C. PLUSIEURS LIAISONS AÉRIENNES D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SONT MENACÉES DE FERMETURE

Les liaisons aériennes d'aménagement du territoire (LAT) sont essentielles au maintien de la connectivité, au désenclavement ainsi qu'au développement économique de certains territoires. En 2024, l'État finance l'exploitation de sept LAT en métropole29(*) (contre dix en 2023 et onze en 2021), deux liaisons en Guyane ainsi que la desserte internationale de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il participe également au financement de la desserte européenne de Strasbourg avec Amsterdam, Madrid et Berlin30(*). Pour cette dernière, des discussions sont en cours avec les autorités autrichiennes pour la mise en place d'une liaison vers Vienne. L'intervention de l'État s'inscrit dans le cadre de conventions pluriannuelles de délégation de service public (DSP).

S'agissant de l'exploitation des LAT de métropole, la charge de la compensation financière est partagée entre l'État et les collectivités locales concernées. Le taux d'intervention de l'État est déterminé en fonction du degré d'enclavement de la destination et ne peut dépasser un pourcentage des recettes commerciales fixé entre 50 % et 80 %. En 2024, les financements consacrés par l'État à ces liaisons devraient représenter 21,4 millions d'euros, soit une baisse de 16 % par rapport à 2023.

Le soutien financier des LAT par l'État en 2024

(en millions d'euros)

Liaison

Soutien financier de l'État en 2024

Aurillac - Paris

2,46

Brive - Paris

1,64

Castres - Paris

1,42

La Rochelle - Poitiers - Lyon

0,18

Le Puy - Paris

0,41

Limoges - Lyon

0,66

Quimper - Paris

0,21

Rodez - Paris

1,71

Tarbes- Paris

1,80

Guyane

1,70

Saint-Pierre-et-Miquelon

3,79

Strasbourg - Amsterdam

3,71

Strasbourg - Madrid

0,62

Strasbourg - Berlin

1,07

Total

21,39

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

En augmentation tendancielle jusqu'en 2010, les crédits consacrés aux LAT métropolitaines ont ensuite été progressivement réduits pour passer sous les 5 millions d'euros en 2017 et en 2018. L'objectif était alors de limiter la participation financière de l'État à quatre liaisons desservant des territoires particulièrement enclavés (Aurillac-Paris, Brive-Paris, Le Puy-Paris et Rodez-Paris), les autres liaisons sous délégation de service public devant être intégralement prises en charge par les collectivités territoriales.

En 2019, le Gouvernement a engagé une nouvelle politique de soutien aux LAT en s'appuyant sur les propositions et recommandations issues des Assises du transport aérien. 15 millions d'euros supplémentaires ont été alloués dès 2019 pour assurer le financement des liaisons existantes.

En 2020 puis en 2021, les répercussions de la pandémie de Covid-19 ont fragilisé le modèle économique des LAT. Des concertations entre les collectivités, l'État et les transporteurs ont permis d'ajuster les programmes de vols. Les accords ont notamment porté sur des réductions du nombre de rotations, sur l'exploitation d'appareils de moindre capacité ou, pour deux liaisons, sur l'attribution d'une surcompensation exceptionnelle. La crise a néanmoins précipité l'arrêt des services aériens entre Agen et Orly en juin 2020, liaison qui se trouvait déjà en difficulté avant la crise sanitaire en raison de la concurrence du TGV.

En 2022, les conventions de DSP portant sur les liaisons Paris-Tarbes et Le Puy-Paris ont été renouvelées. En 2023, trois nouveaux renouvellements de DSP ont été conclus : Limoges-Lyon en mars puis Aurillac-Paris et Castres-Paris en juin. L'appel d'offres concernant l'exploitation de la ligne Limoges-Paris a été déclaré infructueux compte tenu du montant excessif de compensation demandé. Le renouvellement de la DSP relative à la liaison Quimper-Paris, n'a pas été demandé par la collectivité. La convention de DSP relative à la ligne La Rochelle-Poitiers-Lyon a été résiliée par le transporteur et les services ont été stoppés dès le mois de mars 2023. Le renouvellement de DSP de la liaison Rodez-Paris a été conclu en août 2024. En outre, compte tenu de résiliations intervenues en octobre 2023 et mars 2024 à l'initiative des transporteurs, les renouvellements des liaisons Le Puy-Paris et Brive-Paris se sont déroulés de façon anticipée pour des entrées en vigueur en septembre et en octobre dernier.

Évolution du financement des LAT par l'État (2014-2025)

(en milliers d'euros)

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

Dans la foulée de la crise sanitaire, depuis le début de l'année 2022, le contexte économique défavorable, notamment lié au phénomène inflationniste, a profondément bouleversé l'économie des LAT. Les compensations financières demandées par les transporteurs à l'occasion du renouvellement des conventions de DSP sont significativement supérieures à celles qui prévalaient avant la crise sanitaire. La baisse du trafic engendrée par les nouvelles habitudes de travail associée à la forte hausse des coûts a conduit certaines collectivités à renoncer à plusieurs liaisons. Dans ces conditions, l'État subventionne quatre lignes de moins qu'avant la crise sanitaire et les dépenses qu'il y consacre, poussé à la hausse par le contexte de crise puis par le phénomène d'inflation déclinent désormais régulièrement depuis le pic de 2022 où elles avaient atteint 23,2 millions d'euros. En 2025, l'État devrait à ce titre dépenser 20,5 millions d'euros.

Le soutien financier des LAT par l'État en 2025

(en millions d'euros)

Liaison

Soutien financier de l'État en 2025

Aurillac - Paris

2,60

Brive - Paris

1,60

Castres - Paris

1,50

Le Puy - Paris

0,46

Limoges - Lyon

1,02

Rodez - Paris

2,55

Tarbes - Paris

0,30

Guyane

2,10

Saint-Pierre-et-Miquelon

4,37

Strasbourg - Amsterdam

3,99

Strasbourg - Madrid

Strasbourg - Berlin

Total

20,50

Source : réponses de la DGAC au questionnaire budgétaire

À l'horizon 2026-2027, alors que se profile plusieurs renouvellements de DSP, il existe à ce jour une très forte incertitude sur le maintien de certaines dessertes, notamment Rodez-Paris en 2026 ou bien encore Aurillac-Paris et Limoges-Lyon en 2027. En réponse au questionnaire du rapporteur, la DGAC n'a pas caché ses incertitudes : « l'État aura des difficultés à maintenir son engagement, ne serait-ce que sur les lignes les plus anciennes, sans crédits supplémentaires ».


* 29 Les lignes Brest-Ouessant et la Rochelle-Lyon, étant financée exclusivement par les collectivités locales.

* 30 Qui s'est substituée en 2023 à l'ancienne liaison avec Munich.

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