre le rééquilibrage entre les types de dépenses des forces de sécurité : outre d'effectifs, elles ont en effet besoin de crédits importants de fonctionnement et d'investissement, qui conditionne leur efficacité.

B. DES CRÉDITS « HORS TITRE 2 » QUI AUGMENTENT NETTEMENT POUR LA GENDARMERIE MAIS QUI ÉVOLUENT PEU S'AGISSANT DE LA POLICE NATIONALE

1. Les crédits « hors titre 2 » progressent au bénéfice essentiellement de la gendarmerie, à l'inverse de l'année dernière

Pour les deux forces, en cumulé, les crédits « hors titre 2 » apparaissent dynamiques (+ 5,0 % en AE, soit + 215 millions d'euros, et + 14,7 % soit + 472 millions d'euros, en CP) ; ils s'établissent à 4,50 milliards d'euros en AE et à 3,69 milliards d'euros en CP. Ils se décomposent essentiellement en dépenses de fonctionnement (2,86 milliards d'euros en CP) et d'investissement (781 millions d'euros).

Néanmoins, la dynamique est très différente entre les deux forces. Ainsi, la gendarmerie nationale voit ses crédits hors dépenses de personnel progresser de manière dynamique (+ 235 millions d'euros en AE, soit + 11,1 %, et + 438 millions d'euros en CP, soit + 29,5 %), tandis que ceux de la police nationale évoluent peu (- 20 millions d'euros en AE, soit - 0,9 %, et + 34 millions d'euros en CP, soit + 2,0 %)38(*).

Cette évolution est inversée par rapport à l'année dernière : en 2024, les crédits « hors titre 2 » avaient en effet été dynamiques pour la police nationale, tandis qu'ils avaient reflués pour la gendarmerie.

Le niveau des dépenses hors personnel peut être mis en regard de la trajectoire prévue par le rapport annexé à la LOPMI de ce point de vue39(*). Pour la police nationale, elles s'établissent en 2025 à 1,762 milliard d'euros en CP, soit un niveau inférieur d'environ 64 millions à ce que prévoyait la LOPMI. Pour la gendarmerie nationale, en revanche, elles s'établissent à 1,924 milliard d'euros, soit un niveau supérieur de près de 330 millions d'euros à l'objectif de la LOPMI.

Il apparaît ainsi que le budget pour 2025 porte un effort significatif de la mission au profit des dépenses hors personnel de la gendarmerie, alors que des efforts sont demandés à la police nationale dans ce domaine, en présence d'une hausse des dépenses de personnel beaucoup plus forte pour la police nationale que pour la gendarmerie. Cette évolution tend à compenser l'évolution inverse en 2024.

2. La police nationale voit ses crédits « hors titre 2 » rester relativement constants en CP, tandis que les AE d'investissement se réduisent très nettement

Les évolutions des crédits « hors titre 2 » de la police nationale peuvent être ventilées plus finement.

En crédits de paiement, les dépenses de fonctionnement sont en hausse de 2,1 % (+ 26 millions d'euros) et celles d'investissement de 1,6 % (+ 7 millions d'euros). Les mouvements sont beaucoup plus différenciés en AE, qui augmentent de 16 % en fonctionnement (+ 216 millions d'euros) mais baissent de - 30,4 % en investissement (- 236 millions d'euros).

Le fait marquant dans l'évolution des crédits proposés pour la police nationale tient ainsi dans la baisse notable des AE d'investissement. Cette réduction affectera le niveau des CP exécutés cette année et les années postérieures en matière d'investissement.

Ces tendances globales induisent différentes conséquences sur les postes de dépenses hors personnel de la police nationale.

Concernant les évolutions positives, il convient de noter en particulier la hausse des dépenses d'investissement en matière numérique, informatique et technologique (+ 27,3 % en AE et + 10,6 % en CP, soit respectivement + 267 millions d'euros et + 10 millions d'euros). Le rapporteur spécial rappelle en effet que ces outils présentent un caractère tout à fait stratégique pour l'opérationnalité des forces, par exemple en ce qui concerne la sécurisation des frontières mais aussi plus largement. La hausse des AE en fonctionnement du programme s'explique quant à elle principalement par le renouvellement de marchés pluriannuels, notamment en matière d'énergie.

Néanmoins, des baisses de crédits doivent être constatées. Outre une réduction nette des AE en matière de dépenses de fonctionnement pour les équipements40(*) (environ - 150 millions d'euros) liée essentiellement à un renouvellement de marché pluriannuel en 202441(*) ayant augmenté l'enveloppe allouée cette année-là, deux points de vigilance doivent être soulevés.

a) Des crédits d'acquisition de véhicules en nette baisse

En 2025, les dépenses liées au fonctionnement des véhicules de la police nationale sont en légère baisse, elles s'établissent à un niveau relativement comparable à ce qui était prévu initialement en 2024, à 141 millions d'euros en AE (- 6 %) et 136 millions d'euros en CP (- 8,7 %).

En revanche, les dépenses d'acquisition de moyens mobiles sont en nette baisse par rapport aux crédits initiaux de 2024. Elles sont de 65 millions d'euros en AE et de 75 millions d'euros en CP, soit une réduction de 55 % en AE (- 78 millions d'euros) et de 47 % en CP (- 68 millions d'euros). Il convient toutefois de noter qu'en exécution, les crédits finalement disponibles ont été fortement réduits en 2024 du fait du contexte budgétaire pour le programme42(*). Selon toute vraisemblance, les crédits exécutés en 2025 seront en réalité supérieurs à ceux de 2024 (à savoir environ 28,5 millions d'euros en AE et 42,8 millions d'euros en CP43(*)).

En 2025, le plan de renouvellement des véhicules vise l'acquisition de 1 875 véhicules, après environ 600 exécutés en 2024 et 2 487 en 202344(*). Ces niveaux sont inférieurs au besoin de renouvellement annuel du parc, estimé à 3 000 acquisitions par an, ce qui implique que le parc tend à vieillir et à se dégrader sur la période 2023-2025, après des années antérieures qui avaient néanmoins permis un certain renouvellement.

Les véhicules sont essentiels pour permettre aux forces de police de se déplacer dans des conditions satisfaisantes et efficaces. En outre, depuis 2022, les plans de renouvellement automobiles de la police nationale sont contraints par les mutations du marché d'acquisition de véhicules et notamment l'augmentation des coûts de production et la réduction des volumes de production et des modèles disponibles.

b) Des dépenses d'investissement en matière immobilière en baisse notable

L'essentiel du parc des immeubles occupés par les services de la police nationale se compose de bâtiments tels que les commissariats ou hôtels de police, les écoles de formation, les cantonnements et casernements de compagnies républicaines de sécurité, les bâtiments des services départementaux et régionaux de la police aux frontières, de la police judiciaire et de services de la sécurité intérieure ainsi que les locaux annexes comme les stands de tir, les garages et les ateliers.

En 2025, les dépenses de fonctionnement en matière immobilière pour la police nationale apparaissent en hausse par rapport à ce que prévoyait le projet de loi de finances pour 2024 (+ 167 millions d'euros en AE et + 23 millions d'euros en CP). La hausse en AE s'explique par le renouvellement de baux et contrats pluriannuels, notamment en matière d'énergie45(*).

En revanche, les dépenses d'investissement en matière immobilière sont en nette baisse en AE (- 34 %, soit - 180 millions d'euros), tandis qu'elles augmentent en CP (+ 33 %, soit + 69 millions d'euros). Il convient de noter qu'en exécution, les crédits immobiliers ont été fortement réduits en 202446(*).

Selon les informations transmises au rapporteur spécial, l'évolution en AE s'expliquerait par le fait que le volume d'AE prévu en 2024 devait « permettre l'engagement d'opérations immobilière d'envergure qui ont été reportées et qui ne pourront pas toutes démarrer en 2025 »47(*). La priorité en 2025 resterait la poursuite des chantiers déjà démarrés, d'où la hausse des CP et la contraction des AE.

Si le rapporteur spécial se félicite de la hausse des CP, il regrette la baisse notable des AE, au regard de l'état en partie dégradé du parc immobilier de la police nationale et de la nécessité d'engager de nouveaux projets d'opérations de construction.

3. La gendarmerie nationale connaît une hausse générale de ses crédits « hors titre 2 », au bénéfice de l'immobilier, des véhicules et des systèmes d'information et de communication

En 2025, la quasi-totalité des postes de dépenses « hors titre 2 » de la gendarmerie nationale connaît une progression. Il s'agit d'une évolution en miroir par rapport à 2024, année pour laquelle les crédits avaient réduit pour l'essentiel des postes. Ce sont les crédits d'investissement qui progressent le plus, en pourcentage.

Les AE sont stables (+ 0,4 %) en fonctionnement et sont en très forte hausse en investissement (+ 113 %, soit + 218 millions d'euros). En CP, les dépenses de fonctionnement sont en hausse de 22,8 % (+ 296 millions d'euros) et celles d'investissement de 76,7 % (+ 139 millions d'euros).

Si quelques postes de dépenses sont en baisse en AE, le plus souvent pour des raisons de renouvellements de marchés prévus les années précédentes et ayant nécessité une hausse temporaire de l'enveloppe en 2024, les crédits sont globalement en progression, en particulier au profit de l'immobilier, des moyens mobiles et des systèmes d'information et de communication.

Il convient de remarquer que si cette dynamique est très positive, elle répond à des besoins importants. Comme l'indiquent les documents budgétaires, le budget de la gendarmerie pour 2025 constitue « un début de remise à niveau ».

a) Une baisse en trompe l'oeil d'une partie des AE

En 2025, les AE de trois postes de dépenses sont orientées à la baisse. Il s'agit des dépenses de fonctionnement en matière d'équipement et des dépenses d'investissement et de fonctionnement concernant les moyens lourds de projection et d'intervention.

En premier lieu, les AE liées aux dépenses de fonctionnement d'équipement sont en baisse de 140 millions par rapport à 2024. Cette baisse résulte en réalité de renouvellements de marchés pluriannuels les années précédentes. En CP, les crédits sont en hausse de 10 millions d'euros.

En second lieu, les AE liées aux dépenses de fonctionnement et d'investissement en matière de moyens lourds de projection et d'intervention (aéronefs, véhicules blindés polyvalents, etc.) sont également en baisse, respectivement de 144 millions d'euros et de 88 millions d'euros. En matière de fonctionnement, cette évolution s'explique par le fait que les crédits concernés avaient été très significativement augmentés en 2024 pour le renouvellement de marchés pluriannuels concernant des hélicoptères et des drones. S'agissant des crédits d'investissement, l'année 2024 a également été marquée par une hausse de l'enveloppe pour l'acquisition d'hélicoptères, de drones et d'accessoires. Les crédits en AE en 2025 restent supérieurs à ceux de 2023. Par ailleurs, en CP, ils augmentent par rapport à 2024 (+ 29 millions d'euros en fonctionnement et + 12 millions d'euros en investissement).

b) Une hausse significative des crédits en faveur de l'investissement immobilier, qui ne suffira pas encore à répondre aux nouveaux enjeux

Les crédits dédiés à l'immobilier de la gendarmerie sont ventilés entre dépenses de fonctionnement et dépenses d'investissement. Les premières couvrent les loyers versés aux propriétaires des locaux occupés par la gendarmerie (collectivités territoriaux et bailleurs sociaux en particulier), les dépenses d'entretien courant, les coûts d'énergie et de fluides et, à titre marginal, divers frais de fonctionnement. Les secondes recouvrent les coûts d'acquisition et de construction immobilières, de maintenance et de réhabilitation, et ceux liés aux opérations conclues au titre de contrats de partenariat avec le privé.

À ce jour, les enjeux en matière d'immobilier pour la gendarmerie nationale tiennent principalement à l'extension de son emprise territoriale, notamment dans le cadre du plan 239 brigades48(*), au coût de ses loyers49(*), et à l'entretien des nombreux immeubles dont elle est propriétaire et dont l'état est en moyenne dégradé.

La nécessité de mettre fin au désordre bâtimentaire
pour la gendarmerie nationale

Le rapporteur spécial a récemment présenté un rapport de contrôle sur l'immobilier de la gendarmerie nationale50(*).

Alors que l'immobilier constitue une fonction stratégique dans la gendarmerie, notamment au regard de l'obligation de logement en caserne des gendarmes et de leur famille, la gendarmerie occupe aujourd'hui un parc de 11 millions de mètres carrés marqué par la dette grise du parc domanial et le coût croissant du parc locatif.

Pour y faire face, il est nécessaire tout d'abord de confirmer le recours aux financements innovants, en particulier les marchés de partenariat, et de consolider la participation des collectivités locales au déploiement des nouvelles brigades territoriales.

Il apparaît notamment indispensable de rehausser le montant des coûts-plafonds pour la fixation des loyers versés par la gendarmerie aux collectivités territoriales et aux organismes d'habitations à loyer modéré bailleurs pour garantir la viabilité des projets d'extension du parc locatif de la gendarmerie51(*).

Il convient également de prioriser les urgences à traiter et mieux programmer à moyen terme les investissements immobiliers.

Source : commission des finances

En 2025, les crédits de fonctionnement et d'investissement consacrés à l'immobilier connaissent une évolution positive, dans un contexte de besoins très importants.

S'agissant de l'investissement, par rapport à 2024, les AE sont près de cinq fois supérieures (+ 376 %, soit + 233 millions d'euros), tandis que les CP progressent de 61 % en CP (+ 67 millions d'euros). Ils s'établissent à 295 millions d'euros en AE et à 176 millions d'euros en CP.

La dotation prévue pour 2025 doit permettre de relancer les grands projets de construction et de réaliser des opérations indispensables de réhabilitation d'ampleur de certaines emprises domaniales de la gendarmerie. En AE, la hausse porte principalement sur les acquisitions et les constructions immobilières (+ 237 millions d'euros) et la maintenance-réhabilitation (+ 43 millions d'euros), tandis qu'elles se réduisent pour les marchés de partenariat (- 47 millions d'euros), après une forte hausse en 2024.

Les CP restent, quant à eux, néanmoins stables pour les marchés de partenariat. Pour l'heure, seul celui de Versailles-Satory serait confirmé, tandis que sont envisagés des projets à Dijon-Deflandre, Mayotte et Melun52(*).

Cette évolution générale des crédits d'investissement est saluée par le rapporteur spécial. Néanmoins, il convient de noter qu'elle ne suffira pas à régler les importants écueils constatés ces dernières années en matière d'investissement pour la gendarmerie nationale. Selon la formulation utilisée dans les documents budgétaires, les crédits prévus pour 2025 pour la gendarmerie ne marquent qu'« un début de remontée progressive des enveloppes allouées à l'immobilier domanial ». Il est rappelé que la gendarmerie estime à 400 millions d'euros les besoins annuels en investissement nécessaires, soit un niveau nettement supérieur à celui prévu en 2025.

Concernant le fonctionnement, la progression des crédits est moins franche par rapport à la loi de finances initiale pour 202453(*) (+ 2,5 % en AE, soit + 29 millions d'euros et + 7,0 % en CP, soit + 56 millions d'euros). Ils s'établissent à 1 164 millions d'euros en AE et à 855 millions d'euros en CP. Si les crédits d'entretien et de nettoyage sont en hausse (+ 53 millions d'euros en AE et + 50 millions d'euros en CP), de même que les AE d'énergie et de fluides en raison du renouvellement de marchés pluriannuels (+ 170 millions d'euros), les crédits dédiés aux loyers sont contrastés : les CP augmentent de 25 millions d'euros, tandis que les AE baissent de 30 millions d'euros par rapport au projet de loi de finances initiale pour 2024. En sens inverse, les subventions d'investissement (dépenses d'intervention) versées aux collectivités pour contribuer au financement des opérations immobilières de construction de locaux de gendarmerie sont en hausse de 9 millions d'euros en AE et de 4 millions d'euros en CP.

Le rapporteur spécial a souligné54(*) les tensions fortes qui pèsent sur les loyers de la gendarmerie nationale. D'un point de vue conjoncturel, la gendarmerie nationale n'est pas en mesure de payer la majorité de ses loyers à l'automne 2024. D'un point de vue structurel, l'équilibre des montages financiers permettant de construire de nouvelles casernes suppose de mieux rémunérer les bailleurs, notamment les collectivités territoriales, ce qui suppose une hausse des loyers. En outre, la création de nouvelles brigades induit mécaniquement une hausse progressive du coût global des loyers. Les crédits prévus pour les années à venir doivent prendre en compte pleinement ces enjeux.

c) Après une année 2024 marquée par des économies, un effort est fait en 2025 en faveur des moyens mobiles

S'agissant des moyens mobiles, le budget pour 2025 prévoit un effort important, après une année 2024 marquée par des économies.

Les dépenses de fonctionnement sont en hausse de 61 % en AE/CP (+ 45 millions d'euros), de même que celles d'investissement, qui sont en progression de 197 % en AE (+ 69 millions d'euros) et de 116 % en CP (+ 57 millions d'euros). Les crédits de fonctionnement s'établissent à 120 millions d'euros en AE=CP et les crédits d'investissement à 104 millions d'euros en AE et à 106 millions d'euros en CP.

Si la hausse des crédits de fonctionnement s'explique en partie par l'augmentation du coût des carburants, elle concerne également l'entretien et la réparation des véhicules. Surtout, la hausse des dépenses d'investissement devrait permettre de relancer les investissements relatifs aux véhicules au profit des unités territoriales de gendarmerie et de poursuivre le programme de renouvellement des véhicules de maintien de l'ordre.

Ces crédits permettraient de renouveler 1 850 véhicules en 2025, pour un besoin de renouvellement estimé en principe à 3 750 véhicules. Les véhicules constituent l'élément essentiel du travail des unités dans leurs territoires de compétence, par nature beaucoup plus larges que pour la police.

d) Des crédits en faveur des systèmes d'information et de communication en nette hausse

Les crédits, qui relèvent du seul fonctionnement pour la gendarmerie nationale cette année, en faveur des systèmes d'information et de communication sont en hausse de 147 % en AE (+ 147 millions d'euros) et de 75 % en CP (+ 81 millions d'euros). Ils s'établissent à 247 millions d'euros en AE et à 190 millions d'euros en CP.

Si des mouvements pluriannuels expliquent une partie de ces évolutions, la tendance dynamique constatée est vertueuse, l'opérationnalité des forces de gendarmerie dépendant fortement des outils numériques, qu'il s'agisse de matériels (équipements mobiles notamment) ou de technologies comme l'intelligence artificielle. La LOPMI a d'ailleurs fait du numérique une grande priorité.

DEUXIÈME PARTIE
LE PROGRAMME 207 « SÉCURITÉ ET ÉDUCATION ROUTIÈRES » ET LE CAS « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

I. LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE, UNE POLITIQUE DE NATURE INTERMINISTÉRIELLE QUI PRODUIT DES RÉSULTATS

A. UNE POLITIQUE DE NATURE FORTEMENT INTERMINISTÉRIELLE REPRÉSENTANT UN BUDGET D'ENVIRON 5 MILLIARDS D'EUROS POUR L'ÉTAT...

La politique de sécurité routière, dont la finalité est d'assurer la sécurité sur les routes, s'appuie sur trois objectifs généraux :

responsabiliser les usagers de la route vis-à-vis des autres et d'eux-mêmes (formation, information, sensibilisation, code de la route, sanction) ;

contribuer à l'amélioration des infrastructures (signalisation, sécurisation) ;

favoriser une évolution des moyens de mobilité permettant une sécurité renforcée de tous les usagers de la route (règlementation, encadrement de l'aide à la conduite, prévention des situations accidentogène, etc.).

La politique de sécurité routière, une politique interministérielle
dont les axes prioritaires ont été récemment renouvelés

La politique de la sécurité routière est par nature interministérielle. Au sein du ministère de l'Intérieur, elle concerne tant la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), que la direction générale de la police nationale (DGPN) et la délégation à la sécurité routière (DSR). De nombreux autres ministères sont également concernés : ministère de l'Éducation nationale (formation, sensibilisation, examens pour les attestations scolaires de sécurité routière), ministère de la Justice (contentieux de la circulation routière), ministère de la Santé et de l'Accès aux soins (sensibilisation aux risques pour la santé et organisation de la chaîne des secours et de soins d'urgence), ministère du Travail et de l'Emploi (animation de la prévention du risque routier professionnel), etc.

La coordination interministérielle est assurée par le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR), placé sous l'autorité du Premier ministre, qui fixe les orientations en matière de sécurité routière. C'est ensuite la Déléguée interministérielle à la sécurité routière (DISR), qui dirige en outre la DSR, qui prépare et met en oeuvre la politique de sécurité routière. L'action locale est portée dans chaque département par le préfet.

Le CISR du 17 juillet 2023 a décidé du renouvellement des axes prioritaires de la politique de sécurité routière, autour de 7 axes :

- éduquer pour mieux partager la route ;

- mieux détecter, évaluer et suivre les inaptitudes à la conduite ;

- protéger les usagers vulnérables de la route et accompagner les victimes ;

- s'engager pour la sécurité de toutes et tous sur les routes ;

- lutter contre les comportements les plus dangereux ;

- simplifier la vie des usagers de la route ;

- enfin, agir pour une meilleure sécurité routière dans les outre-mer.

Sur cette base, il a été décidé de renforcer l'éducation, la prévention et la répression des comportements les plus dangereux (alcool, stupéfiants, vitesse), en prônant en parallèle une logique d'indulgence pour les fautes d'inattentions (petits excès de vitesse).

Source : commission des finances

Le coût de la politique de sécurité routière est estimé, d'un point de vue interministériel, à environ 4,87 milliards d'euros en 2025 en CP, en hausse d'environ 101 millions d'euros par rapport à 2024. Ce coût est porté à titre principal par deux missions et un compte d'affectation spéciale :

- « Écologie, développement et mobilité durables » : via notamment les programmes 203 « Infrastructures et services de transport » (1,02 milliard d'euros) et 217 « Conduite et pilotages des politiques de l'économie, du développement et de la mobilité durables » (544 millions d'euros) ;

- « Sécurités » : via les programmes 152 « Gendarmerie nationale » (991 millions d'euros), 176 « Police nationale » (521 millions d'euros), mais également 207 « Sécurité et éducation routières » (83 millions d'euros) ;

- le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », via notamment les programmes 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » (777 millions d'euros) et 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » (336 millions d'euros).

B. ...QUI OBTIENT DES RÉSULTATS

Les résultats de la politique de sécurité routière peuvent être appréciés au regard du nombre d'accidents routiers observés, et notamment du nombre de décès afférents. De ce point de vue, les évolutions pluriannuelles doivent faire abstraction de la période marquée par la diffusion du Covid-19, qui a fortement affecté la circulation routière. L'année 2019 est ainsi considérée comme l'année de référence pour comparer les résultats obtenus dans la décennie 2020.

Évolution de la mortalité routière annuelle en France métropolitaine depuis 2010

Source : Observatoire national interministériel de sécurité routière

En 2023, 3 398 ont perdu la vie sur les routes en France (- 4,3 % par rapport à 2022), dont 3 167 en métropole (- 3,1 %) et 231 dans les territoires ultramarins (- 18,4 %)55(*). C'est moins qu'en 2019 (3 498 décès dont 3 244 en France métropolitaine et 254 dans les outre-mer).

Si la tendance est à la baisse depuis plusieurs années, en excluant la période de la pandémie de Covid-19, il convient de noter, selon les informations recueillies par le rapporteur spécial que 2 343 personnes sont décédées sur les neuf premiers mois de l'année 2024 en France métropolitaine, en hausse de 3 % par rapport à la même période en 2023 ; 155 personnes sont décédées dans les outre-mer, soit une baisse de 12 % par rapport à la même période en 2023. Néanmoins, ces chiffres sont meilleurs que ceux de 2022.

Les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, un succès de sécurité routière

L'organisation des JOP de 2024 en France a été intégrée dans la stratégie de la sécurité routière. La DSR a ainsi mis en place des aménagements routiers et une signalisation spécifique, de même qu'elle a déployé des campagnes de communication spécifiques pendant les JOP.

Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial, en Île-de-France, « le nombre de personnes tuées en juillet et août 2024 pourrait être inférieur aux années précédentes. Les restrictions imposées aux véhicules motorisés autour des sites ont permis d'apporter une sécurité aux piétons, nombreux. La présence de forces de l'ordre en nombre a également contribué à une présence dissuasive. Le nombre de blessés sur les routes d'Ile-de-France enregistrés par les forces de l'ordre sur la période juillet-août 2024 semble être du même ordre de grandeur que la moyenne des cinq années précédentes »56(*).

Source : commission des finances

Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial, sur la période 2021-2023, une vitesse excessive ou inadaptée est la première des causes identifiées chez les présumés responsables d'accidents mortels. La conduite sous influence d'alcool est la deuxième cause, tandis que l'inattention, les stupéfiants et les malaises sont identifiés pour respectivement 13 %, 12 % et 10 % des présumés responsables d'accidents57(*). Il est rappelé qu'un accident peut résulter de différents facteurs.

Depuis le début de la décennie 2020, la part des usagers vulnérables, c'est-à-dire non-carrossés (piétons, cyclistes, utilisateurs d'engins de déplacements motorisés électriques, et usagers de deux-roues motorisés), parmi les personnes tuées ou blessées gravement s'est renforcée.

Répartition de l'accidentalité par types de mobilité en 2023

Source : Observatoire national interministériel de sécurité routière

II. OBSERVATIONS SUR LE PROGRAMME 207 « SÉCURITÉ ET ÉDUCATION ROUTIÈRES »

A. UN NIVEAU DES CRÉDITS EN BAISSE DE 26 MILLIONS D'EUROS EN 2025

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » a été rattaché à la mission « Sécurités » en 2013, à la suite du placement de la délégation à la sécurité et à la circulation routières (DSCR devenue ensuite DSR) sous la tutelle du ministère de l'Intérieur, alors qu'elle relevait précédemment du ministère de l'Écologie, au titre de l'équipement.

Après une évolution de son périmètre en 2015 (les emplois sont désormais inscrits au programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »), puis en 2020 (les crédits permettant de développer et de maintenir les systèmes d'information de la DSR ont été transférés au programme 216), aucun changement n'est à noter pour 2025.

Ces crédits, qui représentent environ 0,33 % de la mission « Sécurités » en 2025, sont principalement consacrés aux actions de communication, d'éducation, de prévention et à l'organisation du permis de conduire (fonctionnement et examens).

Évolution des crédits par action du programme 207

(en millions d'euros et en %)

   

LFI 2024

PLF 2025

Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (volume)

Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (%)

FDC et ADP attendus en 2025

01 - Observation, prospective, réglementation et soutien au programme

AE

13,3

7,9

- 5,4

- 23,3 %

0,0

CP

13,3

7,9

- 5,4

- 23,7 %

0,0

02 - Démarches interministérielles et communication

AE

67,2

50,3

- 16,9

- 40,4 %

0,0

CP

66,6

49,7

- 16,9

- 40,4 %

0,0

03 - Éducation routière

AE

29,9

26,5

- 3,5

- 25,2 %

0,0

CP

29,0

25,6

- 3,5

- 25,4 %

0,0

Total programme 207

AE

110,4

84,6

- 25,8

- 23,3 %

0,0

CP

108,9

83,1

- 25,8

- 23,7 %

0,0

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le programme 207 connait une baisse de ses crédits de 25,8 millions d'euros en AE (- 23,3 %) et en CP (- 23,7 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Ses crédits s'établissent à 84,6 millions d'euros en AE et à 83,1 millions d'euros en CP.

Le rapporteur spécial constate que cette réduction apparente des crédits entre 2024 et 2025 résulte en réalité d'une pérennisation de la réduction des crédits du programme à laquelle a abouti en 2024 le décret d'annulation du 21 février 202458(*). Celui-ci avait en effet annulé 25 millions d'euros en AE/CP.

La baisse des crédits en 2025 concerne les trois actions du programme. Elle est concentrée en particulier, en valeur, sur l'action n° 2 « Démarches interministérielles et communication » (- 17 millions d'euros environ en AE et en CP). Cette baisse s'explique notamment par une réduction des crédits en faveur des systèmes d'information de la DSR, et de ceux dédiés aux actions locales. S'y ajoutent des réductions de crédit au sein des actions n° 1 « Observation, prospective, réglementation et soutien au programme » et 3 « Éducation routière », notamment s'agissant des études relatives à la sécurité routière et la gestion du dispositif du « permis à un euro par jour ».

Plus largement, en 2025, les crédits du programme poursuivront la réforme du permis de conduire, engagée en 2019. L'objectif présenté est de moderniser l'apprentissage de la conduite, de réduire son coût, et de faciliter et diminuer les délais d'inscription aux épreuves, en particulier l'épreuve de conduite. Il est en outre prévu :

- la création d'une e-formation à la mobilité tout au long de la vie ;

- des évolutions de la plateforme de réservation en ligne des places d'examen pratique du permis de conduire (« RdvPermis ») ;

- le suivi de la mise en oeuvre de la mesure de l'abaissement à 17 ans de l'âge pour passer le permis, en vigueur depuis le 1er janvier 2024 ;

- l'adaptation des questions du code de la route aux enjeux de sécurité routière.

Pour permettre l'augmentation du nombre de places d'examens au permis de conduire et réduire ainsi les délais de présentation, la délégation à la sécurité routière mobilisera les moyens suivants :

- la mise à disposition d'agents de la Poste comme examinateurs du permis de conduire de la catégorie B ;

- une offre d'examens supplémentaires assurés volontairement par les inspecteurs du permis de conduire ;

- la mobilisation des inspecteurs retraités toujours titulaires de leur qualification professionnelle.

Pour mémoire, il était prévu de créer 100 postes d'inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière (IPCSR) supplémentaires sur 4 ans (2023-2026), en plus des remplacements des postes vacants. 53 d'entre eux ont été créés en 2023 et 2024. Il semble qu'aucun poste supplémentaire ne doive toutefois être créé en 2025, dans un contexte budgétaire aujourd'hui plus contraint.

Ces différents efforts apparaissent d'autant plus nécessaires que le délai d'attente médian aux examens a nettement augmenté entre 2022 et 2023, passant de 54 jours à 65 jours, tandis que le coût pour l'administration par permis délivré a augmenté de 75,5 à 96 euros. Si cette évolution peut être expliquée par les classes d'âge nombreuses nées à partir de 2002, l'abaissement de l'accès au permis à 17 ans, et la possibilité initiale donnée au début de l'année 2024 de mobilier le CPF pour le permis moto, la tendance devra être inversée. Il est prévu une baisse des délais à compter de 2025.

Enfin, une priorité est posée en matière de lutte contre la conduite après usage de stupéfiant. Ainsi, la dotation pour l'acquisition de kits salivaires de dépistage et de confirmation est maintenue en 2025 à 4,1 millions d'euros comme en 2024, afin d'accroître le dépistage par les forces de l'ordre. En 2023, selon les informations recueillies par le rapporteur spécial59(*), les forces de sécurité intérieure ont réalisé 981 000 dépistages de stupéfiants (+ 26 % par rapport à 2022) qui se sont traduits par la constatation de 144 000 infractions (+ 10 %). À titre de comparaison, le volume des contrôles relatifs à l'alcoolémie dépasse 8 millions par an.

B. LE BUDGET RESTE SUPÉRIEUR À CEUX DE 2023 ET 2022, MÊME S'IL EST INFÉRIEUR À CE QUE PRÉVOYAIT LA LOPMI

En dépit de la baisse des crédits du programme en 2025, les crédits restent nettement supérieurs à ceux de 2023 (74,4 millions d'euros en CP) et de 2022 (50,1 millions d'euros en CP), avec 83,1 millions d'euros en CP.

Ils s'établissent toutefois à un niveau inférieur à ce qui était prévu dans le rapport annexé à la LOPMI pour 2025.

Trajectoire budgétaire indicative prévue pour les années 2023 à 2027
par la LOPMI pour le programme 207 « Sécurité et éducation routières

(en millions d'euros, en crédits de paiement, », « hors CAS pensions »)

CRÉDITS DE PAIEMENT

hors compte d'affectation spéciale « Pensions »

2022 (pour mémoire)

2023

2024

2025

2026

2027

Programme 207 « Sécurité et éducation routières », dont l'intégralité « hors titre 2 »

51

74

105

109

110

113

Évolution du programme (N / N - 1), en millions d'euros

-

23

31

4

1

3

Taux d'évolution du programme (N / N - 1)

-

45,1 %

41,9 %

3,8 %

0,9 %

2,7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après la LOPMI : rapport annexé). Les montants pour le programme (deuxième ligne) résultent du rapport annexé ; les calculs (troisième et dernière lignes) sont ceux de la commission des finances

III. OBSERVATIONS SUR LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

A. UN COMPTE À L'ARCHITECTURE COMPLEXE, NUISANT À LA LISIBILITÉ DE LA POLITIQUE DE VERBALISATION

L'article 49 de la loi de finances pour 200660(*) a créé le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », habituellement appelé CAS « Radars »61(*), en partie improprement, ses recettes étant en réalité plus larges. Son architecture, qui fait l'objet d'un ajustement en 2025, est devenue aujourd'hui trop complexe, ce qui nuit à la lisibilité de la politique de verbalisation.

1. Une architecture complexe, qui fait l'objet d'un ajustement en 2025

Le « CAS Radars » a vocation à retracer les dépenses financées à partir du produit des amendes routières. Il est composé, en dépenses, de deux sections.

a) Le CAS « Radars » est composé de deux sections finançant des dépenses de diverses natures

En 2025, les dépenses du compte restent réparties en deux sections, elles-mêmes respectivement divisées en un et trois programmes.

Depuis le 1er janvier 2017, la section 1 « Contrôle automatisé » ne comprend plus qu'un seul programme, le programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » finançant :

le déploiement et l'entretien des radars ;

- le traitement des messages d'infractions constatées par un dispositif de contrôle automatisé et à leur transformation en avis de contravention par l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) et son centre national de traitement (CNT) ;

- les charges de gestion du permis à points.

La section 2 « Circulation et stationnement routiers » comprend :

- le programme 753 « Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers » qui gère le déploiement du « procès-verbal électronique », le « PVe ». L'objectif principal de cet outil était de moderniser substantiellement, au profit des forces de l'ordre, la gestion des amendes en substituant au carnet à souche des outils nomades plus performants62(*) ;

- le programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » transfère aux collectivités territoriales une partie des recettes des amendes pour financer des dépenses en lien avec la sécurité routière ou les transports en commun ;

- le programme 755 « Désendettement de l'État » vient abonder le budget général au titre des recettes non fiscales.

b) Le CAS « Radars » se voit affecter des recettes provenant de deux types d'amendes routières

Le CAS « Radars » est alimenté par deux types de recettes :

- le produit des amendes forfaitaires faisant suite aux infractions relevées par les radars, dites « AF radars » ;

Le contrôle-sanction automatisé est applicable à vingt-et-une infractions

En application de l'article L. 130-9 du code de la route, la liste des infractions susceptibles de se voir appliquer un contrôle-sanction automatisé et donc des amendes issues de radars est défini par décret en Conseil d'État. Cette liste a été prévue par un décret du 28 décembre 201663(*), lequel a créé un article R. 121-6 au sein du même code, qui énumère aujourd'hui 21 infractions.

Parmi elles, se trouvent notamment le port d'une ceinture de sécurité, l'usage du téléphone tenu en main ou le port à l'oreille de tout dispositif susceptible d'émettre du son, l'usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules, de voies vertes et d'aires piétonnes, l'arrêt, le stationnement ou la circulation sur les bandes d'arrêt d'urgence, le respect des distances de sécurité entre les véhicules, le franchissement et le chevauchement des lignes continues, le sens de la circulation ou les manoeuvres interdites, les signalisations imposant l'arrêt des véhicules, les vitesses maximales autorisées, la priorité de passage à l'égard du piéton, l'obligation du port d'un casque homologué pour les deux-roues motorisées, le port de plaques d'immatriculation ou encore le niveau d'émissions sonores.

Source : commission des finances

- le produit des autres amendes de la police de la circulation forfaitaires, dites « AF hors radars », et des amendes forfaitaires majorées, dites « AFM » (radars et hors radars).

Néanmoins, le « CAS Radars » ne bénéficie pas de l'affectation de la totalité des recettes résultant de ces amendes. C'est l'article 49 de la loi de finances initiale pour 200664(*) qui fixe les règles de répartition de ces recettes.

Le schéma suivant récapitule les affectations des deux recettes entre les deux sections et les quatre programmes décrits supra.

Schéma d'affectation du produit des amendes routières en 2025

Source : projet annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », annexé au projet de loi de finances pour 2025

Pour les « AF radars » :

- une première fraction vient abonder la section 1 « Contrôle automatisé » du CAS, dans le respect d'un plafond défini par l'article 49 de ladite loi65(*) ;

- une seconde fraction bénéficie à la section 2 « Circulation et stationnement routiers » », dans le respect d'un plafond défini par l'article 49 de ladite loi66(*). Une première partie de cette fraction est affectée au programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières ». La seconde partie de la fraction est affectée au programme 755 « Désendettement de l'État » ;

- dans le cas où le solde des recettes des AF radars excède le cumul des plafonds de ces deux fractions67(*), le solde revient au Fonds pour la modernisation de l'investissement en santé (FMIS), dans la limite de 26 millions d'euros, puis - à compter de 202568(*) - à l'ANTAI, dans la limite de 13 millions d'euros, puis à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), pour le solde.

L'ajustement du l'architecture du CAS prévu par l'article 37
du projet de loi de finances pour 2025

L'article 37 du présent projet de loi de finances pour 2025 prévoit de modifier l'article 49 de la loi de finances pour 2006, principalement pour :

- d'une part, minorer légèrement - de 3,3 millions d'euros - le niveau du plafond d'affectation des recettes des AF Radars à la première section du compte ; le plafond passerait de 339,95 millions d'euros à 336,65 millions d'euros ;

- d'autre part et surtout, créer une affectation directe d'une fraction du produit des AF Radars à l'ANTAI. Ainsi, lorsque le produit des AF Radars serait supérieur à 532,65 millions d'euros69(*), l'ANTAI bénéficierait d'une affectation de recettes, dans la limite de 13 millions d'euros. Cette affectation de recettes est sans lien avec la subvention déjà versée à l'ANTAI en droit constant, au titre des programmes 753 et 75470(*).

Source : commission des finances

Pour les « AF hors radars » et les « AFM » :

45 millions d'euros sont affectés au budget général au titre de recettes non fiscales ;

le solde vient alimenter la section 2 du CAS dont une première fraction est fléchée vers le programme 753 (« PVe ») ; une seconde fraction est ensuite répartie entre le programme 754 pour 53 %, et le programme 755, pour 47 %.

Ce schéma de répartition des recettes au sein du CAS Radars s'applique tant aux recettes prévues en loi de finances initiale qu'aux éventuels hausses de recettes en cours d'exécution, sauf disposition législative contraire. Les dépenses correspondantes varient chaque année en fonction du rendement des amendes, qui tend à augmenter.

En 2025, alors que les amendes routières devraient produire un rendement cumulé de 2,193 milliards d'euros, 1,864 milliard d'euros reviendrait au CAS « Radars ». En effet 329 millions d'euros, soit 15 % du produit des amendes, n'entrent pas dans son périmètre et alimentent directement l'AFITF (245 millions d'euros), le budget général de l'État (45 millions d'euros), le FMIS (26 M€) et, à compter de 2025, l'ANTAI (13 millions d'euros)71(*).

L'ANTAI, un opérateur central dans la politique de verbalisation
aux compétences en élargissement constant

L'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI), créée par un décret du 29 mars 201172(*), est un établissement public administratif de l'État, placé sous la tutelle du ministre de l'Intérieur.

Sa mission principale est d'« agir en tant que prestataire de services dans le cadre de la politique de sécurité routière pour le traitement des infractions routières relevées par l'intermédiaire de dispositifs de contrôle automatisé ou via des dispositifs de verbalisation électronique »73(*). Cette mission comprend notamment la conception et l'exploitation des systèmes et applications nécessaires au traitement automatisé des infractions, la préparation, l'édition, et l'affranchissement des avis de contravention et de différents courriers, l'information des contrevenants.

Ses missions ont été progressivement élargies, lui permettant d'agir en qualité de prestataire de services de l'État, de collectivités territoriales ou de tout organisme de service public pour le traitement des infractions autres que routières. L'ANTAI s'est ainsi vue confier les missions suivantes74(*) :

- le déploiement du procès-verbal électronique (PVe), au sein des services de l'État et des collectivités, pour l'établissement des contraventions ainsi que le traitement des messages d'infractions émis par ce biais ;

- l'extension du PVe aux amendes forfaitaires délictuelles (AFD), et à un nombre de plus en plus conséquent d'entre elles ;

- le traitement des contraventions pour non-désignation des conducteurs par les personnes morales ;

- la gestion des forfaits de post-stationnement (FPS), pour les collectivités qui le sollicitent depuis la dépénalisation et la décentralisation du stationnement payant ;

- l'extension du traitement des infractions issues des dispositifs de contrôle automatisé mis en place par les collectivités territoriales au titre de la sécurité routière ou d'objectifs environnementaux.

Source : commission des finances

2. Un CAS qui ne garantit plus la lisibilité de la politique de verbalisation, censée financer la politique de sécurité routière

Du fait de son architecture particulièrement complexe et peu lisible et du financement de dépenses ne relevant pas toutes de la sécurité routière, le CAS contrevient au principe de spécialité des crédits et ne favorise pas l'acceptabilité de la politique de verbalisation, qui était pourtant l'objectif initial à sa création.

En 2025, certaines affectations de recettes des amendes ne présentent ainsi aucun lien avec la sécurité ou les infrastructures routières. C'est le cas, au sein du périmètre des dépenses du CAS, des crédits qui alimentent le programme 755 « Désendettement de l'État », soit 38,9 % des crédits (725 millions d'euros) du compte. S'y ajoute, en dehors du périmètre du CAS, l'affectation de 45 millions d'euros au budget général.

Au total, sur un rendement cumulé de 2,193 milliards d'euros issu des amendes, a minima 770 millions d'euros des dépenses ne présentent aucun lien avec la sécurité ou les infrastructures routières, soit plus d'un tiers des crédits (35,1 %).

Ventilation de l'affectation des recettes des amendes en 2025

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », annexé au projet de loi de finances pour 2025

B. UNE NETTE PROGRESSION DU PRODUIT DES AMENDES AFFECTÉ AU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE, QUI BÉNÉFICIE PRINCIPALEMENT AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET AU DÉSENDETTEMENT DE L'ÉTAT

1. Une progression des recettes affectées au CAS d'environ 12 % en 2025

En 2025, les recettes du CAS « Radars » sont prévues en hausse de 12,3 % en AE/CP (+ 204 millions d'euros) par rapport à 2024, pour s'établir à 1,86 milliard d'euros, comme les dépenses75(*). Le solde du compte est nul76(*).

La hausse des recettes du CAS provient des « AFM » et des « AF hors radars », en hausse de 18 % (+ 207 millions d'euros), tandis que les « AF radars » ont un rendement stable (- 1,1 %, soit - 3,6 millions d'euros).

Évolution des crédits de la mission « Contrôle de la circulation
et du stationnement routiers »

(en millions d'euros et en pourcentage)

   

LFI 2024

PLF 2025

Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (volume)

Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (%)

FDC et ADP attendus en 2025

751 - Structures et dispositifs de sécurité routière

AE

339,6

336,3

- 3,3

- 1,0 %

0,0

CP

339,6

336,3

- 3,3

- 1,0 %

0,0

755 - Désendettement de l'État

AE

627,4

724,9

+ 97,5

+ 15,5 %

0,0

CP

627,4

724,9

+ 97,5

+ 15,5 %

0,0

754 - Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

AE

666,8

776,8

+ 109,9

+ 16,5 %

0,0

CP

666,8

776,8

+ 109,9

+ 16,5 %

0,0

753 - Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

AE

26,2

26,2

0,0

0,0 %

0,0

CP

26,2

26,2

0,0

0,0 %

0,0

Total CAS

AE

1 660,1

1 660,1

+ 204,1

+ 12,3 %

0,0

CP

1 660,1

1 660,1

+ 204,1

+ 12,3 %

0,0

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

2. Des crédits des programmes liés à la politique de sécurité routière globalement stables et dans l'épure de la LOPMI
a) Les crédits du programme 751 sont relativement stables, dans un contexte d'aboutissement du déploiement du parc de radars et de leur modernisation

Les crédits du programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière », sont en très légère baisse en 2025. Ils s'établissent à 336,3 millions d'euros en AE/CP, en baisse de - 1,0 %, à savoir - 3,3 millions d'euros.

Ces crédits financent quatre postes principaux.

Premièrement, le poste de dépenses principal du programme concerne l'action et les moyens mis en oeuvre par l'État dans le cadre du système de contrôle-sanction automatisé (radars), à l'exception des moyens humains nécessaires à la mise en oeuvre des dispositifs mobiles et ceux alloués au traitement automatisé des infractions. 196,5 millions d'euros sont prévus à ce titre en 2025, en baisse de - 2,4 %, soit - 5 millions d'euros, par rapport à 2024.

Au 1er septembre 2024, le parc de radars était au total de 4 746 équipements opérationnels (contre 4 094 au 1er janvier 2020). L'objectif en 2025 est de maintenir ce nombre entre 4 600 et 4 800. Sur ce total, 4 160 devraient être actifs77(*), comme c'est déjà le cas aujourd'hui. Le nombre de radars opérationnels et actifs est ainsi désormais conforme aux objectifs. Le taux de disponibilité des radars est élevé en dépit de nombreux actes de vandalisme : en 2023, il était de plus de 90 %78(*).

En 2025, les crédits vont notamment permettre de continuer la modernisation du parc de radars et de poursuivre le déploiement des radars mobiles de nouvelle génération. En outre, selon les informations recueillies par le rapporteur spécial, l'achèvement opérationnel de l'externalisation de la conduite des véhicules radars dans toutes les régions (hors Île-de-France) devra intervenir fin 202479(*).

Évolution du nombre de radars depuis 2020

Date

Nombre total de radars

Radars fixes vitesse

Radars embarqués

Radars feu rouge

Radars passage à niveau

Radars autonomes

Radars Tourelles (Vitesse et franchissement)

1er janvier 2020

4 094

1 768

950

674

78

249

375

1er janvier 2021

4 224

1 572

905

628

76

249

794

1er août 2021

4 402

1 511

985

610

73

279

944

1er janvier 2022

4 422

1 528

964

590

71

308

961

1er septembre 2022

4 447

1 425

973

540

71

340

1 098

1er août 2023

4 636

1 349

975

531

71

440

1 270

1er septembre 2024

4 746

1 241

938

519

71

540

1 417

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Deuxièmement, le programme finance les dépenses liées au traitement des messages d'infractions constatées par un dispositif de contrôle automatisé et leur transformation en avis de contravention. Il s'agit concrètement d'une subvention à l'ANTAI, d'un montant de 98,3 millions d'euros en 2025, en hausse de 9,8 %, soit + 8,8 millions d'euros, par rapport à 2024.

Il convient de noter qu'outre les radars installés par l'État, s'ajoutent aujourd'hui ceux mis en place par les collectivités territoriales, dans le cadre de l'application des lois dites « LOM » du 24 décembre 201980(*) et « 3DS » du 21 février 202281(*) pour garantir le respect des mesures de régulation de la circulation routière et celui de normes antipollution (zones à faibles émissions mobilité, voies réservées, péage à flux libre, surcharge des poids lourds, etc.). L'ANTAI traite ces infractions issues des nouveaux dispositifs de contrôle automatisé.

L'extension aux collectivités territoriales de la possibilité de recourir
au contrôle-sanction automatisé

Le contrôle sanction-automatisé a longtemps constitué une compétence exclusive de l'État. Néanmoins, deux lois relativement récentes ont instauré la possibilité pour les collectivités territoriales de mettre en place des dispositifs de contrôle automatisé.

En premier lieu, la loi « 3DS » du 21 février 2022 a ainsi modifié l'article L. 130-9 du code de la route pour prévoir que les collectivités territoriales et leurs groupements gestionnaires de voirie peuvent installer de tels dispositifs, sous certaines conditions. Ainsi, le préfet doit émettre un avis favorable sur la demande, après que la commission départementale de la sécurité routière a été consultée. La demande au préfet doit être fondée sur une étude d'accidentalité portant sur les sections de route concernées et tenant compte des appareils de contrôle automatiques déjà installés82(*).

Selon les informations disponibles à ce jour84(*), ce sont les collectivités qui sont chargées de financer aussi bien l'achat des radars (via l'UGAP), que les travaux d'installation et le déploiement de la signalisation associée. S'agissant des recettes, les dispositions applicables ne prévoient pas une rétrocession des amendes perçues par la voie de ces dispositifs de contrôle automatisé aux collectivités les ayant installés.

En second lieu, la loi « LOM » du 24 décembre 2019 a prévu la faculté pour les collectivités du bloc communal de créer, sur tout ou partie du territoire de sa commune ou de son EPCI, des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) et d'y associer des dispositifs de contrôle automatisé pour en assurer le respect, sous certaines conditions. L'article 135 de la loi de finances initiale pour 202485(*) a prévu la rétrocession aux collectivités des amendes perçues par le biais de ces dispositifs spécifiques, déduction faite de la quote-part du produit affectée à l'ANTAI.

Source : commission des finances

Troisièmement, le programme finance les dépenses en lien avec le système du permis de conduire à points (37,7 millions d'euros en 2025), notamment pour financer, d'une part, l'envoi de différents types de courriers destinés à assurer l'information de chaque titulaire du permis de conduire quant au nombre de points restants, et, d'autre part, la modernisation des systèmes d'information concernés.

Enfin, le programme porte plusieurs dépenses de soutien (3,8 millions d'euros en 2025).

b) Des crédits du programme 753 qui ne connaissent pas d'évolution, tandis que le champ d'application du procès-verbal électronique poursuit son extension

Le programme 753 « Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers », dont le montant des crédits est de 26,20 millions d'euros en AE et CP en 2025, ne connaît pas de variation par rapport à 2024. Les crédits concernés financent le dispositif du procès-verbal électronique (PVe), dont la mise en oeuvre a été confiée à l'ANTAI. Ils consistent en une subvention versée à cette dernière agence.

Le dispositif du « PVe » substitue au carnet à souche des outils nomades de verbalisation des contraventions. L'infraction est constatée grâce à cet outil électronique dédié qui transmet directement les données au centre national de traitement (CNT) basé à Rennes, qui dépend de l'ANTAI. L'avis de contravention est édité et envoyé automatiquement par courrier au domicile du contrevenant. Le PVe est également applicable en matière de délits pouvant faire l'objet d'une procédure d'amende forfaitaire délictuelle (AFD).

L'extension du PVe à un nombre croissant d'amendes forfaitaires délictuelles

Alors que le dispositif du PVe a initialement été conçu pour traiter des contraventions routières, il a été étendu à compter de 2018 à certaines amendes forfaitaires délictuelles (AFD), routières et non-routières.

Le nombre d'AFD concernées par le PVe est en hausse progressive. Ont d'abord été couverts certains délits routiers (conduite sans assurance, conduite sans permis et conduite avec permis non adapté) puis des délits non-routiers, à mesure que plusieurs lois successives ont multiplié le nombre d'AFD applicables.

À ce jour, huit AFD ont été intégrées au sein du PVe par l'ANTAI : conduite sans permis, conduite avec un permis inadapté et conduite sans assurance (janvier 2019), usage de stupéfiants (septembre 2020), occupation illicite en réunion de parties communes d'immeubles (février 2022), vol simple (vol à l'étalage), vente à la sauvette (juillet 2023) et introduction, détention ou usage de fusées ou artifices dans une enceinte sportive (novembre 2023).

Six AFD sont par ailleurs en cours d'expérimentation, auxquelles cinq autres s'ajouteront en 2025.

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La généralisation de la verbalisation électronique est achevée dans les services de l'État (police et gendarmerie nationales) depuis juin 2012 et le déploiement de la solution électronique continue sa progression auprès des collectivités territoriales volontaires. Selon le projet annuel de performances, fin 2023, 4 700 communes utilisaient ainsi une solution de verbalisation électronique (pour leurs agents municipaux, dont les policiers municipaux), dont la quasi-totalité des villes de plus de 50 000 habitants. En 2023, les communes équipées du PVe ont généré 7,9 millions d'avis de contravention (ACO) initiaux, contre 7,8 millions en 2022.

Au total, 13,4 millions d'ACO initiaux par PVe - hors délits forfaitisés - ont été envoyés en 2023 par les services de l'État ou des collectivités, un chiffre stable par rapport à 2022. S'y ajoute l'envoi de près de 360 000 AFD, soit 24,5 % de plus qu'en 2022.

Par ailleurs, le programme 753 porte depuis 2017 le financement, via l'ANTAI, d'une partie de la modernisation des équipements des forces de l'ordre, s'agissant des appareils smartphones/tablettes dans le cadre du projet NEO (nouvel équipement opérationnel) porté par les directions générales de la gendarmerie et de la police nationales. 16 578 terminaux sont aujourd'hui financés par l'ANTAI (location et fonctionnement des terminaux)

c) Un montant des crédits des deux programmes conformes à la LOPMI

Les montants des programmes 751 et 753 sont globalement conformes - bien que très légèrement inférieurs d'un peu plus de 3 millions d'euros -, à ce qui était prévu dans le rapport annexé à la LOPMI.

Trajectoire budgétaire indicative prévue pour les années 2023 à 2027
par la LOPMI pour le « CAS Radars », programmes 751 et 753 (hors 754 et 755)

(en millions d'euros, en crédits de paiement, « hors CAS Pensions »)

CRÉDITS DE PAIEMENT

hors compte d'affectation spéciale « Pensions »

2022 (pour mémoire)

2023

2024

2025

2026

2027

Programmes 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » et 753 « Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers », l'intégralité étant « hors titre 2 »

366

366

366

366

366

366

Taux d'évolution du programme (N / N - 1)

-

0 %

0 %

0 %

0 %

0 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après la LOPMI : rapport annexé). Les montants pour le programme (deuxième ligne) résultent du rapport annexé

3. Des crédits en faveur de l'équipement des collectivités territoriales et du désendettement de l'État en progression

Les crédits du programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » sont, au titre de 2025, d'un montant prévisionnel de 777 millions d'euros, en hausse de 16,5 % (+ 110 millions d'euros).

Elles se décomposent ainsi :

- une fraction d'un montant de 71 millions d'euros (issue des amendes forfaitaires du contrôle automatisé) destinée à financer des opérations contribuant à la sécurisation des réseaux routiers des communes et EPCI, pour une part limitée à 7 millions d'euros, et des départements, de la collectivité de Corse, de la métropole de Lyon, des régions d'outre-mer et des métropoles, pour une part limitée à 64 millions d'euros ;

- une contribution de 706 millions d'euros (issue des amendes forfaitaires majorées du contrôle automatisé et des amendes forfaitaires hors radars) au titre du financement par les collectivités d'opérations destinées à améliorer les transports en commun et la circulation. Île-de-France-Mobilités et la région d'Île-de-France bénéficient également d'une part de cette enveloppe.

Le comité des finances locales répartit le produit des amendes entre les collectivités territoriales. Les modalités de répartition doivent assurer une redistribution équitable et une mutualisation entre collectivités disposant de ressources différentes.

Le programme 755 « Désendettement de l'État » voit au titre de 2025, ses crédits s'établir à un montant prévisionnel de 725 millions d'euros, en hausse de 15,5 % (+ 97,5 millions d'euros).

Cette hausse mécanique résulte, comme pour le programme 754, de la clé de répartition des recettes au sein du CAS Radars86(*).

C. DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'ANTAI QUI CONTINUENT DE PROGRESSER CORRÉLATIVEMENT À L'ÉLARGISSEMENT CONSTANT DE SES MISSIONS

Le budget de l'Agence est financé par deux programmes du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » : le programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » et le programme 753 « Contrôle et modernisation de la politique de circulation et du stationnement routiers », pour respectivement 98,3 millions d'euros et 26,2 millions d'euros, soit un total de 124,5 millions d'euros en 202587(*).

Le rapporteur spécial constate que les financements octroyés par l'État à l'ANTAI tendent à croître ces dernières années. En 2024, les crédits dédiés à l'Agence via ces deux programmes étaient ainsi respectivement de 89,5 millions d'euros et 26,2 millions d'euros, soit un total de 115,7 millions d'euros ; la hausse est ainsi de 7,6 % en un an, soit + 8,8 millions d'euros.

S'y ajoute, à compter de 2025, une nouvelle affectation de recettes, à hauteur de 13 millions d'euros, pour cette même Agence. Elle vise à compenser les coûts pour l'ANTAI de l'extension aux collectivités de la possibilité d'installer des systèmes de contrôle automatisé.

Selon les informations recueillies par le rapporteur spécial88(*), les coûts associés pour l'ANTAI relèvent de :

- la conception d'un système global (création d'une plateforme de gestion à distance des radars, conception des nouveaux radars), pour 5 millions d'euros ;

- la création d'un site pilote de test, pour un coût supérieur à 1 million d'euros ;

- le développement d'une nouvelle chaîne pénale, dont le coût est évalué à 3 millions d'euros en 2025 et à 2 millions d'euros en 2026 en développements informatiques ;

- l'intégration des radars dans le système informatique de l'ANTAI, pour près de 2 millions d'euros ;

- les coûts du traitement automatisé des informations, pour 4 millions d'euros la première année.

Au total, l'ANTAI bénéficierait ainsi de 137,5 millions d'euros en 2025 par le biais des recettes des amendes routières, soit 18,8 % de plus qu'en 2024.

Néanmoins, cette hausse des financements s'explique en réalité par l'augmentation constante de l'activité de l'Agence liée notamment à89(*) :

- la progression du nombre de radars actifs déployés par l'État et des contraventions afférentes;

- la possibilité ouverte aux collectivités territoriales de déployer des radars;

- la hausse des volumes d'activité associés au PVe et son extension à de plus en plus d'AFD;

- la progression du nombre de forfaits de post-stationnement (FPS).

La décentralisation et la dépénalisation du stationnement payant depuis 2018

Depuis le 1er janvier 2018, la décentralisation et la dépénalisation du stationnement payant sont entrées en vigueur en application de la loi MAPTAM du 27 janvier 201490(*). Le stationnement payant sur voirie est dépénalisé et l'usager qui ne règle pas son stationnement doit désormais s'acquitter d'une redevance pour occupation du domaine public appelée « forfait de post-stationnement » ou « FPS ».

Dans le cadre de cette réforme, l'ANTAI a développé un nouveau système d'information et mis en place un conventionnement avec les collectivités qui se sont engagées dans la décentralisation du stationnement payant. Selon le projet annuel de performances, à fin juin 2024, 622 collectivités avaient renouvelé la convention passée avec l'ANTAI et plus de 98 % des collectivités ont choisi de recourir à la prestation de l'ANTAI pour l'édition et l'envoi des avis de paiement de FPS91(*).

À ce titre, l'Agence a envoyé plus de 13,6 millions d'avis de paiement en 2023, en hausse de 6,6 % par rapport à 2022.

Source : commission des finances

Par ailleurs, la hausse d'activité de l'ANTAI génère, par sa nature même, un surcroît de recettes.

EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Sécurités » et donc des programmes 176 « Police nationale », 152 « Gendarmerie nationale, 207 « Sécurité et éducation routières » et du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 6 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Bruno Belin, rapporteur spécial, sur les programmes « Gendarmerie nationale », « Police nationale » et « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » et sur le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

M. Claude Raynal, président. - Nous en venons maintenant à l'examen des rapports sur la mission « Sécurités ». Nous entendrons d'abord M. Bruno Belin pour les programmes « Gendarmerie nationale », « Police nationale », « Sécurité et éducation routières » et le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » (CAS « Radars »), puis M. Jean-Pierre Vogel pour le programme « Sécurité civile ».

M. Bruno Belin, rapporteur spécial de la mission « Sécurités ». - Je ne fais pas planer le suspense : je vous proposerai d'adopter les crédits de la mission « Sécurités ».

Présenter le budget pour 2025 donne l'occasion de revenir sur l'exercice 2024. Celui-ci aura été particulier sous l'angle de la sécurité, tant pour les personnels de la gendarmerie que pour ceux de la police. Nous avons évidemment en tête les jeux Olympiques et Paralympiques. D'autres événements ont également mobilisé nos forces de l'ordre : les quatre-vingtièmes anniversaires des débarquements de Provence et de Normandie et de la libération de Paris.

Arrêtons-nous un instant sur les jeux Olympiques et Paralympiques. Nous n'en connaissions, un temps, pas le coût exact. Nous disposons désormais de chiffres de plus en plus précis, bien qu'encore provisoires.

Pour leur sécurisation, les jeux ont mobilisé jusqu'à 35 000 policiers et gendarmes. Leur réussite tient non seulement à la ferveur populaire qui les a accompagnés et aux résultats sportifs, mais aussi à une sécurité sans faille, toute à l'honneur de l'ensemble des forces de sécurité qu'elle a impliquée.

La gendarmerie avait d'abord annoncé un coût de 60 millions d'euros, pour la part qui lui revenait en 2024. Nous savons aujourd'hui que le coût pour la police nationale est d'environ 814 millions d'euros, sur la période 2020-2024. En ce qui concerne la gendarmerie, en retenant une période de trois années prenant en compte la préparation des jeux, nous aboutissons à environ 327 millions d'euros. Cela nous permet de dire que la sécurité des jeux a représenté un coût total de l'ordre d'un peu plus de 1,1 milliard d'euros, pour ce qui concerne la police et la gendarmerie nationales.

D'autres événements encore ont pesé en 2024 sur les personnels et les budgets de la sécurité. Je pense à ce qui s'est passé et continue de se passer en outre-mer.

Plus de 3 000 personnels sont intervenus en Nouvelle-Calédonie en renfort des effectifs présents sur place, pour un coût de 155 millions d'euros, réparti à hauteur de 125 millions pour la gendarmerie et de 30 millions pour la police. Un seul chiffre surprend quand on le découvre : l'envoi en avion Antonov, de Châteauroux à Nouméa, de deux véhicules d'intervention Centaure de la gendarmerie représente un coût de 3 millions d'euros ; et on en a envoyé seize en tout... La Martinique a également nécessité la mobilisation de moyens. À Mayotte, la situation a, de même, conduit à mobiliser des forces de sécurité importantes.

Un autre fait d'actualité récent concerne les impayés de loyers de la gendarmerie. Nous avons demandé des précisions lors des auditions que nous avons menées. Derrière, des collectivités ont en effet besoin d'obtenir les flux de trésorerie correspondants. Le rattrapage doit s'effectuer d'ici à la fin de l'année 2024 ouverture de crédits est nécessaire dans le projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG).

Quant aux primes qui avaient donné lieu à des engagements avant les jeux Olympiques et Paralympiques pour les gendarmes, elles seront payées avec les salaires de décembre prochain, là encore si une ouverture de crédits est prévue à cet effet dans le PLFG.

L'année 2025 se situera dans la continuité de 2024, avec des éléments de continuité. On retrouve dans la mission « Sécurités », portée à un peu plus de 25 milliards d'euros, une progression inscrite dans la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi). Pour les forces de sécurité intérieure, la progression bénéficie un peu plus à la gendarmerie qu'à la police.

On y trouve ensuite quelques enjeux bien ciblés. Le Président de la République a annoncé la création de 239 nouvelles brigades de gendarmerie, dont le nombre a ensuite été ramené à 238 . Il va falloir non seulement les monter, mais aussi les doter en effectifs. En 2025, ce sont 57 nouvelles brigades de gendarmerie qui doivent voir le jour. Et ce n'est pas tant la question de l'immobilier qui posera un problème : les collectivités susceptibles d'accueillir ces unités semblent motivées et sollicitent les bailleurs sociaux. La question est davantage celle de la dotation de ces brigades en effectifs.

Le schéma d'emplois attendu initialement était de 500 nouveaux équivalents temps plein (ETP) pour la gendarmerie et de 356 postes pour la police nationale. Plus rien, désormais, n'est prévu en 2025 de ce point de vue. Ce sera, bien évidemment, une difficulté. Faudra-t-il procéder à des redéploiements ? Je m'en entretiendrai dans les prochains jours avec le nouveau directeur général de la gendarmerie nationale. Mais il ne sera pas possible de faire autant avec moins d'effectifs que prévus.

Les militaires de la gendarmerie sont par ailleurs particulièrement sollicités depuis plusieurs mois pour des transfèrements de détenus, après le double assassinat de deux fonctionnaires de l'administration pénitentiaire survenu à un péage de l'Eure, tandis que trois autres agents ont été grièvement blessés. Nous avons aussi vu, à la fin de la semaine dernière, des départements comme l'Ardèche et la Vienne confrontés à des réalités criminelles terribles.

En ce qui concerne la police aux frontières, la création de nouveaux centres de rétention administrative (CRA) a été décidée par le précédent Gouvernement, puis confirmée par le Gouvernement actuel. Certains verront prochainement le jour. Ils nécessitent des moyens humains. Le nouveau ministre de l'Intérieur a donné, à ce sujet, des directives très claires. On voit que les flux de migrants continuent du sud au nord, depuis les Pyrénées ou les Alpes jusqu'à la Manche. Ils mettent très fortement à contribution la police aux frontières, dont les moyens sont donc appelés à devoir augmenter.

La mission « Sécurités » inclut également des crédits pour la sécurité routière. Dans ce domaine, on peut se réjouir de la légère baisse du nombre des décès sur la route. Métropole et outre-mer confondus, il y a eu un peu moins de 3 400 décès en 2023. Mes échanges avec la déléguée interministérielle à la sécurité routière m'ont laissé l'impression que nous avions atteint un niveau en-dessous duquel il sera difficile de descendre. Nous peinons à obtenir une diminution du nombre des accidents liés à la consommation d'alcool ou de stupéfiants.

Ce qu'on appelle le CAS « Radars » collecte les encaissements de verbalisations et les procès-verbaux électroniques, notamment - mais pas seulement - des 4 700 radars disposés le long de nos routes. Le rendement total des amendes affectées au CAS « Radars » est en progression, et s'établirait à 2,2 milliards d'euros en 2025. Ce montant fait l'objet d'une redistribution, pour un peu moins d'un quart en vue du fonctionnement du système, pour un tiers en direction des aménagements et travaux de sécurité routière des collectivités territoriales, et pour un autre tiers aux fins de contribuer au désendettement de l'État. D'autres affectations, plus marginales, sont également prévues.

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la mission « Sécurités ». - Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 prévoit une dotation de 861 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 831 millions d'euros en crédits de paiement (CP) sur le programme « Sécurité civile », ce qui représente une baisse modérée de 5 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2024. Pris dans sa globalité, le budget de la sécurité civile apparaît donc relativement stable.

Passé cette observation, deux éléments sont à retenir dans l'analyse des crédits.

Premièrement, les crédits d'investissement sont en baisse de presque 90 % en AE et de 30 % en CP. Cette diminution est à nuancer pour deux raisons. D'une part, le niveau d'investissement est extrêmement variable d'une année sur l'autre en fonction des commandes d'aéronefs. Or le renouvellement de la flotte d'avions bombardiers d'eau est reporté à l'horizon de 2030. D'autre part, la LFI 2024 avait prévu d'importants crédits d'investissement pour la création d'une nouvelle unité terrestre ainsi que pour la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Cela me permet d'ailleurs de saluer le travail formidable accompli par l'ensemble des acteurs de la sécurité civile, professionnels et bénévoles, lesquels ont démontré l'efficacité et la résilience du modèle français de sécurité en cette année olympique.

Deuxièmement, la baisse modérée des crédits ne remet pas en cause les capacités opérationnelles de la sécurité civile, du moins à court terme. Le PLF 2025 prévoit ainsi des crédits importants pour la location d'aéronefs, pour le financement des pactes capacitaires ou encore pour le renforcement des colonnes de renfort, autant de moyens indispensables à la mise en oeuvre d'une solidarité nationale face à la double extension temporelle et géographique des risques de catastrophes naturelles.

J'en viens aux enjeux thématiques du programme.

Le sujet des capacités opérationnelles m'amène à évoquer la situation de la flotte d'aéronefs de la sécurité civile.

Si la saison des feux de forêt de l'année 2024 a été sous contrôle, je tiens ici à souligner le caractère heureux de cette réussite. En effet, l'hypermobilisation des agents par les jeux Olympiques, doublée d'un taux de disponibilité anormalement bas des appareils bombardiers d'eau, aurait pu mener à des scénarios bien plus malheureux en cas de fortes chaleurs, avec un risque de rupture capacitaire.

Dans ce contexte, trois points retiennent l'attention quant aux moyens aériens.

Tout d'abord, le renouvellement de la flotte d'hélicoptères se poursuit au rythme prévu, avec la livraison des trois premiers modèles H145 avant la fin de 2024. Le calendrier de livraison de 36 appareils d'ici à 2029 devrait donc être respecté.

Ensuite, le budget 2025 consacre la pérennisation de crédits dédiés à la location d'aéronefs. Dans le PLF 2025, 30 millions d'euros d'AE et de CP permettront la location de dix hélicoptères et de six avions. Dans l'attente de la livraison d'appareils neufs, et face à des saisons de feux d'intensité variable, la location offre une solution viable d'un double point de vue budgétaire et opérationnel.

Enfin, je ne vous cache pas une certaine inquiétude sur l'entretien et le renouvellement de la flotte française de douze canadairs. Ce renouvellement continue d'être repoussé dans le temps, après avoir été promis à l'échéance de 2027. Un contrat avec un industriel canadien a finalement été conclu via la Commission européenne cet été, mais les deux premiers appareils destinés à la France ne devraient être livrés qu'en 2030. Il faut donc composer avec la flotte existante pendant encore au moins cinq à dix ans. Or cette flotte est vieillissante, ce qui contraint à ménager les appareils et conduit à complexifier leur entretien, voire impose de faire évoluer la doctrine française de lutte contre les incendies.

Cependant, les moyens de la sécurité civile ne se résument pas aux aéronefs. Un deuxième sujet thématique est celui des pactes capacitaires destinés à renforcer les moyens opérationnels des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) par l'acquisition de matériels, notamment des véhicules, cofinancés par l'État. À la suite des incendies de 2022, une enveloppe additionnelle de 150 millions d'euros en AE avait été inscrite dans le PLF pour 2023, afin de faire face aux feux de forêt.

La promesse semble aujourd'hui tenue : 37 millions d'euros de CP ont été consommés en 2023, 29 millions d'euros devraient l'être en 2024, et 45 millions d'euros de CP sont prévus pour 2025, tandis que les premiers véhicules ont été livrés le mois dernier.

Malgré des retards et certaines critiques, ces pactes sont source de satisfaction. Dans un contexte de contrainte budgétaire, la mutualisation des commandes au niveau national a permis de peser sur les industriels et de faire baisser le prix des équipements d'environ 30 %.

Je souligne que les pactes capacitaires, aujourd'hui essentiellement dédiés à la lutte contre les feux de forêt, constituent un dispositif de financement exceptionnel dont l'entièreté des crédits devrait être consommée d'ici à 2027.

Or d'autres défis capacitaires s'imposent à nous, et les travaux du Sénat l'ont démontré.

Les conclusions de la très récente mission de contrôle relative aux inondations survenues en 2023 et en 2024, menée par nos collègues Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux, soulignent le fait que le changement climatique conduira à une hausse de la fréquence des inondations. Or, face à des inondations sans précédent, les services de secours ont été confrontés à leurs limites, nécessitant l'intervention de renforts européens bienvenus, mais avec des délais trop longs au regard de l'urgence des situations. Il paraît donc légitime de réfléchir à la mise en place de dispositifs de financement consacrés au renforcement des moyens de prévention et de lutte contre ce risque, par la voie de pactes capacitaires « inondations » ou par l'achat de moyens mutualisés directement par l'État.

Le sujet des inondations m'amène à celui de la modernisation des dispositifs des systèmes d'information, de communication et d'alerte de la sécurité civile.

De fait, les inondations dramatiques qui ont touché la région de Valence en Espagne la semaine dernière montrent l'impératif de disposer d'outils de communication et d'alerte à la population pleinement fonctionnels. Je reste donc attentif à l'évolution des projets de modernisation comme NexSIS, FR-Alert, ou encore de mise en place d'un numéro unique d'urgence, qui nécessitent financements publics, mise à l'épreuve du réel et volonté politique.

En ce qui concerne FR-Alert, une remarque sur les dysfonctionnements relevés le 17 octobre dernier en Ardèche avec l'un des opérateurs téléphoniques, Free. Avec cet opérateur, l'alerte n'a pas toujours été lancée, ou l'a été avec plusieurs jours de retard, ou l'a été auprès de populations qui n'étaient pas concernées par le secteur du sinistre. La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) semble n'y être pour rien ; seul l'opérateur téléphonique paraît avoir été défaillant. Une enquête est en cours ; nous en saurons plus dans les semaines à venir.

Je conclurai sur la question de la volonté politique, en relevant que le Beauvau de la sécurité civile, engagé par le Gouvernement précédent, puis interrompu à la suite de la dissolution, reprendra finalement à la fin du mois. Ce cycle de concertation nationale s'achèvera au printemps 2025, avec à terme un projet de loi ambitieux qui devra « poser les bases d'un modèle renouvelé », près de trente ans après la loi de 1996 de départementalisation des services d'incendie.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, je vous propose d'adopter les crédits du programme « Sécurité civile ».

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. - Pour résumer la situation de la gendarmerie nationale dans le PLF 2025, je dirai qu'elle n'est ni terrible ni exceptionnelle et qu'elle aurait pu être pire, vu le contexte contraint en matière de finances.

La gestion du budget de 2024 s'est avérée assez compliquée pour la gendarmerie. Deux raisons à cela : le problème de loyers non honorés et la survenue des événements de Nouvelle-Calédonie, qui a conduit à projeter sur place des moyens humains et matériels, pour un coût global évalué entre 130 et 150 millions d'euros.

J'évoquerai devant vous cinq points.

Premièrement, comme chaque année, l'immobilier apparaît comme une difficulté majeure pour nos armées, quelles qu'elles soient, et pour nos gendarmes en particulier. Nous avions chiffré à un montant de 300 à 400 millions d'euros le budget annuel nécessaire afin d'entretenir les bâtiments et de créer des brigades neuves. À cet égard, 2024 a été une année catastrophique. Nous observons une augmentation des crédits pour 2025, mais nous resterons loin de l'objectif, avec des CP de l'ordre de 175 millions d'euros pour ce qui concerne l'investissement.

Deuxièmement - et c'est un point qui revient également tous les ans -, l'achat des véhicules légers, indispensables à l'exercice par les gendarmes de leurs missions. Le besoin annuel de renouvellement de leur parc avait été estimé à 3 750 véhicules. Année décidément noire pour la gendarmerie, après une année 2023 elle-même assez médiocre, 2024 a vu l'acquisition de seulement 180 véhicules. En 2025, on pourrait apparemment acquérir 1 780 véhicules. Cette augmentation ne permettra cependant pas de rattraper le retard pris au cours des deux exercices antérieurs.

Troisièmement, et il faut y être extrêmement vigilant, on observe dans toutes les armes, notamment dans la gendarmerie, de petites difficultés de recrutement - quoique dans une moindre mesure qu'en 2023 - et surtout un problème de fidélisation des effectifs. Depuis environ trois ans, les gendarmes quittent de plus en plus leurs fonctions avant les dix-sept ans requis pour toucher une demi-pension. Ce phénomène s'amplifie d'une année sur l'autre.

Quatrièmement, la réserve opérationnelle se révèle indispensable au bon fonctionnement de la gendarmerie, particulièrement en période estivale. Or, en 2025, une réduction de 15 millions d'euros s'annonce dans les crédits qui doivent lui être alloués.

Cinquièmement, il faudra surveiller de très près la création de nouvelles brigades, annoncée à grand renfort de communication. Apparemment, le mouvement se ralentit. En ce qui concerne les brigades fixes, la gendarmerie se repose sur les collectivités territoriales pour obtenir des bâtiments. Compte tenu notamment de ce qui vient de se passer, avec l'absence de versement de loyers, ces dernières semblent moins promptes à s'engager. En outre, la question se pose de l'effectif des nouvelles brigades.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Ma première question concerne les nouvelles brigades de gendarmerie. J'entends qu'il existe un certain nombre de difficultés, tant en matière de recrutement que sous l'angle de l'immobilier. Le rapporteur spécial peut-il nous faire le point de la situation ?

Je reste très attaché à ce que, sur ce sujet, l'État assume la mission régalienne qui est la sienne. Il convient de ne pas demander trop systématiquement aux collectivités de porter des projets qui ne ressortissent pas véritablement à leur compétence. D'une part, cela remet en cause le modèle d'une fonction régalienne ; d'autre part, les collectivités se retrouvent en porte-à-faux, quand on leur demande, dans le même temps, des efforts budgétaires supplémentaires.

Ma seconde question porte sur le CAS « Radars ». Il me semble qu'il est prévu, à compter de 2025, une source de financement complémentaire en direction de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai). Qu'est-ce qui la motive ? Est-elle temporaire ?

M. Éric Jeansannetas. - Monsieur Belin, votre présentation des crédits de la mission « Sécurités » n'est-elle pas déjà caduque ? On nous annonce pour vendredi prochain, à Marseille, celle du plan de lutte contre le narcotrafic, un plan issu des travaux de la commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier dont nos collègues Étienne Blanc et Jérôme Durain étaient respectivement rapporteur et président... Avec quels moyens luttera-t-on ? Vous nous dites que le schéma d'emplois équivaut à zéro et vous posez la question d'un éventuel redéploiement. Quels crédits complémentaires affectera-t-on à la police judiciaire, l'acteur principal des enquêtes sur le narcotrafic ? Nous constatons plutôt une inscription en baisse de plus de 8 %.

Nous connaissons la force et la vigueur des propos du ministre Bruno Retailleau ; mais ne va-t-il finalement pas combattre avec peu de moyens supplémentaires, alors que la situation en requiert beaucoup ? Les maires confrontés à de très grosses difficultés demandent davantage d'effectifs de policiers et le renforcement des commissariats dans leurs villes.

En 2020, un travail a abouti à la publication d'un Livre blanc sur la sécurité intérieure. Nous n'étions pas tous d'accord sur ses propositions, mais il proposait une redéfinition des zones de compétence, à la fois de la gendarmerie et de la police nationale. N'est-il pas temps de regarder comment tout cela peut fonctionner, en renforçant nos structures de sécurité intérieure ?

M. Marc Laménie. - Merci à nos deux rapporteurs spéciaux ainsi qu'au rapporteur pour avis, qui a en partie répondu à mes interrogations sur les recrutements de jeunes gendarmes ou de jeunes policiers et sur la difficulté à fidéliser les effectifs. Avons-nous une idée du nombre de postes vacants ?

Mme Nathalie Goulet. - Ma question concerne le moral des troupes. Le Sénat a commis un rapport sur l'état psychologique, notamment, des gendarmes. Dans l'Orne, nous déplorons le suicide récent d'un jeune gendarme. Quels moyens ont été dédiés au soutien psychologique de nos gendarmes, qui sont mis à rude épreuve ?

M. Laurent Somon. - Je me réjouis d'abord de l'augmentation des CP prévus pour 2025 à destination de la gendarmerie. C'est nécessaire à l'attractivité de ces métiers, notamment en milieu rural.

En revanche, je m'inquiète au sujet de la police, puisque les annulations de crédits de février 2024, à hauteur de 134 millions d'euros, posent des problèmes pour les nouvelles constructions programmées et provoquent des retards de paiement. Il semble que les entreprises construisant actuellement des commissariats soient confrontées à des difficultés de trésorerie, qui empêchent l'État d'honorer les factures dues et les échéances prévues.

Sur la sécurité routière, le décret du 8 mars 2024, pris à la suite de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS), précise les conditions dans lesquelles les collectivités locales peuvent installer ou demander l'installation de radars automatiques. Des installations sont-elles intervenues ? A-t-on une idée de ce que souhaitent les collectivités face à une sécurité routière qui se dégrade ?

M. Stéphane Sautarel. - En matière d'immobilier de la gendarmerie, le rattrapage des loyers dus a été évoqué. Je n'ai cependant pas bien compris si un espoir existe que la situation se rétablisse dès la fin de 2024, ou s'il faudra attendre 2025.

En second lieu, j'insiste beaucoup pour que le programme annoncé sur la création de nouvelles brigades de gendarmerie puisse être déployé. Les crédits relatifs au personnel ne sont pas toujours immédiatement nécessaires ; il faut en effet parfois construire avant de doter les brigades en moyens humains. Il importe en revanche que de telles opérations immobilières, qui souvent reposent sur des bailleurs sociaux, soient confirmées et engagées dans les délais prévus, afin que les brigades puissent rapidement voir le jour sur les territoires.

M. Vincent Delahaye. - Deux questions adressées à nos rapporteurs, que je remercie pour leur travail.

La première porte sur l'augmentation de 4,2 %, soit près de 1 milliard d'euros, du budget de la police et de la gendarmerie nationales. J'imagine qu'elle intègre les dépenses exceptionnelles en lien avec l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques qui ont dû être réalisées en 2024, c'est-à-dire que la hausse atteindrait en réalité 2,1 milliards d'euros en 2025. À quoi cette somme est-elle consacrée ?

La seconde a trait aux amendes. Je note une augmentation de leurs produits de 12,3 %. À quoi est-elle due ? Les recettes attendues ne sont-elles pas l'expression d'une prévision plutôt optimiste ?

M. Grégory Blanc. - Si l'on voit bien une augmentation des crédits du volet sécurité sous l'angle des outils de répression, on relève leur diminution sous celui des secours à la personne. C'est assez symptomatique. Quelques millions d'euros manqueront aux pompiers.

Je partage les alertes du rapporteur spécial Vogel, mais évidemment pas sa conclusion quand il nous invite à voter le budget de la mission, qui plus est à l'aube d'évolutions climatiques et alors qu'on demande aux collectivités de supporter près de la moitié des 25 milliards d'euros de l'effort attendu. Un double problème de financement et d'organisation tant humaine que matérielle des Sdis va se poser. Alors que le Beauvau de la sécurité civile est sur le point de s'ouvrir, comment renouvellera-t-on leurs équipements et investira-t-on dans les nouvelles technologies, en particulier l'intelligence artificielle (IA) ?

Si l'État baisse ses crédits, comment soutiendra-t-on l'effort supplémentaire ? Cela signifie-t-il qu'il faille augmenter ou revoir l'assiette de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances (TSCA) ?

M. Olivier Paccaud. - Je reviens sur la problématique des nouvelles brigades fixes et mobiles de gendarmerie. M. Paul a parlé à leur sujet d'une annonce à grand renfort de communication.

Des chiffres précis les concernent : 239 unités, 80 dès 2024, seize dans les Hauts-de-France, dont sept mobiles. Or il me semble que, dans cette région, une seule est actuellement en place. Dans l'Oise, il devait y en avoir trois, dont une mobile ; on ne l'y trouve pas. Confirmez-vous ce chiffre de 80 ?

M. Bruno Belin, rapporteur spécial. - 80 nouvelles brigades de gendarmerie seront opérationnelles à fin 2024. Ces brigades sont soit fixes, soit mobiles, c'est-à-dire itinérantes. Sur la feuille de route de 2025, 57 autres sont prévues, mais il y a le problème des effectifs dont je parlais précédemment.

La question des loyers nous est évidemment posée. Formellement, la réponse consiste à dire qu'elle devrait être réglée avec le PLFG, si l'ouverture de crédits est suffisante. Je viens d'apprendre qu'il a été présenté ce matin en conseil des ministres.

La difficulté de paiement touche tout de même 5 079 emprises. Le règlement des loyers restaurera la confiance, ce qui est indispensable, car on ne saurait maintenir pendant des mois une dette de la gendarmerie à l'égard des collectivités. La première y perdrait sa crédibilité.

Or, nous avons préconisé des recours aux partenariats public-privé sur de très grosses opérations. Évidemment, les investisseurs privés craindront eux-mêmes de n'être pas payés si on ne règle pas ce problème. Je pense à des opérations indispensables, reportées depuis des années, et qu'il est grand temps d'engager, si l'on veut aussi fidéliser les effectifs de la gendarmerie.

En définitive, c'est notre crédibilité collective qui est en jeu. Nécessaire à la réalisation de ces opérations, elle passe par un apurement des impayés de loyers.

S'agissant du moral des troupes, il s'accommode mal d'immeubles des années 1970 mal entretenus. Je l'ai constaté à Dijon, au cours d'un déplacement, où un code de bonne conduite très exigeant a dû être instauré dans ce type d'immeubles en raison de l'absence de toute isolation phonique qui y prévaut.

La notion de fidélisation des effectifs se situe bien notamment à ce niveau des logements. Rappelons que les gendarmes ont une obligation de vivre sur leur lieu de travail. On peut certes toujours leur dire que la résilience est la première vertu du gendarme, mais derrière se pose la question de la situation des conjoints et des familles.

Plus largement, sur le sujet de l'état psychologique des gendarmes, il faut savoir par exemple que les unités de gendarmerie mobile ont été engagées loin des familles pendant plus de 200 jours en 2024. Des cellules psychologiques les accompagnent lors de ces déplacements. En Nouvelle-Calédonie, les gendarmes ont été confrontés à des scènes de guerre. Plus de 500 gendarmes ont été blessés et deux sont morts.

Comme vous, j'ai entendu qu'un projet de texte de loi sur le narcotrafic, issu du travail de nos collègues, pourrait être mis à l'ordre du jour du Parlement en début d'année 2025. Nous verrons ce qu'il contiendra et nous y serons vigilants, car il s'agit d'un véritable sujet, et pas seulement à Marseille, qui nécessite des moyens humains.

Les collectivités ont désormais la possibilité d'installer des radars routiers. Cela se traduit par l'affectation de 13 millions d'euros supplémentaires en faveur de l'Antai, que le rapporteur général a évoquée, afin de couvrir les frais de gestion associés pour elle. Ce dispositif n'est pas temporaire. À ma connaissance, le déploiement de radars par les collectivités territoriales - hors radars pédagogiques - n'est pas encore effectif. Mais cela ne va plus tarder : elles vont commencer à les installer.

Certains équipements des forces de sécurité intérieure sont particulièrement onéreux. Un véhicule Centaure coûte ainsi environ 1 million d'euros. De même, les nouvelles technologies - drones, cybersécurité - nécessitent qu'on y consacre des moyens importants. Il faudra en évaluer, le moment venu, l'effectivité.

La prévision d'un rendement de 2,2 milliards d'euros des recettes des amendes ne tient pas aux seuls radars, dont le nombre reste stable. Elle inclut également les verbalisations hors radars. La plupart du temps, l'estimation est en réalité dépassée en cours d'année.

Enfin, la gendarmerie explique qu'il existe toujours un taux de vacance des postes de l'ordre de 2 %, par le jeu des rotations entre les départs et les arrivées à la sortie des écoles de formation. Dans tous les cas, il est nécessaire d'augmenter les effectifs.

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. - Le problème du financement de la sécurité civile constitue un véritable sujet. Le financement de la sécurité civile repose essentiellement sur les dépenses locales. Le budget consolidé des services d'incendie et de secours s'élève en 2022 à 5,6 milliards d'euros. Il est donc près de 7 fois supérieur aux crédits de paiement inscrits sur le programme 161 dans le PLF pour 2025.

Le Beauvau de la sécurité devra apporter des réponses à ce problème, notamment sous l'angle de la TSCA. Nous avons interrogé les acteurs de la sécurité civile sur la possibilité de valoriser les actes de sauvegarde des biens. Une hausse des primes d'assurance pourrait ainsi prendre en compte une partie du financement des SDIS. La question du montant de la taxe de séjour se pose également dans des régions qui accueillent un nombre très élevé de touristes à certaines périodes de l'année et doivent consacrer des moyens importants pour garantir leur sécurité.

Aucune baisse significative n'intervient à proprement parler. Des crédits complémentaires avaient été mis en oeuvre en 2024 à l'occasion de l'organisation des jeux Olympiques, notamment en considération des risques nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) ; nous ne les retrouvons simplement pas dans le PLF pour 2025.

Néanmoins, si les pactes capacitaires ont permis d'acquérir des camions-citernes feux de forêt (CCF), on s'interroge à présent sur le financement de matériels de lutte contre les inondations, en l'occurrence des pompes à très grande capacité, qui coûtent extrêmement cher et qu'il faudrait déployer sur l'ensemble du territoire national. Leur coût suppose l'engagement de moyens nationaux.

Il ne peut en effet être supporté par les SDIS, dont le financement présente la particularité que l'évolution de la contribution communale ou intercommunale, pour les communautés de communes disposant de la compétence incendie, se limite à celle de l'inflation au cours de l'année précédente. Toutes les dépenses nouvelles reviennent donc à la charge des départements. Les contraintes budgétaires particulièrement sévères qui pèsent sur ces derniers les empêchent de faire face au développement des risques, spécialement du secours aux personnes, qui connaît une croissance régulière.

Il conviendrait d'imaginer des pactes capacitaires pour le risque d'inondation, tels qu'ils existent pour les feux de forêt.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Sécurités » et du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Culture », « Direction de l'action du Gouvernement », « Enseignement scolaire », « Médias, livre et industries culturelles », « Audiovisuel public », « Recherche et enseignement supérieur », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale de la police nationale (DGPN)

- Mme Virginie BRUNNER, directrice générale adjointe de la police nationale ;

- Mme Valérie MINNE, directrice nationale aux frontières ;

- M. Pierre- Ange SAVELLI, conseiller budgétaire ;

- Mme Marie-Laure BERBACH, directrice des finances et du soutien opérationnel à la DRHFS.

Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN)

- Major Général André PETILLOT, Général de corps d'armée adjoint ;

- Général de division Éric MARCHAL, adjoint au directeur des soutiens et des finances de la DGGN ;

- Lieutenant-colonel Ronan LELONG, chef du bureau de la synthèse budgétaire de la DGGN.

Délégation à la sécurité routière (DSR)

- Mme Florence GUILLAUME, déléguée interministérielle à la sécurité routière ;

- M. Éric AZOULAY, sous-directeur de la sous-direction des actions transversales et des ressources ;

- Mme Marie MAUFFREY-VALLADE, adjointe au sous-directeur de la sous-direction des actions transversales et des ressources.

Conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG)

- Colonel Vincent DELAMARRE, secrétaire général adjoint ;

- Colonel Jean CARREL ;

- Capitaine Bertrand LOUBETTE ;

- Major Érick VERFAILLIE ;

- Major Vincent CHARNEAU ;

- Major Sandrine TOULOUZE ;

- Major Sébastien DIOT ;

- Major Olivier DUPIN ;

- Major Laurent CAPPELAERE ;

- Major Bruno TROMEUR ;

- Major Stéphane PITHOIS ;

- Adjudant-Chef Aline ROUY.

ANNEXE
CARTE DES 80 NOUVELLES BRIGADES
DE LA GENDARMERIE NATIONALE AU 31 DÉCEMBRE 2024

Source : gendarmerie nationale

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2025.html


* 1 Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur.

* 2 Projet annuel de performances « Sécurités », annexé au projet de loi de finances pour 2025.

* 3 Le montant du loyer annuel est fixé, en application des décrets et circulaires applicables, en appliquant un taux entre 6 % et 7 % aux dépenses réelles de construction de l'immeuble, dans la limite d'un « coût plafond » par unité-logement.

* 4 Respectivement programmes 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » et 755 « Désendettement de l'État ».

* 5 Et 4 160 actifs.

* 6 Hors effets de l'inflation, la progression des crédits de la mission est ramenée à 0,6 % en AE et à 1,7 % en CP.

* 7 « Concernant les dépenses de l'État, le Gouvernement a l'intention de proposer en cours de débats certains rehaussements de crédits. Cela concernera les crédits du ministère de la Justice, qui seront réévalués à l'initiative du Gouvernement, tout comme ceux du ministère de l'Intérieur (...) ».

* 8 Le programme « Sécurité civile » relève de la compétence du rapporteur spécial Jean-Pierre Vogel.

* 9 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.

* 10 Le rapporteur spécial ne dispose pas des données concernant l'estimation initiale.

* 11 Réponses de la direction générale de la police nationale au questionnaire du rapporteur spécial.

* 12 Sur la période de 2020 à 2023, ont été engagés 155,7 millions d'euros en AE et 73,3 millions d'euros en CP, ayant permis l'acquisition de 1 062 véhicules, d'armements et équipements spécialisés, d'une salle de commandement, d'investissements dans les systèmes d'information et de communication (notamment du plan de vidéoprotection de la ville de Paris), ou encore la réservation anticipée de chambres pour l'hébergement des personnels.

* 13 S'ajoutent à ces dépenses celles prises en charge de 2020 à 2023, voir supra.

* 14 Réponses de la direction générale de la gendarmerie nationale au questionnaire du rapporteur spécial.

* 15 S'ajoutent à ces dépenses celles prises en charge de 2020 à 2023, voir supra.

* 16 Selon les termes utilisés dans le projet annuel de performances de la mission « Sécurités ».

* 17 Auditions de la direction générale de la gendarmerie nationale et de la direction générale de la police nationale par le rapporteur spécial.

* 18 Réponses de la direction générale de la police nationale au questionnaire du rapporteur spécial.

* 19 Audition de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et réponses de la DGGN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 20 Selon les informations transmises par la direction générale de la gendarmerie nationale au rapporteur spécial le 22 novembre 2024. Les 90,1 millions d'euros correspondent à 82,5 millions d'euros pour l'échéance de septembre (qui correspond également à des échéances trimestrielles), et à 3,8 millions d'euros en octobre, puis en novembre.

* 21 Selon les informations transmises par la direction générale de la gendarmerie nationale au rapporteur spécial le 22 novembre 2024.

* 22 Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur.

* 23 La LOPMI couvre trois missions (« Sécurités », « Administration générale et territoriale de l'État », et « Immigration, asile et intégration »), le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » et les taxes affectées à l'ANTS (Agence nationale des titres sécurisés). Sont toutefois exclus du périmètre de la LOPMI le programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », les programmes 754 et 755 du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », et les programmes « Outre-mer ».

* 24  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/0343/CION_LOIS/CL540. Sur le fond, cette hausse du financement était justifiée par les auteurs de l'amendement par la nécessité de renforcer de 60 millions d'euros par an le financement des centres de rétention administrative (CRA).

* 25 Hors contributions au compte d'affectation spéciale « Pensions » et hors programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », programmes 754 et 755 du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », et programmes « Outre-mer ».

* 26 Voir supra.

* 27 Réduction des indemnités journalières dans le cadre d'un « arrêt maladie », et extension du délai de carence applicable de 1 à 3 jours.

* 28 Réponses de la direction générale de la police nationale et de la direction générale de la police nationale aux questionnaires du rapporteur spécial.

* 29 En raison des modes de calcul pluriannuels du plafond d'emplois, l'absence de création de postes en 2025 n'empêche pas celui-ci d'augmenter. Il progresse ainsi de 151 959 à 152 690 pour la police nationale et de 102 623 à 103 077 pour la gendarmerie nationale.

* 30 Dans le rapport annexé de la LOPMI, il est annoncé la création de 200 nouvelles brigades.

* 31 Réponses de la direction générale de la police nationale au questionnaire du rapporteur spécial.

* 32 Réponses de la DGPN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 33 Voir infra.

* 34 Projet annuel de performances « Sécurités », annexé au projet de loi de finances pour 2025.

* 35 Réponses de la DGPN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 36 Réponses de la DGGN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 37 Voir supra.

* 38 Hors effets de l'inflation, les crédits « hors titre 2 » sont stables en CP (+ 0,0 %) et sont en baisse en AE de - 2,9 % en 2025.

* 39 Voir tableaux supra.

* 40 Protection, habillement, armements divers, munitions, etc.

* 41 Renouvellement du marché de l'habillement pour la période 2024 à 2027.

* 42 Voir supra.

* 43 Réponses de la DGPN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 44 Idem.

* 45 Idem.

* 46 Voir supra.

* 47 Réponses de la DGPN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 48 Voir supra.

* 49 Idem.

* 50 Rapport d'information fait au nom de la commission des finances sur l'immobilier de la gendarmerie nationale, M. Bruno BELIN, déposé le 10 juillet 2024.

* 51 Le montant du loyer annuel est fixé, en application des décrets et circulaires applicables, en appliquant un taux entre 6 % et 7 % aux dépenses réelles de construction de l'immeuble dans la limite d'un « coût plafond » par unité-logement.

* 52 Réponses de la DGGN au questionnaire du rapporteur spécial.

* 53 Contrairement aux chiffrages indiqués dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2024, la loi de finances initiale intègre les effets d'un amendement d'un montant de 164 millions d'euros en AE (0 en CP) présenté par le Gouvernement et adopté par le Sénat sur la mission « Sécurités » - et conservé dans le texte définitif.

* 54 Voir supra.

* 55 En outre, on estime à 235 000 le nombre de blessés, dont 16 000 seraient blessés gravement.

* 56 Selon les réponses de la délégation à la sécurité routière au questionnaire du rapporteur spécial.

* 57 Idem.

* 58 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.

* 59 Réponses de la délégation à la sécurité routière au questionnaire du rapporteur spécial.

* 60 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 61 Conformément à l'article 21 de la LOLF, « les comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

* 62 Voir infra.

* 63 Décret n° 2016-1955 du 28 décembre 2016 portant application des dispositions des articles L. 121-3 et L. 130-9 du code de la route.

* 64 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 65 Ce plafond est fixé aujourd'hui à 339,95 millions d'euros ; l'article 37 du projet de loi de finances pour 2025 prévoit de l'abaisser à 336,65 millions d'euros.

* 66 Ce plafond est fixé à 170 millions d'euros.

* 67 L'article 37 du projet de loi de finances pour 2025 prévoit d'abaisser le montant de ce plafond de 509,95 millions d'euros à 506,65 millions d'euros.

* 68 En application de l'article 37 du présent projet de loi de finances pour 2025. Voir infra.

* 69 C'est-à-dire 506,65 millions d'euros au titre des dépenses de la première section du CAS, auxquelles s'ajoute l'affectation de 26 millions d'euros au FMI.

* 70 Voir infra.

* 71 Selon la ventilation exposée supra.

* 72 Décret n° 2011-348 du 29 mars 2011 portant création de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI).

* 73 Projet annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », annexé au projet de loi de finances pour 2025.

* 74 Voir infra.

* 75 Les dépenses augmentent très légèrement plus, de 310 000 euros.

* 76 Il était de + 310 000 euros en 2024 et était également nul en 2023.

* 77 Le parc « opérationnel » est à distinguer du parc « actif ». À la différence des radars fixes, les radars mobiles et les radars autonomes déplaçables ne sont pas utilisés en permanence.

* 78 La cible en 2024 et pour les années postérieures est de 93 %.

* 79 Réponses de la délégation à la sécurité routière au questionnaire du rapporteur spécial.

* 80 Loi n° 2019 1428 du 24 décembre 2019 d'Orientation des Mobilités (LOM).

* 81 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

* 82 Un décret d'application du 8 mars 202483 énumère les pièces à fournir en appui de la demande et fixe un délai de 3 mois au préfet pour prendre sa décision. En l'absence de celle-ci, son avis est réputé défavorable.

* 84 https://www.ugap.fr/reunion-de-pre-information-pour-le-marche-radars-collectivites-c4589294?parentId=4467722.

* 85 Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

* 86 Voir supra.

* 87 Voir supra.

* 88 Réponses de la délégation à la sécurité routière au questionnaire du rapporteur spécial.

* 89 Voir supra.

* 90 Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

* 91 Les 2 % de collectivités restantes ont décidé d'assurer par elles-mêmes ou par l'intermédiaire d'un prestataire privé la notification des avis de paiement de FPS. L'ANTAI intervient alors pour émettre les titres exécutoires et traiter les FPS majorés.

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